dimanche 6 septembre 2009

Gilles Routhier : la Pâques de l'Église, les Pères de l'Église ont bien été à l'école païenne...

[mis à jour et complété]

Quelques déclarations pour mieux connaître Gilles Routhier seul théologien que le juge Dubois cite dans son jugement alors qu'il ignore deux théologiens et un philosophe qui s'opposent à l'imposition. Pourquoi ?

Parce que, selon le juge Dubois, [53] « cet expert n'est pas lié de quelque façon au programme ECR » et « son expertise est très neutre », c'est tout. On ne comprend pas le « lié » pour les quatre experts de la famille Lavallée, être opposé est-ce être lié ? Cela les exclut d'office évidemment.

Mais peut-être le juge voulait-il dire qu'il s'agit du seul expert du gouvernement qui ne soit pas lié de façon évidente à l'élaboration et à la promotion du cours ECR, car Georges Leroux a écrit un livre en faveur du cours, a participé à son élaboration, Gérard Bouchard a recommandé énergiquement le cours, Jacques Pettigrew du MELS a également participé à son élaboration.

Rappelons que « l'abbé Routhier » comme l'appelle le juge Dubois, s'est entêté pendant deux jours à prétendre à tort que la Congrégation pour l'éducation catholique n'avait rien à dire dans ce dossier, que cette congrégation s'intéressait aux séminaires, pas à l'enseignement de la religion dans les écoles publiques. Il a fallu lui faire lire publiquement l'inverse écrit en toutes lettres dans la description officielle de ladite Congrégation. Embarrassant pour un « expert » qui, bien sûr, confronté à son erreur, noya le poisson dans son style doucereux alors qu'il reculait périlleusement et à répétition de l'estrade où il se tenait.

Mais Routhier est-il vraiment neutre dans ce dossier ? Il s'est pourtant exprimé contre les cours de religion catholique dans les écoles publiques... Pour Routhier, il faut que l'Église vive sa Pâques, une école païenne ce n'est pas si grave, dit-il en substance, Saint Augustin et Tertullien y ont bien été...

Écoutez Gilles Routhier, le théologien embauché par la Procureure générale du Québec contre les parents catholiques de Drummondville, parler il y a quelques semaines, le jeudi saint, de la mort de l'Église et de l'éducation catholique à laquelle il ne faut pas s'accrocher.

Quelques extraits, les intertitres sont de nous :
Animateur : L'Église doit donc mourir à quelque chose selon vous.

Gilles Routhier : [...] Il n'y a pas de mort douce et bien sûr cela effraie. [...] Le corps ecclésial est appelé à une autre vie. [...]

Animateur : Si on regarde les agissements de Benoît XVI, on constate plutôt le contraire, on constate un raffermissement de ce qu'était l'Église traditionnellement qui cherche à se faire autour de la personne du Pape.

Gilles Routhier : Oui, et là, je ne veux pas entrer dans l'actualité chaude ou proche parce que l'on regarde les choses dans la longue durée et d'un point de vue historique, ce n'est pas en trois ans, ni même en dix, que la figure de l'Église est restructurée et transformée. Et j'allais dire, on est dans ce processus-là depuis une quarantaine d'années et on n'en est pas sorti. Cependant plutôt que de freiner des quatre fers, il doit y avoir un consentement.

Euh. L'Église, par exemple, au Québec, est habituée à être une Église qui avait un certain statut social, un certain nombre de privilèges, qui avait une position enviable. Et qu'est-ce que c'est suivre le Christ dans sa kénose[1] ? C'est consentir et pas simplement subir une défaite après l'autre au plan social, au plan du statut social, mais c'est consentir à l'abaissement. Et cela qu'est-ce que ça veut dire suivre le Christ dans sa kénose, ça veut également dire ne pas revendiquer pour soi des privilèges, ne pas revendiquer pour nous un statut comme groupe chrétien, mais de savoir que nous serons le plus près de notre Seigneur et que nous adopterons sa conduite si nous entrons dans la kénose.

Vous savez on prêche beaucoup le mystère pascal aux chrétiens qui viennent endeuillés ou qui viennent pour un baptême. Mais vous savez le mystère pascal n'est pas uniquement pour les chrétiens pris individuellement, mais aussi pour l'Église.

[...]

L'Église doit consentir à une mort

Et même dans ses institutions, l'Église doit consentir à une mort. De toute manière, il y a des choses qui vont mourir, mais l'on peut mourir simplement en résistant et en ne croyant pas que, au-delà de cette mort, il y a une vie qui nous est promise ou on peut mourir en consentant, sachant et en ayant confiance en ce Dieu qui donne la vie.

[...]

Mais l ne faut pas rêver à une Église triomphante, qui a du pouvoir ou à une Église qui a un statut social, cela est contraire à la suite du Christ. Nous sommes proches de lui, nous sommes en communion avec lui lorsque nous entrons dans la kénose.

Animateur — Si on veut identifier certains éléments, si on regarde l'Église du Québec, est-ce que cela veut dire, par exemple, accepter que les cours de religion ne seront plus jamais comme ils ont déjà été, est-ce que cela peut vouloir dire également que cela veut dire que les bâtiments, les églises ne seront plus pleins comme ils l'ont déjà été ? Est-ce que cela fait partie de la mort dont vous parlez ? C'est cela cette Pâques qui est appelée à vivre l'Église comme institution ?

Gilles Routhier — De toute manière, pour les deux exemples que vous avez donnés, les cours de religion ne seront plus jamais ce qu'ils ont été et l'Église peut vivre même si on ne connaît plus cette situation.

Les Pères de l'Église ont bien été à l'école païenne

Écoutez, avant le VIIIe siècle et que l'Église n'ait pris en charge le régime scolaire, si l'on veut, ou les institutions d'enseignement, cela n'existait pas. Écoutez, tous les grands saints qu'on magnifie, les Pères de l'Église, ont été à l'école païenne. Qu'est-ce qu'ils ont pas appris à l'école ce n'est pas la religion chrétienne, ils ont appris à lire les auteurs païens et qui avaient des cosmologies, des visions du monde et qui donnaient le sens à notre vie et à notre monde, non pas à partie des Écritures saintes, mais à partir des textes païens. Et cela a quand même créé des saints.

[...]

De vouloir s'accrocher à cela [les cours de religion comme avant], comme si le sort de l'Église était lié à cela, c'est probablement faire fausse route.
L'Église présente par ses enfants non accompagnés à l'école primaire...

Ailleurs, M. Gilles Routhier a écrit :
« À titre d'exemple, certains voudraient bien aujourd'hui que l'Église catholique puisse être encore institutionnellement présente dans les écoles publiques, mais on n'a pas encore réfléchi à ce que cela pourrait signifier d'y être présente « par ses enfants », à travers les chrétiens, et, surtout, on n'a pas prévu d'accompagner les chrétiens qui y vivent au quotidien. J'ai bien peur, au final, que l'on se soit trompé de combat ou que l'on soit en retard d'une guerre alors que des chrétiens d'autres traditions ont bien compris quelle forme pouvait prendre le témoignage rendu à l'Évangile dans une société comme la nôtre. »
(Penser l'avenir de l'Église, Fides, 2008, p. 105)
On se demande bien de quels chrétiens d'autres traditions, M. Routhier veut parler. Les évangéliques des États-Unis qui vivent dans un pays ayant un rapport totalement différent au christianisme ? Les évangéliques du Québec qui retirent leurs enfants des écoles publiques contrairement aux vœux de l'« abbé Routhier » ? Les coptes du Québec qui veulent créer leur propre école privée ? Les Arméniens et les Grecs qui ont déjà les leurs ? Ou M. Routhier veut-il parler des confessions moribondes comme les luthériens et les épiscopaliens qui ne sont en rien un exemple de réussite de transmission ? On croit rêver. D'ailleurs, même parmi les catholiques, le Père Michel Gitton devait avouer que, parmi les traditionnalistes, « la transmission de la foi aux jeunes générations y a souvent mieux réussi qu’ailleurs, malgré les trésors de pédagogie déployés dans les parcours de la catéchèse officielle. »

À la lumière de ces déclarations de M. Gilles Routhier, on comprend mieux que celui-ci ne veuille pas défendre les parents catholiques qui ne veulent pas du cours d'éthique et de culture religieuse et qui refusent ainsi, selon lui, une forme d'abaissement christique.

Ce n'est évidemment pas du tout ce que prêche l'Église catholique de Rome qui cherche, au contraire, à s'assurer autant que faire se peut que des cours de religion soient maintenus et donnés aux enfants.

Enfin, pourquoi l'abaissement des parents par la perte du droit d'éviter ce qui les choquent au niveau religieux doit-il être défendu par M. Gilles Routhier ? Il a même décrit leur attitude au tribunal de Drummondville comme « de la bouderie »... Vivre la Pâque est-ce participer à l'abaissement de l'autre ? Cette volonté à imposer la « kénose » à autrui est-elle vraiment compatible avec la charité, M. Routhier ?

[1] Kénose — abaissement, anéantissement du grec κένωσις kénōsis, littéralement « évidement », voir cénotaphe qui signifie à l'origine tombeau (-taphe) vide (céno-).

6 commentaires:

Jonathan a dit…

Je savais qu'il y avait au Québec énormément de prêtres et de théologiens qui étaient résignés face au déclin de l'Église et que d'autres, béats et naïfs, attendent encore l'abondante moisson que donnera "une Église ouverte aux réalités de notre temps et à l'esprit de Vatican II". Cependant, je n'osais croire que certains d'entre eux souhaitaient la destruction des institutions de l'Église!

Cette génération de catholiques ultra-progressistes a fait un tort considérable à l'Église du Québec.

Hein a dit…

Ce n'est pas l'Eglise qui doit mourir (l'Eglise universelle compte plus 1 milliard de catholique), mais l'Eglise du Qc qui doit renaitre car elle est deconnectee de l'Eglise universelle...

Anonyme a dit…

L'église ici, elle est déjà morte, tuée et enterrée par Fernand Dumont, Gilles Routhier et tant d'autres catholiques sincères (sic). Les quelques têtes blanches qui continuent à fréquenter les quelques églises qui ne sont pas devenues des condos sont commes des spectres qui nous rapellent vaguement un autre âge.
On est dans le silence du samedi, et on attend avec Espérance la Résurrection!

Dans le champ a dit…

Hein a dit:

"Ce n'est pas l'Eglise qui doit mourir (l'Eglise universelle compte plus 1 milliard de catholique), mais l'Eglise du Qc"

C'est exactement la ou M Routhier se leure; c'est l'Eglise du Qc qui s'auto-detruit en n'etant pas a l'unisson de l'Eglise universelle. Comme une branche decoupee de l'arbre, elle risque de se dessechee. L'Eglise ce n'est pas les batiments et les structures existantes au Qc. L'Eglise, le corps du Christ, c'est les gens qui la composent (et il y en a plus d'un milliard). Pardonnez la comparaison, mais qu'elle armee subsisterait si ses generaux la conduisait a l'abatoire devant l'ennemi. C'est une image de ce que font une partie de la classe ecclesiastique du Qc (les eveques entre autres). Au contraire, les gens qui font partie de l'Eglise aujourd'hui sont plus convaincus que jamais et non rien a voir avec ce que represente M Routhier et son "pessimisse masochisme" d'autodestruction. Les chretiens d'aujourd'hui qui sont fideles a l'enseignement du Christ et qui sont l'Eglise, voient bien au dela de la surface de ce que decrit M Routhier. Quel devin est-il pour dire que le catholicisme ne sera plus jamais ce qu'il a ete. A t-il une boule de crystal pour cela? Il devrait dire que l'Eglise au Qc est malade et doit subir une transformation, qu'elle doit se reconnecter avec le reste de l'Eglise, cela ne veut pas dire que toute L'Eglise est en train de mourir! D'ailleurs en Amerique du sud, l'Eglise est bien vigoureuse par exemple.

Anonyme a dit…

Cette idée que l'Église serait appelée à "disparaître" par fidélité à ce qu'est la foi chrétienne dans son essence, derrière son apparence mystique, est une manière habile d'éviter d'avoir à se remettre en question par rapport aux options pastorales et doctrinales passées, afin de se justifier d'accélérer encore davantage la fuite en avant dans les mêmes impasses (auto-)destructrices... Le bon abbé ne semble pas le moins du monde effleuré par le doute, alors que dans une situation de déclin telle que celle du catholicisme au Québec, la prudence et le véritable esprit de discernement devraient amener à s'interroger avec sérieux sur le point de savoir si ce qui arrive est bien la volonté de Dieu sur nous ou la sanction qui nous frappe, catholiques québécois, pour Lui avoir tourné le dos. Ne pas même vouloir envisager qu'il y ait là une grave ambiguité pour choisir plutôt de "sanctifier" la dissolution de notre Église, cela en dit suffisamment long sur le pseudo-spiritualisme de ce prêtre. Et pourtant! Il n'y a là rien de nouveau, et cette thèse de la "mort de l'Église" comme passage "pascal" n'est qu'une adaptation de la "théologie" oubliée de la mort de Dieu, dans les années 70, alors que Dieu était censé avoir voulu mourir dans la personne de son Fils pour que ses enfants deviennent adultes, comme dans un mauvais pastiche de Freud. En 1979, dans une entrevue après sa nomination comme archevêque, le défunt Jean-Marie Lustiger disait avoir rencontré, au début de son épiscopat précédent dans un autre diocèse, "une Église fiancée à sa propre mort". Lui n'embarquait pas dans ces fumées mortifères et l'Église de Paris aujourd'hui, sans être une chrétienté florissante, est un des rares diocèses de France à ne pas subir autant qu'ailleurs la crise des vocations, dû à des orientations pastorales résolument fidèles à la ligne de Jean-Paul II et mises en oeuvre depuis 30 ans. Et encore, ici même au Québec, le jésuite René Latourelle, dans un livre publié en 1994, "De la morosité à l'espérance", critiquait déjà cet état d'esprit consistant pour les communautés religieuses québécoises à se résigner "mystiquement" à disparaître au lieu de se demander s'il n'y avait pas lieu de corriger le tir des options prises à l'époque récente. Mais aujourd'hui, on a un abbé Routhier qui dit qu'on doit étendre l'application de cette théorie à toute l'Église du Verbe incarné qui devrait apprendre, elle, à être de moins en moins incarnée. Cherchez l'erreur.

Anonyme a dit…

Gilles Routhier est de cette race de prêtre "progressiste" qui s'est trompé sur toute la ligne et qui demande toujours plus de progressisme, de baisser toujours plus la garde, de toujours se laisser mourir à quelque chose, de toujours confronter un peu plus les enfants à l'école non catholique, de toujours ressembler un peu plus au siècle...

On a entendu d'autres progressistes, en URSS ceus-là, appeler sans cesse à un redoublement du socialisme alors que les preuves de l'échec de cette doctrine était pourtant patente.