mercredi 23 juin 2010

Jugement Loyola — Pour Le Devoir et Québec solidaire, il faut une charte de la laïcité

Visiblement, on est fâché au Devoir de la décision du juge Dugré dans l'affaire Loyola c. le Monopole de l'Éducation.

Il y a de ces signes qui trahissent cet agacement : Le Devoir refuse la lettre constructive d'un des témoins experts au procès Loyola et préfère une lettre d'un instituteur qui transpire d'un ressentiment abondant, lettre par ailleurs singulièrement pauvre en faits précis et avérés. (Pour une critique de cette lettre rapidement acceptée par le Devoir, voir le billet du philosophe Jean Laberge.)

Le Devoir, un journal engagé dans l'imposition d'ECR

Il faut rappeler que ce journal qui se veut intellectuel a toujours pris fait et cause pour l'imposition du cours d'éthique et de culture religieuse (ECR) aux enfants des autres. (Il serait d'ailleurs intéressant de savoir combien d'enfants ont ces phares de l'intellect que sont les journalistes du Devoir, mais nous nous égarons.) Les colonnes du quotidien de la rue de Bleury sont largement ouvertes à deux des pères du programme ECR, à savoir le « charmant sophiste » Georges Leroux, collaborateur au Devoir, et Jean-Pierre Proulx, ancien journaliste de ce même Devoir.

Le 27 février 2008, déjà, Marie-Andrée Chouinard du Devoir avait pris la défense du cours dans un éditorial et avait qualifié l'opposition à l'imposition du cours ECR de « Vain combat ».

Après quelques mois de silence, en octobre 2008, alors que des milliers de parents protestaient dans les rues de Montréal contre l'inflexibilité du Monopole de l'Éducation, le Devoir dut publier le pensum de, une nouvelle fois, Marie-Andrée Chouinard, pour dénoncer ces parents et cela au nom de « la majorité silencieuse », ce qui est un comble pour un journal qui n'a jamais hésité à défendre les points de vue les plus minoritaires progressistes dans la société ! Tout cela alors qu'un sondage du même mois démontrait que 72 % des Québécois étaient pour la liberté de choix dans le domaine de la formation morale et religieuse...

Alors que Loyola poursuivait déjà le Monopole de l'Éducation, sans doute désireux de marginaliser et de minimaliser l'opposition au cours ECR, le Devoir n'informa jamais ses lecteurs du fait !

Mais voilà que tombe la décision du juge Dugré en faveur de plus de souplesse et de tolérance pour le collège Loyola. Le Devoir ne pouvait la passer sous silence, ni la tolérer.

Marie-Andrée Chouinard s'insurge donc contre la décision du juge Dugré dans l'édition de ce mercredi. Elle a raison de penser que les recours judiciaires pourraient s'accumuler, mais elle ne comprend pas que son journal et elle-même ont encouragé le dogmatisme du gouvernement en la matière qui a mené à cette défaite. Elle affirme d'ailleurs encore aujourd'hui que « Le gouvernement, qui n'a d'autre choix que de contester »... Entendre s'entêter et s'exposer à une longue guérilla judiciaire. Pourquoi est-ce une priorité ? Pourquoi est-ce un bon usage des deniers publics ?

On remarquera au passage la petite pique inélégante contre les parents du public qui s'opposent au cours ECR et que Mme Chouinard ne peut s'empêcher de décocher : « des parents avaient l'an dernier faiblement tenté de démontrer que le cours ECR causait un préjudice grave à leurs enfants ». Pique inélégante, car il est facile de considérer comme faible une tentative qui a échoué en première instance. De toute façon, comment le Devoir pourrait-il juger de la défense ? En se basant sur le jugement très critiquable du juge Dubois qui ignorait les quatre expertises en faveur des parents ? Rappelons que Le Devoir n'envoya aucun journaliste au procès, même lorsqu'une de ses journalistes fut convoquée pour venir témoigner, le Devoir refusa et demanda à faire une déposition par téléphone... Le Devoir fut le seul journal qui fit de sorte...

Le Devoir et Québec solidaire, même combat

Marie-Andrée Chouinard termine son article sur un appel déjà lancé par Québec solidaire et le Mouvement laïque québécois (mouvement pourtant opposé au cours ECR) : l'inscription de la « laïcité » dans une charte qui empêcherait de nouvelles défaites en justice.

Passons sur le fait que cette laïcité n'est opportunément pas définie, ce qui permet de rallier le soutien de lecteurs pressés, passons sur le fait qu'on peut défendre le point de vue selon lequel l'État en imposant le cours ECR à une institution religieuse privée avait enfreint une saine laïcité. Ce qui est frappant c'est que cette suggestion suit immédiatement la même suggestion de la part de Québec solidaire pour résoudre le même problème : la défaite du MELS devant une école confessionnelle.

Québec solidaire demande des changements à la Charte québécoise

Dans un communiqué de presse, Québec solidaire saluait la décision du gouvernement libéral d'interjeter appel à la suite du récent jugement de la Cour supérieure permettant au Loyola High School de donner le cours Éthique et culture religieuse dans une perspective catholique.

Québec solidaire contre le droit ?

Québec solidaire s'inquiète que « les éléments invoqués par le juge Dugré portent à croire que sa décision a des chances d'être maintenue par les tribunaux d'appel ». Sans doute parce qu'elle est fondée en droit...

Québec solidaire poursuit : « L'absence d'un règlement ou d'une loi permettant au ministère de l'Éducation d'imposer sa perspective laïque est à la base de ce jugement. « Imposer », le maître mot de la gauche québécoise. Selon le parti d'extrême gauche, il faut à nouveau modifier la Charte des droits et libertés de la personne du Québec afin d'y inscrire, sans équivoque, la laïcité de l'État et de ses institutions. D'une part, la Charte a déjà été modifiée pour imposer le cours ECR — cela devient de l'acharnement ! — et, d'autre part, en quoi une école privée (une corporation dans le cas de Loyola) serait-elle une institution de l'État ?

Québec solidaire pince-sans-rire dogmatique

L'inénarrable Françoise David, présidente et porte-parole de Québec solidaire, n'hésite pas à déclarer sans rire que « L'idée n'est pas de restreindre la liberté religieuse. » Alors à quoi servirait cette Charte puisque c'est la liberté religieuse qui a fait échouer les prétentions « totalitaires » du gouvernement ? Il est bien sûr évident que Le Devoir comme Québec solidaire veulent restreindre la liberté de conscience au Québec.

Toujours selon Mme David, « Par contre, l'État que nous voulons laïque n'a pas à financer l'enseignement religieux avec les deniers publics », a-t-elle précisé. Il ne le fait pas : c'est pourquoi l'État ne finance que 60 % des coûts de fonctionnement des écoles privées, il finance une partie des programmes obligatoires qu'il impose aux écoles privées.

« De plus Québec solidaire propose depuis longtemps de cesser le financement de l'enseignement privé, qu'il soit religieux ou non. » Comme si les parents qui envoient leurs enfants dans une école privée n'étaient pas des contribuables comme les autres. Enfin, pas tout à fait comme les autres : ils paient deux fois pour l'éducation de leurs enfants.

Tiens, et si l'État ne finance plus l'enseignement privé, l'État abandonnera-t-il sa prétention d'imposer son régime pédagogique aux écoles privées ? Ou tout se fera-t-il à l'avantage des seuls bureaucrates de l'État ? Comme d'habitude à sens unique ?




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1 commentaire:

Mehdi a dit…

La laicité dans la Charte ???
Je veux bien qu'on puisse inscrire le principe de la laicité dans la Charte québécoise, mais cela ne met pas du tout le Québec à l'abri d'une ou plusieurs contestations judiciaire en relation avec la Charte canadienne et la Constitution.

Si on arrive, il faudra impérativement y inscrire le principe de laicité ouverte et non fermée, proposé par cette frange ou auberge espagnole d'intellectuels et policiens opportunistes qui ont des comptes à régler avec les croyances et la Foi d'autrui.