mardi 3 avril 2018

ÉCR – Un cours à jeter aux poubelles

On trouvera ci-dessous l’avis lapidaire de Richard Martineau sur le programme controversé d’Éthique et de culture religieuse. Nous ne partageons pas ses raisons, mais Richard Martineau représente cependant une frange importante des critiques que l’on peut lire dans les médias sociaux ces jours-ci.

Si j’étais ministre de l’Éducation, je prendrais le cours d’éthique et de culture religieuse, je le roulerais en boule avec amour et attention, et je le jetterais dans la poubelle la plus proche. Je ne le réécrirais pas. Je ne l’améliorerais pas. Je le flusherais [j’actionnerais la chasse d’eau]. Avec tous les honneurs qu’il mérite.

Opération lavage de cerveaux

Personnellement, sur la liste des choses que l’on devrait enseigner en priorité à l’école, la religion occupe la 1 753e place... juste après le crochet, la vie sexuelle des carpes et la cuisson des choux de Bruxelles. La seule place où l’on devrait parler de religion est en histoire. Pour montrer combien de milliards de litres de sang ont été versés au nom de Dieu au fil des siècles. « Mon ami imaginaire est meilleur que le tien ! » Le cours d’éthique et de culture religieuse n’avait qu’un seul et unique but : enfoncer l’idéologie multiculturaliste dans la gorge de nos enfants. Sur ce plan, c’est une réussite totale. Les jeunes qui sont passés par ce cours sont incapables d’entendre la moindre petite critique des religions. Pour eux, critiquer une religion, même du bout des lèvres, est du racisme et de la xénophobie, point final. De plus, ils croient que toutes demandes d’accommodements sur des bases religieuses sont censées et recevables. Pendant des années, ils se sont fait laver le cerveau à la brosse et au Purell. Résultat : ils ressemblent à Justin comme deux gouttes d’eau. Le voile islamiste ? Cool ! La séparation des hommes et des femmes ? Une pratique culturelle qu’il faut respecter ! La Terre a été créée par une tortue albinos ? Quel beau mythe, quelle imagination !


Richard Martineau quand, au début 2008, il déclarait « je trouve cela intéressant que mes enfants puissent justement s’ouvrir aux religions des autres, non ? »... (à 1 min 20 s) puis « Moi, j’ai pas eu la chance d’apprendre les autres religions ».

La science avant tout

L’autre jour, mon fils de 10 ans est arrivé avec son bulletin. Il avait de bonnes notes partout, sauf dans le cours d’éthique et de culture religieuse, qu’il a presque coulé. J’étais fier de lui. À la maison, nous nous faisons un devoir de lui « désapprendre » tout ce qu’on lui enseigne dans ce cours. Nous lui enseignons l’importance de développer un esprit critique. Nous lui rappelons que toutes les religions monothéistes sont sexistes et homophobes. Et nous lui disons que ce n’est pas parce qu’un monsieur barbu a appris un livre sacré vieux de 2 000 ans par cœur qu’il peut dire aux gens comment vivre leur vie. Je reviens d’un week-end à New York avec ma femme et mes trois enfants. Nous avons passé toute la journée du lundi au Musée d’histoire des sciences naturelles, où nous avons vu un moyen métrage fascinant sur la théorie de l’évolution de Darwin. C’est ça qu’on devrait enseigner, à l’école. Des théories scientifiques, et non des sornettes, des croyances et des superstitions. Nos enfants ont déjà de la difficulté à maîtriser leur langue maternelle et à comprendre les principes de base de l’économie. Vous voulez leur enseigner la religion ? Faites-le hors des heures de cours.

Pas vite, vite

Ça a pris dix ans à certains fonctionnaires pour se rendre compte que le cours d’éthique et de culture religieuse « avait des lacunes ». Duh. Je m’en suis aperçu la première fois où j’ai ouvert le manuel de ma fille aînée.


Critique des manuels et cahiers d'ECR par la CLÉ (présentée en public une vingtaine de fois en 2008-2009) le défilement est rapide, n'hésitez pas à mettre en pause la vidéo.



Voir aussi

ECR — Dix ans plus tard, le ministère considère corriger les manuels qu’il a pourtant approuvés

« Georges Leroux est mon gourou », déclare directeur de la fédération des écoles privées au sujet d’ECR

Lettre ouverte du théologien Guy Durand à la ministre Michèle Courchesne au sujet du programme ECR (2008)

Reportage radio-canadien sur la résistance au cours ECR
(2008)


lundi 2 avril 2018

ECR — Dix ans plus tard, le ministère considère corriger les manuels qu'il a pourtant approuvés

Le Québec est un des rares États dans le monde occidental qui approuvent les manuels scolaires (ce n’est pas, par exemple, le cas de la France, pas depuis le régime de Vichy).

Officiellement, c’est pour en assurer la qualité et la conformité au programme officiel imposé à toutes les écoles publiques comme privées (encore une particularité du Québec...) En pratique, le Bureau d’approbation du matériel didactique (BAMD) s’intéresse à des aspects matériels (le manuel est-il de bonne facture ?), pédagogiques comme l’enseignement par compétences ainsi qu’aux aspects « socioculturels » des matériels, c’est-à-dire que le BAMD s’assure que le contenu des manuels est politiquement correct. Tiré du site du BAMD :
Représentation démocratique et pluraliste de la société

Il s’agit de s’assurer de retrouver : une juste représentation (25 p. 100) des personnages des groupes minoritaires ; des rapports égalitaires entre les personnages des deux sexes ; une représentation diversifiée et non stéréotypée des caractéristiques personnelles ou sociales ; une interaction des personnages de groupes minoritaires dans des situations de la vie courante ; une rédaction non sexiste des textes.

Selon, le journaliste Christian Rioux du Devoir, le BAMD s’est mérité le sobriquet de « politburo » chez les éditeurs de manuels scolaires québécois.

« La situation des manuels [d’éthique et de culture religieuse, ECR] qui circulent est très problématique. Il faut recommencer, on en est là », affirme sans détour Louis Rousseau au Journal de Québec, professeur au département de sciences des religions à l’UQAM. Des ouvrages présentent des représentations simplistes, presque caricaturales, des religions à travers leurs symboles, déplore-t-il. Ces critiques sont apparues dès l’approbation des manuels il y a près de dix ans (le programme a été imposé avec très peu de manuels approuvés). Georges Leroux, professeur émérite en philosophie à l’Université du Québec à Montréal, a aussi été irrité de constater que des « feuilles maladroites » circulent parfois en classe. « Les critiques nous ont rendu service en débusquant les dérives et les dérapages », affirme-t-il. Stricto sensu, c’est un problème distinct des manuels, les « feuilles maladroites » sont de la responsabilité des professeurs pas des éditeurs ni du Ministère (BAMD).

Rappelons que, dès le début de l’imposition du programme ECR, la Table de concertation des protestants et les évêques catholiques du Québec avaient attiré l’attention du gouvernement sur les lacunes présentes dans les manuels d’ECR. Voir Synthèse de la TCPE sur le matériel didactique pour le programme ECR (décembre 2009) et Évêques québécois inquiets quant à la mise en œuvre du programme ECR (septembre 2009).

Sept. 2009 : Évêques catholiques prédisent échec du cours ECR si de sérieux correctifs ne sont pas apportés.

Georges Leroux est un chaud partisan de l’imposition du cours unique d’ECR, il est allé jusqu’à le défendre devant deux tribunaux différents et a admis adopter une vision jacobine de l’État qui impose d’en haut ce que les enfants des autres doivent assimiler comme vision du phénomène religieux.

Au secondaire, le programme devrait faire une plus grande place aux positions critiques, le tout « dans le respect des religions », affirme-t-il, tout comme d’autres experts consultés par le Journal de Québec. Les experts cités par le Journal de Québec sont toujours les mêmes et ils approuvent dans l’ensemble l’idée de ce programme unique imposé à tous les élèves. Georges Leroux poursuit : « Il ne faut pas seulement regarder la beauté des religions, comme la non-violence ou la charité. Il y a aussi un angle mort de la religion qu’il ne faut pas nier, c’est très important. [Georges Leroux a déjà écrit pour les deux tribunaux mentionnés que les religions engendrent la violence.] Le sexisme est très important aussi. Toutes les religions sont sexistes parce qu’elles sont patriarcales. » On voit que le professeur émérite ne s’effraie à généraliser et à mettre dans le même sac de toutes les religions. Voir Le mythe de la violence religieuse et le professeur Rémi Brague qui récuse ces amalgames faciles à la mode dans certains cercles (voir note 1).


Georges Leroux parle d'éthique et de culture religieuse : « S'interroger sur quelque chose qui pourrait s'apparenter à de la folie [...] Actuellement, personne au Québec ne mesure l'amplitude du changement et ses conséquences réelles »

Plus grande place pour les non-croyants

Comme certains détracteurs du cours d’éthique et culture religieuse, des artisans de la première heure estiment que le contenu devrait faire une plus grande place aux positions des non-croyants, même si le programme le permet déjà. « Je pense que les positions de non-croyance devraient être abordées au même titre que les autres religions », ce qui n’est pas le cas actuellement, affirme Nancy Bouchard, professeure au département de sciences des religions de l’UQAM. Cette dernière rappelle que le programme a fait l’objet d’un « compromis » lors de sa création et qu’il est pertinent, dix ans plus tard, de réfléchir à nouveau aux choix qui ont été faits. Patrice Brodeur, professeur à l’Institut d’études religieuses à l’Université de Montréal, considère aussi que les positions non religieuses pourraient occuper une plus grande place dans le programme, tout comme Spencer Boudreau, professeur retraité de l’Université McGill, qui rappelle que la société a beaucoup évolué à ce chapitre. « Avant, le religieux était puissant et attaquait le non religieux. Maintenant, c’est l’inverse. » Admettons que cette évolution se soit produite en dix ans (nous en doutons, à moins de confondre la critique de l’islam en forte progression avec la critique de toutes les religions), pourquoi un programme scolaire devrait-il renforcer cette attaque du « non religieux » envers le religieux amalgamé ? Si ce n’est bien sûr que ce professeur partage cette critique contre ce « religieux »...?

Des manuels en révision, un ministre en réflexion

Plutôt que d’avoir entrepris une révision en bonne et due forme du programme d’éthique et culture religieuse, le ministère de l’Éducation travaille à la révision du matériel scolaire pendant que le ministre Sébastien Proulx consulte différents intervenants afin d’alimenter sa réflexion à ce sujet. On ne sache pas qu’il ait contacté les critiques religieux du cours d’éthique et de culture religieux comme les parents qui ont traîné le gouvernement du Québec jusqu’en Cour suprême... Mais bon, rien de nouveau au Québec, les mêmes experts seront à nouveau sollicités, semble-t-il.

En décembre 2016, alors que le programme d’éthique et culture religieuse était la cible de nombreuses critiques, le ministre Proulx avait indiqué que le cours « était en révision auprès du ministère ».

Interrogé récemment à ce sujet par Le Journal, M. Proulx a plutôt indiqué qu’un travail de révision était en cours au ministère concernant le matériel scolaire, conçu par les éditeurs et approuvé par les fonctionnaires. « J’ai demandé au ministère de faire une réflexion à l’égard du matériel, parce que les premiers enjeux qui sont ressortis touchaient au matériel », a-t-il affirmé.

À son cabinet, on précise que « plusieurs scénarios ont été regardés [lire : envisagés] par le ministère » cet automne afin d’améliorer les manuels scolaires, « dont le remplacement de certaines pages ». La proposition soumise a toutefois été jugée insatisfaisante et les fonctionnaires ont été renvoyés à leur planche à dessin, explique-t-on.

« Il y a des interrogations à l’égard du matériel et il faut avoir une réflexion sur le rendu. J’ai moi-même des enfants qui reçoivent des cours d’ECR en 4e et 6e année et je suis convaincu que ce qu’ils reçoivent comme information et matière à réflexion diffère d’une autre école », a affirmé M. Proulx, qui s’interroge sur « ce qui pourrait être amélioré pour respecter l’esprit du programme initial ». On se rappellera que M. Proulx (quand il était encore à l’ADQ) avait offert une critique fort molle contre l’imposition du programme ECR (voir l’encadré ici).

Consultations informelles

En parallèle, le ministre affirme avoir consulté plusieurs personnes à ce sujet, tant dans les rangs des opposants (Ah ! qui ? Parents les anti-religieux du MLQ ? Les parents catholiques de l’APCQ n’ont pas été convoqués à notre connaissance) que des défenseurs du cours d’ECR. « Nous avons convié des gens à une conversation, mais de manière informelle », précise le ministre, qui admet qu’« il n’y a pas une opération formelle » de révision des contenus en cours au ministère de l’Éducation ». « Il faut, par une démarche personnelle, que je mette au jeu une réflexion », a-t-il précisé.

Cette réflexion mènera éventuellement à une révision en bonne et due forme du cours, à laquelle seront invités à participer plusieurs acteurs du réseau de l’éducation, à commencer par les enseignants d’éthique et culture religieuse, dit-il. Il n’y a toutefois aucun échéancier qui a été fixé jusqu’à maintenant.

État des lieux et évaluations absents

Des experts consultés par Le Journal de Québec insistent de leur côté sur l’importance de faire un « état des lieux » de ce qui est enseigné en classe, avant d’entreprendre une révision des contenus. « On n’a pas d’infos sur ce qui se passe sur le terrain, on n’a aucun portrait de la situation », déplore Nancy Bouchard, professeure au département de sciences des religions de l’UQAM.

Pour notre part, nous aimerions savoir quels sont les objectifs du cours par lequel on jugera de l’efficacité du cours. Quels seront les critères objectifs ? Une plus grande ouverture à l’« autre », à l’immigrant ? Comment les comportements que l’on cherchait à faire apparaître chez les élèves (voir ci-dessous) seront-ils évalués ? Rappelons que les connaissances ne sont pas un des objectifs du programme. Pour reprendre la prose de Georges Leroux :
Dans l’univers très riche des programmes formulés selon des compétences, nous ne travaillons pas à partir de contenus prédéterminés : les jeunes ne recevront pas dans ce programme des connaissances encyclopédiques sur telle ou telle religion, ou doctrine morale.

LEROUX, Georges, « Orientation et enjeux du programme d’éthique et de culture religieuse ». Formation et profession, mai 2008

Pour le professeur Lucier, « il ne s’agira pas davantage d’un enseignement de type encyclopédique sur le contenu ou l’histoire des doctrines et des traditions religieuses ». Ce qui est attendu de l’élève n’est pas la maîtrise de connaissances. ECR vise plutôt « l’adoption d’attitudes et de comportements ». Le programme prescrit que l’enseignant doit évaluer « des comportements observables ou des actions attendues chez l’élève qui témoignent du niveau de développement des compétences » Pour le professeur Lucier, cette compétence est liée aux objectifs sociaux et visées éducatives 10 du programme qui consistent à « favoriser la construction d’une véritable culture publique commune » à la fois sur le plan religieux et sur le plan éthique. Plus de détails ici.

Si cette « réflexion » est menée à terme, on peut craindre que les parents conservateurs, chrétiens ou nationalistes anti-multiculturalistes risquent une fois de plus d’être les dindons de la farce des « experts » consultés et de l’imposition d’un programme idéologique unique à tous.



Critique des manuels et cahiers d'ECR par la CLÉ (présentée en public une vingtaine de fois en 2008-2009) le défilement est rapide, n'hésitez pas à mettre en pause la vidéo.



Note

1. « Je m’oppose à ce qu’on mette les religions dans le même panier pour les soumettre à une même appréciation de valeur : selon les modernes, toutes les religions seraient également fausses, violentes, sexistes, etc. Sur le problème de la violence, on ne peut pas mettre sur le même plan des religions qui admettent le sacrifice humain et celles qui prêchent le respect de la vie sous toutes ses formes. Pourquoi refuser de comparer ? Comparons le Sermon sur la montagne à la sourate IX, la plus tardive du Coran, qui contient au verset 29 un appel à un combat matériel visant à la soumission et à l’exploitation économique du vaincu. Si vous trouvez que c’est aussi bien, libre à vous, mais permettez-moi de douter de votre intelligence ! ». Rémi Brague, Le Figaro, le 8 février 2018.

Voir aussi


Le ministère n’approuve pas les manuels. « Seul le régime de Vichy s’est permis cela. »

Québec — C'est la déconfiture post-réforme chez les éditeurs scolaires !

Table ronde sur le matériel pédagogique ECR

Conférence du « politburo » du Monopole de l’Éducation du Québec

Le rôle des femmes dans les religions selon le livre ECR d’ERPI pour la 2e secondaire (catholiques place « variable » de la femme, autochtones très bien, [Mahomet] « au 7e siècle améliore la situation de la femme »).

L’ancien ministre Louis O’Neill sur la Cour suprême et ECR : « Un jugement qui laisse perplexe »

« Match nul » sur la constitutionnalité du programme ECR, entretemps Jésus, Superman même combat !

À qui sont ces enfants au juste ? (rediff)

Thèse doctorale — Des enseignants d’éthique (ECR) loin d’être neutres ?

« ECR : vrai problème, fausse solution ; il faut l’abolir »

Où est le problème ?

ECR — L’avertissement de la Cour suprême

Cannabis thérapeutique : effets positifs modestes, effets indésirables sont importants et très fréquents


La revue professionnelle Le Médecin de famille canadien publiait en février une recension systématique des études ayant évalué l’utilisation médicale des cannabinoïdes. Après avoir identifié 1085 articles et retenu 31 publications pertinentes, les auteurs arrivent aux conclusions suivantes :
  • il existe des preuves raisonnables en faveur de l’utilisation des cannabinoïdes pour les nausées et vomissements associés à la chimiothérapie ;
  • ces produits pourraient améliorer la spasticité surtout dans la sclérose en plaques ;
  • il n’est pas certain que les cannabinoïdes puissent soulager la douleur, et si tel était le cas, ce ne serait que pour la douleur neuropathique, et les bienfaits seraient alors modestes ;
  • en contrepartie, les effets indésirables sont très fréquents, à tel point que les auteurs indiquent que les bénéfices attendus devraient être très élevés avant même de songer à les utiliser. 

À ce sujet, ils ajoutent :
Les données probantes font valoir que les effets les plus constants des cannabinoïdes médicaux sont des événements indésirables. Les divers effets indésirables sont d’une plus grande ampleur que les bienfaits potentiels pour les problèmes visés.

Les conclusions de cette analyse ne surprennent pas : étude après étude, analyse après analyse, revue après revue, on arrive sensiblement toujours au même constat : les cannabinoïdes ont peu de place dans l’arsenal thérapeutique contemporain sauf dans des situations bien particulières ou en fin de parcours quand rien d’autre n’a fonctionné.

Malgré cela, certains prétendent que les cannabinoïdes pourraient améliorer la qualité de vie des utilisateurs. Or, une publication récente vient contredire cette croyance. Les résultats de cette méta-analyse concluent qu’il n’est pas possible d’établir une relation entre la qualité de vie et la consommation thérapeutique de cannabis.

Normalement, face à pareils constats, on devrait arrêter de tergiverser sur les bienfaits potentiels du cannabis ou des cannabinoïdes et clore le débat une fois pour toutes. Si ces produits sont si peu efficaces (ou de façon si marginale), engendrent tant d’effets secondaires et ne changent rien à la qualité de vie, il n’y aurait aucune raison de s’en servir, sauf dans des situations bien particulières. N’est-ce pas ce que nous ferions pour toute autre substance ?

Mais pas avec le cannabis ou les cannabinoïdes !

Mais le plus étrange est certainement le paradoxe sociétal. Si le cannabis est à ce point inefficace, engendre tant d’effets indésirables et ne change rien à la qualité de vie, pourquoi donc 3,4 millions de Canadiens en ont-ils consommé au cours de l’année ? Pourquoi ces individus fument-ils du pot dont ils ne connaissent même pas l’origine, acceptent-ils de payer pour une substance dont ils ne sont pas certains de la composition et s’exposent-ils aux risques judiciaires associés à la production, la possession et la consommation d’une substance illicite ? Ajoutons que souvent ces consommateurs le fument et que pourtant le gouvernement ne s’est pas privé d’indiquer que l’inhalation de produits (que ce soit le tabac ou d’autres herbes) n’est pas sans effets néfastes.

Pour son usage récréatif, me dites-vous ? D’accord. Mais qu’entend-on par usage récréatif ? Sans doute que la plupart des consommateurs recherchent ses effets psychotropes comme c’est le cas pour toutes les autres drogues, le tabac et l’alcool inclus ; qu’ils ont besoin de l’excitation, de l’euphorie ou de la sédation associées à la substance ; qu’ils recherchent un mieux-être, même transitoire. Sinon, pourquoi consommeraient-ils donc une substance prétendument inefficace et inutile, et de surcroît accepteraient-ils de payer pour l’obtenir ?

Source


samedi 31 mars 2018

Les gouvernements surestiment-ils le rendement économique des diplômes universitaires ?

L’automatisation et la mondialisation ont radicalement bouleversé le marché du travail des pays occidentaux. Les emplois moyennement qualifiés disparaissent rapidement. En Amérique, les salaires des cols bleus — surtout des hommes — ont largement stagné depuis les années 1970, tandis que ceux des diplômés universitaires ont fortement augmenté. Cette augmentation dépend, toutefois, fortement de la discipline, certaines disciplines offrant même un rendement négatif quand on considère l’endettement occasionné par les études et la perte de revenus pendant les années passées à l’université.

Les informaticiens de Californie préviennent souvent que les progrès de la technologie, en particulier dans l’intelligence artificielle, seront dévastateurs pour les travailleurs peu qualifiés. Une étude importante, menée par Carl Benedict Frey et Michael Osborne de l’Université d’Oxford, a estimé que 47 % des emplois en Amérique pourraient être automatisés au cours des deux prochaines décennies. L'OCDE prévoit plutôt une perte de 9 % des emplois due à la robotisation. Le spectre du chômage de masse, ainsi qu’une inégalité accrue des revenus, a conduit de nombreux décideurs à considérer qu’il était crucial de dépenser plus dans la formation universitaire afin d’assurer la future prospérité économique de leurs pays.

Dans leur livre La Course entre l’éducation et la technologie, Claudia Goldin et Lawrence Katz de l’Université de Harvard soulignent que la prime au diplôme universitaire a chuté à la fin de la première moitié du XXe siècle aux États-Unis alors que les universités ont accueilli nettement plus d’étudiants. (En 1945, il y avait 500 universités à travers le monde. Aujourd’hui, il y en a plus de 10 000.) Cette prime a, cependant, connu une forte hausse vers 1980. Bien que la prime a commencé à se stabiliser ces dernières années, le fait que les diplômés universitaires gagnent encore environ 70 % de plus que les non-diplômés suggère que la demande de travailleurs qualifiés dépasse encore de loin l’offre.

Il est, toutefois, possible que les gouvernements surestiment les avantages économiques liés l’enseignement supérieur. Car, bien que les universités soient des lieux d’apprentissage, elles sont aussi des mécanismes de tri social. Une partie de la raison pour laquelle les diplômés universitaires gagnent plus s’explique par le fait qu’avant même d’entrer à l’université ils sont plus brillants et plus industrieux que leurs camarades, ce sont des bosseurs pour parler familièrement. Certaines professions, comme les médecins ou les ingénieurs, exigent une formation technique poussée, mais ce n’est souvent pas le cas. Le fait que les diplômés en sciences humaines, dont les cours ont souvent peu à voir avec leur travail ultérieur, tendent à gagner plus s’ils proviennent d’établissements plus prestigieux suggère que l’une des raisons d’aller à l’université est de se démarquer de ses pairs sur le marché du travail. Bryan Caplan, économiste à l’Université George Mason, soutient que l’obtention d’un diplôme est comme « se lever lors d’un concert ». On voit mieux le spectacle, mais c’est aux dépens de ceux qui sont assis derrière vous. Et si tout le monde va à l’université, tout le monde se lève pour filer la comparaison, et on est revenu au point de départ, le tout à un coût important.

Dans l’ensemble des pays de l’OCDE, 43 % des adultes âgés de 25 à 34 ans ont aujourd’hui un diplôme d’études supérieures, alors qu’ils n’étaient que 23 % en 1995.

Cependant, on ne sait pas exactement dans quelle mesure ces diplômes se sont traduits par des gains économiques. Une analyse des données sur le marché du travail américain effectuée par The Economist révèle que depuis 1970, la proportion de travailleurs diplômés a augmenté dans presque toutes les professions. Mais pour environ la moitié des professions où les travailleurs sont les mieux éduqués, les salaires moyens ont quand même diminué en termes réels.

L’omniprésence du diplôme signifie que, pour de nombreux travailleurs, aller à l’université est devenu une obligation plus qu’un choix. En outre, l’université ne convient pas à tous. Les études sur le rendement économique de l’enseignement supérieur tendent à supposer que tous les étudiants obtiendront leur diplôme. En pratique, environ 30 % des étudiants en Europe et 40 % des étudiants en Amérique abandonneront leurs études avant d’obtenir leur diplôme. Cela signifie que les rendements économiques attendus d’une éducation universitaire pour les étudiants moyens sont beaucoup plus faibles que ceux que l’on évoque habituellement en ne considérant que la prime des diplômés.

Pour Bryan Caplan, l’économiste déjà cité ci-dessus, « les employeurs qui cherchent un bon travailleur (parmi le premier tiers) ne devraient souvent exiger qu’un diplôme d’études secondaires. La qualité du travail ne s’en ressentirait pas, mais on épargnerait quatre années d’études coûteuses par personne. En d’autres termes, ce que les employeurs veulent, c’est le meilleur tiers, pas nécessairement une formation ou un diplôme. Si l’on peut repérer le “meilleur tiers” avec autant de précision par un autre moyen qu’un diplôme, l’éducation n’a pas d’importance. » Rappelons que, aux yeux de l’investisseur californien Peter Thiel, l’université pourrait souvent être remplacée par un test de QI et de bonnes références. Dans les mots de Caplan, « Pour être le plus franc possible, il serait préférable que l’éducation soit moins abordable. Si les subventions gouvernementales à l’éducation universitaires étaient considérablement réduites, beaucoup de candidats ne pourraient plus financer l’éducation qu’ils envisagent d’obtenir. Si j’ai raison, cependant, il n’y a pas lieu de s’inquiéter. C’est précisément parce que l’éducation est tellement abordable que le marché du travail s’attend à ce que tant de jeunes soient passés par l’université. Sans les subventions, vous n’auriez plus besoin de l’éducation que vous ne pouvez plus vous permettre. » Nous reviendrons dans un prochain billet aux opinions quelque peu iconoclastes que Bryan Capan expose dans son livre The Case Against Education (Le Dossier contre l’Éducation).

Les gouvernements ont raison de s’inquiéter de la formation de leurs futurs travailleurs, mais ils devraient considérer la hausse du niveau à l'école secondaire pour y acquérir une solide culture générale et de nombreuses autres formations par la suite et pas uniquement l’université.

Voir aussi

Peter Thiel et la bulle universitaire : un test de QI extrêmement coûteux

États-Unis — Quels diplômes universitaires rapportent le plus ?

Québec — Encadrement des élèves en hausse de 22 % depuis 2000

Si la moitié des écoles publiques québécoises sont en mauvais état et ont pâti d’un manque de dépenses gouvernementales, l’encadrement des élèves dans les écoles publiques a, pour sa part, fortement augmenté au Québec ces dernières années. Le nombre d’élèves par adulte est, en effet, passé de 14,43 en 2000-2001 à 11,80 en 2017-2018, soit une hausse de 22 % en 17 ans. 


Ces dépenses supplémentaires ciblent les élèves en difficulté et ceux provenant de milieux défavorisés notamment ceux issus de l’immigration dans l’espoir de favoriser la réussite de tous par ce personnel supplémentaire.



vendredi 30 mars 2018

France — Nul djihadiste n’est sorti d’une école libre, mais les écoles catholiques et Montessori davantage contrôlées

Les écoles libres (dites aussi hors contrat) en France sont libres de choisir leur personnel enseignant, leur programme et leur pédagogie. Elles bénéficient de nettement plus de libertés que le secteur dit privé au Québec qui est très sévèrement encadré (voir Québec — Les écoles dites privées veulent plus de souplesse et le livre Le Monopole public de l’Éducation par Jean-Luc Migué et Richard Marceau).

Le Parlement français a adopté définitivement jeudi, par un vote « conforme » de l’Assemblée, une proposition de loi centriste qui renforce l’encadrement des écoles libres hors contrat, soutenue par le gouvernement comme un outil contre « l’embrigadement » islamiste. Le texte, issu du Sénat, a été voté à main levée dans les mêmes termes qu’à la chambre haute fin février, au terme de vifs débats.

À l’ouverture des discussions, mercredi, il avait affirmé que « le contexte actuel doit nous donner encore plus d’ardeur à voter une loi comme celle-ci », après le meurtre de Mireille Knoll et les attentats de l’Aude. À notre connaissance, tous les terroristes sont pourtant issus de l’école publique...

Anne Coffinier répond aux questions de Jean-Jacques Bourdin sur cette nouvelle loi qui renforce les contrôles de l’État sur le secteur scolaire indépendant. Mme Coffinier est directrice générale de la « Fondation pour l’école », fondation créée en 2008 et reconnue d’utilité publique par le Premier ministre (décret du 18 mars 2008), elle est destinée à venir en aide au secteur des écoles hors contrat.

Extrait n° 1


Anne Coffinier:
Les écoles musulmanes sont un peu contrôlées, les écoles catholiques et Montessori sont extrêmement contrôlées. [...] Se sert-on d’un contexte émotionnel et d’une vraie urgence qui est de tout faire pour éviter le péril islamiste pour couper les ailes à un mouvement d’écoles indépendantes qui dérange, tout simplement parce que ce n’est pas l’Éducation nationale ?

Dans Valeurs actuelles, Anne Coffinier revient plus longuement sur ce fait :

[O]n ne veut pas discriminer, on refuse de désigner les endroits particulièrement problématiques et l’on inspecte donc tout le monde de la même manière. En réalité, puisqu’on a peur d’inspecter les écoles musulmanes, on inspecte même bien plus les écoles catholiques et les écoles Montessori. Selon certains responsables d’écoles musulmanes, une minorité d’entre elles sont été inspectées. Les écoles catholiques, elles, ont toutes été inspectées. Certaines l’ont même été plusieurs fois.

Alors il faut maintenant être clair. Soit on nomme le problème pour le résoudre : on met en place des inspections systématiques et régulières pour déceler les foyers islamistes. Mais dans ce cas, il faut se concentrer sur les écoles musulmanes. Soit on n’ose pas dire le problème et on reste flou dans les mots comme dans le travail. Mais dans ce cas précis, on risque d’épuiser les capacités des inspecteurs qui ne tiendront jamais plus de deux ou trois ans à ce rythme.

Il faut bien comprendre qu’un professeur du public est inspecté tous les 5 à 7 ans. En ce moment, on mobilise une quantité colossale du corps d’inspection sur les écoles hors-contrat. Ça veut dire que les professeurs du public seront moins inspectés, qu’ils tarderont à avoir leurs avancements, qu’ils auront du mal à progresser… Donc les syndicats risquent de très vite monter au créneau.

Extrait n° 2




Anne Coffinier:
Les enfants juifs de banlieue, ce n’est un secret pour personne, sont obligés de quitter l’école publique et ils trouvent refuge dans les écoles hors contrat. C’est un fait. C’est-à-dire que le communautarisme [musulman] se développe de façon puissante, que l’antisémitisme se développe de façon puissante en banlieue dans le cadre de l’école [publique].

Anne Coffinier est revenue par écrit sur le renforcement des écoles hors contrat par l’État.

« La proposition de loi Gatel vient d’être adoptée. Pour les écoles indépendantes, le pire a été évité, et l’essentiel de nos demandes a pu être entendu dans les consultations auxquelles nous avons participé.

Mais on peut vraiment s’interroger en revanche sur l’utilité de cette loi au regard de l’objectif affiché de lutter contre les risques d’endoctrinement islamiste.

Le vrai problème réside-t-il vraiment dans les 0,5 % d’élèves scolarisés dans les écoles privées sans contrat, d’autant que les écoles sans contrat musulmanes représentent une toute petite partie des 1300 établissements sans contrat (moins de 0,5 %) ?

Sur le régime d’ouverture des écoles sans contrat :

En ce qu’elle rassure les maires en leur donnant plus de temps pour examiner les projets de création d’écoles, elle est positive. Le guichet unique pour les démarches administratives d’ouverture est aussi une bonne chose.

En revanche, cette loi impose des contraintes à l’embauche du corps professoral qui sont anachroniques et sans intérêt pour lutter contre la radicalisation islamiste, comme l’obligation d’avoir un niveau licence pour enseigner en maternelle ou en élémentaire, qui gênera en particulier nombre d’écoles Montessori, ou celle de n’embaucher que des professeurs européens, ce qui compliquera l’existence des écoles internationales en particulier.

Sur le contrôle des écoles une fois ouvertes :

Nous sommes tout à fait d’accord avec le principe d’inspections et de contrôles efficaces des écoles indépendantes. Nous notons toutefois que le régime actuel était déjà très complet (il prévoit la possibilité d’inspecter une fois par an les écoles, et plus, en cas de problème).

Ce qui a manqué jusque là, c’était la volonté de l’administration d’inspecter les écoles, notamment à cause du manque de moyens humains. Nous nous demandons donc si l’Éducation nationale aura les moyens d’inspecter chaque année ces écoles, quand on sait qu’elle n’arrive pas à inspecter plus souvent qu’une fois, tous les 5 à 7 ans, les professeurs de son propre réseau, bien que leur carrière en dépende.

Mais, nous le répétons, les inspections même renforcées ne nous posent pas de problème : les écoles indépendantes que nous soutenons n’ont rien à cacher, et nous invitons tous ceux qui le souhaitent à les visiter.

Il serait bon en revanche que ces inspections portent bien sur toutes les écoles, et en particulier celles qui se prêteraient plus à une instrumentalisation islamiste, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Il sera utile également que ces inspections se déroulent d’une manière plus respectueuse de la liberté pédagogique de ces écoles, sans chercher à plaquer indûment sur le secteur sans contrat les programmes et pratiques pédagogiques de l’école publique. Les contrôles doivent s’opérer d’une manière plus transparente, neutre et respectueuse du cadre légal.

Une loi inefficace au regard de la lutte contre les risques d’endoctrinement islamiste de la jeunesse :

Dans le contexte actuel, chaque secteur doit participer à la lutte contre le fléau de l’islamisme. Le secteur sans contrat comme les autres, bien sûr. Mais notre conviction, c’est que l’on passe à côté des vrais problèmes. Ce ne sont pas les 0,5 % d’élèves scolarisés dans les écoles sans contrat qui constituent les bataillons de terroristes en France !

Il y aurait donc bien mieux à faire :

  • traiter d’abord les écoles islamistes clandestines ou illégales,
  • contrôler les activités périscolaires (cours de soutien, clubs sportifs,…) développées dans l’ombre des mosquées militantes,
  • regarder de près les écoles musulmanes sous contrat — qui constituent de loin les plus gros établissements privés musulmans, sont financées sur argent public, et vivent pour bien d’entre elles en osmose notoire avec l’organisation des frères musulmans en France (UOIF).
  • N’oublions pas qu’aucun des terroristes qui ont ensanglanté la France n’est issu d’une école sans contrat.

En imposant un carcan administratif à l’essor des écoles indépendantes, ce sont la totalité des établissements scolaires sans contrat qu’on prend pour cible, alors que :

  • 3/5 d’entre eux sont non confessionnels,
  • une part infime est musulmane,
  • les établissements sans contrat ont d’excellents résultats académiques ou offrent une seconde chance à des enfants en échec dans le système ordinaire (petits effectifs, suivi individualisé, pédagogies adaptées),
  • ils sont un laboratoire d’innovation et d’expérimentation et apportent une émulation précieuse à l’Éducation nationale.
Il est urgent que l’administration se rende compte que l’école publique a besoin des écoles indépendantes et qu’elle en favorise l’essor.

Vidéo complète



Sur la fuite des juifs des écoles publiques

Pour le politologue Jérôme Fourquet, “Dans les entretiens que nous menions pour notre livre, les gens nous disaient : ‘On avait sorti nos gamins des écoles publiques car ils s’y faisaient ‘emmerder’, mais Merah est venu en tuer jusque dans la cour d’une école juive !’”

Bernard Ravet, ancien proviseur de collège dans les quartiers nord de Marseille, raconte — dans Principal de collège ou imam de la République ? – en avoir été réduit un jour à dissuader une dame juive d’inscrire son enfant dans son établissement public. Faute de pouvoir assurer sa sécurité au quotidien, écrit-il — le cœur lourd. Même scénario quand des familles juives de la Seine–Saint-Denis (le “93”), victimes de dégradations à répétition contre leur logement, se voient conseiller de quitter le quartier par les policiers auprès desquels ils ont porté plainte. Le géographe Christophe Guilluy, qui travaille avec les bailleurs sociaux, les propriétaires publics de logements sociaux subventionnés, témoigne que, dans les faits, beaucoup de bailleurs ne prennent désormais plus le risque de loger une famille ou une personne juive dans certains immeubles, où ils seraient en danger... Christophe Guilluy est notamment l’auteur de La France périphérique, comment on a sacrifié les classes populaires chez Flammarion.

Depuis des années, les Français juifs désertent en nombre certaines villes de Seine–Saint-Denis, pour d’autres quartiers où ils seraient plus en sécurité.

Les juifs quittent la Seine–Saint-Denis (nord de Paris), région très multiculturelle
Source : L’An prochain à Jérusalem ? (Jérôme Fourquet, Sylvain Manternach, Éd. de L’Aube

Une partie de ces Français juifs de Seine–Saint-Denis [le département n° 93] a tiré la conclusion qu’il fallait déménager, aller dans des endroits où ils seraient plus en sécurité, dans le 17à Paris, à Saint-Mandé [le département n° 94], à Sarcelles [le 95]...



Un policier à une mère de famille juive du 93: « Madame, mais partez, ne restez pas dans ce logement : ils vous ont repérée »

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Toujours plus d’obligations : France — Instruction obligatoire dès 3 ans : quel intérêt à légiférer ?

Notons qu’au Québec, le programme unique et obligatoire d’Éthique et de culture religieuse a également et notamment été imposé pour éviter une nouvelle crise des accommodements nés de l’enrichissement culturel et ethnique récent au Québec. Il fallait “apprendre à ébranler la ‘suffisance identitaire’” des Québécois et leur “apprendre à s’intéresser à l’autre par delà les divergences et les conflits de valeurs”.

La maternelle à 4 ans n’a pas atteint ses objectifs, Québec en crée 100 classes de plus

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jeudi 29 mars 2018

France — Instruction obligatoire dès 3 ans : quel intérêt à légiférer ?

La Fondation pour l’école réagit à l’annonce gouvernementale de l’abaissement de la scolarisation obligatoire des enfants de 6 à 3 ans :

J’ai décidé de rendre obligatoire l’école maternelle et ainsi d’abaisser de 6 à 3 ans en France l’obligation d’instruction dès la rentrée 2019 […] Il faut cesser de considérer l’école maternelle comme une option.
Emmanuel Macron. Assises de l’École Maternelle, 27 mars 2018.

Les Assises de l’École maternelle se sont ouvertes ce mardi 27 février sur cette annonce phare du Président, reposant sur une proposition du Ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer.

ENTRE INSTRUCTION ET SCOLARISATION, LE DEVOIR DE DISCERNER

La Fondation pour l’école rappelle à cette occasion que la liberté de choix donnée aux parents de scolariser ou non leur enfant au sein des établissements scolaires ne saurait être remise en cause, instruction et scolarisation ne pouvant être confondues. En France en effet, seule l’instruction est aujourd’hui obligatoire de 6 à 16 ans et non la scolarisation (article L131-1 du Code de l’Éducation : « l’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre six ans et seize ans »).

Le cadre dans lequel cette instruction peut être offerte est fixé, lui, par article L131-2 : « l’instruction obligatoire peut être donnée soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles par les parents, ou l’un d’entre eux, ou toute personne de leur choix ».

L’abaissement de l’âge de l’instruction à 3 ans ne peut remettre en question une liberté majeure : la liberté des parents à choisir le mode d’instruction de leur enfant.

EST-IL OPPORTUN DE LÉGIFÉRER POUR 2,4 % D’ENFANTS ?

Par ailleurs, le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans étant de 97,6 % (source INSEE), on peut légitimement s’interroger sur la pertinence à légiférer pour les seuls 25 000 enfants que cette nouvelle loi concernerait. S’il s’agit bien de s’adresser uniquement aux enfants élevés dans des environnements linguistiques et culturels différents, qui compliquent leur apprentissage du français, pourquoi ne pas apporter une réponse adaptée et spécifique à ce seul segment de la population ?

Plutôt qu’imposer un modèle unique et indifférencié à tous, il serait plus judicieux de proposer une scolarisation précoce aux seuls enfants effectivement concernés par un retard d’apprentissage de la langue préjudiciable pour leur entrée en CP [1re année du primaire].

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lundi 26 mars 2018

Démographie de l'Occident et de l'Afrique : avenir de l'immigration

Si tant d’Africains quittent et quitteront en plus grand nombre encore, leur continent, c’est que les promesses de l’indépendance n’ont pas été tenues. Pourquoi ? Que s’est-il passé ? Pour évoquer l’échec de la coopération et les enjeux de la migration Sud-Noir et cet exode massif qui se profile, Alain Finkielkraut reçoit Serge Michaïlof et Stephen Smith.

Serge Michaïlof, chercheur à l’Iris, a été l’un des directeurs de la Banque mondiale et le directeur des opérations de l’Agence française de développement. Il a publié en 2015 chez Fayard Africanistan : l’Afrique en crise va-t-elle se retrouver dans nos banlieues ?


Stephen Smith est américain et a été journaliste spécialisé sur l’Afrique pour Libération et Le Monde de 1986 à 2005. Actuellement il enseigne les études africaines à l’université de Duke (États-Unis d’Amérique) Il vient de publier chez Grasset La ruée vers l’Europe : la jeune Afrique en route vers le vieux continent.

Écoutez l’émission :



Bibliographie

Africanistan
de Serge Michailof
chez Fayard, en 2015


Présentation de l’éditeur : En 2050, l’Afrique sera plus peuplée que la Chine, mais les jeunes en âge de travailler y seront trois fois plus nombreux et les emplois manqueront encore plus cruellement qu’aujourd’hui. Or le chômage massif de jeunes à demi scolarisés constitue l’une des principales explications de l’effondrement dramatique de l’Afghanistan, la Syrie ou l’Irak. Le Sahel francophone est une zone d’immense fragilité, dont les caractéristiques rappellent l’Afghanistan. Nous ne voulons voir que l’Afrique en progrès, celle qui offre de nouveaux marchés et regorge de matières premières. Mais l’Afrique en crise existe toujours et se comporte comme un cancer, envoyant ses métastases dans les pays voisins, et jusqu’en Europe. Bien naïf celui qui croira que la charité et les interventions militaires suffiront à éteindre l’incendie qui couve dans ces zones déshéritées. Nous ne pourrons rester longtemps indifférents : pour ne pas être nous aussi victimes de ces métastases, tentons de comprendre la réalité, et réfléchissons à ce qui peut encore être envisagé pour endiguer le feu et éviter que l’Afrique en crise n’arrive dans nos banlieues. Chercheur à l’IRIS, enseignant à Sciences Po et conseiller de plusieurs gouvernements, Serge Michaïlof a été l’un des directeurs de la Banque mondiale et le directeur des opérations de l’Agence française de développement (AFD). Son dernier ouvrage, Notre maison brûle au Sud (Fayard, 2010), a reçu le prix Jean-Michel Gaillard.

La ruée vers l’Europe : la jeune Afrique en route pour le Vieux Continent
[note du carnet : l’immigration africaine vers l’Amérique du Nord augmente aussi rapidement]
de Stephen Smith
chez Grasset, en 2018

Description
L’Europe vieillit et se dépeuple. L’Afrique déborde de jeunes et de vie. Une migration de masse va se produire. Son ampleur et ses conditions constituent l’un des plus grands défis du XXIe siècle.

L’Union européenne compte aujourd’hui 510 millions d’habitants vieillissants ; l’Afrique 1,25 milliard, dont quarante pour cent ont moins de quinze ans. En 2050, 450 millions d’Européens feront face à 2,5 milliards d’Africains. D’ici à 2100, trois personnes sur quatre venant au monde naîtront au sud du Sahara. [Note du carnet : si la tendance se maintient, les prévisions démographiques d’ici 32 ans sont probables, celles à 82 ans n’ont guère de sens.]


L’Afrique « émerge ». En sortant de la pauvreté absolue, elle se met en marche. Dans un premier temps, le développement déracine : il donne à un plus grand nombre les moyens de partir. Si les Africains suivent l’exemple d’autres parties du monde en développement, l’Europe comptera dans trente ans entre 150 et 200 millions d’Afro-Européens, contre 9 millions à l’heure actuelle.

Une pression migratoire de cette ampleur va soumettre l’Europe à une épreuve sans précédent, au risque de consommer la déchirure entre ses élites cosmopolites et ses populistes nativistes. L’État-providence sans frontières est une illusion ruineuse. Vouloir faire de la Méditerranée la douve d’une « forteresse Europe » en érigeant autour du continent de l’opulence et de la sécurité sociale des remparts — des grillages, un mur d’argent, une rançon versée aux États policiers en première ligne pour endiguer le flot — corrompt les valeurs européennes.

L’égoïsme nationaliste et l’angélisme humaniste sont uniment dangereux. Guidé par la rationalité des faits, cet essai de géographie humaine assume la nécessité d’arbitrer entre intérêts et idéaux.

Journaliste-écrivain et universitaire, Stephen Smith a tenu la rubrique Afrique de Libération (1988-2000) puis du Monde (2000-2005). Il a travaillé comme analyste pour les Nations unies et L’International Crisis Group. Depuis 2007, il est professeur à l’Université de Duke aux États-Unis, où il enseigne les études africaines. Il est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages publiés en France, dont Négrologie : pourquoi l’Afrique meurt ou Oufkir, un destin marocain et d’ouvrages coécrits avec Antoine Glaser comme Ces Messieurs Afrique ou Comment la France a perdu l’Afrique.


Pornographie accessible en quelques clics à tous les mineurs

mercredi 21 mars 2018

Les jeunes femmes gagnent plus que les jeunes hommes dans les métropoles américaines

James Chung un analyste de Reach Advisors, une entreprise de recherche du secteur privé, a passé environ un an à analyser les données du recensement des États-Unis de 2008, en examinant les revenus des hommes et des femmes dans les régions métropolitaines des États-Unis. L’étude complète n’a jamais été publiée, seules quelques-unes de ses conclusions.

Parmi celles publiées en septembre 2010, on retrouve la suivante : « Les salaires médians à temps plein des jeunes femmes des grandes villes américaines dépassent de 8 % ceux de leurs jeunes homologues masculins ».

Une ventilation fournie pour le magazine Time fournissait des données pour quelques grandes villes. À Atlanta, les jeunes femmes célibataires sans enfant gagnaient 21 % de plus que les jeunes hommes célibataires sans enfant. À Los Angeles, les jeunes femmes gagnaient 12 % de plus que les jeunes hommes de leurs cohortes. Ces données ont également été publiées par NPR et CBS News.

L’American Enterprise Institute a publié ces chiffres dans un tableau (repris ci-dessous) qui illustre le fait que les jeunes femmes célibataires gagnent plus que les jeunes hommes célibataires.



Chung a déclaré à Politifact en 2014 qu’il n’avait pas mis à jour son analyse pour déterminer si ces chiffres avaient changé depuis 2008. Politifact ne connaît aucune source plus récente qui aurait tenté de recréer l’analyse spécifique de Chung. En outre, la méthodologie de Chung ne semble pas avoir été sérieusement critiquée.

Pew Research a publié une étude sur les tendances salariales pour toutes les femmes entre 25 et 34 (un groupe plus étendu et plus âgé). Comparé à tous les hommes du même âge, Pew Research a constaté que les femmes gagnent 93 % de ce qu’un homme gagne.

Notons que l’étude de Chung porte sur des revenus médians sur l’ensemble des salaires, elle ne compare pas les salaires par secteur d’activités.

La raison pour laquelle les jeunes femmes dans les régions métropolitaines gagnent plus que les jeunes hommes, c’est qu’elles sont 50 pour cent plus susceptibles d’avoir un diplôme universitaire. Selon Chung, « cela signifie donc qu’elles sont les plus nombreuses que les jeunes hommes dans les emplois de premier échelon dans notre économie de la connaissance. » Ces emplois sont bien payés.

Il y a quelques années déjà l’économiste Thomas Sowell répondait à quelques idées fausses sur les différences salariales entre hommes et femmes (voir la vidéo ci-dessous). Thomas Sowell nous apprend ainsi que « la proportion des femmes parmi les cadres était plus grande pendant les premières décennies du XXe siècle que pendant les décennies du milieu du XXe siècle et tout cela avant le mouvement féministe. » Il y avait ainsi deux fois plus de femmes dans le Who’s Who en 1908 qu’en 1950 (alors en plein baby-boom). C'est la maternité qui a le plus grand impact sur les salaires, pas le mouvement féministe. Pour d’autres détails, voir la vidéo :



Source : Politifact 

Voir aussi

Wall Street Journal : « Il n’y a pas d’écart salarial hommes-femmes »

Discrimination — Les lesbiennes gagnent plus que les hétérosexuelles.

Les gars, l’école et le Conseil du statut de la femme

Classement des écoles de l’Institut Fraser (2016) : les filles dominent désormais aussi en maths

L’État [et ses emplois à l’abri des aléas économiques] se féminise et se « diversifie »