dimanche 23 juin 2019

Le troublant copier-coller du « Un million d'espèces animales et végétales menacées d'extinction »

Selon Radio-Canada qui reprend une dépêche de l’AFP : « Déjà un million d’espèces menacées d’extinction et le rythme s’accélère : la nature, qui permet à l’humanité de vivre, est condamnée à poursuivre son déclin à moins d’“un changement profond” des modèles de production et de consommation des hommes.

Dans un rapport sans précédent publié lundi, le groupe d’experts de l’ONU sur la biodiversité (IPBES) peint un tableau sombre de l’avenir de l’être humain, qui dépend de la nature pour respirer, boire, manger, se chauffer ou se soigner.

“Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier”, décrit Robert Watson, président de l’IPBES.

Déforestation, agriculture intensive, surpêche, urbanisation galopante, mines : 75 % de l’environnement terrestre a été “gravement altéré” par les activités humaines et 66 % de l’environnement marin est également touché.

Résultat : environ un million d’espèces animales et végétales sur les quelque huit millions estimées sur Terre sont menacées d’extinction, dont “beaucoup dans les prochaines décennies”. »



Le journaliste Toby Young du Spectator s’est penché sur cette histoire alarmiste pour la biodiversité et sur l’affirmation selon laquelle un million d’espèces devraient disparaître à moins d’un changement de notre mode de vie et de notre modèle économique.

Young semble avoir fait quelques brèves recherches et a montré que les estimations sous-jacentes, parrainées par l’ONU, sont bidons. Les auteurs du rapport ont extrait certaines données de la « liste rouge » officielle des espèces menacées et les ont soumis à des extrapolations que les auteurs de cette même liste rouge disent qu’il ne faut justement pas faire. Ils ont ensuite publié un communiqué de presse quelque peu hystérique, mais pas le rapport sous-jacent.



C’est une histoire familière pour quiconque s’intéresse à l’écologisme, mais Young a été plutôt surpris, à la fois par la médiocrité de la recherche et par la façon dont la presse l’a traitée. Après tout, si de brèves recherches ont révélé à Young (avec un diplôme en politique, philosophie et économie) que certaines recherches dites scientifiques sont absurdes, les nombreux autres journalistes auraient sans doute dû remarquer que des aspects de ce rapport alarmiste clochaient. Mais voilà, de nombreux journalistes scientifiques sont eux-mêmes militants (ils se considèrent simplement comme « responsables ») se voient comme faisant partie du mouvement écologiste et il est donc mal vu (« peu responsable ») de poser des questions qui pourraient démobiliser les gens. Ainsi, les journalistes scientifiques des différents médias ont-ils simplement repris ce communiqué de presse ou l’ont rapidement réécrit avec leurs propres mots. Très peu semblent avoir gratté ou posé de questions, nous ne connaissons que le cas de Toby Young.


Dans une certaine mesure, le problème peut être imputé au manque de connaissances scientifiques de la presse. La plupart des gens qui tiennent les colonnes science-environnement dans les médias sont des diplômés en sciences humaines (Stephen Guilbeault a fait des études en théologie) et auraient du mal à remettre en question de nombreux communiqués de presse qu’ils retranscrivent fidèlement. Toutefois, le cas de Toby Young démontre qu’un esprit curieux peut faire une grande différence. Mais les journalistes scientifiques ne sont pas très curieux, la plupart d’entre eux sont à l’aise dans leur foi écologiste, ils sont écoresponsables.

Les personnes sensées devraient prendre avec une énorme poignée de sel toutes les manchettes sensationnalistes scientifiques que les médias reprennent, en particulier ceux qui relatent de « nouvelles études ». Devant ces dépêches sensationnalistes, il vaut mieux chercher l’opinion de sceptiques dans les médias alternatifs ou sociaux pour mettre en perspective ces unes à sensation. Ces gros titres sont généralement réfutés le jour même par de mauvais coucheurs de sceptiques, malheureusement pas avant que les médias grand public aient fait des dégâts dans l’opinion publique qui ne se souviendra que de la manchette alarmiste. Ces médias ne donnent jamais la même ampleur à des corrections tardives, si tant est qu’ils les publient.



Extrait de l’article de Toby Young

J’ai décidé de creuser un peu pour voir si un million d’espèces « risquent de disparaître au cours des prochaines décennies », comme l’a dit la BBC. Cette affirmation se fonde sur un rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) de l’ONU, mais ce rapport n’a pas encore été publié. Tout ce que j’ai réussi à trouver en ligne fut un communiqué de presse publié par la IPBES et un « résumé » du rapport « à l’intention des décideurs ». Le communiqué de presse indique : « Le rapport révèle qu’environ un million d’espèces animales et végétales sont menacées de disparition, dont beaucoup au cours des décennies. » Il ne fournit aucune source au-delà du rapport non encore publié, mais le résumé indique clairement qu’il est en partie basé sur les données de la liste rouge des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Le site Web de la Liste rouge de l’UICN indique que « plus de 27 000 espèces sont “menacées d’extinction” ». Alors, comment l’IPBES est-il arrivé au chiffre d’un million ? Le passage essentiel dans le résumé destiné aux décideurs politiques se lit comme suit : « Environ 25 % des espèces appartenant à des groupes d’animaux et de plantes évalués sont menacées, ce qui suggère qu’environ un million d’espèces sont déjà menacées de disparition, dont beaucoup dans des décennies, si aucune mesure n’est prise. » Le mot « suggérant » est essentiel. Le site Web de la Liste rouge indique que 98 500 espèces ont été « évaluées » — et l’IPBES a déterminé le pourcentage d’espèces sur un total de 98 500 et a multiplié les 27 000 en conséquence. C’est un calcul difficile à faire, étant donné que le nombre d’espèces dans le monde est inconnu... L’estimation la plus fiable est de 8,7 millions (avec une marge d’erreur de plus ou moins 1,3 million), mais même les compilateurs de cette statistique reconnaissent que 86 % de toutes les espèces terrestres et 91 % des espèces marines n’ont pas encore été découvertes, décrites et répertoriées.

Comment l’IPBES est-il parvenu au chiffre magique d’un million ? Il semble que nous devions simplement le croire sur parole, ce que la BBC a dûment fait. Qu’en est-il de l’affirmation de l’IPBES selon laquelle « environ 25 % des espèces… sont menacées » ? Cela semble un peu pessimiste, étant donné que le nombre de mammifères disparus au cours des 500 dernières années est d’environ 1,4 % et qu’un seul oiseau a connu le même sort en Europe depuis 1852. Ce n’est pas mal si l’on considère l’ampleur de la croissance économique au cours des 167 dernières années. Alors, que veut dire « menacé » ? L’IPBES utilise la définition de l’UICN, qui est « à haut risque d’extinction dans la nature ». De manière peu vraisemblable, l’UICN inclut dans cette catégorie les espèces qu’elle qualifie de « vulnérables », qu’elle définit comme faisant face à une « probabilité de disparition dans la nature » d’au moins 10 % ». Près de la moitié des espèces incluses par  l’IPBES dans son chiffre de 25 % appartiennent à cette catégorie « vulnérable ».

[...]

Le lecteur de nouvelles de la BBC, résumant le rapport (non publié) de l’IPBES, a déclaré que 40 % des amphibiens font partie des espèces « en danger d’extinction imminente ». Effectivement, ce chiffre de 40 % figure dans le communiqué de presse de l’IPBES et sur le site Web de la liste rouge. Mais environ un tiers de ces amphibiens entrent dans la catégorie « vulnérable ». Décrire leur extinction comme « imminente » est donc exagéré. C’est un peu comme si on disait que Manchester City risque 10 % d’être relégué dans les 100 prochaines années et qu’il risque donc d’être relégué de façon imminente. Pour ceux qui ne suivent pas le football anglais, Man City devrait être sacré champion de Premier League samedi.


L’analyse des données de la Liste rouge tend à démentir cet alarmisme

Les données de base proviennent de la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN), qui répertorie toutes les espèces connues qui ont suivi le chemin du dodo et de la tourte voyageuse. L’examen de l’ensemble des données révèle une vision bien différente de cette tendance alarmiste à l’extinction imminente.

Ci-dessous, toutes les 529 espèces de la liste rouge répertoriées dont la date d’extinction est connue sont illustrées ci-dessous à la figure 2 par décennie d’extinction. Ce graphique révèle une histoire assez différente de celle avancée par le nouveau rapport. Au lieu d’une augmentation constante du nombre et du taux d’extinctions, nous constatons que les extinctions ont atteint leur maximum à la fin du XIXe siècle et au début du 20e siècle, suivies d’un déclin important qui se poursuit encore aujourd’hui. On pense que ce pic d’extinction coïncide avec l’introduction d’espèces non indigènes, principalement sur des îles (y compris l’Australie).

Extinction d’espèces par décennie de 1500 à 2009


Un examen plus approfondi des informations les plus récentes remontant à 1870 révèle que, au lieu d’une augmentation effrayante, les extinctions sont en train de régresser de manière significative.

Ce qui est évident, c’est que la tendance aux extinctions est à la baisse plutôt qu’en hausse, tout le contraire de ce que prétend le nouveau rapport. En outre, selon le rapport de l’IPBES, nous pouvons nous attendre à 25 000 à 30 000 extinctions par an, mais la moyenne des 40 dernières années est d’environ 2 espèces par an. Cela signifie que le taux devrait être multiplié par 12 500 à 15 000 pour atteindre les hauteurs vertigineuses prédites. On ne voit pas ce qui permet de prévoir une telle augmentation, ni même une petite fraction de cette hausse vertigineuse.

Graphique des extinctions d’espèces par décennie, à partir de la liste rouge



Cette nouvelle étude portant sur l’extinction des espèces animales et végétales n’est que le dernier exemple d’abus du processus scientifique conçu pour causer l’hystérie autour d’une apocalypse climatique imminente et forcer la main aux pouvoirs politiques et aux citoyens. La peur et l’alarme suscitées par de prétendues catastrophes imminentes doivent servir à imposer à une population rétive des politiques qui ne pourront qu’abaisser notre qualité de vie et notre vitalité économique.

Ironie : ce nouveau rapport présente un problème épineux à tous ceux qui veulent sauver la planète de nos excès de dioxyde de carbone, car il indique que la perte d’habitat est la principale cause des extinctions prévues. Mais voilà, la solution préconisée habituellement pour lutter contre le CO2 consiste à recouvrir de vastes étendues de terres par des usines solaires de taille industrielle et à ériger d’immenses usines éoliennes qui couvriront les forêts et les prairies, tuant les oiseaux en danger et les autres espèces qu’ils prétendent sauver.

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