lundi 12 juin 2017

Décrypter les médias - Il faut schroumpfer

Extrait de l’ouvrage d’Ingrid Riocreux sur la langue des média. Voir notre billet Cours de rhétorique et de décryptage des médias à l’école. Ingrid Riocreux est agrégée de lettres modernes et docteur de l’Université Paris-Sorbonne. Elle est actuellement chercheuse associée à l’Université Paris IV.

Obligation de schtroumpfer

On peut penser ici à ce grand moment de télévision inquisitoriale que fut l’interview de Marine Le Pen par Bruce Toussaint dans la matinale d’iTélé le 12 janvier 2015.

« Êtes-vous Charlie ? » demande le journaliste à la présidente du FN, reprenant le mot d’ordre de la grande manifestation de la veille. Agacée, la présidente du FN répond que dans l’hypothèse où cela revient à lui demander si elle défend la liberté d’expression, la réponse est évidemment oui ; mais que cette réponse est négative, en revanche, si on lui demande ainsi d’adhérer à la ligne éditoriale de Charlie Hebdo. Toutefois, ce discours ne plaît pas à Toussaint qui réitère sa question. Il veut entendre un bien clair et bien scandaleux « Je ne suis pas Charlie ».

Le fameux « Je suis Charlie » est la formule la plus vide ou, au choix, la plus ambiguë qui soit ; elle a permis de faire défiler côte à côte des gens pour qui elle n’avait pas le même sens en donnant l’illusion de l’unité.

Pour les uns, elle signifiait, « à bas l’islam (ou telle forme de l’islam) », pour d’autres « à bas la République impuissante et veule », pour d’autres encore, « à bas les religions ». C’était un slogan-schtroumpf : « Schtroumpfons tous· ensemble ! » — « oui, schtroumpfons ! ». Sauf que le verbe schtroumpfer n’a pas le même sens pour tous les Schtroumpfs en présence. Donc personne ne sait ce que signifie « être Charlie » ; mais il est ignominieux de ne pas être Charlie.



Quelles que soient ses motivations, celui qui n’est pas Charlie tombe sous le coup d’une condamnation a priori. Il ne veut pas schtroumpfer avec les autres.

Si Marine Le Pen concède qu’elle n’est pas Charlie, inutile pour elle de soigner sa justification. Son propos sera réduit au titre « Marine Lepen affirme : “Je ne suis pas Charlie » » qui défilera toute la journée dans le bandeau au bas de l’écran.

Nous sommes encore sur iTélé le 16 juillet 2015 à 22 h 20. Romain Desarbres interroge Guillaume Larrivé sur la politique migratoire de l’Union européenne et lui demande ce qu’il pense du mur que la Hongrie veut faire construire à sa frontière. Réponse de l’invité : « C’est une initiative de la Hongrie ». Romain Desarbres : « Initiative... regrettable ? » Le journaliste est gentil : il va jusqu’à suggérer les bonnes réponses à ses propres questions. On rêve tous d’un pareil jury du concours. Face à cette attitude, les hommes politiques ont trois options :
  • jouer la provocation en affirmant que non, ils ne sont pas opposés à cette initiative ;
  • courber l’échine et affirmer que, bien entendu, il s’agit là d’un mur de la honte et que tout le monde doit le condamner avec la plus grande fermeté selon la formule consacrée ;
  • ne pas exprimer de point de vue.

Guillaume Larrivé choisit la troisième possibilité : « Je ne veux pas commenter les décisions d’un pays étranger ». Sa réponse est claire et le Journaliste [avec une majuscule, l’archétype du journaliste] devrait donc passer à la question suivante.

Mais, après la suggestion de l’adjectif « regrettable », Romain Desarbres entend bien accomplir au mieux sa mission inquisitoriale (il ne s’agirait pas d’encourir un blâme du CSA [organe de surveillance de l’audiovisuel], qui veille) : « Vous ne voulez pas condamner ce mur 7 » L’invité doit saisir la perche qui lui est tendue une dernière, fois, ou confirmer qu’il a consciemment et obstinément refusé de la saisir. Par calcul ou par conviction, Guillaume Larrivé ne condamnera pas le mur. Encore un qui ne veut pas schtroumpfer.

Dans un ouvrage paru en 2011 et intitulé Le Petit Livre bleu, Antoine Buéno montrait que la société des schtroumpfs constitue un « archétype d’utopie totalitaire ». Comme un journaliste lui faisait remarquer que les petits hommes bleus n’ont pas l’air opprimés ni malheureux, il répondait qu’« on peut vivre pas trop mal dans une société non démocratique ». Une société non démocratique où l’on ne vit pas trop mal, c’est peut-être une bonne description de la nôtre.




Description de l’ouvrage d’Antoine Buéno, Le Petit Livre bleu


Les Schtroumpfs peuvent être étudiés sous une infinité d’angles : culturel, esthétique, marketing, économique, juridique, historique, sociologique, psychologique, psychanalytique. Pédagogique également : ils s’adressent en priorité à un public d’enfants. Une telle approche explique certains traits saillants du monde des Schtroumpfs, comme l’absence de sexualité. Le village des Schtroumpfs peut apparaître comme la métaphore d’une classe d’école. 

Mais allons plus loin dans l’analyse : Les petits lutins de Peyo se ressemblent tous : bonnet blanc, collant blanc, corps bleu, petite schtroumpf bleue, excepté le grand Schtroumpf, ils vivent en collectivité et travaillent tous à une cause commune : réparer le village après le passage d’un méchant, bâtir un pont sur la rivière Schtroumpf... l’initiative privée est rarement récompensée, elle est même la plupart du temps réprimée, ils prennent leur repas tous ensemble dans une salle commune, ils ont un chef unique, ils sortent très rarement des limites de leur petit pays... Cela ne vous évoque rien ? Une dictature politique par exemple ? 

Antoine Bueno, professeur à l’IEP de Paris, nous propose une étude intéressante autant que divertissante émaillée d’exemples divers pris dans l’œuvre de Peyo. Son raisonnement étayé en étonnera plus d’un, et livrera aussi toutes les réponses aux questions fondamentales que pose la série, comme la taille réelle des Schtroumpfs. A l’issue de la lecture, nous espérons qu’il vous aura convaincu d’une chose : Le monde des Schtroumpfs semble bien un archétype d’utopie totalitaire. Alors, cela change-t-il pour autant le regard que nous portons dessus ? En aime-t-on moins les petits lutins de Peyo ? Sans doute pas. Faut-il s’en inquiéter ? C’est toute la question...


Roger Scruton sur le progrès, le progressisme, le conservatisme et le populisme


Extrait d’un entretien avec Roger Scruton publié dans Le Figaro, philosophe anglais né le 27 février 1944 au Royaume-Uni, il est l’auteur de plus de trente livres. Depuis 1992, il occupe des postes de professeur invité à Boston University, à l’American Enterprise Institute de Washington D.C., à l’Université de St Andrews, et à l’Université d’Oxford où il est membre du Blackfriars Hall. En 1982, il cofonde la Salisbury Review, revue politique conservatrice qu’il dirige pendant 18 ans.

LE FIGARO. — Emmanuel Macron estime que le nouveau clivage est entre « conservateurs » et « progressistes ». Ce clivage vous paraît-il plus pertinent que celui entre droite et gauche ?

Roger SCRUTON. — Le problème de la politique, c’est qu’elle est souvent binaire. Le progrès contre le regret, l’avenir contre le passé, les ouverts contre les fermés : ce sont souvent ceux qui définissent les oppositions qui veulent s’en sortir gagnants. Ce sont des clichés. Moi, je suis pour le progrès dans la science, la tradition dans les arts, la continuité dans la morale et pour ne rien faire d’autre que le nécessaire en politique. En situation de paix et de relative opulence, je crois que la politique doit rester à sa place. Pour moi, c’est cela le conservatisme. Quant au progrès, c’est un slogan. Il fut utilisé par les jacobins, les fascistes et les communistes qui se voyaient l’instrument de l’avenir. L’avenir est une excuse pour quantité de crimes. C’est une idole qui exige qu’on lui sacrifie les hommes du présent. Le passé n’est pas une excuse pour les crimes du présent. Il est ce qui est achevé, il ne demande aucun sacrifice. Le passé est beaucoup plus inoffensif que l’avenir. Le progrès justifie tout, là où la Tradition ne demande aucune justification. D’un point de vue rationnel, l’idéalisation du futur est extrêmement dangereuse.

LE FIGARO. — On accuse souvent le conservateur d’être renfrogné, replié sur lui-même, triste et nostalgique. Peut-on être un conservateur joyeux ?

Roger SCRUTON. — Absolument. Pour moi, le conservatisme, c’est la philosophie de l’amour ! L’amour de ce qui existe, de ce que nous possédons et avons hérité. Lorsqu’on aime vraiment, on accepte les imperfections de l’objet aimé. Cette acceptation de la vie ordinaire qui est au fondement du conservatisme peut être joyeuse. Regardez Chesterton, c’est l’exemple type du bon vivant conservateur : son œuvre est pleine d’un rire tendre pour l’humanité et sa stupidité. J’ai passé ma vie, en tant qu’intellectuel, à fréquenter des gens de gauche, car j’y étais obligé. Ce sont les gens les plus tristes du monde ! Ils se détestent les uns les autres, ils ont des ennemis partout, refusent le dialogue et sont animés par le ressentiment. Qu’y a-t-il de joyeux dans le marxisme groupusculaire ? Quelle joie y a-t-il dans les écrits de Lénine ? Un peu chez Marx, mais sous la forme du sarcasme…

LE FIGARO. — Il semble que la joie soit le propre du conservatisme britannique. En France, l’antimodernité a quelque chose de douloureux et de tragique…

Roger SCRUTON. — Il est très compliqué d’aborder le conservatisme français : il est comme enterré dans la littérature et dans l’art, mais pas explicite. Dans Voyage au bout de la nuit, de Céline, les sentiments de base sont conservateurs, mais l’action est entièrement sombre et négative. Idem chez Balzac, où la peinture de l’ordre social est conservatrice, mais là aussi sinistre. Je crois qu’il y a là une tristesse créée par la Révolution, qui n’est jamais partie. Comme un deuil d’avoir perdu la bataille, une nostalgie. [Note du carnet : nous pensons qu’il y a de cela en effet, le culte de Révolution par la République alors que celle-ci fut sanguinaire, cruelle et mesquine le tout au nom du progrès. On se souvient du mot célèbre de Talleyrand : « Celui qui n’a pas connu la vie avant 1789, n’a pas connu la douceur de vivre. » Le prince de Bénévent savait de quoi il parlait, né en 1754, il survit à la Révolution, connaît l’Empire, la Restauration et la Monarchie de Juillet, une longue vie de 84 années.]

LE FIGARO. — Oui, d’ailleurs le conservatisme a tellement mauvaise presse qu’aucun politique n’ose s’en réclamer. Est-ce la même chose au Royaume-Uni ?

Roger SCRUTON. — Au Royaume-Uni, seuls 10 % des universitaires votent pour le Parti conservateur et ils étaient quasiment tous contre le Brexit. Ils appartiennent tous à la couche cosmopolite de la société et se proclament contre la vie bourgeoise. Depuis John Stuart Mill, qui disait « les conservateurs forment le parti stupide », ils identifient le conservatisme à l’arriération et à la bêtise. Pour nous, conservateurs, c’est ce genre de remarque qui est stupide. D’ailleurs, en général, le conservateur ne peut dissocier la politique d’une certaine forme de stupidité.

LE FIGARO. — Pourquoi cette honte à se dire conservateur ?

Roger SCRUTON. — Parce que le conservatisme a du mal à se justifier. C’est ce que Burke a dit sur le préjugé ou Pascal sur les raisons du cœur : il y a des raisons que la rationalité libérale ignore, qui sont des raisons enterrées dans les pratiques humaines. Des traditions qui sont le fruit d’interactions sociales. Il est très facile de justifier les idées libérales : elles ne proposent que de libérer l’homme, d’aller de l’avant, de combattre l’injustice. On peut trouver des tas de bonnes raisons d’être de gauche.

Mais la vraie raison, la raison profonde de la société, échappe à ce genre de raisonnement. Prenons la question du mariage. Si l’on s’interroge sur la raison derrière le mariage traditionnel entre un homme et une femme pour la vie, il est très difficile de trouver une raison. Comme il est très embêtant de donner des raisons objectives d’une opposition au mariage entre homosexuels. Pourquoi n’auraient-ils pas le droit ?

La raison profonde derrière l’idée du mariage traditionnelle n’était jamais connue des gens qui l’ont pratiquée. Idem pour l’inceste. C’était un tabou dont les gens ignoraient la raison, cachée dans les profondeurs de la nature humaine. Le mariage n’est pas un contrat d’exclusivité entre individus pour le plaisir sexuel, mais un vœu entre deux personnes pour transcender le contrat, mettre l’accord de côté et se dévouer entièrement à quelque chose qui n’existe pas encore, une descendance. Ce n’est pas un contrat de jouissance, mais une renonciation.

La rationalité libérale n’admet que l’explicite, là où le conservateur met sa foi dans l’implicite. Peut-on encore faire valoir des raisons implicites dans un monde libéral ? La tradition existe, mais elle ne reçoit pas de crédibilité politique. Pourtant, il est impossible de fonder une politique uniquement sur la raison. Sinon, c’est 1789 ou 1917. Il faut à un moment respecter ce que les gens sont, leur passé. Sinon, on les torture. Aujourd’hui, les bonnes consciences de gauche torturent les pauvres gens, les accusant d’être racistes et xénophobes parce qu’ils veulent être chez eux. Ce mépris pour la nature humaine a coûté aux travaillistes le pouvoir et aux cosmopolites, le Brexit.

LE FIGARO. — Une expression très à la mode est celle de « populisme », mot infamant destiné à discréditer toute critique de la mondialisation libérale. Le conservatisme est-il une forme de populisme ?

Roger SCRUTON. — Le populisme est un mot utilisé par la gauche pour désigner le peuple quand il ne l’écoute pas. Quand le peuple prend une autre direction que celle tracée pour lui par les intellectuels de gauche, ils en tirent la conclusion qu’il a été manipulé par des démagogues.

LE FIGARO. — Mais les démagogues existent. Il y a dans le populisme un « antiélitisme » qui semble incompatible avec la pensée conservatrice…

Roger SCRUTON. — Il y a en effet une vraie tentation populiste qui est de dire : le peuple a toujours raison contre les intellectuels. Mais dans la vie, parfois les intellectuels ont raison et parfois le peuple a tort. La foule a toujours tort. Qu’est-ce que la politique ? La tentative de séparer le peuple de la foule, pour que le peuple soit une voix organisée autour d’une idée nationale. Je crois que le populisme n’est rien d’autre que l’exploitation des sentiments conservateurs de la foule. Trump et Le Pen n’ont rien de conservateur, mais ils prennent les aspirations conservatrices des peuples sans les transformer en projet. Nous, conservateurs, ne devons pas être démagogues. Mais nous savons que les sentiments du peuple comptent, en particulier ceux qui ne sont pas explicités et raisonnés, mais qui procèdent de l’expérience concrète de membres d’un corps constitué, des communautés locales, de la société, d’une vie qui exige des sacrifices.

LE FIGARO. — Benjamin Disraeli avait théorisé le torysme « one nation » et plaidé pour une responsabilité des élites envers les masses. Est-ce là le rôle du conservatisme ?

Roger SCRUTON. — Ce que Disraeli et son mouvement ont voulu faire, c’était utiliser la politique et la culture pour imposer des limites à la spéculation économique. Il était contre les grands dirigeants d’usine, les exploiteurs. Il voulait leur rappeler l’unité sociale profonde du pays qu’ils étaient en train de détruire en créant deux nations, celle des pauvres et celle des riches.

Avec la mondialisation, nous sommes revenus à cette situation de deux sociétés : l’une cosmopolite, qui profite des bienfaits du transfrontiérisme, et l’autre de la vie ordinaire, qui fait tourner le pays. C’est même pire : au XIXe siècle, la bourgeoisie profitait des pauvres, mais de pauvres auxquels elle était liée, qu’elle croisait sur le palier ou à l’église. Aujourd’hui, la classe libérale n’a plus rien en commun avec ceux qu’elle exploite : elle ne les voit pas.

Ce que voulait Disraeli, c’est l’unité de la nation, pas seulement autour du droit de propriété, mais aussi autour du devoir des propriétaires, de ceux qui réussissent, envers les plus défavorisés, à la manière d’une famille. Voilà la grande tâche de la droite : c’est de réconcilier profondément ces deux classes. On ne doit pas se contenter de verser des injures sur l’élite libérale ou d’entretenir à coups de subventions les défavorisés. Il faut ouvrir une conversation.

LE FIGARO. — De nombreux penseurs comme Christopher Lasch ou Jean-Claude Michéa ont montré une incompatibilité fondamentale entre libéralisme et conservatisme. Qu’en pensez-vous ?

Roger SCRUTON. — C’est une question fondamentale : comment contrôler le marché pour qu’il ne vienne pas détruire ce à quoi nous sommes attachés ? Il faut reconnaître que le marché est nécessaire : on n’a jamais trouvé d’autre moyen de coordonner la vie économique d’une grande société. Cela a été prouvé théoriquement par l’école autrichienne et pratiquement par l’URSS.

La circulation de l’information qu’exigent les échanges économiques ne fonctionne qu’à travers le marché. Mais il y a des limites, des choses qu’on ne peut pas marchandiser, des profits excessifs qu’on ne peut pas tolérer. Comment renforcer ces limites ? Dans le passé, il était reconnu que certaines choses ne pouvaient pas être achetées : l’amour, la maternité, l’honneur, la famille, tout ce qui relève des relations humaines intimes. On dit que la prostitution est le plus vieux métier du monde : mais son interdiction est bien aussi ancienne ; en tout cas, si elle était tolérée, elle était aussi marginalisée.

LE FIGARO. — Face à la montée du péril djihadiste, le conservatisme doit-il désormais « conserver » ce qu’il a combattu, à savoir l’héritage hédoniste et libertaire de Mai 68 ?

Roger SCRUTON. — Je déteste la presse satirique et la musique pop. Mes enfants aiment la musique pop. Mais pour les islamistes, ce n’est pas une faute de goût, mais un crime. Ils n’attaquent pas nos salles de concert au nom de Beethoven, mais au nom d’Allah, parce qu’ils détestent la musique en soi. Ils se sentent offensés par la vue des gens qui s’amusent, qui acceptent le monde. Leur religion, dans sa forme extrême, est un rejet du monde. Je valorise davantage une civilisation qui permet au mauvais goût d’exister. Il y a une hiérarchie de valeurs, et la liberté est au-dessus de la beauté.

LE FIGARO. — Mais personne n’a envie de mourir pour le libéralisme…
 
Roger SCRUTON. — C’est vrai. Mais on meurt rarement pour un « isme ». La seule chose que le communisme a créée, ce sont des martyrs pour un « isme ». En général, on meurt pour la liberté. Mais pas la liberté comme abstraction, la liberté de la patrie, de la presse, de la pensée. L’expérience concrète d’une communauté dont il convient de défendre l’existence. C’est le sentiment de base de la décence commune que nous avions oublié : celui de mourir pour ce à quoi nous sommes attachés.

La maternelle à 4 ans n’a pas atteint ses objectifs, Québec en crée 100 classes de plus

On se rappellera qu'il y deux mois sortait une première étude sur la qualité éducative de la maternelle quatre ans, depuis son déploiement en 2013, démontre qu’elle n’a pas atteint ses objectifs. Ceci s’expliquerait par un manque de qualité, selon la psychologue et professeure Christa Japel au Département d’éducation et formation spécialisées de l’UQAM, qui a piloté l’étude. La conclusion de son étude est sans équivoque : l’initiative a raté sa cible, puisqu’elle ne réussit pas à favoriser la préparation à l’école des enfants issus de milieux défavorisés.

Une nouvelle qui ne surprenait pas les lecteurs de ce carnet au vu des études précédentes qui tendent à montrer que l’éducation formelle très précoce a — en général — peu d’effets à long terme. Les gains observés en maternelle s'atténuant au bout d'une année d'école. Voir Maternelle publique et gratuite : sans effet sur les résultats au primaire, « Le système de garderie universel en Suède forme des enfants moins instruits » et Les CPE ont échoué sur le plan pédagogique... comportemental et démographique. Ceci dit dans certains cas avec des enfants très défavorisés et des programmes de très bonnes qualités, on peut obtenir de bons résultats. Mais cela ne s’applique pas à un grand nombre d’enfants, il faut vraiment que les enfants viennent de milieux dysfonctionnels ou qui ne permettraient pas à l’enfant d’apprendre la langue d’enseignement avant qu’il ne rentre à l’école.

Eh bien ! malgré cet échec, le ministre de l'Éducation, Sébastien Proulx, annonce l'ouverture de 100 classes de maternelle 4 ans à temps plein dès la prochaine rentrée scolaire. Ces classes de maternelle qui accueillent des enfants dès l’âge de 4 ans sont créées en complément des services de préparation à la maternelle déjà offerts aux tout-petits dans les services de garde éducatifs. Ces classes de prématernelle visent particulièrement les enfants des milieux défavorisés qui ne fréquentent pas des services de garde éducatifs et qui ne bénéficient pas de cette période d’adaptation à la vie scolaire.

Les élections approcheraient-elles ? S'agit-il de cocher la case « Nous avons créé beaucoup de classes de maternelles à 4 ans » ? Même si l'argent des contribuables n'est pas nécessairement dépensé au mieux dans ce domaine ?


France — Des professionnels dénoncent les risques de l’éducation à la sexualité trop précoce

Le pédopsychiatre Maurice Berger alerte l’opinion sur « l’éducation à la sexualité » précoce chez les enfants. Le Dr Berger est ancien chef de service en psychiatrie de l’enfant au CHU de Saint-Étienne, ex-professeur associé de psychologie à l’Université Lyon 2, et psychanalyste. Il déclare d’emblée être athée et en faveur de l’avortement, il le précise, car les croyants sont d’office disqualifiés ou qualifiés d’extrémistes par les « tolérants » qui pensent pour nous et savent ce qui est bon pour les enfants d'autrui.



Nous, professionnels de la psychologie et de la psychiatrie, du psychotraumatisme et de l’enfance, dénonçons les risques de « l’éducation sexuelle » et des « droits sexuels » mettant en danger les enfants, sous couvert d’idéaux de « prévention » et d’« égalité ».

De fait, les plans gouvernementaux français sur « l’éducation à la sexualité », prenant source dans des textes internationaux portés par l’OMS, la planification familiale et l’ONU, dont nous critiquons la dangerosité pour les enfants, sont en cours d’application dès la maternelle en France.

Ce site Internet a été développé pour alerter, informer, donner un lieu d’expression et d’échange aux professionnels et être facteur de ressources documentaires. Nous revendiquons, au regard des risques inhérents à de tels programmes, que soit entendu et pris en compte l’avis des professionnels spécialisés dans la psychologie, tout particulièrement de l’enfant et du psychotraumatisme.

Une pétition intitulée « Stop à la dangereuse imposture des “droits sexuels” et de “l’éducation sexuelle” » a été créée.


Pétition


Novlangue — Exit les immigrants illégaux, fini les sans-papiers, désormais c'est migrant au statut précaire

De Radio-Canada cette réserve inépuisable de correctivisme politique et de novlangue, cet extrait d’un reportage d’avril 2017 :

« Nous sommes chez Médecins du Monde, une clinique qui prodigue certains soins de santé gratuits à des migrants au statut précaire. »

« Braulio est un demandeur d’asile dont la demande a été refusée en 2009. » Il vit dans la clandestinité depuis huit ans, c’est un immigrant illégal donc.

« Après avoir épuisé leurs recours, ceux dont la demande d’asile est refusée reçoivent un avis de déportation et doivent ensuite se présenter à l’aéroport. »

« À long terme, ces personnes espèrent pouvoir régulariser leur statut [en restant suffisamment longtemps illégalement]. En attendant, l’accès aux soins de santé est pénible et il est difficile de voir la lumière au bout du tunnel. »

On comprend bien la portée de cet euphémisme : leur statut est précaire à cause d’une administration tatillonne ou injuste, il suffira d’attendre avec ou sans campagne médiatique jouant sur l’émotionnel (regardez comme cette fillette est charmante et on veut la renvoyer avec ses parents !) pour que cette précarité se transforme en des papiers finalement délivrés par une administration obtuse.

Ce terme n’est pas tout neuf, le ministère de l’Éducation du Québec (sous brève gouvernance du PQ, mais cela ne change habituellement rien aux tendances lourdes au sein de ce ministère) l’avait déjà utilisé en 2013 : « Québec facilite l’admission à l’école des enfants de migrants à statut précaire » encore décrits par la périphrase dont « leurs parents [sont dans l’incapacité] de fournir des documents officiels nécessaires à l’obtention d’un code permanent ».

Le projet de loi 144, présenté le 9 juin 2017 à l’Assemblée nationale, élargit « la portée du droit à la gratuité des services éducatifs dans le but d’assurer l’accessibilité à l’école pour les enfants à statut d’immigration précaire ».

Voir aussi

Novlangue : « implanter des mesures d’appui au vivre ensemble »

« Avoir droit » ou « être obligé » ?

Parlez-vous le français socialiste ?

Sélection novlangue de la semaine (en construction)

Sélection novlangue de la semaine (2)


Novlangue au Monopole : le mot athée désormais tabou

Ne dites plus... parlez pédagogiste...

Lexique du Plateau

Novlangue — OQLF prescrit « action positive » plutôt que « discrimination positive »