dimanche 4 octobre 2009

Espagne — les tribunaux régionaux continuent d'accorder le droit d'exemption

On aurait pu croire la cause entendue quand la Cour suprême espagnole avait conclu, le 28 janvier 2009, dans quatre arrêtés similaires que le contenu du programme d’Éducation à la citoyenneté (EC) était compatible avec le droit à la liberté de conscience et de religion garantie par la Constitution espagnole et qu’il n’existait donc pas, par conséquent, un droit à l’objection de conscience à son encontre.

Toutefois, la Cour suprême permettait aux parents de recourir aux tribunaux s’ils considéraient qu’un manuel ou un professeur commettait de l’endoctrinement ou du prosélytisme, plus particulièrement pour des sujets qui ne font pas l’objet d’un consensus moral dans la société espagnole (à savoir principalement les sujets liés à la moralité sexuelle comme l'avortement, l'homosexualité ou la théorie du genre).

C'est exactement ce qu'on fait des milliers de parents espagnols.

Les tribunaux régionaux des communautés autonomes de l'Espagne, se penchant sur des cas précis de manuels et de programmes régionaux d'Éducation à la citoyenneté, ont donc accordé de nombreuses exemptions au cours d'Éducation à la citoyenneté.

C'est ainsi que la semaine passée la Cour supérieure de justice de Castille et Léon a prononcé deux sentences qui reconnaissent le droit à l'objection de conscience des parents qui demandaient à ce que leurs enfants soient exemptés du programme d'Éducation à la citoyenneté. On trouvera ici un de ces jugements forts détaillés (136 pages). Des parents de Valence ont également récemment présenté 250 recours en justice alors que ceux d'Alicante vont en déposer près de 120 de plus. En tout, plus de 52 000 parents ont demandé à ce que leurs enfants soient exemptés du cours d'Éducation à la citoyenneté.


Des parents objecteurs devant le ministère de l'Éducation. Sous la plaque officielle, ils affichent un grand bulletin au nom du ministre et y ajoutent en grandes lettres qu'un devoir n'a pas été rendu : « Dialoguer avec les parents objecteurs au sujet du cours d'Éducation à la citoyenneté ».



Dans un communiqué remis la semaine passé, les Professionnels pour l'Éthique soulignaient que les deux jugements abordent le conflit idéologique et moral associé au programme d'Éducation à la citoyenneté pour les parents. Les magistrats fondent leur jugement, entre autres arguments, sur l'article 27.3 de la Constitution espagnole qui oblige les pouvoirs publics à garantir « le droit des parents à ce que leurs enfants reçoivent une formation religieuse et morale en accord avec leurs propres convictions ».

Les deux sentences castillo-léonaises parlent d'« intense charge morale et idéologique » au sujet de l'Éducation à la citoyenneté (EC), un ensemble de cours, qui a pour conséquence « indésirable d'influencer le caractère privé et intime des élèves en pleine phase de formation morale ». De même, le Tribunal castillo-léonais reconnaît que l'EC prétend « viser à transmettre des valeurs afin d'influencer les comportements et les attitudes des mineurs (et ne transmet pas simplement des connaissances) qui feront l'objet d'une évaluation particulière ». Rappelons que, dans le cas québécois, le cours vise à former des citoyens complets (selon la Commission scolaire des chênes), ouverts sur le pluralisme normatif à la sauce Georges Leroux, et qu'avec le cours ECR la crise des accommodements raisonnables ne se serait pas produite selon Gérard Bouchard, témoin au procès de Drummondville. Il s'agit donc bien d'influencer les jeunes élèves.

En outre, le président des Professionnels pour l'éthique, Jaime Urcelay, a rappelé que la Cour supérieure de justice de Castille et Léon doit encore se pencher sur 300  requêtes en justice similaires. « Nous espérons donc que dans les semaines à venir le Tribunal de Castille et Léon prononcera près de 300 sentences favorables aux objecteurs de conscience à l'EC. De surcroît, d'autres tribunaux autonomes pourront également suivre le chemin ouvert par la Cour supérieure de justice de Castille et Léon. »

Le nouveau ministre de l'Éducation espagnol, Angel Gabilondo Pujol, qui succède à la très partisane Mercedes Cabrera dont la vidéo annonçant le décision du tribunal suprême se trouvait sur Youtube deux jours avant que celle-ci ne fût rendue publique, s'est déclaré ouvert au dialogue avec les parents objecteurs.


Le nouveau ministre de l'Éducation, Ángel Gabilondo







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Aucun manuel ECR en anglais n'existe, mais le dalaï-lama est enthousiasmé

Nous en avions déjà parlé il y a un an, le dalaï-lama serait enthousiasmé par le cours ECR.

Comme le rapporte Radio Canada,
« Après Vancouver et Calgary, le dalaï-lama était samedi à Montréal, dernière étape de sa tournée canadienne.

Il a rencontré en matinée 500 étudiants en éducation qui donneront bientôt le cours d'éthique et de culture religieuse.

Le contenu du cours, au programme des élèves québécois depuis 2008, a suscité l'enthousiasme du chef spirituel tibétain.

La rencontre avec les étudiants, qui ont été choisis parmi les universités francophones et anglophones du Québec, a été diffusée en direct sur le web.

« Toutes les religions envoient un message d'amour et de compassion, et elles ont toutes le potentiel pour apporter la paix intérieure », leur a-t-il fait valoir. »
C'est, en effet, une vision que le programme ECR semble véhiculer (surtout au primaire), mais elle n'est guère compatible avec des religions comme l'islam, le judaïsme et le christianisme (voir la document Dominus Jesus). Mais que pense le dalaï-lama de la partie du programme au secondaire qui porte sur l'athéisme ? Pense-t-il aussi que l'athéisme «envoi[e] un message d'amour et de compassion, et [qu'il a] le potentiel pour apporter la paix intérieure » ? Si c'est le cas, tout se vaudrait-il donc, tout serait-il dans tout et inversement ?

On peut douter que le dalaï-lama ait regardé en détail les manuels d'ECR, il n'en existe aucun en anglais. Mais on lui a peut-être dit qu'il était souvent cité en exemple alors qu'on ne puisse pourtant pas vraiment dire qu’il ait réussi à améliorer le sort des Tibétains. Se cantonnant à établir son hagiographie, les manuels ne disent rien du dalaï-lama comme chef temporel et spirituel intransigeant qui n’hésite pas, par exemple, à exclure violemment les pratiquants de Dordjé Chougdèn de la communauté bouddhiste tibétaine et d'interdire une pratique pourtant ancestrale. Voir l'illusion bouddhiste.

Enfin, on peut se demander si le dalaï-lama est d'accord avec la manière dont ce programme est imposé : en supprimant des droits dans les chartes, en enlevant le droit d'objection de conscience aux enseignants, en imposant le cours à tous et en menaçant les parents récalcitrants.

Aucun journaliste québécois pour lui poser la question.






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