jeudi 24 janvier 2019

France, premier bilan des classes dédoublées en zone prioritaire

Les élèves sont « beaucoup plus attentifs, concentrés, efficaces » et les enseignants, plus satisfaits : pour le ministère de l’Éducation, les premiers résultats du dédoublement des petites classes dans les quartiers défavorisés (très majoritairement des banlieues immigrées) sont « positifs ». Cette politique, surnommée « 12 élèves par classe », au cœur du programme présidentiel d’Emmanuel Macron et brandie comme la grande mesure sociale du gouvernement, a été mise en place dès septembre 2017, pour 60 000 élèves de CP issus des milieux les plus en difficulté de l’éducation prioritaire (en « REP + »). Elle profitera à 300 000 élèves en 2020, soit 20 % d’une classe d’âge. Le ministère de l’Éducation a publié mercredi une première évaluation de cette politique. L’étude a comparé les résultats des 60 000 élèves avec d’autres, ayant le même profil socioéconomique mais qui ne bénéficiaient pas du dédoublement.

Sur ces 60 000 élèves, 40 % étaient en très grande difficulté en mathématiques et en français, soit 24 000 élèves. Le dédoublement a permis « une baisse de cette proportion d’élèves en très grande difficulté de 7,8 % pour le français et de 12,5 % en mathématiques ». Soit, au total, 2 000 élèves de moins en très grande difficulté en français et 3 000 élèves de moins en très grande difficulté en mathématiques. « C’est un beau résultat, très positif, mais qui reste un petit résultat, commente Laurent Cros, délégué général de l’association Agir pour l’école et proche du ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer. En un an, on est donc passé de 40 à 37 % d’élèves en très grande difficulté en français, et de 40 à 34 % en mathématiques. »

« Les résultats sont très décevants », estime de son côté Roland Goigoux, professeur à l’université de Clermont-Auvergne, et très critique à l’égard de la politique de Jean-Michel Blanquer. « Les enseignants qui ont des CP dédoublés sont naturellement contents, mais cela ne veut pas dire que le dédoublement est efficace », juge-t-il.

Fabienne Rosenwald, à la tête de la Direction de la prospective du ministère, qui a piloté l’évaluation, admet d’ailleurs que les résultats sont « plutôt dans la fourchette basse » par rapport aux attentes. « La question qui se pose est celle du coût du dispositif — très fort — rapporté à l’efficacité – modeste », reprend Roland Goigoux, qui déplore que le ministère n’ait pas publié les résultats de l’évaluation du dispositif du « plus de maîtres que de classes », lancé sous le quinquennat précédent. Ce dispositif consistait à mettre en place un maître en plus dans certaines écoles.

« Des transformations pédagogiques plus importantes devront accompagner le déploiement et l’approfondissement du dispositif dans les années à venir pour donner sa pleine efficacité à la mesure de dédoublement », affirme-t-on au ministère. Autrement dit, pour avoir des résultats plus significatifs, il faudra que les enseignants changent leurs pratiques pédagogiques. Le ministère cite en exemple les expérimentations menées par Alain Bentolila, professeur à l’université Paris-Descartes, et celles d’Agir pour l’école. « Ce changement pédagogique n’a pour l’instant pas eu lieu, déplore Laurent Cros. C’est vraiment le point majeur. » Pour accélérer, le gouvernement entend aussi étendre le dédoublement, en commençant par les grandes sections de maternelle, conformément aux souhaits du chef de l’État de « généraliser » la mesure à toutes les petites classes.

L’ombre au tableau ? Le « coût » de la mesure, qui a fait augmenter les effectifs d’autres classes, dénonce le Snuipp, principal syndicat du primaire.

Sources : Les Échos et 20 minutes

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