mardi 30 décembre 2014

Manuel d'histoire (2) — Chrétiens tuent les hérétiques, musulmans apportent culture raffinée, pacifique et prospère en Espagne

Nous poursuivons ici l'analyse du manuel d'histoire pour le premier cycle du secondaire (I)  édité par une maison d'édition réputée (La Chenelière). (Lire le premier billet)

Dans ce billet, quelques commentaires sur la page 205 de ce manuel approuvé par le Bureau d'approbation du matériel didactique du Monopole de l'Éducation (MELS). Rappelons qu'au Québec, contrairement à la France, les manuels (mais pas les cahiers d'activités) doivent être approuvés par le MELS. En France, le dernier gouvernement à faire de la sorte était celui de Vichy de sinistre mémoire.

I. Chrétiens tuent hérétiques, musulmans raffinés, pacifiques

La page 205 présente sur le haut le sort réservé aux hérétiques dans la chrétienté médiévale (pas enviable), le bas parle des Arabes musulmans dans la péninsule ibérique, héritiers d'une culture raffinée, pacifique et prospère qui seront pourchassés par l'Inquisition.

On notera cette opposition flagrante : méchants aux Nord (surtout l'Inquisition), gentils, pacifiques, raffinés au Sud avant l'arrivée des méchants (surtout l'Inquisition) et des ingrats.

II. Les hérétiques chez les chrétiens, mais quid des hérétiques chez les musulmans ?

D'Hier à demain, manuel A, 1ercycle du secondaire (12-13 ans), édition Chenelière, p.  205.
Il s'agit ici de l'exécution d'amauriciens, des panthéistes, en 1210.

Le meurtre d'un dominicain, Pierre de Castelnau, en 1208 pousse en effet le pape Innocent III à lancer la croisade contre les Albigeois. Mais il est tendancieux de laisser entendre que le Roi de France participa à cette guerre. Au contraire, Philippe II Auguste  ne voudra jamais participer personnellement à cette croisade. En revanche, la conquête du Midi méditerranéen (Avignon, Beaucaire, Nîmes, etc.) par Louis VIII fut une affaire strictement royale, ni le Pape, ni les seigneurs croisés n'y prirent part. (Voir Alix Ducret, dans Mythes et polémiques de l'histoire, p. 54.)

Le manuel n'explique en rien le contexte politique de l'époque, tout semble uniquement une affaire de religion pour ce manuel. C'est paradoxal dans une époque matérialiste comme la nôtre.

Au début du treizième siècle, le roi d'Aragon Pierre II et son beau-frère, le comte de Toulouse, soutiennent la cause des Albigeois tandis que les rois chrétiens de Navarre épousent à chaque génération l'une des filles des émirs qui règnent sur la moitié sud de l'Espagne. Une alliance devient envisageable entre les Albigeois et les Maures d'Espagne contre le catholicisme. Les princes d'Europe du Nord veulent à tout prix éviter cette nouvelle menace après l'expulsion des Sarrasins de Sicile, un siècle plus tôt par les Normands. Ce sont du reste des seigneurs normands et du nord du domaine français qui vont diriger la croisade contre les Albigeois. Plusieurs historiens voient d'ailleurs dans cette guerre contre les Albigeois une manière d'éliminer des rivaux et d'étendre les terres de ces seigneurs septentrionaux et de faire rentrer ces territoires dans le domaine capétien. Dès que la noblesse albigeoise sera vaincue, l'hérésie disparaîtra. (Voir Alix Ducret, dans Mythes et polémiques de l'histoire, pp. 57-58.)

Il est en outre étonnant que la modernité ait des élans de sympathie envers les cathares qui dénonçaient la sexualité et la procréation comme incarnations du Mal... En effet, la procréation donnant lieu à une vie nouvelle avec un nouveau corps, elle est condamnée par la doctrine cathare, pour qui tout ce qui est corporel est mauvais. Dans le christianisme orthodoxe, par contre, ce qui est demandé au croyant c'est la chasteté laquelle consiste à ne pas avoir de relations sexuelles immorales.

Et les hérétiques musulmans ?

Le manuel passe sous silence ce que les musulmans faisaient de leurs hérétiques... Quel sort réservaient-ils aux panthéistes comme les amauriciens ou aux manichéens comme les cathares ?

Exécution du soufi Mansoûr el-Halloûj (922)
sur l'ordre du calife abbasside Al-Mouqtadir
Bien que l'absence d'une église unique musulmane, de synodes ou de conciles qui établissent la doctrine précise de la foi ne permette pas d'établir une équivalence exacte avec la notion d'hérésie dans le christianisme, il ne faut cependant pas croire que les musulmans étaient plus tendres envers ceux qu'ils considéraient comme de dangereux déviants ou des mécréants.

Dès la fin du VIIIe siècle, les musulmans ont commencé à traiter les manichéens, les zoroastriens, les apostats, les païens, les athées et tous ceux qui critiquaient ouvertement l'islam et l'unicité de Dieu comme des hérétiques, ce crime était punissable par la mort. (J. Bowker, entrée Zindiq dans Concise Oxford Dictionary of World Religions, 1997) À la fin du VIIIe siècle, les califes abbassides ont commencé à persécuter et à exterminer en grand nombre les hérétiques qui remettaient en cause leur autorité religieuse, les mettant parfois à mort sur ​​simple soupçon d'hérésie. (C. Glassé, dans The new encyclopedia of Islam, p. 491). La persécution commença à grande échelle sous le règne d'el-Mahdî,  elle fut poursuivie par ses successeurs, el-Hâdî et, un peu moins, par le célèbre Hâroûn er-Rachîd. Ensuite, le calife abbasside El-Ma'Moûn institua la Mihna, surnommée l'inquisition musulmane, qui devait faire imposer la doctrine d'État de la création du Coran, alors qu'aujourd'hui l'orthodoxie sunnite considère le Coran comme incréé. Bien des docteurs de la loi se soumirent, mais quelques-uns résistèrent : ils  furent arrêtés, flagellés ou emprisonnés. L'inquisition mutazilites ou mihna continua avec le calife Al-Wâlhiq (842-847).

Le mutazilisme disparaît définitivement entre le XIe et le XIIIe siècle. Il a été interdit, ses livres brûlés, et l'on ne connaît sa doctrine que par les textes des théologiens qui l'avaient attaqué.

Il est vrai que la chasse aux hérétiques devint par la suite relativement rare en islam (notons qu'on exagère aussi l'ampleur de l'Inquisition en Europe), mais elle existait bien. Elle touchera après l'inquisition des mutazilites principalement, mais pas uniquement, les groupes aux idées religieuses dissidentes qui se révoltaient contre l'ordre établi, religieux et politique puisqu'il n'y a pas traditionnellement de distinction en islam entre les deux (voir B. Lewis, p. 62).

Quelques exemples d'hérétiques persécutés en islam :  Al-Ja'd Ibn Dirham (mutilé et crucifié en 752),  Bachâr ibn Bourd (714 – 784),  Ibn al-Rawandî (827 – 911),  soufi Mansoûr al-Hallûj (858 – 922) qui s'était dit en union avec Dieu,  Lissan-Edine Ibn al-Khatib (v. 1313 – 1374), etc.

Ce silence au sujet du traitement des hérétiques et des rebelles en islam par le manuel n'est peut-être pas sans arrière-pensées politiques et philosophiques :
« Ce n’était pas la première fois qu’un islam mythique et idéalisé fournissait les verges destinées à châtier les défauts de l’Occident. Au XVIIIe siècle, les philosophes des Lumières avaient loué l’islam pour son absence de dogmes et de mystères, l’absence de prêtres et d’inquisiteurs, ou autres persécuteurs, lui reconnaissant ainsi de réelles qualités, mais les exagérant pour en faire un outil polémique contre les Églises et le clergé chrétien. Au début du XIXe siècle, les juifs d’Europe occidentale, émancipés récemment, mais encore imparfaitement, en appelèrent à un âge d’or de légende en Espagne musulmane, âge de tolérance et d’acceptation complète dans une harmonieuse symbiose. » 
(Bernard Lewis, Race et esclavage au Proche-Orient, p. 393)

III. Islam raffiné, pacifique, prospère et à nouveau l'Inquisition des chrétiens

La page 205 se termine par un encadré sur les Arabes musulmans en Espagne que nous reproduisons ci-dessous :

D'Hier à demain, manuel A, 1ercycle du secondaire (12-13 ans), édition Chenelière, p.  205.

Ce petit encadré vaut son pesant d'or... Nous analyserons ci-dessous ce faisceau de faussetés, d'approximations et d'insinuations.

« Les Arabes s'installent... »

Couronne
wisigothe
Les Arabes sont en fait minoritaires dans les troupes qui envahissent la péninsule ibérique : il s'agirait plutôt principalement de soldats berbères. Au passage, les « Arabes » ne s'installent pas en Hispanie, ils l'envahissent militairement en profitant des conflits internes aux chrétiens. Des villes comme Tarragone (en 718) seront complètement détruites par les immigrants envahisseurs.

«... Ils apportent avec eux une culture raffinée, pacifique et prospère... »

Ah, la mission civilisatrice des « Arabes » ! (Note au réviseur linguistique des éditions Chenelière : « apporter avec soi » est un pléonasme.)

En quoi cette culture militaire qui a conquis une grande partie du pourtour méditerranéen par les armes est-elle pacifique ?

Pour ce qui est du prospère, ce n'est pas tant la culture qui l'est que les territoires conquis par les musulmans, notamment la Syrie et  l'Égypte.

Le manuel affirme, sans aucune preuve, que cette culture est raffinée. En quoi était-elle plus raffinée en 711 que celle de l'Hispanie wisigothique ? Tout à coup, dans notre monde relativiste (il n'y a plus d'arts  primitifs, mais des arts premiers qui ont leur musée), il y aurait des cultures raffinées et d'autres moins ?  Comment, en 711, la culture arabe (si ce n'est pas la culture berbère) — sortie depuis peu des déserts arabes — peut-elle prétendre dépasser en raffinement la civilisation wisigothique ?

Mais on connaît mal (et ce manuel n'en dira rien) la culture wisigothe. L'orfèvrerie wisigothe connut un grand essor, notamment dans l'atelier royal d'où sortirent croix et couronnes votives qui, comme à Byzance, étaient suspendues au-dessus des autels (voir ci-contre). Les sculpteurs abandonnèrent la représentation de la figure humaine au profit de motifs géométriques, végétaux et animaux où se mêlaient les influences romaine, byzantine et germanique.

Si l'orfèvrerie wisigothe est raffinée, son architecture l'est aussi. L'arc outrepassé si caractéristique de l'art « musulman » fut utilisé par les Wisigoths bien avant l'arrivée en Hispanie des musulmans. L'arc outrepassé sera repris et amplifié dans l'architecture omeyyade de l'émirat de Cordoue (à partir de 759) où il acquit une forme plus fermée que l'arc wisigothique.



Arcs outrepassés de Sainte-Marie de Melque,
début de la construction au VIIe siècle
(Autres exemples)



Arc outrepassé de la mosquée de Cordoue
début de la construction 786
Dans les grands centres urbains de l'Hispanie wisigothe comme Mérida, Tolède, Hispalis (Séville), Cordoue, Lisbonne, Carthagène, Barcelone ou Saragosse, des édifices religieux s'étaient substitués à des bâtiments plus anciens. De grands évêques, qui étaient également de grands auteurs, firent de leurs sièges épiscopaux des centres intellectuels en les dotant de bibliothèques et d'écoles. Le plus célèbre d'entre eux fut sans doute Isidore de Séville (vers 570-636), dont les œuvres furent lues et commentées pendant tout le Moyen Âge. « C'est dans le royaume wisigothique que la culture classique jette en Occident son dernier éclat. Le rôle politique joué par l'épiscopat, la diffusion de l'éducation et de l'écriture, l'importance de la société urbaine assurent une longue survie à l'héritage de la civilisation romaine » de résumer le professeur Michel Zimmermann.

L'Espagne wisigothe accueille les intellectuels d'Afrique du Nord chassés par les Vandales, les Byzantins puis les Musulmans. Le pays se spécialisa dans les compilations et les florilèges, tout en produisant des œuvres originales en histoire, en droit et en théologie. Ses écoles, qui transmettaient la culture classique, formèrent aussi bien des clercs et des laïcs, et de nombreux actes de vente conservés sur ardoise témoignent de la diffusion de l'écriture dans les communautés rurales.

Les Espagnols du VIIe siècle continuèrent à vivre dans des villas de type romain, décorées de fresques, au centre de vastes domaines agricoles ou artisanaux

En droit (Liber Iudiciorum terminé en 654), les femmes espagnoles pouvaient hériter de terres et les gérer de manière indépendante de leur mari ou de leur parenté mâle. Elles pouvaient tester (disposer de leurs biens par testament) si elles n'avaient pas d'héritiers, elles pouvaient ester (en justice) dès l'âge de 14 ans et décider qui marier dès l'âge de 20 ans (voir Suzanne Fonay Wemple).

En quoi la culture wisigothe était-elle donc moins raffinée que celles de Bédouins et de Berbères qui envahirent l'Espagne en 711 ? Pour Ph. Conrad, « il semble extrêmement difficile d'accueillir, sans réserve, la thèse selon laquelle la civilisation de l'Espagne musulmane serait un "miracle arabe". Comment des Bédouins, originaires d'un désert aride, vivant jusque-là sous la tente, auraient-ils créé, ex nihilo, une civilisation essentiellement urbaine ? » (Voir Alix Ducret, dans Mythes et polémiques de l'histoire, p. 70.)

Michel Zimmermann résume l'éclat de l'Espagne wisigothe : « La synthèse entre la vigueur de l'héritage romain et le dynamisme du peuple wisigoth fit du VIIe siècle un moment de grande prospérité culturelle ».

«... Ils vivent en bon voisinage avec les chrétiens et les juifs... »

Euh.. Si l'on considère bon voisinage le fait

  • que les chrétiens et les juifs devaient s'acquitter d'une capitation mensuelle occasion à des humiliations (soufflet du percepteur musulman), 
  • qu'ils se font expulser du centre des villes, de leurs églises (comme leur église de Cordoue transformée en mosquée), 
  • que leur responsabilité collective peut être décrétée pour la défaillance d'un de leur membre, 
  • qu'ils doivent se garder de toute provocation envers la religion musulmane, 
  • que la simple vue d'une croix ou d'un porc peut être interprétée comme une injure faite au prophète Mahomet. 

Les périodes troublées que connaît assez fréquemment l'Espagne musulmane sont également le prétexte des pires excès. Les chrétiens de Séville en font la cruelle expérience en 891, à l'occasion d'une révolte de la garnison yéménite contre le gouverneur local. (Voir p. 45 de Mozárabes y mozarabías de Manuel Rincón Álvarez, éditions universitaires de Salamanque, 2003).

De manière générale, les musulmans andalous, attachés comme ceux du Maghreb, au rite malékite défini au VIIIe siècle par le docteur médinois Malek Ibn Anas limitent les contacts avec les « infidèles ». Un faquih (juriste) musulman recommande de ne leur adresser la parole qu'à distance, en évitant de frôler leurs vêtements. Des distinctions doivent permettre de distinguer les croyants des dhimmis. Ceux-ci se voient interdire le port d'arme. Ils doivent l'hospitalité à tout voyageur qui la réclame. Ils ne peuvent monter à cheval et doivent se contenter de mulets ou d'ânes. Le fouet et la prison sont les peines prévues pour toute infraction à ces interdictions. Les infidèles doivent s'effacer quand ils croisent un croyant et se lever s'ils sont assis au passage d'un musulman. Les maisons des dhimmis doivent être moins hautes que celles des musulmans, la construction des églises est limitée, etc. (Voir Mythes et polémiques de l'histoire, pp. 68-69)

Voir aussi

Histoire — « On a trop souvent mythifié el-Andalous »

Les chrétiens et les juifs dans l'Occident musulman

«... Mais au XIe siècle les forces chrétiennes décident de chasser les Arabes musulmans... »

Vivant en « bon voisinage », ces « forces chrétiennes » sont bien ingrates...

On note que ce ne serait que les « forces chrétiennes » pas les chrétiens (parce qu'eux vivaient en bon voisinage ?) qui décident de chasser le pacifique musulman. Pourquoi « les Arabes musulmans » ?  Il s'agit pour les chrétiens de se libérer du joug des musulmans et de l'islam, pas d'un peuple puisqu'on cherchera à convertir les musulmans ! Les musulmans sont des Arabes, des Berbères, des juifs ou des chrétiens convertis.

Enfin, les chrétiens n'ont jamais eu de cesse de chasser les « forces musulmanes ». La Reconquista recommence dès 718 (ou 722 selon les sources) à partir des Asturies et des monts Cantabriques. En 795 Charlemagne établit la marche d’Espagne, un territoire gagné sur les musulmans composé par des comtés dépendants des monarques carolingiens. Parmi eux, celui qui jouera le plus grand rôle fut le comté de Barcelone.

Ce qui est vrai c'est qu'à partir du XIe siècle les royaumes chrétiens se concentrent sur les royaumes musulmans et que la Papauté met son poids dans la balance. Les chrétiens profitèrent de l'émiettement des forces musulmanes et des rivalités chroniques entre les princes musulmans pour travailler à la Reconquista. Déjà, le roi Ferdinand Ier, après avoir uni en 1037 le Léon et la Galice à la Castille, avait manifesté, par son refus d'annexer la Navarre (1054), sa volonté de concentrer ses efforts contre les musulmans. Par ses offensives heureuses, il avait réduit au rang de tributaires les rois de Séville, Badajoz, Tolède, Saragosse, et élargi ses frontières dans toutes les directions. En 1063, le pape Alexandre II décidait l'octroi d'une indulgence spéciale à quiconque irait lutter contre les musulmans d'Espagne, et les chevaliers de France vinrent en nombre se joindre à leurs pairs d'outre-mont.

La Reconquista commence dès la fin de la conquête musulmane. Le territoire en orange foncé ne fut jamais conquis par les Maures. La zone orange claire qui comprend (de gauche à droite) Porto, Bragance, Léon et Barcelone fut reconquise au cours du IXe siècle.

«... Pour atteindre leur objectif, elles font appel à l'Inquisition... »

L'Inquisition espagnole ou Tribunal du Saint-Office de l'Inquisition est une juridiction ecclésiastique instaurée en Espagne en 1478, quatorze ans avant la fin de la Reconquista qui s'achève le 2 janvier 1492 quand Ferdinand II d'Aragon et Isabelle de Castille chassent le dernier souverain musulman de la péninsule, Boabdil de Grenade. L'inquisition sert non pas à reconquérir les territoires sur les « Arabes », mais à détecter les faux convertis (juifs ou musulmans d'ailleurs). L'élite musulmane s'exile après la prise de Grenade en 1492. Les musulmans qui ne s'exilent pas sont forcés de se convertir à partir de 1502. On les nomme les morisques. Après plusieurs révoltes, les derniers morisques furent expulsés de Castille en 1609 et d'Aragon en 1610.

Notons que la tradition islamique demande à ce que les musulmans partent des pays conquis par les chrétiens :
« Les musulmans ont-ils le droit de vivre sous un gouvernement chrétien ou bien doivent-ils émigrer ? La réponse est sans équivoque : ils doivent partir, hommes, femmes et enfants, tous sans exception. Ce gouvernement est tolérant ? Leur départ n’en est que plus urgent, car le danger d’apostasie est plus grand. […] Mieux vaut la tyrannie de l’Islam que la justice des chrétiens. »
(Bernard Lewis, Juifs en terre d’Islam, p. 470)

Enfin, il faut rappeler que la déportation de masse de chrétiens (notamment au XIIe) avait fait partie des outils de « pacification » des musulmans d'Espagne. C'est ainsi qu'à la suite d'une expédition chrétienne en 1125 jusqu'à Grenade par Alphonse d'Aragon, les chrétiens demeurés en el-Andalus sont en majorité déportés en Afrique du Nord pour y être installés près de Meknès et de Salé où l'interdiction de pratiquer leur religion entraîne la disparition rapide de ces communautés. Dans l'ensemble d'el-Andalous, le nombre des chrétiens est désormais très réduit, à un moment où, dans le contexte général des croisades et des « réveils » religieux radicaux berbères, l'antagonisme entre islam et chrétienté atteint son intensité maximale.

«...nombreuses années ... la Reconquista »

Est-ce que plus de sept siècles (718 — 1492) peuvent vraiment être décrits comme de «  nombreuses années » ?

À suivre 

Nous reviendrons sur ce manuel qui est une source intarissable de clichés et stéréotypes du prêt-à-penser politiquement correct. On comprend pourquoi il a été approuvé par le « politburo » du MELS.





Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)

7 commentaires:

Urbain a dit…

Bon, je comprends les QUébécois sont héritiers de sales intolérants fanatiques mal dégrossis, les nombreux immigrants du Maghreb sont les héritiers d'une culture injustement rejeté d'Europe car elle fut si pacifique et si riche.

Nous rachetons cette intolérance en payant le BS et le chômage aux très nombreux immigrés maghrébins qui ne trouvent pas du travail à cause de notre racisme atavique.

J'ai bon ?

Ravi de la crêche a dit…

L'école québécoise n'est surtout que propagande.

La petite Zoé a dit…

Après Saint-Louis précurseur de Hitler à quelques pages de là dans le même manuel, il faut dire que les pauvres élèves québécois ne sont pas choyés.

Ecolemaison a dit…

Merci pour ce travail, le bourrage de crâne et les manipulations historiques et idéologiques des manuels scolaires et de notoriété publique, mais il est bon d'avoir de temps à autre un peu de documentation.

⚜ a dit…

On dirait que chacun cautionne les mensonges et affabulations qui ne frappent qu'autrui – comme si c'était permis à un chrétien. En pratique, c'est politiquement se faire l'auxiliaire des puissants du temps, et religieusement renier le Christ (sans risque d'être crucifié, contrairement à ce à quoi saint Pierre fut confronté avant le chant du coq).

Le véritable cadre législatif encadrant la publication de manuels scolaires en France, depuis la période radicale de la Troisième République (jusqu'en 1987) :
https://www.persee.fr/doc/hedu_0221-6280_1987_num_34_1_1492

Le jugement sur les collaborateurs, par Charles de Gaulle (Mémoires de guerre, II) :
« C’est un fait, qu'au fond du malheur, ceux des Français qui, en petit nombre, choisirent le chemin de la boue n’y renièrent pas la patrie. Témoignage rendu à la France par ceux de ses fils “qui se sont tant perdus”. Porte ouverte sur le pardon. »

Son jugement sur Vichy (« de sinistre mémoire », dicunt Gallicanadiani catholici), ibid., III :

« Bref, rénover l'économie afin qu'elle serve la collectivité avant de fournir des profits aux intérêts particuliers et, du même coup, rehausser la condition des classes laborieuses, c'est ce que souhaitait le sentiment général.
Le régime de Vichy avait essayé d'y répondre. Si, dans le domaine financier et économique, ces technocrates s'étaient conduits, malgré toutes les traverses, avec une incontestable habileté, d'autre part, les doctrines sociales de la “Révolution nationale”: organisation corporative, charte du travail, privilèges de la famille, comportaient des idées qui n'étaient pas sans attraits. Mais le fait que cette entreprise se confondait avec la capitulation ne pouvait que rejeter les masses vers une tout autre mystique. »

Vichy (« de sinistre mémoire », dicunt Gallicanadiani catholici) et l'Église catholique :

Histoire des congrégations chrétiennes en France — Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_des_congrégations_chrétiennes_en_France
Après que le régime de Vichy a autorisé le retour des congrégations enseignantes et autorisé le subventionnement de l'école privée, l'ordonnance du 9 août 1944 du général de Gaulle proroge les mesures de Vichy.

laïcité sous Vichy 1940 et 1944 sous l heure d'ete - ERICK
labrousse-erick.over-blog.com/2019/10/laicite-sous-vichy-1940-et-1944-sous-l-heure-d-ete.html
Ce discours antilaïque (qui va inspirer le slogan Travail, Famille, Patrie de Vichy) est ensuite repris et martelé dans les cérémonies religieuses qui attirent à nouveau les foules : en effet messes, processions, pardons, cultes des saints mobilisent partout la masse des fidèles. On enregistre alors un mouvement de retour à la foi et une intense ferveur populaire dans tous les milieux.

http://valentin.beziau-ump77.over-blog.com/2015/09/vichy-et-l-eglise-catholique.html

⚜ a dit…

Extrait du rapport du révolutionnaire protestant et franc-maçon Jean Bon, dit « Saint-André », rédigé pour le ministre de la marine, à la demande du Premier Consul Napoléon Bonaparte, à Mayence, le 27 juillet 1802 (« 8 thermidor an X de la république ») :

« (…) Si la guerre éclatait avec Alger, on n'aurait pas à craindre que ce peuple vînt avec une armée tenter une invasion sur le territoire de la république ; mais, suivant l'usage de ces barbares, leurs corsaires se répandraient sur les points de passage de notre commerce du Levant et des colonies pour intercepter nos navires marchands ; ils viendraient sur nos côtes et celles d'Italie, de Gênes, d'Espagne et de Corse pour troubler notre cabotage ; ils chercheraient à s'insinuer dans nos anses, nos baies ouvertes, nos criques ; à descendre sur les points indéfendus de nos côtes, pour y enlever des bestiaux, des denrées, saisir les hommes, les femmes, les enfants, et les emmener en esclavage. (…) Une seule famille, un seul individu emmené esclave en Alger, est un grand malheur ; c'est un de nos concitoyens privé de ses droits les plus précieux.

(…)

L'armée du dey [un Turc, régent d'Alger] se divise en armée que j'appellerai permanente, et en armée de circonstance.

L'armée permanente n'est que de 10 000 à 12 000 hommes. Elle est tout entière composée de bandits turcs, ramassés dans les boues de l'Anatolie, de la Caramanie et quelques îles de l'Archipel, surtout des îles de Candie et de Rhodes. Cette armée est le plus ferme appui de la puissance du dey. Elle s'embarque par pelotons sur les corsaires, elle passe le reste de son temps à ravager les champs et les jardins qui environnent la ville, à maltraiter les juifs par passe-temps, à déshonorer les femmes et les filles de ces malheureux, etc., etc. Jamais on n'obtient justice contre elle, et il serait même très dangereux de l'obtenir. Si nos relations avec la Porte [Istamboul] étaient rétablies de manière à pouvoir compter sur quelque condescendance de la part des sultans, on pourrait, dans le cas d'une rupture avec le dey, demander que le recrutement fût suspendu. Ce serait porter un coup très sensible à la Régence. J'ai été témoin moi-même de l'inquiétude qu'occasionnait le retard de l'arrivée des recrues. Le dey ne compte et ne peut guère compter que sur les Turcs, parce qu'ils ont seuls un intérêt de la même nature que le sien : et quoiqu'il emploie au besoin le reste de la population à la guerre, une armée n'a de force que quand elle est conduite, animée et contenue par des Turcs. C'est l'effet de la terreur qu'ils inspirent et de l'idée qu'on s'est formée de leur supériorité.

Ce que j'ai appelé l'armée de cironstance est celle que le dey rassemble au besoin, soit pour la défense du pays, soit pour attaquer ses voisins. Elle se compose des corps de troupes qui appartiennent aux beys [gouverneurs provinciaux]. Ces troupes sont entièrement maures [maghrébines], et comme il n'est pas d'indigène qui ne soit obligé de marcher, elles forment une multitude assez mal armée et bien plus mal vêtue. Il est assez difficile d'évaluer au juste la force de l'armée que le dey mettrait sur pied s'il était menacé d'une invasion de la part des Français ; mais on peut assurer qu'il rassemblerait beaucoup de monde. À la vérité, les Maures n'ont point de persévérance, et cette armée si nombreuse se fondrait bientôt par la désertion, surtout si le dey éprouvait un échec dès les premiers pas.

⚜ a dit…

(Suite de l'extrait du rapport de Jean Bon dit « Saint-André »)
« QUESTION [du ministre de la marine] : Quelle est la population de la Régence ? Quelle est celle d'Alger ?

RÉPONSE : Je n'ai pas de données assez sûres pour dire quelle est la population de tout le pays soumis à la dénomination du dey. On sait en général que ce beau pays, à peu près inculte, n'a pas une population qui réponde à sa fertilité naturelle. Quant à la population particulière de la ville, elle est évaluée à 60 000 âmes, et je ne crois pas cette évaluation exagérée.
[Note, 2022 : par comparaison, Paris avait 800 000 habitants ; Marseille et Lyon en avaient à peine plus de 100 000 ; la population des futurs départements d'Algérie avant la colonisation est estimée à un peu moins que deux millions.]

La population d'Alger, et en général celle de tout le pays, se divise en trois classes ou races d'hommes bien distinctes. La première est celle des Turcs venus du Levant qui, comme je l'ai dit, composent essentiellement l'armée du dey. Ils sont à la Barbarie [le Maghreb] ce que les chevaliers de Saint-Jean étaient à Malte, les souverains du pays, à qui tout obéit. Eux seuls parviennent aux grandes places de la Régence, à l'exclusion, non seulement des indigènes, mais encore des enfants de leurs devanciers nés dans le pays.

Ceux-ci forment la seconde classe de la population, et on la désigne par le nom de Couloughlis. Nés d'un Turc et d'une femme maure, ils ne peuvent être admis dans la milice turque à la seconde génération, et sont bornés à la culture de leurs propriétés, du commerce et des arts. Comme cette classe est en général dans l'aisance, elle est aussi la plus honnête. Elle sent la dégradation où elle est réduite, et elle aime peu un gouvernement sous lequel elle ne peut prétendre à rien.

La troisième classe de la population, et la plus nombreuse sans contredit, est celle des naturels du pays, qu'on appelle en général Cabyles. Elle se subdivise en plusieurs peuplades ou nations diverses, qu'on ne pourrait bien connaître et bien distinguer qu'en voyageant dans les parties du territoire qu'ils habitent, ce qui est impossible dans l'état actuel. Ces Cabylès sont les serfs, les ilotes d'Alger. Pauvres et opprimés, ils cultivent la terre pour leurs oppresseurs ; ils les servent dans les emplois les plus pénibles et les plus bas, ils tremblent devant eux et les détestent. Ils aspirent même à secouer le joug sous lequel ils gémissent, et il en est parmi eux d'assez braves pour ne pas s'y soumettre. Dans certains quartiers des montagnes pas très éloignées d'Alger, les Turcs n'oseraient paraître sans les plus grandes précautions, et il arrive souvent qu'ils y trouvent la mort.

On ne devrait pourtant pas conclure de là qu'ils fussent disposés à se réunir à nous. Leur fanatisme est aussi absurde que leur ignorance est grossière. Ils ont en horreur le nom de chrétien, nos mœurs et nos usages ; il prendraient les armes en faveur du dey, parce qu'ils croiraient combattre pour leur religion.

Je n'ai pas parlé des juifs, quoiqu'ils soient passablement nombreux dans la ville d'Alger, et plus ou moins répandus dans les provinces. Ils n'ont aucune existence politique et ne peuvent être bons à rien. (…) »