mardi 2 avril 2019

Des parents qui instruisent à domicile en colère contre le ministre Roberge

Des parents qui font l’école à la maison veulent échapper aux nouvelles règles que veut leur imposer le gouvernement Legault.

Mardi, l’Association juridique canadienne pour l’école-maison (HSLDA) a appelé le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, à assouplir ou retirer son projet de règlement. Plusieurs membres ont d’ailleurs entrepris dans les derniers jours de sensibiliser les députés de l’Assemblée nationale à leur cause.

La semaine dernière, M. Roberge a présenté un projet de règlement pour obliger l’enseignement d’un contenu minimal en langues, mathématique, sciences et univers social, ainsi que la passation d’examens ministériels.

Il exige aussi que les quelque 5000 petits Québécois scolarisés à la maison se présentent à des rencontres dans le but de permettre un meilleur suivi et un dépistage plus efficace des difficultés d’apprentissage.

Le ministre veut ainsi empêcher l’utilisation de l’école à la maison comme « astuce » pour se soustraire à la Loi sur l’instruction publique.

Il a donné l’exemple de parents qui prétendent faire l’école à la maison mais qui, en réalité, envoient leurs enfants dans une école religieuse, où ils ne suivent pas le programme de formation de l’école québécoise. « C’est inacceptable », avait-il déclaré en point de presse. La logique du ministre-instituteur Roberge n’est pas pas infaillible : le fait qu’ils apprennent le Talmud et l’hébreu le matin dans une yéchiva n’implique en rien qu’ils n’apprennent rien l’après-midi à la maison... En passant, il existe des programme de formation que des parents peuvent considérer comme meilleurs que celui du Québec (voir le bac français ou le bac international) ou mieux adapter à leurs enfants, notamment les surdoués ou ceux au contraire avec des difficultés d’apprentissage. L’ancien instituteur Roberge ne semble voir les choses qu’à travers l’école qu’il connaît et uniquement elle et le programme d'étude québécois.

Le ministre Roberge (à droite) jette un regard vers un parent québécois qui le supplie. La réponse est NON !


Ce qui est inacceptable, répond Manon Fortin, une porte-parole de HSLDA, c’est que le ministre place tous les parents qui font l’école à la maison dans le même « étau ». Elle déplore également que les trois principales associations représentant les parents qui font l’école à domicile n’aient jamais été consultées.

« En voulant imposer des évaluations, on va imposer par le fait-même un curriculum, parce que si on veut se préparer à des examens, on devient restreints et on rentre dans un cadre qui brise la beauté de l’école-maison », a-t-elle déploré lors d’un entretien téléphonique avec La Presse canadienne, mardi.

« La raison pour laquelle les parents font l’école-maison, ce n’est pas pour suivre ce qui se fait à l’école à la lettre. [...] Il y a des parents qui veulent voyager, qui ont des enfants avec des particularités », a-t-elle illustré.

« Je me sens comme si on me force à niveler par le bas, au nom de l’uniformité québécoise, a pour sa part déclaré Mélanie Camirand, une mère-éducatrice, dans un courriel envoyé à La Presse canadienne. Je crois que le ministre Roberge cherche à se faire du capital politique en s’inventant des faux problèmes. »

« Nous savions que la CAQ était comme une épée au-dessus de notre tête. Je vais être contrainte de faire une année sous le régime Roberge, mais à l’été 2020, nous aurons quitté le Québec », a-t-elle pesté.

Par ailleurs, Jean-François Roberge a tort d’affirmer que les règles actuelles sont « largement insuffisantes », selon elles.

Présentement, le projet d’apprentissage de l’enfant scolarisé à la maison doit comporter des activités « variées et stimulantes », dont l’apprentissage de la langue française, d’une autre langue et de la mathématique, ainsi que d’au moins une matière appartenant à chacun des domaines d’apprentissage suivants :

– mathématique, science et technologie ;

– arts ;

– développement de la personne ;

– univers social, dans le cas où l’enfant a atteint l’âge de 9 ans à la date du début de la mise en œuvre du projet d’apprentissage.

Les examens du ministère sont actuellement optionnels. En revanche, les parents doivent fournir au ministère des plans d’apprentissage et des évaluations de leurs enfants.


« Il y a beaucoup de choses qui sont demandées, a insisté Mme Fortin en entrevue. Le parent avise, envoie son projet d’apprentissage, la Direction de l’enseignement à la maison (DEM) le regarde, ensuite le parent envoie un bilan mi-parcours, il y a une rencontre de suivi qui se fait, [...] ensuite un bilan de fin d’année et il y a des évaluations qui sont faites par le parent tout au long de l’année. »

Elle craint que les propos du ministre Roberge ne viennent ternir la réputation de l’école-maison, alors que « les tabous commençaient à tomber », et que les gens se mettent à dire : « “C’est du n’importe quoi. Ses enfants ne sauront rien. ” »


Son association compte bien se faire entendre. Une période de 45 jours est actuellement en cours, durant laquelle toute personne intéressée peut transmettre son avis au ministre sur les modifications proposées. Cette période se termine le 10 mai prochain.

« Le ministre s’est déjà engagé à tenir compte des avis reçus dans l’édiction du règlement. [...] Je ne crois pas qu’un retrait pur et simple du règlement soit une option », a indiqué l’attaché de presse du ministre Roberge, Francis Bouchard.

La porte-parole du Parti libéral du Québec en matière d’éducation, Marwah Rizqy, exige quant à elle la tenue de consultations publiques en commission parlementaire. « Le ministre est très loin de la réalité des gens », a-t-elle martelé, mardi.

Source : Presse canadienne

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