mardi 6 avril 2021

« Voix 1 » ou « Voix 2 », Siri ne sera plus un homme ou une femme

Apple ne réglera plus Siri avec une voix par défaut. Auparavant, « Voix 1 » était « Homme », et « Voix 2 », « Femme ».

Ne cherchez plus l’homme ou la femme derrière Siri. Apple supprime la mention du genre dans son célèbre assistant vocal. Dans la dernière version du logiciel de l’iPhone, les voix de Siri s’appellent « Voix 1 » et « Voix 2 » et non plus « Homme » et « Femme », comme les formulaires administratifs labellisés « Parent 1 » et « Parent 2 ». Et il n’y a plus de réglage par défaut. Il sera demandé, au premier lancement de l’iPhone, de choisir l’une des voix.

Le contexte. Les concepteurs des assistants vocaux, qui les ont dotés de voix féminines dans la plupart des pays, sont accusés de propager par là des « stéréotypes de genre ».

Siri, Alexa (Amazon), Cortana (Microsoft), Google Assistant seraient dociles, obséquieuses. Elles se démènent pour apporter des réponses à leurs propriétaires. Un rapport de l’UNESCO de 2019, souvent cité, estime que ces voix, et certaines réponses qu’elles apportent enfermeraient les femmes dans un rôle de faire-valoir (un « tu es sexy » conduisait Siri à répondre « merci, vous dites ça à toutes les assistantes ? »).

In fine, cela découragerait les femmes à faire carrière dans l’informatique…

Cette thèse est résumée en une phrase :

Les machines qui répliquent les idées patriarcales mettent au défi la promesse que la technologie aide à atteindre l’égalité de genre.

Rapport de l’UNESCO, « I’d blush if I could », 2019.

En retirant le réglage par défaut sur la voix féminine, en supprimant la mention d’homme et de femme (sans toutefois changer les voix), Apple répond à ces critiques.

Laissons-lui la parole :

(Cela) s’inscrit dans (notre) engagement de long terme envers la diversité et l’inclusion, pour concevoir des produits et des services qui reflètent mieux la diversité du monde dans laquelle nous vivons.

Communiqué Apple

La nouveauté sera appliquée dans la prochaine mise à jour du logiciel de l’iPhone (iOS 14.5). « Je n’ai pas de genre, comme les cactus », répondait déjà Siri quand on lui demandait s’il était un homme ou une femme.

Bon à savoir. Siri a été lancé en octobre 2011, au même moment que l’iPhone 4S. Sa voix américaine a d’abord été féminine. Il n’a été possible de choisir une voix masculine que deux ans plus tard dans les options. Alexa et Google Assistant ont eu le même parcours.

Pour une raison qui n’a jamais été expliquée, Siri est configuré avec une voix masculine par défaut en arabe, en néerlandais, en français et en anglais britannique. « Des commentateurs se sont demandé si les utilisateurs dans ces marchés préféraient des voix plus “autoritaires” », rapporte l’UNESCO. Cette explication générale laisse quelque peu songeur.

Un couple, un enfant, tant de possibilités

Et maintenant. Les géants de la tech sont sommés de rendre leurs produits et services plus « inclusifs ». Un des combats les plus visibles tient dans l’ajout de couleurs de peau et de nouvelles représentations dans les emojis (couples homosexuels, personne non genrée, etc.). Des associations reprennent régulièrement Google pour que le terme « lesbienne » ne renvoie plus en premier lieu vers des sites pornographiques, pour purger les suggestions de recherche de cooccurrences, ou pour que l’outil de traduction automatique n’associe plus indûment certains rôles aux hommes et aux femmes, lors de l’usage de pronoms neutres.

Derrière cela, il y a la conviction que la tech reste conçue par des hommes (jeunes, blancs, Californiens) et pour des hommes (jeunes, geeks). Et que ces produits, utilisés par des milliards de personnes, peuvent contribuer à une meilleure représentation des minorités.

Le rapport de l’UNESCO conseillait d’aller plus loin, en créant des voix « non humaines » (recommandation 7), ce que n’a pas fait Apple. Autrement dit, faire disparaître l’humain pour régler la représentation du genre dans les assistants vocaux. C’est le sens de Q, le premier assistant « non genré ».

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