dimanche 24 mars 2013

Nombre de « grands lecteurs » en baisse

« Le nombre des vrais lecteurs, ceux qui prennent la lecture au sérieux, se réduit. C’est comme la calotte glaciaire », a lancé le romancier américain Philip Roth, dans une interview au Monde reprise dans nos pages vendredi dernier. Inquiétant, le phénomène n’a cependant rien d’inéluctable.

Le constat que le romancier fait est confirmé dans certaines études sur les pratiques culturelles au Québec. En 2004, un rapport mettait en relief la « diminution des grands lecteurs au profit des petits lecteurs. En outre, cette progression de la lecture de livres n’est pas le fait des jeunes générations, mais des plus âgées ».



Cet étudiant en médecine qui affirmait la nécessité d'une aristocratie des lecteurs et regrettait le livre de poche doit être content


Philip Roth a déjà soutenu qu’il y a même là un risque d’extinction pour le roman. Le patient tueur, on le connaît : l’ère numérique, qui a bien des qualités, mais qui propage le virus du « déficit d’attention ». C’est une ère de dispersion, de papillonnage, de messages surgissants, d’alertes, etc. Autant dire un complot contre les longues heures de concentration qu’exigent le roman. L’essai aussi, en passant, nécessite cette ascèse. Le véritable essai. Non pas la juxtaposition de textes proposée le plus souvent par les universitaires de cette même époque distrayante. Tout le monde est atteint par le mal ; même – ou plutôt surtout – les professionnels de la pensée. Comme ceux de l’information : nous !

(Il faut lire à ce sujet l’intéressante entrevue de Québec Science avec Nicholas Carr, « Internet menace l’intelligence ».)

Les optimistes diront qu’une autre culture, nouvelle, émerge, « non linéaire », multitâche, qui vaut bien l’ancienne. Tout n’est certainement pas perdu en effet. Le catastrophisme et l’annonce de la fin du monde sont des postures courantes parce que commodes. Il y a assurément des avantages au monde culturel en devenir.

Rien, du reste, ne nous oblige à tout relativiser. Et rien ne nous empêche de réagir pour contrer les défauts qui semblent se développer. Car rien n’est inéluctable dans l’évolution culturelle. A-t-on vraiment besoin de dire quelles richesses seraient perdues si les grands lecteurs disparaissaient de nos sociétés ? Ces « têtes bien faites » habituées à suivre de longs récits, des démonstrations complexes et exigeantes.

La suite sur Le Devoir


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