lundi 22 décembre 2025

La laïcité étriquée contribue à vider la France de sa substance

Le 120e anniversaire de la loi de 1905 est l’occasion de rappeler qu’une conception étriquée de la laïcité contribue à vider la France de sa substance affirme Laurent Dandrieu dans ce texte paru dans Valeurs actuelles. 

Il a beaucoup été question, la semaine dernière, de laïcité, à l’occasion du 120e anniversaire de la loi séparant les Églises et l’État: une loi qui fait figure aujourd’hui de vache sacrée, mais dont la commémoration n’en a pas moins révélé des divergences profondes. Ceux qui la laïcité reste le pilier central et intangible de la République se divisent entre partisans d’une application libérale ou intransigeante; pour certains, elle laisse encore trop de place aux religions dans l’espace public, pour d’autres, elle ne serait plus que l’alibi d’une islamophobie agressive ; certains, enfin, y voient au contraire un rempart bien faible contre l’islamisme, arguant qu’on ne contient pas une idéologie conquérante avec un principe de neutralité.

Ces derniers ont raison sur au moins un point : c’est que la religion n’est pas qu’une question cultuelle et que toute religion porte avec elle une dimension culturelle. La réflexion française [note du carnet: dans la francophonie plus généralement] sur la laïcité est trop souvent une réflexion idéologique, abstraite, qui fait l’impasse sur cette empreinte culturelle du catholicisme et donc sur sa dimension identitaire — surtout depuis que le progressisme est parvenu à faire de l’identité le gros mot absolu, diabolisant cette notion comme un concentré de révisionnisme, de fascisme, de racisme et de colonialisme. 

Beaucoup voient la laïcité comme une relégation de la religion à la sphère privée — comme si la foi était un gadget qu’on allume à la maison et qu’on éteint dès qu’on sort de chez soi. Beaucoup croient, en jugulant l’expression publique de la foi, chasser du même mouvement le christianisme de la société — comme s’il n’avait pas modelé, des siècles durant, nos villes, notre patrimoine, notre culture, notre langage, nos paysages mêmes. D’où les querelles incessantes sur les crèches, les calvaires et les clochers, les spectacles qui évoquent les racines chrétiennes de la France, la possibilité pour les écoles privées d’intégrer dans leur éducation une dimension chrétienne ou la simple mention, par tel ou tel politique, de sa foi personnelle

Le maire de Béziers, Robert Ménard, a inauguré sa deuxième crèche de Noël depuis son élection, objet régulier d'attaques en justice au nom d'un principe de laïcité étriquée

Avec, sur le versant gauche de la laïcité, une intransigeance vis-à-vis du catholicisme qui se marie avec une grande mansuétude envers l’islam. Quand le sociologue Jean Baubérot, gardien du temple de la laïcité, déclare dans Libération du 9 décembre que « la loi de 1905, ce ne devait pas être une loi de combat. Nous en sommes pourtant là », il faut entendre que le combat lui semblait naturel tant qu’il visait les chrétiens, mais qu’il lui paraît illégitime quand il prétend imposer aux musulmans les mêmes contraintes…

Or, il ne faut pas se lasser de le rappeler après de Gaulle, « la République est laïque, mais la France est chrétienne »Vouloir effacer cette évidence, c’est vouloir vider la France de sa substance, en faire une coquille vide ouverte à toutes les ingénieries politiques, idéologiques ou démographiques. C’est vouloir effacer l’identité profonde, charnelle et spirituelle de la France, et prétendre la remplacer par un principe désincarné. Comme le rappelle le philosophe Pierre Manent dans Situation de la France (Desclée De Brouwer), « La laïcité est un dispositif de gouvernement qui n’épuise pas le sens de la vie commune, et qui d’ailleurs en donne une représentation abstraite et fort pauvre. On n’habite pas une séparation ».

La nature civilisationnelle ayant horreur du vide, le vide ainsi créé par une laïcité qui serait une négation de notre identité chrétienne aura vocation à être comblé par une identité de remplacement : la seule qui candidate à ce remplacement est pour l’heure celle, créolisée, proposée par Jean-Luc Mélenchon, qui n’est que le paravent hypocrite d’une France islamisée.

Mais ce n’est pas seulement pour faire barrage à cette identité de remplacement que la France doit retrouver le moyen de combiner une laïcité apaisée avec le respect de son identité chrétienne : c’est avant tout parce que c’est le seul moyen pour elle de rester fidèle à sa vocation. C’est sous l’égide du christianisme que la France a modelé sa culture ; c’est sous le regard de la chrétienté que la France a composé la partition unique qu’elle a fait entendre au monde. Ce n’est qu’en restant fidèle à cette partition et à ses racines chrétiennes qu’elle conservera un rôle à jouer dans le concert des nations.

Combiner une laïcité apaisée avec le respect de son identité chrétienne est le seul moyen pour la France de rester fidèle à sa vocation.

Voir aussi
 
 
 
 

Qui veut la tête d’Anne Coffinier ?

Figure de l’école libre en France, Anne Coffinier est aujourd’hui la cible d’une campagne de presse d’une grande violence, orchestrée par une extrême gauche prête à tout pour éviter que son monopole scolaire lui échappe complètement. Texte de Mickaël Fonton dans Valeurs actuelles.

Cinq pages dans L’Humanité (communiste, gauche radicale), au matin du 8 décembre. On imagine facilement des lundis plus plaisants. Et la couverture, en outre, qui présente Anne Coffinier en joueuse de flûte de Hamelin, entraînant à sa suite une ribambelle de personnages enfantins : une figurine des Républicains, une petite fille blonde arborant la flamme du Rassemblement national (de qui s’agit-il ?), une autre enfin au tee-shirt siglé UDR. Petit détail graphique : la flûte est taillée dans le bois d’une croix catholique. Le message est clair. On ne sait pas en revanche s’il s’agit de rallier tout ce petit monde à sa cause ou de le perdre. Au moins le journaliste, Thomas Lemahieu, connaît-il ce conte allemand popularisé par les frères Grimm. Sans doute parce que son âge lui a permis de bénéficier d’une instruction qui tenait encore le coup. Une chance ! 

« Fondation Kairos : à l’école du pire », voilà pour le titre. Précisions : « Derrière la vitrine prestigieuse d’Anne Coffinier, c’est tout un écosystème réactionnaire qui s’agite à l’extrême droite. Avec, dans l’ombre [forcément dans l’ombre, NDLR], deux milliardaires en pointe dans cette bataille idéologique : Vincent Bolloré et Pierre-Édouard Stérin. » Tout y est. Comme diraient les jeunes : un combo parfait. Une matière tellement idéale que L’Humanité n’est pas le seul journal à s’être penché sur la vie et l’œuvre d’Anne Coffinier. 

Le site du Monde lui a consacré deux articles conséquents le lendemain et, au printemps, Libération ou Mediapart avaient commencé à labourer le terrain. « Je me trouve à la convergence de tout ce qui obsède la gauche, reconnaît l’intéressée. L’école libre, parfois même l’école libre catholique, la droite, Bolloré, Stérin… » Thomas Lemahieu le dit autrement ; Anne Coffinier se situe « au point nodal […] “là où l’or, la boue et le sang s’entremêlent” ». Rien que ça. C’est une phrase de Marx — c’est aussi le titre d’un ouvrage d’Édouard Drumont, l’auteur de la France juive, ce qui ne manque pas de sel, quand on y songe.

Des réseaux, quelle horreur !
Il n’y a qu’à droite que l’on trouve ça


Qu’apprend-on dans ces différents papiers ? À la fois tout et rien, comme souvent. Beaucoup de noms, mais aucune idée, aucune « preuve » de quoi que ce soit. Derrière la fondation Kairos, derrière « Créer son école », derrière la « vitrine prestigieuse », il y a des gens, figurez-vous. Des gens extrêmement de droite et extrêmement catholiques (ou traditionalistes, intégristes, au choix) ; il y a des gens fortunés ; il y a des gens malintentionnés (dit-on) ; il y a des gens qui se voient, qui s’invitent, qu’on retrouve tantôt chez les uns, tantôt chez les autres, qui ont des projets, qui se rendent des services. Des réseaux, quelle horreur ! Il n’y a vraiment qu’à droite que l’on trouve ça. Il y a un peu de Hongrie, ça ne mange pas de pain. Des anciens de chez Fillon (pourquoi lui ?), un zeste de « Manif pour tous », ça marche toujours très bien. Bref : on comprend très vite que L’Humanité ou Le Monde n’aiment pas, mais alors pas du tout, cette droite qui n’est pas de gauche.

Mais au-delà de ça ? Sur la liberté scolaire ? Sur les écoles indépendantes ? Il n’y a rien. Ce qui est saisissant, encore une fois, c’est que jamais le journaliste ne se demande si le constat que pose Anne Coffinier sur l’école publique, constat qui l’a poussée à consacrer sa vie à soutenir l’essor des écoles libres, est fondé, rationnel, pertinent. Il n’est pas là pour ça. Comme nous l’écrivions la semaine dernière dans le dossier que nous lui consacrions, la gauche sait. Vincent Bolloré n’a pas d’idées, il est le mal. Ses projets ne se discutent pas, ils se combattent.

Un exemple parmi d’autres de cette volonté de ne pas comprendre. Quand Anne Coffinier rétorque au journaliste de L’Humanité, qui l’accusait de disposer de « fiches » sur certains opposants à la liberté scolaire, que « s’il fallait recenser tous les hommes et les femmes politiques de gauche qui scolarisent leur enfant dans le privé, ce n’est pas une fiche qu’il faudrait, mais un bottin ! », précision plutôt amusante, Lemahieu estime qu’Anne Coffinier « persifle ». Pourquoi « persifle » ? Il faudrait plutôt se demander si c’est vrai, ou pas. C’est là le sujet et la seule question qu’un journaliste devrait se poser. S’il se la posait, il découvrirait très vite que ce n’est pas du « persiflage », mais la stricte réalité. Énormément d’élus ou de responsables de gauche évitent soigneusement à leur progéniture les joies de l’école publique version XXIe siècle.

Les personnes soucieuses de leur carrière peuvent passer leur chemin

La raison, connue des lecteurs de Valeurs actuelles depuis longtemps, est désormais un secret de Polichinelle. Les familles désertent l’école publique parce qu’elle n’a plus d’école que le nom. Parce que le temple de Jules Ferry est devenu un moulin ouvert à tous les vents d’une société violente, déconstruite, absurde. Beaucoup de familles font ce choix. Toutes celles qui le peuvent, ou presque. Et les autres le feraient si elles en avaient les moyens, moyens que, précisément, on leur refuse.

Lors d’un de nos premiers échanges, voilà des années, Anne Coffinier m’avait fait l’aveu suivant : « Je préférerais évidemment que l’on restaure le bel édifice de l’instruction publique, mais je pense que, pour tout un tas de raisons, ce n’est pas possible. Donc plutôt que d’attendre un hypothétique sauveur, je mets tout en œuvre pour qu’un maximum d’enfants puisse échapper à un système hors de contrôle. » C’était il y a quinze ans. Le système en question, l’Éducation nationale, est moins sous contrôle que jamais tandis que les écoles libres n’ont jamais été si nombreuses ni si diverses — n’en déplaise aux journalistes de gauche qui voient des catholiques d’extrême droite partout et qui, fidèles à leurs réflexes, s’évertuent à casser ou à salir ce qu’ils ne comprennent pas.

Par chance, la patronne de Créer son école, normalienne de formation, énarque, diplomate (d’où ses fameux réseaux internationaux !), a le cuir épais. Les joyeusetés balancées sur son compte par une ancienne collaboratrice, qui ont abondamment nourri la presse ces derniers temps, ne lui font pas plaisir, mais elles sont en quelque sorte digérées. « Je subissais déjà tout ça en interne, soupire-t-elle. Maintenant, c’est public, ce n’est pas agréable, mais c’est comme ça. J’attends sereinement que la justice rétablisse la vérité. » Une justice qu’une certaine presse ne prend jamais la peine d’attendre — mais ceci aussi fait partie du « job ». Sauver l’instruction, permettre aux enfants de France de disposer encore d’une école, ne saurait être une sinécure. C’est une vocation, un sacerdoce. Les personnes soucieuses de leur carrière ou de leur confort intellectuel peuvent passer leur chemin.

Le problème est que c’est souvent le cas des responsables de droite ! De ce point de vue là les « révélations » promises par L’Humanité sont à la fois éloquentes — et contradictoires. Il y a de riches donateurs partout dans l’entourage d’Anne Coffinier, mais les écoles libres continuent de tirer le diable par la queue — cherchez l’erreur ! « La vérité est que la droite a toujours roupillé sur l’éducation, regrette Anne Coffinier. On parle à l’envi de fondamentaux, d’autorité, d’autonomie, mais on ne fait que réagir aux offensives de la gauche, mollement et avec un temps de retard. Cela ne constitue pas une vision politique. »

L’école libre qui est simplement le nouveau nom de l’école de toujours

La fondatrice de Kairos ne le dira pas, mais elle soupçonne un certain nombre de gens de droite de ne voir dans l’école privée qu’un moyen de mettre leurs propres enfants à l’abri, tout en défiscalisant tout ce qui peut l’être. Une attitude qui peut se comprendre, mais qui laisse intact le problème de l’école, de toute l’école, donc de la société de demain. Nul ne peut se contenter de créer des isolats. Anne Coffinier le demande avec une détermination intacte : pour elle, la droite doit passer à l’offensive en matière d’éducation, au lieu de subir. « Il lui faut donner une dimension sociale qui manque à son action, en se battant pour que toutes les familles qui le veulent puissent scolariser leur enfant dans l’école privée », insiste-t-elle, avant de préciser en outre que cette réforme « serait source d’énormes économies pour la nation ».

Mais la question est : qui aurait le courage de se saisir de ce sujet ? « François-Xavier Bellamy est très présent sur ces questions d’éducation, qu’il place toujours au premier rang de ses préoccupations, avance Matthieu Grimpret. Mais il est un peu empêtré dans un milieu politique où les gens sont largement déconnectés de la réalité profonde du problème. » De manière surprenante, l’auteur de Bullshit bienveillance (Magnus) imagine que le salut pourrait venir… des milieux d’affaires. « Je fonde un certain espoir dans la prise de conscience des chefs d’entreprise, explique-t-il. Par le biais du recrutement, ils sont directement confrontés à l’effondrement de l’école, non seulement pour ce qui est des savoirs, mais aussi et surtout par la question comportementale. » Et si certains patrons, conscients du caractère « ingérable » de la génération née après l’an 2000, avouent froidement « attendre les robots », d’autres ne veulent pas renoncer à la beauté de la transmission, de la formation, de la chaîne intergénérationnelle.

« L’éducation nationale demeure dominée par le gauchisme culturel, mais le rapport de force bouge, observe de son côté Joachim Le Floch-Imad. Certaines propositions conservatrices gagnent de l’audience et 20 % des enseignants en viennent à voter pour le Rassemblement national. » Les professeurs, longtemps inféodés à ces idées de gauche qui ont creusé leur tombe, pourraient-ils devenir les acteurs de leur propre sauvetage ? « L’hégémonie de la gauche s’est fracassée sur le mur de la réalité. Elle conserve toutefois une forte capacité d’influence au sein de la technostructure du ministère », tempère l’auteur de Main basse sur l’éducation nationale (les Éditions du Cerf). Le prof évolue, mais la salle des profs continue d’afficher son hostilité à toute réforme, tout projet, toute idée qui semblerait « de droite ». Cette dernière n’est pas près de reprendre pied sur ce terrain-là — pour ne rien dire du monde syndical ! « Les professeurs sont — au moins pour un temps encore — attachés à la discipline qu’ils enseignent, insiste Matthieu Grimpret. Ils veulent transmettre du savoir, or ils ont bien conscience que, sans autorité, sans exigence, leur métier n’est pas possible. C’est une question d’efficacité. »

On retrouve l’intuition d’Anne Coffinier, celle qui l’a portée vingt ans durant : tout le monde veut l’école privée, l’école libre, qui est simplement le nouveau nom de l’école de toujours. Les enfants, leurs parents, les professeurs. Surtout : tout le monde mérite cette école et seuls les amis du désastre en cours peuvent vouloir torpiller ceux qui veulent la construire ou la reconstruire. « Le mal, pour triompher, n’a besoin que de l’inaction des gens de bien », dit la très célèbre formule attribuée à Edmund Burke. Anne Coffinier l’a bien compris. Mais qui avec elle ? 

dimanche 21 décembre 2025

Chili : la recomposition de la droite

La nette victoire de José Antonio Kast à l’élection présidentielle chilienne marque un tournant politique à Santiago et s’inscrit dans un mouvement plus large de recomposition des droites en Amérique latine.

Le président chilien élu, José Antonio Kast, et son épouse, Maria Pia Adriasola, devant la cathédrale de Santiago, après avoir assisté à la messe, le 19 décembre 2025.

Costume sombre et cravate rouge, José Antonio Kast a conduit une campagne axée sur les thèmes de la sécurité, de l’immigration et du redressement économique. Son discours a trouvé un écho auprès d’une partie de l’électorat, lassée par quatre années de gouvernement progressiste marquées, selon ses critiques, par des réformes inabouties, des tensions institutionnelles et un ralentissement de l’activité économique. Ces préoccupations ont été accentuées par la hausse de la criminalité : d’après les statistiques officielles, le taux d’homicides est passé de 2,5 à 6 pour 100 000 habitants en une dizaine d’années, tandis que les enlèvements ont atteint 868 cas l’an dernier, soit une augmentation de 76 % par rapport à 2021.

Au cours de ses derniers meetings, le candidat du Parti républicain a fait de la lutte contre le crime organisé et le narcotrafic une priorité, appelant à un « gouvernement d’urgence » et à un contrôle renforcé des frontières afin de lutter contre l’immigration illégale.

Cette lecture est partagée par certains acteurs de la droite chilienne. Johannes Kaiser, fondateur du Parti national libertarien, arrivé quatrième au premier tour, attribue en partie la dégradation de la sécurité à l’arrivée massive de migrants vénézuéliens ces dernières années. Selon lui, si la majorité a fui la crise politique et économique de leur pays, des réseaux criminels transnationaux auraient également profité de cette situation, dans un contexte d’accueil jugé trop permissif par l’ancien gouvernement.

Une réaction au progressisme

Âgé de 59 ans, catholique pratiquant et père de neuf enfants, José Antonio Kast incarne une droite conservatrice sur les plans sociétal et économique. Admirateur déclaré de l’économiste Milton Friedman, il se positionne à l’opposé de Gabriel Boric, président sortant de 39 ans, élu en 2021 dans le sillage des grandes mobilisations sociales de 2019. Ces manifestations, connues sous le nom d’estallido social, avaient porté des revendications liées aux inégalités, aux droits sociaux, à l’égalité des genres et à la dénonciation des violences sexuelles.

L’élection de Gabriel Boric avait alors été perçue comme un renouveau pour une gauche latino-américaine en perte de repères depuis la disparition d’Hugo Chávez et l’évolution autoritaire du régime vénézuélien. Le Chili semblait tourner la page de la période pinochetiste pour renouer avec une mémoire plus favorable à l’héritage d’Allende.

Pour Carlos Ominami, ancien ministre de l’Économie au début des années 1990, ce cycle s’est toutefois refermé. Il estime que la gauche au pouvoir n’a pas su répondre aux attentes sociales, privilégiant des thématiques culturelles et sociétales (le « wokisme ») au détriment des enjeux économiques et populaires. Selon lui, la droite bénéficie également du soutien d’une génération plus jeune, qui n’a pas connu directement la dictature militaire.

Une victoire nette

Déjà candidat malheureux en 2022, José Antonio Kast s’est cette fois imposé avec 58 % des voix face à Jeannette Jara, candidate soutenue par le Parti communiste chilien, qui a recueilli 42 %. Ses soutiens présentent Kast comme un représentant d’une droite classique, tandis qu’ils soulignent l’ancrage idéologique de son adversaire à gauche de l’échiquier politique.

Selon Johannes Kaiser, Jeannette Jara était une candidate communiste « dans la plus pure tradition marxiste-léniniste ». « Kast est un homme de droite classique, pas un fasciste comme ils disent. En revanche, Madame Lara s’est dite du centre gauche pendant toute la campagne alors qu’il y a quelques mois encore, elle était militante active du Parti communiste chilien, soutien des régimes cubains et vénézuéliens, et entretenait de très bonnes relations avec les terroristes révolutionnaires des FARC colombiens. »

Un mouvement continental

Au-delà du Chili, cette alternance s’inscrit dans une dynamique régionale. Pour la politologue Renée Fregosi, José Antonio Kast a pris soin d’éviter toute apologie explicite de la dictature de Pinochet, se concentrant sur des thèmes contemporains. D’autres analystes, comme l’Argentin Nicolás Márquez, voient dans cette victoire un effet comparable à celui observé en Argentine avec Javier Milei, illustrant selon eux l’épuisement des modèles politiques issus du « socialisme du XXIᵉ siècle ».

Cette évolution s’accompagne d’un rapprochement de plusieurs gouvernements latino-américains avec les États-Unis, dans un contexte de rivalités géopolitiques accrues avec la Chine et la Russie. Le renforcement de la coopération sécuritaire et diplomatique américaine dans la région en est l’un des signes.

Enfin, l’attribution récente du prix Nobel de la paix à l’opposante vénézuélienne María Corina Machado, en présence de plusieurs dirigeants de droite du continent, a été interprétée par ses partisans comme un symbole de cette nouvelle phase politique en Amérique latine, marquée par le retour de forces libérales et conservatrices se réclamant d’un ancrage pro-occidental.

Apocalypse professionnelle ? Pas pour l'instant : l'IA crée de tout nouveaux métiers

Les compétences humaines sont les plus recherchées. 


Une fausse offre d’emploi qui a récemment fait le tour des réseaux sociaux recherche un « ingénieur coupe-circuit » pour OpenAI, le créateur de ChatGPT. La description exige que le candidat retenu reste à côté des serveurs toute la journée et les débranche « si cette chose se retourne contre nous ». Parmi les compétences utiles, il faut également savoir « jeter un seau d’eau sur les serveurs. Au cas où. »

Malgré les craintes généralisées de pertes d’emplois dues à l’essor des agents d’intelligence artificielle (IA), tout n’est pas noir. La technologie crée déjà de nouveaux rôles : former les agents conversationnels, les intégrer dans les organisations et s’assurer qu’ils se comportent correctement. En outre, bon nombre de ces nouveaux emplois requièrent des compétences propres à l’humain.

Commençons par les annotateurs de données. Ils ne sont plus seulement des travailleurs précaires mal payés qui étiquettent des images de manière fastidieuse. À mesure que les modèles d’IA sont devenus plus avancés, des experts dans des domaines tels que la finance, le droit et la médecine ont été de plus en plus sollicités pour aider à les former. Mercor, une jeune entreprise qui a créé une plateforme pour embaucher des experts chargés d’aider au développement de robots, a récemment été évaluée à 10 milliards de dollars. Brendan Foody, son directeur général, affirme que ces experts gagnent en moyenne 90 dollars de l’heure.

Une fois les robots formés, des équipes d’ingénieurs déployés sur le terrain (ou à l’avant) sont nécessaires pour les intégrer dans les organisations. Palantir, un géant du logiciel qui a été le pionnier de ce concept, leur insuffle un esprit d’audace. « Au début, il n’y avait que nous ». Deux ingénieurs ont débarqué dans une base militaire près de Kandahar, avec des ordres minimaux, mais clairs venus de Palo Alto : « Allez-y et gagnez », commence un article de blogue typique rédigé par un ancien ingénieur de Palantir.

Dans la pratique, leur travail est un mélange de développeur, de consultant et de vendeur. Ils travaillent sur place pour personnaliser les outils d’IA pour un client et les mettre en service. Les ingéneiurs déployés à l’avant se multiplient, même si leur nombre reste faible. Garry Tan, le patron de YCombinator, une pépinière de jeunes pousses, a récemment déclaré que ses jeunes entreprises avaient publié 63 offres d’emploi pour des ingénieurs déployés sur le terrain, contre quatre l’année dernière. À mesure que les agents IA se répandent, leurs créateurs doivent comprendre les domaines liés à l’humain dans lesquels leurs outils fonctionnent. Un programmeur qui crée un agent de service client, par exemple, doit comprendre pourquoi un client frustré compose le zéro juste pour hurler sur un humain.

Himanshu Palsule, directeur général de Cornerstone OnDemand, une entreprise de développement des compétences, cite Waymo, une entreprise de robotaxis en pleine expansion, comme exemple de l’évolution du métier de développeur. Les voitures de Waymo roulent de manière autonome du début à la fin. Mais que se passe-t-il si elles tombent en panne, enfermant leurs passagers à l’intérieur ? C’est là qu’intervient ce qu’il appelle « le gars — ou la fille — dans le ciel », un dépanneur humain à distance qui doit non seulement comprendre la technologie, mais aussi savoir comment gérer des passagers épuisés. Selon M. Palsule, les ingénieurs en logiciel étaient autrefois recherchés pour leurs compétences en codage, et non pour leur savoir-faire relationnel. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. L’écriture de code peut désormais être effectuée par un algorithme [Avis du carnet : suggérée ou facilitée par un algorithme]. « C’est votre personnalité qui fait votre valeur. »

Il faut ensuite établir des règles pour s’assurer que les agents IA ne sèment pas le chaos. L’AI Workforce Consortium, un groupe de recherche dirigé par Cisco, un fabricant d’équipements réseau, a récemment examiné 50 emplois dans le secteur informatique dans les pays riches. La croissance la plus rapide, encore plus que celle des programmeurs IA, concernait les spécialistes des risques et de la gouvernance IA, qui veillent généralement à ce que les robots ne divulguent pas de données ou ne provoquent pas de panne dans les opérations d’une entreprise, entre autres.

C’est au directeur de l’IA qu’incombe la responsabilité de rassembler tous ces rôles. Ce poste est de plus en plus populaire parmi les cadres supérieurs, car les PDG cherchent à convaincre leurs conseils d’administration qu’ils prennent cette technologie très au sérieux. Les directeurs de l’IA combinent généralement une expertise technique avec une connaissance approfondie d’un secteur particulier et une expérience dans la refonte des processus d’entreprise. Ce n’est pas un travail pour les timides. Selon IBM, une entreprise informatique, une grande entreprise type utilise jusqu’à 11 modèles d’IA générative et est constamment sollicitée par des fournisseurs qui tentent de lui vendre des agents pour toutes les fonctions imaginables. Les responsables sont peut-être déjà tentés d’appuyer sur le bouton d’arrêt d’urgence. 

Source : The Economist

Voir aussi
 

« Non, la science n’a pas démontré qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre immigration et délinquance »

Une note publiée par un centre de recherches rattachée à Matignon, reprise dans l’émission Complément d’enquête (capture d’écran ci-dessous), assure que, d’après la science, on ne peut établir de lien entre immigration et délinquance. Philippe Lemoine, directeur de la recherche à l’observatoire Hexagone et chercheur invité à Georgetown (Washington, É-U), critique cette affirmation.


L’immigration augmente-t-elle la délinquance en France et plus généralement en Europe ? Pour  Arnaud Philippe et Jérôme Valette, deux économistes qui ont écrit une note pour le CEPII  (un centre de recherche placé auprès du Premier ministre) sur le sujet en 2023, la cause est entendue : les études sur le sujet « concluent unanimement à l’absence d’impact de l’immigration sur la délinquance ».

Le message semble d’ailleurs avoir été reçu cinq sur cinq par la plupart des lecteurs de cette note. Par exemple, au cours d’un récent épisode de Complément d’enquête, le magazine d’investigation diffusé sur France 2, une journaliste cite la note du CEPII à l’appui de son affirmation selon laquelle le «  lien de causalité entre étrangers et insécurité n’existe pas  », ajoutant même que « c’est la science qui le dit ». Le problème c’est que, n’en déplaise aux journalistes de Complément d’enquête et aux auteurs de cette note du CEPII, « la science » ne démontre rien de la sorte.

D’abord, il est faux que les études sur la question concluent « unanimement » et « sans ambiguïté » à l’absence d’effet de l’immigration sur la délinquance, comme l’écrivent faussement Philippe et Valette. Il existe en effet plusieurs études qui utilisent précisément le type de méthodes permettant d’établir un effet causal de l’immigration dont ils parlent dans leur note et qui trouvent pourtant  un effet de l’immigration sur la délinquance, non seulement sur les atteintes aux biens, mais parfois aussi sur les atteintes aux personnes.

La vérité est que les résultats dans  la littérature scientifique, loin d’être sans ambiguïté, sont au contraire très contrastés : il est vrai que beaucoup d’études ne trouvent pas d’effet, mais d’autres en trouvent un. Parfois des études différentes aboutissent même à des conclusions différentes alors qu’elles portent sur le même pays à la même époque. La note du CEPII, qui se veut pourtant une revue de la littérature, en présente donc un portrait trompeur.

Les données individuelles sur les auteurs de délit montrent non seulement en France, mais partout en Europe que les immigrés et leurs enfants, du moins ceux qui sont originaires du Maghreb, d’Afrique subsaharienne et du Moyen-Orient, sont mis en cause ou condamnés pour des délits à des taux plusieurs fois supérieurs à ceux du reste de la population. Contrairement à ce que suggèrent Philippe et Valette dans leur note, cela reste vrai même quand on les compare à  des individus sans ascendance migratoire de même âge, sexe et avec des caractéristiques socio-démographiques identiques.

Les biais dans  la police  et  le système judiciaire  pourraient expliquer une partie de cette surreprésentation, mais il est totalement invraisemblable qu’ils puissent l’expliquer en totalité. Personne de sensé ne peut croire que, si les ressortissants de pays africains sont mis en cause dans les affaires de vols avec violence sans arme à un taux plus de 6 fois supérieur à celui des Français, c’est uniquement ou même principalement parce que les forces de police et de gendarmerie sont biaisées contre eux.

samedi 20 décembre 2025

À Paris, l’inexorable chute du niveau dans les très bons lycées publics

Depuis la réforme d’Affelnet en 2021, l’origine sociale compte autant que les notes, si ce n’est plus, pour intégrer un établissement réputé. Et les résultats ont considérablement baissé. Affelnet (Affectation des élèves par le Net) est la plateforme informatique du ministère de l'Éducation nationale français qui gère l'affectation centralisée des collégiens de 3e dans les lycées publics (seconde générale, technologique, professionnelle ou CAP) en fonction de leurs vœux, résultats scolaires, critères sociaux et localisation géographique, grâce à un algorithme qui classe les élèves pour leur attribuer une place dans un établissement à la rentrée

L’indice de positionnement social utilisé pour organiser la mixité scolaire augmente les candidatures des élèves des collèges défavorisés et pèse sur les résultats des lycées élitaires. 

Lycée Charlemagne. En 2025, Charlemagne s’est ainsi tout juste maintenu dans le top 100 du classement du Figaro Étudiant.

Condorcet, Charlemagne, Lavoisier, Sophie-Germain, Fénelon… Dans l’esprit des familles parisiennes attachées à l’école publique, ces noms riment encore avec réussite scolaire. Des lycées prisés pour leur exigence et leurs bons résultats.

Pourtant, la situation a bien changé depuis 2021 et la réforme d’Affelnet, cette plateforme de répartition des élèves de 3e vers le lycée. Le recteur de l’académie de Paris et chef d’orchestre de la réforme, Christophe Kerrero, l’avait du reste annoncé : le problème, c’était les « lycées de niveau» (comprendre, les établissements élitistes et attractifs). Puisqu’ils engendraient une « anxiété généralisée », le rectorat entendait introduire davantage de mixité sociale et scolaire dans les établissements de la capitale.

Objectif atteint : entre 2019 et 2023, la « ségrégation sociale » a baissé de 49 %, et la « ségrégation scolaire » de 39 % dans les lycées publics parisiens, selon le bilan du comité de suivi de la réforme de mars 2024. Mais cette mixité scolaire, et l’accueil d’élèves au niveau plus hétéroclite, présentés de manière positive par le rectorat, ont conduit à une baisse du niveau des meilleurs lycées publics parisiens. Une crainte exprimée au moment de la réforme par une partie des parents d’élèves et des enseignants des lycées les plus prestigieux.

Pourquoi l'Angleterre, berceau du multiculturalisme, fait-elle officiellement marche arrière ?

Alors que les Anglais sont de plus en plus hostiles envers l'immigration, le gouvernement de Keir Starmer décide de les apaiser en pondant une réforme digne des partis dits « d'esstrême-droite ».

Pourquoi l'Angleterre, berceau du multiculturalisme, fait-elle officiellement marche arrière ?

Décryptage


Études (n = 400) — Correcteurs noteraient plus sévèrement les garçons

L’école se veut le lieu par excellence de la méritocratie, où les élèves sont évalués uniquement sur la base de leurs compétences et de leurs efforts. Pourtant, une étude publiée en 2020 dans la revue scientifique Economics of Education Review par l’économiste Camille Terrier met en lumière une réalité plus dérangeante : les pratiques d’évaluation des enseignants ne sont pas toujours neutres et tendent, en France, à désavantager les garçons. 

Une étude fondée sur la comparaison entre notation anonyme et notation classique

Pour mener son analyse, Camille Terrier s’appuie sur un ensemble de données particulièrement riche, portant sur plus de 4 000 élèves suivis de la classe de sixième à la troisième dans 35 collèges français, majoritairement situés dans des zones socialement défavorisées.

L’originalité de la démarche réside dans la comparaison entre deux types d’évaluations :
  • des épreuves corrigées à l’aveugle, c’est-à-dire anonymement, par des correcteurs extérieurs ne connaissant ni l’identité ni le genre des élèves ;
  • des notes attribuées par les enseignants, dans le cadre habituel de la classe, où l’identité des élèves est connue.
Cette double source permet d’isoler l’effet propre des pratiques d’évaluation des enseignants, indépendamment du niveau réel des élèves.

Un désavantage net pour les garçons en mathématiques

Les résultats sont sans équivoque. Lorsque les copies sont corrigées à l’aveugle, les performances des filles et des garçons sont comparables. En revanche, dès lors que les enseignants savent à qui ils attribuent une note, un écart apparaît.

En mathématiques, les garçons reçoivent des notes inférieures à celles des filles pour un niveau de compétence identique. L’écart atteint 0,259 écart-type, ce qui correspond à un avantage d’environ 5 % en faveur des filles dans la notation non anonyme.

Ce biais, loin d’être anecdotique, s’accumule au fil des années. Sur l’ensemble du collège, il conduit à une progression plus lente des garçons, avec une perte estimée à 0,123 écart-type par rapport aux filles. À lui seul, ce mécanisme explique jusqu’à 6 % de l’écart de performance observé entre les deux sexes en fin de collège.

Des effets durables sur les trajectoires scolaires

L’étude montre que ces biais d’évaluation ne se limitent pas à des différences de notes ponctuelles. Ils influencent également les choix d’orientation des élèves.

Les meilleures notes obtenues par les filles en mathématiques — en partie dues au biais d’évaluation — augmentent leur probabilité de s’orienter vers des filières scientifiques au lycée. À l’inverse, si les notes reflétaient strictement les compétences mesurées par les évaluations anonymes, l’avantage des garçons dans ces filières serait plus marqué, de l’ordre de 12,5 % supplémentaires.

Ainsi, des écarts initialement modestes dans la notation contribuent à façonner des parcours scolaires différenciés, avec des conséquences potentielles sur l’accès aux études supérieures et aux carrières scientifiques.

Des biais liés aux attentes et aux stéréotypes

Comment expliquer ces écarts ? L’étude suggère que les enseignants, le plus souvent sans en avoir conscience, peuvent être influencés par des attentes différenciées selon le genre.

Certains comportements plus fréquents chez les garçons — agitation, prise de parole jugée excessive, moindre conformité aux normes scolaires — peuvent être interprétés négativement et se traduire par une évaluation plus sévère, y compris lorsque le niveau scolaire est équivalent. Il ne s’agit donc pas d’un favoritisme volontaire, mais de biais implicites, profondément ancrés dans les représentations sociales.

La notation anonyme comme levier d’équité

L’un des enseignements majeurs de cette recherche est la supériorité, en matière d’équité, de la notation à l’aveugle. En supprimant toute information sur l’identité des élèves, cette méthode permet de recentrer l’évaluation sur les seules compétences scolaires.

Déjà utilisée pour certains examens nationaux ou concours, sa généralisation dans les évaluations scolaires pourrait contribuer à réduire les inégalités de traitement entre filles et garçons, mais aussi à renforcer la confiance des élèves dans la justice du système éducatif.

Repenser l’évaluation pour garantir l’égalité


L’étude de Camille Terrier invite à une remise en question profonde des pratiques d’évaluation à l’école. Elle rappelle que l’égalité des chances ne dépend pas uniquement des programmes ou des moyens alloués, mais aussi de mécanismes plus discrets, comme la manière dont les performances sont jugées.

Former les enseignants à la reconnaissance de leurs biais implicites, développer la notation anonyme et repenser les critères d’évaluation constituent autant de pistes pour faire de l’école un espace réellement équitable, où les trajectoires scolaires reflètent les compétences réelles plutôt que des attentes genrées.

Voir aussi

Quand l’anonymat récent des copies révèle un biais historique… favorable

 

Le sport à l’école primaire a un effet positif sur la réussite scolaire selon une étude

Étude — École non mixte n’augmente ni résultats ni intérêt des filles pour les sciences, mais bien pour les garçons

Syndicats : « Adapter l’école aux garçons nuirait à leur réussite »  

La sous-scolarisation des hommes n’intéresse pas le pouvoir

Boris Cyrulnik : l’école valorise la docilité des filles et dévalorise la hardiesse des garçons

Étude de 2018 (n=2064) : pas d’effet de menace du stéréotype sur résultats en maths des filles

La menace stéréotypée n’expliquerait pas la différence de résultats entre les sexes en mathématiques (suite)

Femmes et mathématiques, un désamour tenace

Paradoxe confirmé : l’égalité juridique des sexes renforce les stéréotypes sexuels (chasser le naturel, il revient au galop ?) 

Le mythe d’Ada Lovelace, « première programmeuse »

Stéréotypes à l’école : au nom de l’égalité des filles, on veut les empêcher de choisir ce qu’elles veulent 

vendredi 19 décembre 2025

Licenciement du correspondant de longue date du Devoir à Paris : Christian Rioux s'explique

Lettre de Christian Rioux (ci-contre) où il explique son congédiement du Devoir :  

Vous êtes nombreux à vouloir connaître le détail de mon congédiement, car il s’agit bien d’un congédiement.

Vous vous doutez que depuis le changement de direction, je n’étais pas dans les grâces de la nouvelle équipe. Cela s’est rapidement manifesté par de petits signes qui ne trompaient pas.

Des papiers qui normalement faisaient la une se retrouvaient dans le fond du journal, mes grandes entrevues n’intéressaient plus la rédaction (« Toi et tes intellectuels français ! », dixit la rédactrice en chef Marie-Andrée Chouinard). [Très mal, les intellectuels…]

Il y a trois ou quatre ans, pour la première fois, on me refuse de couvrir les élections britanniques et allemandes comme je l’avais pourtant fait sans discontinuer depuis les années 1990. C’est à cette époque que la rédactrice en chef a décidé de resserrer son contrôle sur les chroniqueurs.

On m’a par exemple refusé une chronique sur le changement de nom des Dix petits nègres d’Agatha Christie. C’était un mois exactement avant que ce débat n’éclate au Québec avec la suspension de Verushka Lieutenant-Duval à l’Université d’Ottawa.

Il y a deux ans, ce contrôle s’est encore resserré virant en une sorte de guérilla permanente. Il me fallait dorénavant justifier chaque mot. Impossible d’évoquer un « baiser volé » dans un texte sous peine de se voir accusé de justifier les agressions sexuelles.

Impossible de rappeler que dans de nombreux pensionnats autochtones, les religieuses enseignaient les langues autochtones sans devoir tout justifier.

Le Devoir se montre alors plus sensible aux petits groupes de militants qui me harcèlent sur les réseaux sociaux qu’à soutenir son journaliste. Ce harcèlement me vaudra trois poursuites devant le Conseil de presse en un peu plus d’un an (que j’ai toutes gagnées) alors que je n’en avais jamais eu une seule depuis que je suis journaliste.

Lors de la dernière, alors qu’on m’accuse d’entretenir des préjugés (racistes), Le Devoir a refusé de me soutenir en appel et j’ai donc dû me défendre seul contrairement à la tradition qui veut qu’un journal défende toujours son journaliste. J’ai heureusement gagné.

C’est le même genre de censure qui explique le départ en catastrophe de Normand Baillargeon à qui on avait demandé de réécrire de manière plus « politiquement correcte » une de ses chroniques sur la théorie du genre et les trans.

Ce harcèlement s’est accentué avec la mise en place d’un groupe de « fact checking » qui est aussi en partie un comité de censure destiné à remettre les chroniqueurs dans la droite ligne. Comme par hasard, sous prétexte d’éthique, ce « fact checking » s’exerce minutieusement sur tous les textes qui concernent l’islam, l’immigration ou le genre, mais à peu près pas sur ceux qui concernent la politique française, la culture ou l’Union européenne.



Depuis un an, je suis convaincu qu’on n’attendait qu’une chose, que je claque la porte moi aussi. Et on a tout fait pour. À commencer par m’interdire de couvrir les dernières législatives françaises.

Pour l’anniversaire de l’attentat du Bataclan, on a commandé dans mon dos un article à un pigiste sans m’en informer. Il y a un mois, je décroche une entrevue exceptionnelle avec l’ex-otage israélien Eli Sharabi qui a passé 18 mois dans les tunnels du Hamas, on me la refuse ! Elle ne cadrait pas dans la politique pro-Hamas du journal.

À quelques reprises, on s’est même permis de faire des corrections majeures dans ma chronique sans m’en avertir, y introduisant même parfois des erreurs.

Last but not least, depuis trente ans, tel que convenu avec l’ancien directeur Bernard Descôteaux, ma rémunération avait toujours suivi grosso modo celle des journalistes du Devoir. À chaque nouvelle convention, on me versait donc une rétro comme à mes collègues. Cette année, on a supprimé unilatéralement ces versements sans la moindre explication.

Je réalise aujourd’hui que l’annonce de la décision de me congédier n’attendait probablement que la reconduction de Brian Myles à la direction du journal pour cinq ans et la fin de la campagne de financement qui vient de se clore.

Une semaine avant Noël, c’est aussi pas mal pour étouffer l’affaire.

On me l’a donc annoncée mardi en prétextant mes « mauvais rapports avec les correcteurs ». Comme si un journaliste était en plus tenu d’avoir de bons rapports avec ses censeurs !

Lors de cette rencontre, on m’a proposé d’acheter mon silence en échange de deux mois de rémunération et de la signature d’un contrat dans lequel je m’engagerais à ne rien dire sur le Devoir. Moi qui n’ai jamais signé le moindre contrat avec Le Devoir en trente ans, tellement la confiance entre nous était forte ! 


Voir aussi

 

Natalité : taxe sur les préservatifs et contraceptifs en Chine

La Chine impose une taxe à la vente de 13 % sur les préservatifs et contraceptifs à partir de janvier 2026, finissant une exonération en vigueur depuis 1993, pour contrer le déclin démographique avec un taux de natalité en chute de 50 % depuis 2000.

Ce segment de l'émission "Le Monde à la Carte" sur LCI analyse les causes du faible taux de fécondité chinois (1,09 enfant par femme en 2024) et les mesures incitatives du gouvernement, comme des subventions pour naissances multiples.

Une mère se plaint du coût lié à l'éducation des enfants, son enfant serait en CM2 (10-11 ans) et elle a « dû » lui payer un tuteur particulier d'anglais.

Des experts doutent de l'efficacité de cette taxe, soulignant que les facteurs socio-économiques (coût de la vie, urbanisation) pèsent plus que l'accès à la contraception, selon des études de l'ONU sur les dynamiques démographiques.

 

Voir aussi 

Corée du Sud — les garderies en anglais sont du gaspillage et néfastes au développement de votre enfant

L'intérêt pour l'anglais diminue en Chine

Démographie — Les jeunes Chinois se tournent vers les agent conversationnels virtuels

En manque de bébés, la Chine annonce de nouvelles aides aux jeunes parents

Les économies avancées d’Asie ont désormais des indices de fécondité inférieurs à ceux du Japon

Le système éducatif de l'Inde est-il à l'origine des problèmes du sous-continent ? (système souvent anglophone comparaison avec la Chine)

Corée — « la concurrence intense, particulièrement dans l'éducation » une des causes de la sous-fécondité, selon le président

Corée du Sud : la surchauffe éducative, l'implosion démographique