mercredi 24 septembre 2008

Le cours d'ECR : la foi est acceptable tant et aussi longtemps que les gens ne la prennent pas trop au sérieux...

Extraits d'un article de Douglas Farrow dans le n° XXI d'Égards. Les intertitres sont de nous.

«

[...]

 [L]e nouveau cours d’éthique et culture religieuse devrait constituer un signal d’alarme. Non que je sois contre le fait de transmettre aux enfants, disons à des enfants plus âgés, un enseignement concernant d’autres religions que le christianisme. En tant que professeur dans une faculté de sciences religieuses, on s’attendra difficilement à ce que je m’y oppose. Je suis contre le nouveau cours parce qu’il est imposé aux écoles privées et confessionnelles ainsi qu’aux jeunes enfants. Je me dresse contre ce cours parce qu’il vise à sevrer les enfants des religions traditionnelles et de leurs engagements moraux pour leur inculquer une idéologie hostile à de tels engagements, l’idéologie dite du « pluralisme normatif ».

Principe de Sheerman

Le but est de leur enseigner le principe de Sheerman selon lequel la foi est acceptable tant et aussi longtemps que les gens ne la prennent pas trop au sérieux. Ce qui est visé, en d’autres mots, c’est d’arracher les enfants de leur communauté de socialisation de base — leurs familles et leurs lieux de culte — pour les unir à l’État, avec l’État et sous l’État, un État qui se considère plus important que les familles et leurs Églises.

Léon XIII : fuir les écoles où toutes les croyances sont traitées comme des égales

Dans un article publié dans le numéro 19 d’Égards, je rappelais aux catholiques canadiens certaines choses que le Pape Léon XIII avait dites dans son encyclique Affari Vos (1897) sur la question scolaire au Manitoba.

Léon XIII souligne d’abord que l’Église catholique « se tint au berceau de l’État canadien », et en particulier au berceau de son système d’éducation, ce qui, normalement, devrait avoir gagné à l’Église une écoute plus respectueuse de l’État sur cette question alors que nous avons à nouveau à y faire face ; et, réciproquement, il nous faut rappeler à l’Église qu’elle a encore un devoir de responsabilité en cette matière.

Deuxièmement, que « nos enfants ne peuvent fréquenter des écoles qui, soit ignorent, soit ont l’intention arrêtée de combattre la religion catholique, ou des écoles dans lesquelles ses enseignements sont méprisés et ses principes fondamentaux rejetés. » C’est précisément ce que le nouveau cours force nos écoles à faire, explicitement ou implicitement. « Il est nécessaire d’éviter à tout prix, comme étant les plus dangereuses, les écoles dans lesquelles toutes les croyances sont bienvenues et traitées comme des égales, comme si, en ce qui concerne Dieu et les choses divines, il n’était d’aucune importance que ce qui est cru par quelqu’un soit correct ou non et qu’il s’engage du côté de la vérité ou de l’erreur. » Mais au mois de septembre 2008, nos écoles feront précisément cela. Et si elles ne font pas cela, elles feront quelque chose d’encore plus dangereux : la mise en place du « pluralisme normatif » qui est un critère irréligieux pour juger la vérité et l’erreur.

Pour un chrétien : point d'éducation morale digne de ce nom sans religion

Troisièmement, que « sans religion, point d’éducation morale digne de ce nom, ni vraiment efficace, étant donné que la nature même et la force de tout devoir dérivent de ces devoirs spéciaux qui relient l’homme à Dieu, à Dieu qui commande, qui défend et qui détermine ce qui est bien et mal. » Comme le note Léon XIII : « désirer que les esprits soient gagnés au bien tout en les laissant sans religion est aussi insensé que d’inviter à la vertu après en avoir ruiné la base. »

[...]

Mascarade qui servit à priver les parents d'un choix

Rappelons-nous la mascarade au cours de laquelle nous avons perdu des droits parentaux et familiaux fondamentaux par les lois 109, 118, et 95. Stéphane Dion, à titre de ministre des Affaires intergouvernementales, déposa en 1997 une résolution permettant d’amender la Constitution de telle façon que la loi abolissant le système scolaire confessionnel puisse devenir effective. Stéphane Dion précisa à ce moment que « le droit à une instruction religieuse est toujours garanti sous la Section 41 de la Charte des Droits et Libertés qui possède un statut quasi constitutionnel selon la Cour Suprême du Canada ». Mais cette garantie s’avéra sans valeur. Quand la loi 95 fut présentée en 2005, la Charte québécoise elle-même fut amendée à l’insu du public, sans débat significatif et sans même qu’il y ait enregistrement d’un vote.

La version originale de la section 41 accordait aux parents « un droit permettant d’exiger dans les établissements scolaires publics que leurs enfants reçoivent une éducation religieuse ou morale en conformité avec leurs convictions. » La nouvelle version concède seulement « un droit de donner à leurs enfants une éducation religieuse et morale conforme à leurs convictions et respectueuse des droits et des intérêts des enfants. » Tant pis pour la quasi-constitutionnalité évoquée par Stéphane Dion ! Et qui donc, je me le demande, déterminera ce qui est ou non dans les meilleurs intérêts des enfants. C’est une brèche dans les droits parentaux suffisamment grande pour y faire passer une cavalerie.
[...]

Cela a des conséquences sur la question de l’éducation. Un des droits particuliers auquel nous avons toujours été attachés, qui était, jusqu’à récemment, reconnu dans notre Constitution, est le droit d’éduquer nos enfants comme nous le souhaitons, spécialement en ce qui regarde la religion. Mais ce droit (toujours valable bien sûr) nous a maintenant été enlevé. L’État a décidé pour nous comment éduquer nos enfants, même en ce qui concerne la religion. Et pourquoi ne le devrait-il pas ? Après tout, n’est-ce pas le même État qui, la même année, fit passer la loi 95 et élimina gaiement, sous la juridiction fédérale, l’institution elle-même [le mariage traditionnel] qui protégeait l’instance familiale naturelle et ses droits — l’institution qui disait clairement à qui les enfants appartiennent.

L'État s'occupera de l'éducation de tous les enfants comme bon lui semblera

Au Québec, le gouvernement fait pression pour aller de l’avant avec un plan de formation de la prochaine génération concocté par des idéologues professionnels qui ne se sont pas souciés de ce que les familles du Québec pensaient. L’État s’occupera du développement de tous les enfants comme bon lui semblera. Il formera tous les enfants d’après une philosophie individualiste et pluraliste qui supprime et efface efficacement la conception catholique du développement spirituel.

La foi catholique n'est ni individualiste, ni pluraliste, ni relativiste

Pensez-vous que cette prétention est exagérée ? Je peux seulement vous dire, si c’est ce que vous pensez, que soit vous n’avez pas lu soigneusement les documents exposant la politique derrière le nouveau curriculum, soit vous ne comprenez pas la foi catholique elle-même. La foi catholique — étant trinitaire, incarnée et ecclésiale — n’est précisément ni individualiste, ni pluraliste, ni relativiste. Elle s’intéresse à la personne plutôt qu’à l’individu. Elle cherche la communion, non l’homogénéité imposée par l’État (notez le mot « normatif » dans l’expression « pluralisme normatif » [ce qui doit devenir la norme]). La foi catholique désire la vérité et, par conséquent, reconnaît que l’erreur existe. Elle ne se réfugie pas dans le subjectivisme, comme le fait le curriculum, un subjectivisme qui voile à peine le cynisme d’une intelligentsia et d’un service public composés majoritairement de catholiques qui ont perdu la foi.

Les « experts » se penchent sur les familles

Aujourd’hui des « experts » des deux côtés de l’Atlantique commencent à questionner le droit des parents à éduquer leurs enfants conformément à leurs propres croyances religieuses, même dans l’intimité de leurs propres maisons. Notre ministère de l’Éducation n’est pas allé aussi loin, du moins pas encore. Mais il est déterminé à avoir préséance sur les parents. Nos enfants seront soumis au pilonnage de la supériorité de l’individualisme sur le communautarisme« experts »; ce qui fera de l’individualisme le nouveau communautarisme. Quel est le but ou quel est le résultat visé par cette catéchèse individualiste, sinon de séparer les enfants des communautés — familiales et religieuses — qui relativisent l’État et ses institutions« experts »? Le but n’est-il pas de déplacer vers l’État leur allégeance« experts »?

Vers des Églises conformes à l'idéologie de l'État ?

D’autres personnalités éminentes (et cela ne devrait pas nous surprendre) ont commencé à questionner le droit des organisations religieuses comme telles, et pas seulement leurs écoles privées, à agir librement comme organismes de charité si leurs enseignements et leurs œuvres ne sont pas conformes à l’idéologie actuelle de l’État. Que les croyances et les pratiques de ces mêmes organisations religieuses aient présidé à la fondation de ce même État et de son progrès, et qu’elles soient à la racine de son histoire et de son organisation ne semble guère compter. Le nouveau plan doit l’emporter ; il doit à tout prix configurer le visage de la nouvelle génération et la résistance doit être neutralisée sinon éradiquée. La cible principale ? Ce n’est pas, comme l’imaginent certains, l’islam radical, qui importe chez nous des idées et des pratiques antagonistes à notre ordre social et à son histoire, mais le christianisme, et plus spécialement le catholicisme.

Je pense que nous devons comprendre l’enjeu plus large dans lequel le combat sur le nouveau cours s’inscrit. Il est désormais impossible de ne pas prendre parti dans cette bataille. »

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1 commentaire:

Durandal a dit…

Tolérance séculière 101 :

Croire, c'est correct, à condition de ne pas vraiment croire.