mardi 20 septembre 2016

L’immigration et le Québec, Denise Bombardier

Denise Bombardier rappelle quelques réalités trop souvent tues par les idéologues.

Dans le film culte Le déclin de l’empire américain, le réalisateur Denys Arcand cite Arnold Toynbee : « La loi du nombre est incontournable. »

Nos ancêtres l’avaient compris. Sous l’impulsion du clergé, la natalité était une valeur collective. Tant qu’ils faisaient des enfants, les Québécois avaient un avenir. C’était la revanche des berceaux sur la conquête anglaise.

Plus tard, la pilule récompensait les mères de chez nous. Finis les enfants à la douzaine. [Il y avait statistiquement peu de familles avec 12 enfants en réalité : le nombre d’enfants par femme se situait en moyenne entre trois et quatre enfants dans les années 30, mais la descendance de ces familles ayant été nombreuse elle a sans doute laissé un souvenir plus important.] Les utérus québécois ont peu à peu rapetissé. Jusqu’à faire plonger les statistiques de natalité.

Depuis 2011, la fécondité a continué de baisser (malgré l’immigration) pour atteindre 1,60 en 2015, il faut 2,1 enfants/femme pour renouveler les générations.

L’immigration n’est pas notre planche de salut, au Québec. Car l’immigration, avec la loi 101, même affaiblie, n’assurera pas la pérennité de ceux qu’on appelait les Canadiens français. Si les immigrants se refusent à apprendre le français et que le gouvernement québécois laisse à chacun le droit de vivre à sa manière sans tenir compte des contraintes de l’intégration, nous disparaîtrons.


Domination de l’anglais et fausses équivalences

Le Canada anglais ne craint rien, car ses immigrants apprennent l’anglais sans protester. Sa vision du vivre ensemble envoie les nationalistes québécois dans les cordes. Car pour eux, la langue ne garantit pas seule la protection de l’identité québécoise. Des revendications religieu­ses sont aussi un obstacle à cette valeur moderne qu’est la laïcité pour nous. Ce qui pose, au-delà de la langue, un défi culturel.

Le Québec ne peut donc pas ouvrir ses frontières aux immigrants actuels s’il n’a pas les moyens matériels de les franciser et la volonté politique de faire triompher une conception de la laïcité distincte de celle du Canada anglais. Nous serons inévitablement accusés d’être xénophobes, voire islamophobes, car notre vision des rapports sociaux s’éloigne de celle du Cana­da anglais.

Faut-il répéter que cette impasse dans laquelle nous sommes, nous, Québécois francophones, est le résultat de l’échec de deux référendums ? Et que le « jamais deux sans trois » s’applique ici.

Voir aussi

La fécondité continue de chuter au Québec

(Le nombre de naissances, la ligne bleue, n'est pas une mesure très pertinente pour calculer le renouvellement des générations quand la population croît, principalement à cause de l'immigration. On a l'impression qu'on essaie de trouver une mesure consolatrice à la baisse de la fécondité malgré des investissements massifs dans les mesures de retour des femmes au travail.)


Québec — Plus bas nombre de naissances depuis 8 ans, record de décès [mars 2016]

Les CPE ont échoué sur le plan pédagogique... comportemental et démographique

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour!
J'enseigne au cégep et je parle de ces chiffres session après session (depuis 10 ans), et les étudiants ne sont jamais au courant de ce problème majeur. :(
Votre graphique est très beau, mais il s'arrête en 2012. Seriez-vous capables de le faire continuer jusqu'en 2015 (afin que l'on voit la descente jusqu'à 1,6)? J'aime distribuer à mes étudiants les chiffres les plus récents.

Merci à vous de parler de ce dont on ne parle pas assez.

Anonyme a dit…

Madame Bombardier devrait aller plus loin dans le raisonnement. Elle devrait dire que le multiculturalisme, inventé par Pierre-Eliott Trudeau, qui haïssait le désir d’indépendance des Canadiens français, a été depuis le début une arme de guerre du pouvoir anglais pour casser les reins au mouvement indépendantiste québécois. C’était une arme d’un cynisme dégueulasse: détruire biologiquement un peuple, on disait même une "race" autrefois au Canada et on avait raison, la race canadienne française, en la noyant dans la diversité ethnique, pour la priver de son droit à l’auto-détermination. C’était de ça qu’il s’agissait. Et ça a marché en plus. Aujourd’hui si la population québécoise était restée homogène, française et catholique, comme elle l'était encore dans les années 60, au lieu d’être devenue bigarrée de chinois, arabe, musulman, boudhiste, etc., il existerait une nouvelle nation independante appelée Québec. Ça c’est un fait et Mme Bombardier, qui se dit québécoise nationaliste, devrait le dire clairement. Pourquoi ne le dit-elle pas?