lundi 17 juillet 2023

L'Ukraine se vide, le taux de fécondité y serait à 0,7 enfant/femme (la moitié du russe)

Extrait d’un article du Corriere della Sera de Milan de ce dimanche 16 juillet.


L’Ukraine se vide : moins d’enfants et d’habitants « Beaucoup ne reviennent pas, c’est une catastrophe ».

De 52 millions à moins de 30 : l’avenir est en danger

Ligne de front Un artilleur ukrainien accroupi sur la ligne de front près de Bakhmout, dans le Donbass.

Au cours de ces 16 mois de guerre, de nombreuses villes, en particulier dans l’est du pays, ont perdu beaucoup d’habitants. Les cas de séparation se sont également multipliés : des soldats abandonnés par leur compagne ou vice-versa.

Des villes et surtout des villages vides, des familles éclatées, des soldats seuls au front avec femmes et enfants à l’étranger qui ne reviennent pas, un taux de natalité au plus bas : l’Ukraine traverse une crise démographique d’une ampleur catastrophique. 

« L’effondrement de la population entraînera bientôt de très graves problèmes économiques et sociaux. […]

On en parle peu en public, le problème est brûlant, mais personne ne sait comment l’aborder, et l’urgence de la lutte contre l’invasion russe oblige à repousser toutes les autres questions. Lorsque la maison brûle, il faut d’abord éteindre le feu et ce n’est que plus tard que l’on pensera aux meubles à acheter », se défendent les fonctionnaires du gouvernement Zelensky.

Pourtant, la question semble trop urgente pour être remise. Il suffit de regarder les chiffres : au moment de l’indépendance en 1991, après l’implosion de l’Union soviétique, l’Ukraine comptait environ 52 millions d’habitants. Le recensement national de 2001 faisait état de 48,5 millions, chiffre qui aurait chuté à 42 dans les mois précédant l’invasion ordonnée par Poutine le 24 février 2022. Ces chiffres coïncident avec le déclin de la population dans toutes les anciennes républiques soviétiques [européennes]. Mais le coup le plus dur a été porté dans les premières semaines des 16 derniers mois de guerre, qui ont provoqué la fuite massive des femmes et des enfants à l’étranger, le gouvernement ayant immédiatement interdit le départ des hommes âgés de 18 à 65 ans.

Et aujourd’hui, la population résidente est estimée entre 28 et 31 millions.

De 52 millions à moins de 30 millions en trois décennies : une perte très grave pour le pays, qui compromet ses chances de reconstruction après la fin de la guerre, pénalise la normalisation économique et sape le système de retraite », explique Alexander Démentchouk, recteur de la faculté de sciences politiques de Kiev : « Il n’y a pas d’enfants, donc pas d’avenir ». Les jeunes femmes issues des classes moyennes supérieures et ayant un excellent niveau de scolarité s’en vont. Et ce qui est encore plus grave, c’est que plus de la moitié d’entre elles n’ont pas l’intention de revenir en Ukraine. Les enfants étudient dans des écoles allemandes, polonaises, autrichiennes, françaises ou néerlandaises. Les mères ont immédiatement trouvé du travail.

La politique européenne d’accueil nous a d’abord semblé un miracle de générosité, mais elle se révèle aujourd’hui une malédiction ». Selon Ella Libanova, démographe réputée de l’Académie nationale des sciences, tout cela affecte le taux de fécondité, qui a chuté à 0,7 %, l’un des plus bas du monde.

Ce sont des faits que nous, journalistes, vérifions tous les jours. Tous les centres urbains autour du Donbass sont semi-déserts : il ne reste que les personnes âgées, les malades et les pauvres. Mais le problème est national. La plupart de mes meilleurs employés ont rapidement trouvé du travail en Pologne et en France. Nos industries ne fonctionnent pas, il n’y a pas de marché.

Aucun d’entre eux ne reviendra », déclare Sergueï, un entrepreneur en informatique qui possède des bureaux dans tout le pays. Il lui arrive de rencontrer des soldats et des officiers qui racontent qu’ils sont restés seuls. « Ma femme et nos deux enfants de cinq et sept ans sont partis pour l’Allemagne dès les premiers jours de la guerre. 

Depuis, nous sommes de moins en moins en contact. Et voilà que j’apprends qu’elle s’est trouvé un nouveau compagnon », raconte Alexei, un capitaine de 40 ans cantonné près de Bakhmout (Artemyovsk). Le conflit va accroître le nombre de divorces. Les femmes quittent les hommes, mais même les soldats trouvent parfois de nouvelles compagnes », explique Ioulia Komar, une psychologue qui s’occupe des difficultés familiales. Le débat est ouvert sur la question des retours possibles. Une étude récente du HCR estime que 76 % des réfugiés ont l’intention de rentrer. Mais les experts ukrainiens restent très sceptiques. Dans les deux prochains mois, notre gouvernement élaborera un programme de soutien aux retours, en essayant d’impliquer les partenaires européens », déclare le professeur Démentchouk. Il espère que cela se fera « le plus tôt possible ».

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