mardi 18 août 2009

Le « dialogue » du Monopole de l'Éducation au sujet du cours d'éthique et de culture religieuse

On l'a appris, lors du procès de Drummondville, de la bouche même du responsable du programme Éthique et culture religieuse (ECR) auprès du Monopole de l'Éducation du Québec (MELS), M. Jacques Pettigrew, quand les parents ont commencé à vouloir dialoguer avec les membres du gouvernement, le gouvernement a décidé de rapidement mettre un terme à ces réunions d'information.

Pourquoi ne plus vouloir informer et mettre fin au dialogue alors que le gouvernement prétend que ce cours apprendra le dialogue aux jeunes élèves otages de son monopole ?

Parce que ces parents isolés qui ne bénéficient d'aucun relais dans les médias francophones [1] du Québec s'en tiraient fort bien devant les fonctionnaires. Voir le récit d'une réunion à Valcourt avec les représentants du Ministère.

Extrait de la déposition de M. Jacques Pettigrew où il avoue candidement la volonté de ne pas dialoguer de la part du gouvernement après cette réunion à Valcourt et une réunion similaire à Drummondville :
11 h 24, Me Bélisle – Votre dernière page de votre rapport (JP-1). Il y a eu un débriefing après la rencontre.

M. Pettigrew – Oui, Monsieur.

[Long accouchement pour apprendre qui était présent à la rencontre dont nous faisons grâce aux lecteurs]

Me Bélisle, lisant le rapport – Première conclusion de l’avis de deux représentants du MELS, – je suppose que c’est vous et M. Bergevin ? –

M. Pettigrew – Exact.

Me Bélisle, continue la lecture — « …ce genre de rencontres risque d’offrir aux représentants de la CLÉ une tribune que ce mouvement, pour l’instant marginal, recherche à des fins de promotion de ses idées, ainsi nous estimons qu’il serait préférable de ne pas répéter ces rencontres. » C’est bien ça ?

M. Pettigrew – Exact.

Me Bélisle – Alors votre stratégie à vous autres c’est on ne fait plus de rencontres, on ne va pas exposer ou communiquer ou faire la pro-mo-tion é-ner-gique du programme, du nouveau produit parce qu’on se fait brasser. Vous l’avez dit aux pages précédentes que vous vous êtes fait brasser.

[…]

Me Bélisle – Vous avez eu Valcourt, vous avez eu effectivement ici à Drummondville. Puis vous en avez eu assez. Deuxième commentaire, conclusion : « Une fois l’année scolaire engagée, le MELS devrait peut-être utiliser la stratégie de soutien aux autorités scolaires locales, les laisser assumer le rôle de prestataire de services, et éviter de se présenter localement comme le premier interlocuteur auprès des parents. » Vous disparaissez de la circulation, vous laissez là la commission scolaire avec ses problèmes. C’est vous qui êtes responsable du programme ECR, il y a un peu de houle dans le bateau, vous vous retirez, vous laissez la commission scolaire effectivement aller au bâton pour vous autres.
En matières de communication, les commissions scolaires se borneront à ânonner un « Non ! » et à polycopier des lettres de refus aux parents qui demandaient l'exemption. Lettres préparées par une association des directeurs de commissions scolaires. Le panurgisme en action. Certaines commissions plus zélées et faisant montre d'un bel esprit de tolérance et de dialogue, comme celle de Granby, suspendirent les élèves récalcitrants.


[1] Remarquons ici que le quasi-unanimisme pro-ECR des médias francophones n'est pas chose nouvelle et qu'il y a d'autres domaines où il existe un clivage entre la population du Québec (près de 50 % des Québécois sont contre le cours ECR, 76 % est pour la liberté de choix) et les médias qui servent surtout de caisse de résonance au gouvernement et reproduisent le discours multiculturel le plus éculé et le plus béat.

Paul Wells dans le magazine Maclean's faisait aussi remarquer ce divorce entre, d'une part, les éditorialistes et « intellectuels » québécois et, d'autre part, la population québécoise dans leur attitude respective face au crime :

You’ll note that when Colleague Phil wanted to demonstrate a “chasm between Tories and Quebecers” on crime in the post I link above, he linked to an article from last autumn’s election that quotes only Quebecers who teach criminology at universities or write editorials for newspapers. Polling data consistently demonstrates that on perceptions of the appropriate response to crime, the most easily demonstrable chasm is between Quebecers who write editorials for a living and Quebecers who don’t.

Voir aussi ce que disait l'ombudsman du service français de Radio-Canada, Mme Julie Miville-Deschênes :

Il n’y a pas assez de diversité d’opinions et de diversité culturelle dans les grands médias québécois. Le Québec, avec ses 7,6 millions d’habitants, est une petite société. Cette réalité démographique nuit à la diversité. Parlons d’abord des journalistes. Les plus influents appartiennent souvent à la génération des baby-boomers. Et la grande majorité d’entre eux – jeunes ou vieux – partagent la même idéologie. Ces Québécois « de souche » ont surtout étudié les sciences humaines et ont été contestataires dans la mouvance nationaliste et/ou de gauche. Souvent, leur façon de voir le monde comporte, par exemple, les éléments suivants : préjugés favorables envers les syndicats, antiaméricanisme, anticléricalisme, etc. Cela ne les empêche pas de s’être embourgeoisés au fil des ans, grâce notamment à des conventions collectives de plus en plus généreuses. En outre, ils vivent en ville et font partie de la classe moyenne ou même aisée. Il est difficile pour eux de voir venir des phénomènes comme la montée de l’ADQ ou le malaise qui sous-tend le code de conduite pour les immigrants de Hérouxville puisque chacun sait, dans les grands médias, que le Québec est laïc, accueillant et plus tolérant que le reste du Canada… Remarquez que ce phénomène du « trop petit nombre » ne touche pas la classe journalistique plus que les autres. La preuve nous en est donnée chaque jour par les médias lorsque nous écoutons les experts sollicités pour nous éclairer. Les mêmes têtes reviennent. Un exemple : à lui seul, Steven Guilbeault, ex-directeur de Greenpeace au Québec, a été entendu 120 fois à la radio et à la télévision de Radio-Canada en 2007. [suite ici]