mercredi 29 février 2012

87 % mon œil !

De Christian Dufour


Cela a fait la manchette avant d’être repris partout : « Anglais intensif - Appui massif des parents à 87 % ! » Fin du débat  : les parents le veulent !

Les Québécois ont ces temps-ci des tendances suicidaires, mais 87 % d’appui à la bilinguisation de la 6e année… Vraiment ? Coup de fil à la Fédération des comités de parents du Québec. [Nous en avions parlé ici.]

Le supposé 87 % ne résulte pas d’un sondage ou d’une étude. À la dernière réunion du conseil général, les représentants des comités de parents ont simplement voté au sujet de la 6e année bilingue : 48 pour, 7 contre.

C’est cela qui a donné ce 87 % d’appui des parents qu’on a répété toute la semaine.

GROSSIÈRE MANIPULATION

Quelle grossière manipulation de l’information dans un dossier crucial pour l’avenir du français !

De façon plus plausible, le sondage quotidien du Journal révélait mercredi que 60 % des gens seraient pour la 6e année bilingue, 40 % contre.

DE LA FOLIE PURE

Quant à moi, l’appui serait-il de 98 % que je continuerais à penser que la bilinguisation de la 6e année à Montréal est de la folie pure. Un peuple a le droit de se suicider, mais qu’au moins il le fasse lucidement.

Des gens sur le terrain disent non. La CAQ a fait part de ses premières critiques par l’entremise d’Éric Caire. La présidente de la Commission scolaire de Montréal, Diane De Courcy, a annoncé le report d’un an de la bilinguisation de la 6e année, son mandat étant de franciser les étudiants issus de l’immigration et non de les angliciser.

Reste le Québec des régions où il existe un appétit d’anglais chez des parents ayant souffert de leur maitrise insuffisante de cette langue.

Si l’anglais intensif n’y a clairement pas les mêmes conséquences que dans le grand Montréal, il ne faudrait pas se tromper d’époque : à cause d’Internet, la pénétration de l’anglais y est nettement plus importante que pour les gens de la génération de Mario Dumont par exemple.

J’ai donné récemment trois conférences à Mont-Laurier sur mon livre Les Québécois et l’anglais - Le retour du mouton.

Le matin devant des étudiants de secondaire V, le midi pour des cégépiens et universitaires, le soir devant des adultes. L’un de ces derniers me lança : « C’est bien beau, mais, à Mont-Laurier, il n’y en pas d’Anglais ! » [Quelle utilité alors à ce que tous les élèves y soient bilingues ?]

INTERNET

J’ai pu lui répondre : « C’est vrai pour les gens de votre génération, mais un étudiant de Secondaire V m’a dit ce matin qu’à cause d’Internet, il écrivait mieux l’anglais que le français. » À Mont-Laurier !

Généraliser Internet haute vitesse sur tout le territoire sera plus profitable que l’anglais intensif.

Ce dernier répond en partie à un problème dépassé, la bilinguisation des jeunes francophones se faisant de plus en plus toute seule.

N’en déplaise à l’anglomaniaque PLQ…


Libertariens pour l'imposition par l'État de... l'anglais

Les idéologues libertariens prétendent s’opposer à un État omniprésent qui ne respecte pas la liberté des gens. Cela n’empêche pas la cofondatrice du Réseau Liberté Québec, Joanne Marcotte, d’applaudir à l’imposition mur à mur par l’État québécois d’une sixième année bilingue, y compris aux enfants des parents qui n’en veulent pas. Quand c’est le temps de faire rentrer l’anglais dans la gorge des Québécois, les libertariens aiment bien l’État et font peu de cas de la liberté des gens.





Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Voici exactement comment a été mené le sondage dont il est question. Ces lignes proviennent du rapport officiel:

"Cʼest dans le but de recueillir le point de vue des parents au sujet du projet dʼenseignement
intensif de lʼanglais, et ainsi mieux porter leur voix tout au long de cette démarche, que la FCPQ
a réalisé ce sondage.

Celui-ci a été mené du 9 décembre 2011 au 20 janvier 2012 et a été envoyé à tous les délégués
du Conseil général de la FCPQ. Un rappel a été fait au début du mois de janvier. Les délégués
étaient invités à transmettre le sondage aux membres de leurs comités.

Les parents qui ont reçu le sondage étaient invités à répondre à dix questions.
[...]
4. Résultats généraux du sondage
En date du 20 janvier 2012, ce sont 577 personnes au total qui ont répondu au sondage. Sur
ces 577 personnes, 534 d’entre elles ont spécifié à quelle commission scolaire leur comité est
rattaché ce qui nous permet d’affirmer que ce sont 46 des 61 commissions scolaires interpellées
qui ont répondu (75 %). On ajoute à cela 43 répondants (7 %) pour lesquels il n’est pas possible
d’identifier la commission scolaire à laquelle leur comité est rattaché puisqu’ils ne l’ont pas spécifié ou qu’ils ont mentionné un acronyme qui ne nous permet pas de déterminer avec
certitude leur commission scolaire.

Anonyme a dit…

Ajout: le rapport, disponible à la Fédération des comités de parents, précise ce qui suit:

"Note aux lecteurs
Notons les biais suivants:
- Le fait que les répondants sont des parents qui s’engagent bénévolement dans les
comités scolaires (comités de parents, conseils d’établissement, comités consultatifs de
services aux élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage) ;
- Le fait que le sondage a été acheminé par courriel aux délégués du Conseil général et
qu’ils étaient invités à le transmettre à leurs membres. Par conséquent :
o Il n’est pas possible de savoir le nombre exact de personnes qui ont reçu le
sondage ;
o Il n’est pas possible de savoir comment le sondage a été transmis dans chacun
des milieux, c’est-à-dire comment il a été présenté lors de la transmission."