vendredi 30 septembre 2022

Québec — La violence envers les enseignants explose dans les écoles

Le président de la Fédération du personnel de soutien scolaire, Éric Pronovost, déplore que 74 % de ses membres affirment avoir subi de la violence au travail au cours de la dernière année scolaire, une proportion qui est en hausse selon un sondage.

En un an seulement, le nombre d’enseignants et d’éducateurs indemnisés après avoir été victimes de violence à l’école a bondi de 65 %, selon le Journal de Québec.

En 2020, 554 membres du personnel scolaire ont été indemnisés à la suite de « lésions attribuables à la violence en milieu de travail », selon les données de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

L’année suivante, en 2021, ce nombre avait grimpé à 911, soit le bond le plus important depuis au moins dix ans (voir graphique ci-contre).

Or, il ne s’agit que « de la pointe de l’iceberg », selon Simon Viviers, professeur à la Faculté des sciences de l’éducation de l’université Laval.

« Pour qu’il y ait une réclamation à la CNESST, c’est parce que la situation n’est pas banale », souligne-t-il.

Indemnisée deux fois

La CNESST indemnise des travailleurs qui sont incapables d’exercer leur emploi en raison d’une lésion professionnelle, qui peut être physique ou psychologique.

Une éducatrice de service de garde d’une école de Montréal a par exemple été indemnisée deux fois par la CNESST après avoir subi un traumatisme crânien et un choc post-traumatique à la suite de gestes de violence causés par des élèves.

Ce sont d’abord les éducateurs spécialisés, suivis des enseignants de la maternelle et du primaire, qui sont victimes de gestes de violence commis en majorité par des élèves.

On parle surtout de « bousculades », « pincements », « coups de pied » et « volées de coups » qui sont en augmentation, selon la CNESST.

Le constat est semblable du côté de la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS-CSQ).

Selon un sondage réalisé par la firme Ad hoc ce printemps auprès des membres (1617 répondants), 74 % des employés ont subi de la violence au cours de la dernière année scolaire, provenant principalement des élèves.

En 2018, cette proportion était de 71 %, selon un coup de sonde comparable.

Un effet de la gestion de la pandémie Covid ?

« C’est pire qu’avant. C’est qui qui va prendre son courage à deux mains et régler cette situation-là ? », laisse tomber son président, Éric Pronovost, qui voit dans cette augmentation un « effet pandémie ». 

[Il est vrai qu’une forte augmentation a été ressentie entre 2020 et 2021. Mais, d’une part, 2020 constituait un léger creux par rapport à 2019 et 2018 et, d’autre part, il y a une tendance à l’augmentation de ces violences, depuis 2012 ; en effet le nombre d’employés indemnisés a augmenté de 153 % de 2012 à 2021. Ceci dit, la gestion de la pandémie a été désastreuse pour les écoles alors que les jeunes n’ont jamais été en danger de la Covid-19 et qu’on le savait dès le début de la pandémie. Voir Suède et Suisse — Enfants peu à risques et peu contagieux (juillet 2020), Les leçons européennes (comparaisons entre pays) sur l’ouverture des écoles pendant le début de la pandémie (décembre 2020) et Québec — Les pédiatres réclament la réouverture des écoles le 11 janvier (2021) ]

Le son de cloche est le même du côté des services de garde en milieu scolaire. Les enfants, en ayant été plus longtemps à la maison et privés de contacts sociaux, ont des « habiletés sociales moins développées » si bien qu’ils sont maintenant « moins tolérants envers les autres », affirme Réjeanne Brodeur, présidente de l’association québécoise de la garde scolaire.

Simon Viviers partage aussi ce constat, rappelant que la société en générale est « dans un contexte de tension sociale ».

Ce dernier rappelle par ailleurs que l’intégration des élèves à besoins particuliers dans les classes ordinaires demeure un « problème extrêmement important » puisque plusieurs enseignants ne se sentent pas aptes à répondre à leurs besoins.

Le manque de services pour encadrer ces élèves dans les services de garde demeure aussi un enjeu et pourrait expliquer en partie la hausse des gestes de violence, ajoute Réjeanne Brodeur.


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