jeudi 20 février 2014

Belgique — Nova Schola, école internationale d’humanités classiques





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La Belgique, exemple pour le Québec, « chantier des folies bioéthiques »

« La Belgique, chantier des folies bioéthiques » selon l’hebdomadaire français Valeurs actuelles.

Comme aux Pays-Bas, où l’euthanasie est autorisée pour les enfants de plus de 12 ans, la Belgique a décidé d’élargir l’euthanasie aux mineurs atteints d’une maladie incurable (en particulier d’un cancer), cette fois sans limites d’âge. L’euthanasie sera autorisée si les mineurs, « en phase terminale », sont jugés « capables de discernement ».

Présentée par un quatuor de députés issus des partis libéral et socialiste des deux communautés linguistiques (flamande et francophone), cette loi a été votée le 13 février après avoir franchi toutes les étapes législatives, comme si le Parlement actuel avait voulu accélérer le temps avant les élections du 25 mai.

« Il me semble qu’il s’agit là d’une décision hâtive, regrette Michel Dupuis, le président du Comité consultatif de bioéthique. Cette loi a été préparée par des hommes politiques cherchant à se faire valoir autour d’une conviction occasionnelle. » Ce projet a créé une onde de choc, moins en Belgique que dans certains pays européens, surtout latins. En Espagne, la Vanguardia évoque une loi qui poussera à mettre à mort des enfants, sans qu’ils puissent bénéficier des progrès de la médecine. Le Conseil de l’Europe a lui-même dénoncé cette proposition de loi qui « trahit certains des enfants les plus vulnérables de la Belgique, en acceptant l’idée que leur vie n’a plus aucune valeur et qu’ils doivent mourir », qui suppose « à tort que les enfants sont capables de donner un consentement approprié et éclairé à l’euthanasie et qu’ils peuvent comprendre la gravité de la signification et la complexité des conséquences liées à une telle décision », qui « favorise la croyance inacceptable qu’une vie peut ne pas être digne d’être vécue, mettant en cause la base même d’une société civilisée ».

La loi belge a soulevé la consternation dans le monde

En Belgique aussi des voix se sont élevées. Les représentants chrétiens, juifs et musulmans ont publié une déclaration commune — fait rarissime — pour exprimer leur inquiétude face à ce risque de banalisation de l’euthanasie.

La Belgique est « en pointe » depuis longtemps sur ces questions. Elle avait été l’un des premiers pays à voter l’euthanasie pour les adultes, puis le mariage homosexuel et même la PMA (procréation médicalement assistée, populaire dans les « familles » lesbiennes). Elle est devenue le laboratoire européen des projets bioéthiques les plus audacieux — ou les plus inquiétants.

« Située à la croisée des cultures latine et nordique, elle a été forcée de se construire dans le compromis créatif, explique Michel Dubois. En réalité, les lois dans ce domaine sont souvent votées pour encadrer des pratiques médicales qui existent déjà et rétablir le dialogue entre les médecins et la loi. »

L’une des premières lois marquantes, sur l’euthanasie, date de mai 2002. Débattu pendant deux ans et demi par des médecins, des philosophes, des représentants religieux, ce texte fit l’objet de près de 600 amendements avant son adoption définitive.

Dans la pratique, son application épouse la « géographie variable » de ce pays carrefour : 80 % des cas d’euthanasie se situent en Flandre, le reste est en Wallonie. La culture médicale de chaque région expliquerait ces différences entre le Nord et le Sud.

En Flandre, cette loi a suscité une campagne active de sensibilisation des médecins et des patients, expliquant l’euthanasie et ses « bienfaits ». En Wallonie, au contraire, les médecins ont préféré continuer d’administrer des sédatifs puissants qui n’obligent pas à déclarer officiellement les cas d’euthanasie. « La Flandre se rapproche davantage de la culture des Pays-Bas et la Wallonie de la culture française », explique Virginie Defrang, secrétaire politique du groupe libéral francophone au Sénat.

L’autre loi bioéthique belge qui a fait date en Europe porte sur la procréation médicalement assistée (PMA). Adoptée en juillet 2007, elle autorise la PMA « à toute personne qui a un projet parental, que la PMA soit effectuée ou non au départ de ses propres gamètes ou embryons ». La PMA est donc accessible aux couples mariés, aux concubins et même aux célibataires, qu’ils soient hétérosexuels ou (surtout aujourd’hui) homosexuels. Le législateur belge s’est voulu « le plus inclusif possible », au nom prétendent certains de la culture de compromis qui caractérise l’histoire de la Belgique.

Ses promoteurs assurent qu’il fallait répondre à un problème pratique : des couples gays et lesbiens s’adressaient déjà régulièrement aux centres de PMA. En l’état, la loi a donc conféré un cadre légal à des pratiques existantes. Il semble qu’en Belgique n’est pas là pour encadrer les pratiques, mais plutôt les suivre au plus près.

Par effet de voisinage, cette loi concerne aussi des couples français : certains viennent « chercher » leur bébé en Belgique. Chaque année, des milliers de couples homosexuels ou de femmes seules passent la frontière pour bénéficier de l’insémination artificielle avec donneur (IAD). « Les Françaises représentent 82 % des 1 100 traitements effectués en 2013, et plus de 8 sur 10 sont des lesbiennes », confie le Pr Michel Dubois, chef du service de PMA de l’hôpital universitaire de Liège.

Les « avancées » de la Belgique en matière de bioéthique s’expliquent souvent par une alliance de circonstance entre les partis libéraux et socialistes francophones et flamands, opposés en cela aux partis sociaux-chrétiens, généralement hostiles, mais minoritaires.

Ces lois émanent en effet des milieux libéraux (la droite économique), appuyés par les socialistes. « La droite belge est plus libérale qu’en France, et, dans le domaine éthique, ses membres ont une totale liberté de vote », explique Virginie Defrang. Le père Éric de Beukelaer, curé doyen de Liège, le regrette : « La Belgique est un ancien pays de tradition catholique, comme l’Irlande ou l’Autriche. Elle est entrée soudainement dans une ère de sécularisation accélérée, avec des relais puissants et institutionnels dans la société civile comme les syndicats, les maisons de la laïcité, les mutuelles. »

Ces relais lancent et mènent le débat avant que les lois n’arrivent au Parlement. Les majorités libéralo-socialistes ont ainsi enfanté d’autres projets de loi, comme la coparentalité ou la comaternité des parents homosexuels. Cette proposition voudrait offrir aux couples homos qui ont eu un enfant dans le cadre de la PMA la possibilité de devenir parents, tous les deux à part entière. Ce projet est âprement discuté parce qu’il ne favoriserait que les couples lesbiens, au détriment des couples homosexuels (hommes), car la Belgique interdit — jusqu’à maintenant — de faire appel à une mère porteuse. Toutefois des propositions de loi dans ce sens sont à l’étude.

« Il serait faux de croire que l’opinion publique est passive, elle est aussi capable de sortir dans la rue en masse, comme l’ont prouvé la Marche blanche et les affaires de pédophilie, souligne Anne Morelli, professeur à l’Université libre de Bruxelles. Mais l’opinion belge affiche dans sa grande majorité un large consensus, notamment autour de l’euthanasie, même dans les milieux [dits] catholiques. »

Entretemps, la Belgique est suspendue à la plume de son roi. Philippe refusera-t-il de signer la loi autorisant l’euthanasie des enfants ? On dit le roi actuel conservateur moral, il est un membre de la Communauté de l'Emmanuel. Ce geste de Philippe imiterait celui de son oncle Baudouin qui avait abdiqué (« était dans l'impossibilité de régner ») le temps d'une journée et demie pour ne pas sanctionner la loi instaurant la dépénalisation conditionnelle de l'avortement en 1990. On mesure l'« avancée » sociale récente : désormais l'avortement est considéré comme un droit imprescriptible par les partis politiques dominants en Belgique. Personne ne pense que ce refus de Philippe empêchera la loi d'être promulguée, mais certains espèrent qu'un refus marquera le début d'une remise en question, d'une prise de conscience. D'autres craignent (ou espèrent) qu'un refus s'accompagnera d'une restriction des prérogatives royales à l'avenir, car le gouvernement actuel, nettement moins conservateur social qu'en 1990, n'aura pas la patience qu'il a eu avec le roi Baudouin.

Caricature refusée de Dubus :



Caricature publiée :







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