lundi 29 mai 2023

Le ministre français du Numérique se déclare prêt à « bannir » Twitter

Le réseau social d’Elon Musk (ci-contre) est sorti samedi du « code européen de bonnes pratiques contre la désinformation en ligne. »

Twitter « sera banni » de l’Union européenne en cas d’infraction à ses règles, a déclaré lundi le ministre français délégué au numérique Jean-Noël Barrot, qui s’est parallèlement inquiété d’une future régulation européenne « excessive » en matière d’intelligence artificielle (IA). « Twitter, s’il ne se conforme pas à nos règles, sera banni, en cas de récidive, de l’Union européenne », a martelé sur Franceinfo le ministre Jean-Noël Barrot.

Cette déclaration survient après la sortie officielle de Twitter du code de bonnes pratiques de l’Union européenne contre la désinformation en ligne, annoncée samedi par le commissaire européen à l’Industrie Thierry Breton. Ce dernier avait rappelé dans un message sur Twitter que le réseau social, dirigé par le milliardaire américain Elon Musk, demeurait assujetti légalement au respect des règles européennes.

« Twitter joue un rôle important dans le débat public, mais nous ne pouvons pas prendre le risque qu’un réseau social tel que Twitter se laisse prendre en otage par les partisans de la désinformation et que, par conséquent, notre débat public, notre démocratie soient affectés », a insisté Jean-Noël Barrot. « C’est la raison pour laquelle nous avons établi des règles claires et il faudra que Twitter s’y conforme », a-t-il ajouté.
 
Twitter avait déjà accepté un test de simulation de crise dans le cadre de la mise en place de ce Code, et M. Breton a déclaré que lui et son équipe se rendraient au siège de l’entreprise à San Francisco à la fin du mois de juin de cette année pour effectuer l’exercice de simulation volontaire. M. Breton n’a pas précisé en quoi consisterait ce test.
 
Garde-fous

Il existe des garde-fous pour les contenus générés par l’intelligence artificielle, tels que les vidéos « hyper truquées » (deep fake/contrefaçon profonde) et les images de synthèse, qui devront être clairement identifiés lorsqu’ils apparaîtront dans les résultats de recherche, a déclaré M. Breton. Il a également indiqué qu’en vertu de la loi sur les services numériques, les infractions pourraient être sanctionnées par de lourdes amendes pouvant aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires annuel d’une entreprise.

Les plateformes devront « revoir complètement » leurs systèmes afin de garantir un niveau élevé de confidentialité et de sécurité pour les enfants, notamment en vérifiant l’âge des utilisateurs, a déclaré M. Breton.

Les grandes entreprises technologiques devront également réorganiser leurs systèmes pour « empêcher l’amplification algorithmique de la désinformation », a-t-il ajouté, se disant particulièrement préoccupé par les systèmes de modération de contenu de Facebook à l’approche des élections de septembre en Slovaquie.

La société mère de Facebook a déclaré qu’elle soutenait la nouvelle directive européenne sur les services numériques. « Nous prenons des mesures importantes pour lutter contre la diffusion de contenus préjudiciables sur Facebook et Instagram dans l’UE », a déclaré Meta il y a plusieurs semaines. « Bien que nous le fassions tout au long de l’année, nous reconnaissons que c’est particulièrement important pendant les élections et les périodes de crise, comme la guerre en cours en Ukraine. »

Critiques du Code

 
Jacob Mchangama, historien danois, a tiré la sonnette d’alarme au sujet de la loi sur les services numériques à la fin de 2022, écrivant dans un article d’opinion que ce plan pourrait bien être un « remède » serait « pire que la maladie ».

« Mais lorsqu’il s’agit de réglementer la liberté d’expression, les bonnes intentions n’aboutissent pas nécessairement à des résultats souhaitables », a-t-il écrit pour le Los Angeles Times. « En fait, il y a de fortes raisons de croire que la loi est un remède pire que le mal, susceptible d’entraîner de graves dommages collatéraux à la liberté d’expression dans toute l’UE et partout où les législateurs tenteront de l’imiter. »

Bien que « la suppression de contenus illégaux semble assez innocente », il écrit que « ce n’est pas le cas ». Ce terme — « contenu illégal » — est « défini de manière très différente en Europe », a-t-il déclaré. « En France, des manifestants ont été condamnés à des amendes pour avoir dépeint le président Macron en Hitler, et les discours de haine illégaux peuvent englober l’humour offensant, tandis que l’Autriche et la Finlande criminalisent le blasphème. »

Direction sur l’intelligence artificielle excessive

Interrogé sur la future réglementation européenne en matière d’intelligence artificielle générative (l’« IA Act » [franglais (ce serait AI Act en anglais) typique et croissante des instances européennes, ses règlements n’étant en outre pas des actes [lois]…]) actuellement en discussion, le ministre français, tout en reconnaissant la nécessité de « donner un cadre » au développement de l’IA, a taclé le positionnement du Parlement européen qui risque de « faire sortir l’Union européenne de l’histoire technologique ».

« À ce stade, la position du Parlement européen est excessive, car elle impose des obligations d’audits, des obligations de transparence qui sont excessives pour ce type de modèles », à l’image de ChatGPT, a-t-il estimé. Ces modèles d’IA « font l’objet d’une course effrénée dans laquelle nous ne devons pas nous laisser distancer, sans quoi nous nous enfermerions dans des décennies d’assujettissement et de dépendance technologique », a-t-il poursuivi, appelant à « investir » dans le domaine.

« Il est impératif de disposer dans les mois qui viennent de modèles tels que ceux qu’ont développés ces géants américains », a-t-il conclu, rappelant que Google avait pour l’heure renoncé à déployer son IA Bard dans l’UE, face aux contraintes réglementaires.

Voir aussi

Macron bloque Rumble et Odysee en France (novembre 2022)


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