mardi 16 novembre 2021

Steven Guilbeault : la lutte contre les changements climatiques passe par le savoir et le leadership autochtone

Déclaration lors de la COP 26 à Glasgow, de la part du ministre de l’Environnement et du Changement Climatique (et non des Affaires autochtones), la profession de foi du théologien Steven Guilbeault. 


 

Autochtones ?

De quels peuples autochtones parle Steven Guilbeault ? L’immense majorité des habitants de la Terre sont des peuples autochtones. Ils ne sont pas les descendants d’immigrants.

Il semble que M. Guilbeault veuille dire les peuples « primitifs », les Premières Nations, les peuples non industrialisés. Son petit laïus n’était probablement que de l’« affichage vertueux » woke à destination de la gauche et des médias canadiens. Ces Autochtones ne seraient donc pas les Allemands, les Congolais, les Malgaches, les Chinois, les Bengalis, les Indonésiens, ni les Péruviens, mais plutôt les Amérindiens du Canada.

Figure imposée et mythe de l’Indien écologiste

Nombreux sont ceux qui croient encore aujourd’hui que les « Sauvages » à l’arrivée des Européens en Amérique se préoccupaient davanatage de la conservation de la Nature (parce qu’animistes) que les colons français. Ce n’est pas ce que révèlent les textes historiques.

Les Amérindiens étaient-ils vraiment plus soucieux de l’environnement que les anciens Européens ? Ne gaspillaient-ils vraiment jamais ? Avaient-ils toujours des comportements que nous qualifierons d’écologiques ? Les Amérindiens avaient-ils des croyances spirituelles qui les menaient à adopter des comportements antiécologiques ?

Réponses d’un anthropologue et d’un sociologue et historien : non, non, non et… oui. Mais voyons cela dans le détail.

D’après Denys Delâge, sociologue et historien de l’Université Laval, les Amérindiens n’étaient pas plus écologiques que nos ancêtres paysans. Mais les paysans québécois ce n’est pas très glamour, trop identitaire, trop enraciné, pas assez ouvert sur « la diversité ».

Pour illustrer la conscience écologique des Amérindiens, on cite souvent Pehr Kalm, un Suédois venu en Nouvelle-France en 1749. Il décrit dans sa relation de voyage les tourtes, les « pigeons sauvages » de l’Amérique. Selon lui, les Amérindiens ne tuaient jamais ces pigeons lorsqu’ils couvaient ou lorsqu’ils avaient des petits. Ils n’acceptaient pas non plus que d’autres le fassent, menaçant même à une occasion un Français qui avait tenté d’en tuer quelques-uns.

Mais les pigeons sauvages étaient pour les Amérindiens ce qu’étaient les poules ou les vaches pour les Français, c’est-à-dire des animaux domestiques. Les tourtes faisaient « partie de l’ordinaire », de leur vie de tous les jours. Les tuer était donc l’équivalent pour le colon de voir un Amérindien abattre une de ses vaches. L’habitant de la Nouvelle-France, tout comme ses descendants vivant dans les campagnes québécoises jusqu’au milieu du XXe siècle, possédait aussi ses propres habitudes écologistes.

Selon Delâge, les colons européens comprenaient très bien qu’il ne fallait pas exterminer tous ses animaux durant une même année, au risque de mourir de faim l’année suivante. Pas question non plus de gaspiller les restes : tout était récupéré, recyclé. On salait, on congelait ou on mettait en conserve les surplus. Les restes de table servaient de nourriture aux chiens et aux chats, on n’utilisait ni emballage de plastique ni produit chimique. Les vêtements étaient faits de fibres naturelles, de lin et de laine, et lorsqu’ils étaient trop usés, ils étaient recyclés en tapis et en courtepointes. Le bois servait à construire, à chauffer et à récolter de l’eau d’érable. Aucun habitant n’aurait songé à couper à blanc le petit bois si utile près de chez lui. Presque aucun déchet ne venait donc polluer l’environnement de ces habitants. Même le contenu des latrines extérieures, les « bécosses », était parfois utilisé comme engrais.

Lequel vivait alors le plus en harmonie avec la nature : le Blanc ou l’Indien ? En fait, chacun adaptait son style de vie à ses besoins et ses croyances. Ce style de vie était marqué dans les deux cas par l’autosubsistance, où il fallait gérer habilement ses ressources pour survivre. Les choses ont changé lors du passage à une économie de marché. Pour les cultivateurs, c’est à ce moment que l’agriculture à grande échelle s’est imposée et qu’ils ont commencé à détruire la nature avec la machinerie, la surexploitation des sols et l’utilisation d’engrais chimiques.


Les Amérindiens pas toujours si écologiques que cela… 

Le jésuite Paul Le Jeune, dans la Relation de 1635, s’inquiétait déjà de la surexploitation du castor par des Amérindiens. Il relate de quelle façon les Montagnais les tuaient tous dans leurs huttes, alors qu’il leur conseille d’y laisser au moins quelques petits afin qu’ils se reproduisent.

Cette surchasse est extrêmement contradictoire avec la vision du monde des Amérindiens évoquée plus haut. Certains cherchant des raisons pour l’expliquer ont affirmé que les autochtones se sont mis à tuer les animaux parce qu’ils les tenaient responsables des maladies qui les frappaient. Cette théorie a toutefois été vivement contestée. Un historien américain comme Charles A. Bishop croit plutôt que, malgré le respect voué à la nature, il n’y avait rien dans les croyances des Amérindiens qui les empêchait de tuer beaucoup d’animaux, à condition que leurs restes soient bien traités et que la traite rapporte quelque chose de bénéfique. C’était bien le cas, puisqu’un grand nombre d’objets utiles étaient échangés contre des fourrures. Il s’agit peut-être là d’une piste d’explication de l’apparente absence de scrupules des Amérindiens à chasser le castor presque jusqu’à l’extinction complète de l’espèce.

Denys Delâge apporte également certaines nuances aux pratiques des autochtones qui paraissaient en harmonie avec la nature. Bien que la plupart d’entre eux tuaient d’abord les animaux pour survivre, ils considéraient aussi que ces animaux se donnaient et venaient s’offrir à eux. « Cela aurait paru mesquin de ne pas prendre tous les animaux offerts : on pouvait, on devait même, en certaines occasions, tuer au-delà des besoins », affirme-t-il. Des sacrifices étaient également réalisés, particulièrement de chiens. Le Père de Charlevoix écrivait dans son Journal historique en 1721 comment les chiens étaient parfois immolés ou suspendus vivants à un arbre par les pattes de derrière jusqu’à la mort lorsque les Amérindiens devaient franchir des rapides ou des passages dangereux. Des pratiques qui feraient frémir des écologistes de nos jours.

Plusieurs autres gestes pouvaient aussi avoir des conséquences assez graves pour l’environnement. Le père Louis Nicolas racontait dans son Histoire naturelle des Indes qu’il avait vu des Amérindiens couper des arbres entiers pour ramasser les noix ou accéder aux nids d’oiseaux. Les autochtones allumaient également des feux pour toutes sortes de raisons. On fertilisait les terres avec des feux, on régénérait les forêts de pins et d’épinettes ou encore on facilitait ainsi le transport. Mais les Amérindiens perdaient parfois le contrôle de ces incendies et, en plus de la pollution qu’ils provoquaient, ils détruisaient d’autres plantes et animaux qui n’étaient pas utilisés par la suite.

La réincarnation, une croyance religieuse amérindienne antiécolo

Comme l’expliquait l’anthropologue Shepard Krech dans le Washington Post du 29 août 1999 (traduit dans le Courrier international du 20 avril 2000), s’il est vrai que l’Europe a fait exploser la demande en castors, en bisons et en cerfs, « dans la plupart des cas, les Indiens y ont répondu avec enthousiasme, contents d’échanger des peaux de peu de valeur pour eux contre des couteaux, des vêtements ou des fusils. » Dès que naissait un marché pour la fourrure dans une région, le nombre des castors y chutait rapidement, à cause de la chasse intensive. Plus tard, dans les postes de traite, les Européens ont tenté d’introduire des mesures de conservation, notamment en refusant les peaux des animaux trop jeunes.

Shepard Krech affirme également que les Indiens tuaient fréquemment plus d’animaux qu’ils ne pouvaient en manger. Cela paraîtra paradoxal à tous les élèves québécois, car n’était-ce pas contraire à leurs croyances apprises diligemment en classe d’ECR et d’histoire ? Il faut savoir, explique l’anthropologue américain, que les Amérindiens entretenaient avec les bêtes une relation très intime : ils leur prêtaient des sentiments, une pensée humaine. Ainsi, les Indiens des Plaines croyaient qu’il ne fallait pas laisser s’échapper un bison après la chasse — il avertirait les autres de ne plus s’aventurer dans les parages. Ils s’assuraient donc de tuer toutes les bêtes prises au piège, au risque de gaspiller la viande. La plupart croyaient également en la réincarnation. Ces indiens pensaient que les animaux tués renaissaient la saison suivante et qu’en conséquence plus ils en tuaient, plus il en revenait. La disparition de l’espèce était à leurs yeux impensable.

Illustration du manuel d’ECR Mélodie, publié par Modulo, destiné au 1er cycle du primaire, manuel B, p. 8. Aucune prière chrétienne dans les manuels du primaire de cet éditeur.

 

Récupération idéologique de l’Indien

Anne Garrait-Bourrier, professeur à l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, commente la récupération politique des Amérindiens par le mouvement écologiste :

Bien des penseurs indiens sont outragés de cette récupération politique qui ramène leurs ancêtres à des clichés et qui ne tient pas compte de deux éléments essentiels : l’anachronisme et l’ignorance.

Ignorance de la culture indienne tout d’abord, et anachronisme consistant à la propulser dans le monde moderne sans la comprendre, et à des fins utilitaires.

L’anthropologue américain Shepard Krech III a, à cet égard, écrit un ouvrage magistral en 1999, The Ecological Indian : Myth and History [accessible ici en PDF], où, enfin, les pendules sont remises à l’heure. En présentant très clairement ce que sont les mythes naturalistes fondateurs de la culture indienne, et en soulignant qu’ils ne sont que des mythes accompagnés de rituels, Krech annule et détruit l’image — si pratique — de l’Indien écologiste engagé. Il part pour cela de l’une des toutes premières campagnes publicitaires écologistes de la compagnie américaine Keep America Beautiful Inc. (Gardez l’Amérique belle), en 1971, montrant sur d’immenses affiches, un visage d’Indien avec dans le regard une larme et en gros titre : Pollution : it’s a crying shame (La pollution : c’est honteux à pleurer).

Immédiatement touchée par cette vision inhabituelle, l’Amérique, prompte à s’émouvoir dès lors qu’on lui parle d’elle et de son devenir, fit de ce Crying Indian (Indien en larmes) une icône.

L’acteur « cherokee » [né de deux parents siciliens…] Iron Eyes Cody [né Espera Oscar de Corti] qui avait posé pour l’affiche n’avait rien d’un porte-parole écologiste… mais son visage buriné et le message véhiculé étaient, eux, des plus parlants.

Il s’agit là d’un cas flagrant de manipulation de l’opinion publique par l’image et par une mémoire collective stéréotypée.

Cela permit le démarrage du mouvement écologiste américain, celui-ci utilisant le visage de ce même acteur à plusieurs reprises, sans se soucier de la réaction des Amérindiens eux-mêmes.

L’Indien [Nouvel] Âge n’existe pas. Il y a d’une part le citoyen amérindien qui tente de vivre en harmonie avec sa culture traditionnelle et les exigences de sa société, et, d’autre part, les écologistes qui cherchent à faire passer leur message socio-politique. Entre les deux se trouvent les Américains qui aimeraient sans doute croire que l’Indien mythique existe toujours, qu’il n’a pas été détruit par le progrès et qu’il a le pouvoir de les sauver d’eux-mêmes.

 

Voir aussi

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La COP 26 (27, 28…) ou comment appauvrir l’Afrique  

ECR — obsession pour les Amérindiens écologistes

L’utilité de la glorification des Premières Nations    

Spiritualité autochtone, écologie et norme universelle moderne

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Ontario — Des écoles détruisent 5000 livres jugés néfastes aux Autochtones, dont Tintin et Astérix

Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement Climatique, a effectué des études en morale internationale et en théologie de la libération. Il a depuis de nombreuses années taillé ses longs cheveux, qui lui ont longtemps valu le surnom de « Jésus ». Il a été très influencé par un oncle missionnaire à Haïti, dont il avait pensé suivre les traces et à cause de qui ses parents ont adopté l’une de ses deux sœurs, d’origine haïtienne. C’est d’ailleurs ce qui l’a poussé à s’inscrire en sciences religieuses à l’Université de Montréal, au milieu des années 1990. Il abandonna cependant rapidement l’idée de devenir missionnaire religieux. Il a, toutefois, gardé une fibre moralisatrice de gauche, de prophète écologiste et de missionnaire du correctivisme politique.

Une COP26 aveuglée tant au plan scientifique qu’économico-politique

De Stanislas de Larminat sur la Sélection du Jour.

Rien de neuf ne pouvait sortir d’une COP26 réunie du 1er au 12 novembre 2021 à Glasgow et aveuglée, tant au plan scientifique qu’économico-politique.

Au plan scientifique, d’abord, les participants ont eu le comportement des « géo-centristes », opposés à Galilée, croyant que le Soleil tournait autour de la Terre. Aujourd’hui, les « carbo-centristes » croient que la cause humaine du réchauffement climatique est un fait. Comment 196 pays ont-ils pu en arriver à signer ce « pacte de Glasgow » qui exprime en degrés des objectifs d’action ? Or, ni la COP 26 ni le dernier rapport du GIEC AR6, n’ont répondu à des questions essentielles : pourquoi le GIEC ne se fonde-t-il que sur 150 ans d’observations ? Seuls 1000 ans d’observations, reconstituées par la paléoclimatologie, peuvent expliquer les causes de la période chaude médiévale et du petit âge glaciaire. On est confondu quand le GIEC reconnait que « dans la recherche et la modélisation du climat,… nous avons affaire à un système chaotique, et la prévision à long terme des futurs états climatiques n’est pas possible » et prétend que leurs modèles « n’exigent que chaque aspect de la réponse au facteur causal en question soit correctement simulé » et « ne distinguent pas explicitement les probabilités “Objectives” et “Subjectives” » ! Pourtant des milliers de publications attribuent la période chaude contemporaine à des variations d’activité solaire. Mais qu’importe, les congressistes de Glasgow ne se posent plus de questions. Galilée doit se retourner dans sa tombe à l’idée que la science se négocie dans une procédure de consensus !

Au plan économique et politique, l’Inde et la Chine ont obtenu que le terme « disparition progressive » soit remplacé par « diminution progressive » de l’énergie au charbon. Quel euphémisme ! Il n’empêche que trente-neuf pays développés ont signé un accord mettant fin, d’ici à la fin 2022, aux financements à l’étranger de projets d’exploitation d’énergies fossiles sans techniques de capture du carbone. D’abord, la capture du carbone a un effet totalement marginal malgré son coût abyssal. S’agissant de projets à l’étranger, cette technique inefficace et coûteuse serait donc réservée aux pays importateurs de centrales, généralement peu industrialisés ! Par ailleurs, les pays industriels continueraient à financer ces centrales sur leur marché sans système de capture. Les riches se réserveront ainsi une électricité produite avec une énergie abondante et bon marché tout en en privant les pays les plus pauvres. La main sur le cœur, ils se sont engagés à « lancer un dialogue » pour compenser au Sud une économie sans carbone mais, en réalité, invivable. Qui entend le cri de la zambienne, Dambisa Moyo, qui dénonce cette « aide fatale » qui alimente un cycle sans fin de corruption en Afrique ?

Cette volonté de décarboner les économies rendra les pays pauvres encore plus pauvres. Aujourd’hui, l’UE dépend à 80 % des énergies fossiles. Après avoir dépensé 1000 milliards € en 20 ans, en éolien et solaire, nous en sommes à 2,5 %. Samuele Furfari, fonctionnaire européen pendant 36 ans à la DG Énergie de la Commission européenne, connait les chiffres : en Afrique, la consommation est de 700 kg d’équivalent pétrole d’énergie/personne/an contre 3 300 kg en Europe ! 900 millions d’Africains cuisinent avec des bouses animales séchées ou du bois vert, ou, si on est riche, avec du charbon de bois. Cela représente 60 % de la consommation africaine d’énergie pour la cuisine, 99 % en Ouganda, et Madagascar. En Europe, la consommation électrique est de 6100 kWh/habitant contre 530 en Afrique. 570 millions d’Africains n’ont pas accès à l’électricité. Au Kenya, 65 % des entreprises sont victimes de délestages de deux heures entre 4 et 14 fois par semaine.

Croit-on un instant que l’Afrique pourra se développer sur ces bases ? Ni l’éolien ni le solaire ne permettront de rattraper un tel retard. Et quand certains pays d’Afrique envisagent d’investir dans des barrages hydroélectriques, ou des centrales à charbon, le Nord refuse de les financer au motif que ce ne serait pas du « développement durable » !

Quel paradoxe, de voir nos gouvernants faire acte de repentance pour le colonialisme passé et se complaire dans un néocolonialisme économiquement inique et un paternalisme écologiquement moralisateur ! Paradoxe de nos ONG qui enferment l’Afrique dans un sous-développement durable alors que la Chine est érigée en modèle social même si elle construit actuellement plus de 368 centrales à charbon pour moderniser un réseau auquel 100 % des Chinois sont connectés. Les émissions de CO2 de ces centrales sont sans risque pour la planète, puisque les variations climatiques sont le fait de variations de rayonnements cosmiques corrélées à des cycles solaires.

En Afrique, l’urgence n’est pas climatique, mais énergétique avec un charbon abondant et bon marché. À force de confondre le cri des ONG avec une prétendue clameur de la Terre, on n’entend plus celle des pauvres !



France — Les mesures du ministère de l'Éducation en faveur des transgenres à l'école

Parue le 29 septembre, une circulaire de l’Éducation nationale a fixé les principes pour un meilleur accueil des élèves transgenres en milieu scolaire. L’enseignant Olivier Gosset considère que certaines préconisations du texte outrepassent largement les missions de l’école. Olivier Gosset est enseignant et président de l’association des « Enseignants pour l’enfance » a publié une lettre ouverte sur le sujet dans Le Figaro.

Le 29 septembre 2021, Jean-Michel Blanquer publiait une Circulaire adressée à tous les membres de la communauté éducative. Intitulée « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire », cette dernière a suscité de nombreux commentaires. Les uns se félicitaient que l’école prenne en charge cette problématique affectant la jeunesse, tandis que d’autres s’indignaient des possibles conséquences que la mise en place de ce texte pouvait induire. Peu ont vu que ce dernier, multipliant injonctions et contradictions, plaçait l’école dans le monde de la confusion.

Ce qui frappe en effet à la lecture de cette directive est la succession des contradictions proférées. Tout d’abord, le Ministre se félicite d’une école qui protège un « universalisme qui définit chacun non par son identité, mais par sa dignité d’être humain ». Parallèlement, il affirme que « la transidentité est un fait qui concerne l’institution scolaire ».

Le Québec a depuis longtemps cédé à la dérive thérapeutique et d’évincement des parents que dénonce Olivier Gosset. Voir, par exemple, ces « Mesures d’ouverture et de soutien envers les jeunes trans et les jeunes non binaires »

 

De même, le texte précise que « la non-congruence entre le genre de naissance et le genre vécu ne constitue ni un trouble psychiatrique ni une pathologie ». Pourtant, le Ministre se réclame de l’Organisation Mondiale de la Santé pour alerter les personnels éducatifs sur cette question.

Enfin, la circulaire rappelle que ces difficultés renvoient chacun « à son ressenti intime » et qu’elles relèvent de la « vie privée ». Toutefois, c’est bien elle qui demande à l’école, lieu public par excellence, de prendre en charge celles-ci. À lire le texte de Monsieur Blanquer, on ne sait plus trop si la transidentité est un trouble ou un fait, si l’école doit dispenser des savoirs ou des soins, si la mission de l’État est de viser au bien de tous ou de veiller à la souffrance de chacun.

Voulant soigner les blessures d’une souffrance, l’école sort de son statut et manque à ses missions.

Olivier Gosset

Pour pallier ces difficultés, le Ministre demande à ses personnels de multiplier les tâches et d’adopter toutes les postures. Ainsi, les professeurs sont sommés de faire preuve « d’une écoute attentive et bienveillante permettant de respecter le libre choix de l’élève ». De même, ils « ont le devoir d’accompagner les jeunes » et « de leur laisser la possibilité d’explorer une variété de cheminements ».

S’ils reçoivent des confidences, les enseignants doivent veiller au « respect du principe de confidentialité », quitte à se garder d’« une communication avec les représentants légaux ». Enfin, si l’élève veut changer de prénom, il faut que « l’établissement scolaire substitue le prénom d’usage, de manière cohérente et simultanée dans tous les documents qui relèvent de l’organisation interne ». Multiples et injonctives, ces recommandations donnent le vertige. Le professeur est ici sommé d’être à la fois écoute attentive, tuteur, substitut des parents et chambre d’enregistrement des changements de civilités.

La seule question pour laquelle le cadre scolaire a quelque compétence est celle du genre grammatical.

Olivier Gosset

Consciente de la charge qui pèserait alors sur l’école, la directive recommande à celle-ci d’entrer dans une « démarche collective et partenariale ». Sous ce beau nom, il faut entendre que l’institution, dépassée par une problématique qu’elle prétend régler, accepte « le concours des associations, agréées ou conventionnées ». Ici, la porte s’ouvre et peut entrer qui veut : la dernière limite qu’accepte de lever l’école est celle de sa propre sanctuarisation.

La Circulaire Blanquer marque une étape dans la politique que mène l’Éducation nationale au sujet des questions liées à la sexualité et à la vie affective. Voulant soigner les blessures d’une souffrance, l’école sort de son statut et manque à ses missions. Demandant aux professeurs de jouer tous les rôles et réclamant le secours d’organismes non scolaires, l’institution trahit le pacte qui la lie à la nation comme aux familles.

Faut-il rappeler que le Code de l’Éducation assigne comme premier objectif à l’école celui de « la transmission des connaissances » ? Faut-il redire que « L’État » y « garantit l’action éducative des familles » ? Que penser d’une école qui voudrait guérir au lieu d’enseigner ? Que dire de professeurs cachant de lourds secrets à des parents inquiets ? Qu’en est-il d’une structure d’État ouvrant ses portes au tout-venant ? Se perdant dans d’insolubles questions d’identité, l’institution risque ici la perte de son identité. À cet égard, la seule question pour laquelle le cadre scolaire a quelque compétence est celle du genre grammatical. Et c’est à elle qu’il ferait bien de revenir s’il veut porter secours : masculin et féminin sont des catégories qui s’enseignent dans la langue pour pouvoir être ensuite réfléchies par les consciences. Donnons d’abord à nos élèves les mots qui leur permettront ensuite de penser leurs maux.

Voir aussi

France — Le niveau de défiance des parents envers l’Éducation nationale devient « préoccupant » 

Zemmour : je suis tombé dans le panneau de J-M Blanquer 

France — Traitement inégalitaire pour les lycéens des écoles libres au bac 2021 

Alors que la « culturophobie » menace l’école, le ministre Blanquer lutte contre la transphobie 

France — L’Éducation nationale se dit pro-innovation, mais ne l’est pas dans les actes

France — Enseignement à distance, la semaine calamiteuse 

France — Fin de la liberté d’instruire ses enfants à la maison sauf stricte et subjective autorisation gouvernementale (sous Macron et Blanquer)

Michel Desmurget: “Le télé-enseignement est une parodie éducative”

France — Nouveau bac : fin de l’anonymat et du diplôme national, davantage de bachotage, pas plus d’excellence ?

France — La droite conservatrice se trompe-t-elle au sujet de Blanquer ?

France — le ministre de l’Éducation Blanquer bouscule la « gauche pédago »  (jeu de rôles)

Réforme Blanquer : en 2021, le programme de philosophie « sera féminisé et deviendra plus multiculturel qu’il ne l’est actuellement » 

France — la Théorie du genre enseignée (rien n’a changé avec Blanquer) 

France — Chute inquiétante du niveau des élèves dans les quartiers immigrés

Très faible impact du dédoublement très coûteux des classes en « banlieues difficiles »

France — dédoublement des classes en banlieues, fermeture de 200 à 300 classes en milieu rural

France — Classes dédoublées en banlieues immigrées, l’intendance ne suit pas 

Pour Barbara Lefebvre, M. Blanquer le ministre de l’Éducation en France, a tenu à sa nomination un langage conservateur. mais il ne changera rien sur le fond  

France — Le grand oral du bac risque d’être une fabrique de conformisme

France — Les écoles hors contrat, coupables de mieux réussir que l’État ? 

France — malgré des moyens très importants, constat d’échec des politiques d’éducation prioritaires

 

Universités — la bureaucratisation de l'idéologie woke

Le texte ci-dessous est de Joseph Facal dans le Journal de Québec, il résume un article de Jonathan Kay. 

Mais rappelons d’abord le contexte. La pandémie a été une période difficile pour les universités canadiennes, car l’adoption des salles de classe virtuelles a amené certaines familles à se demander si le modèle d’éducation traditionnel dans des universités de briques et de mortier en valait le prix. 

De nombreuses facultés canadiennes dépendent financièrement des étudiants étrangers, source de revenus remise en question par la gestion draconnienne de la COVID. 

En avril, l’Université Laurentienne en Ontario s’est déclarée insolvable. En conséquence, elle a supprimé des dizaines de programmes et a licencié une centaine de professeurs — chose inédite. 

Et pourtant, aucune de ces questions n’était inscrite à l’ordre du jour de la réunion du 27 octobre d’Universités Canada dont nous parlent Joseph Facal et Jonathan Kay ci-dessous. En vérité, l’Université Laurentienne ne mérite même pas une mention dans l’ordre du jour.  Et la seule référence substantielle à la pandémie de COVID consiste en un aparté selon lequel « les femmes ont été touchées de manière disproportionnée pendant la pandémie ». Comme on le verra ci-dessous, au lieu de cela, tous les principaux points d’action de l’ordre du jour sont consacrés à la très connoté et très woke « justice sociale ».


Le 27 octobre dernier, 53 hauts dirigeants des universités canadiennes se sont discrètement réunis à Ottawa. 

Les universités québécoises qui font partie d’Universités Canada.

 

Ont-ils discuté de leurs difficultés financières, des priorités de la recherche scientifique, de l’avenir des cours en ligne, de la quête de l’excellence, de partenariats internationaux, etc. ?

Orwellien

Pas du tout. Leurs discussions furent centrées sur une série de documents dont Jonathan Kay a obtenu copie.

Il y est proposé d’écarter pour de bon la non-prise en compte de la race, associée à un déni coupable, pour y substituer l’obligation pour chaque bureaucrate universitaire de réfléchir à son « identité ethno-raciale », à ses « biais raciaux » et à sa trajectoire privilégiée en comparaison de ceux qui vivent une « marginalisation liée à leur race ». 

 



Il y est lourdement question de « fragilité blanche », d’instructions sur l’utilisation ou non de certains mots et phrases, etc.

La pièce de résistance est cependant le plan d’action proposé, truffé de schémas, graphiques, questionnaires, etc., dont nous montrons un mini-échantillon.

Les efforts antiracistes sont classés en quatre catégories, allant de « l’introspection affirmative » à la reconfiguration de « l’architecture sociale ».

Les dirigeants doivent se classer dans un schéma en 15 points construit autour des « axes de privilège, domination et oppression ».

La « diversité » se saisit à quatre niveaux, allant de « l’analyse » au « changement organisationnel » en passant par la « conceptualisation de la sécurité culturelle ».  

On se croirait dans un séminaire de MBA.

L’idéologie se concrétise en cibles, outils, questionnaires, tâches, rôles, responsabilités, indicateurs de performance, etc.

Il faut terminer d’installer, dit le rapport, des cadres seniors chargés d’appliquer des politiques antiracistes sur tous les campus, et des « champions juniors de l’antiracisme » récompensés à coup de promotions, de hausses de salaires et de bonis.

Un conseiller en équité dûment formé devrait être impliqué dans chaque décision d’embauche.  

Tous les candidats pour un poste devront remplir un questionnaire sur l’antiracisme, le sujet devra être abordé dans toutes les entrevues, et l’ardeur de leur antiracisme devra être priorisée lorsque plusieurs candidats seront dans la même « zone d’excellence ».

Nous sommes très loin de quelques étudiants « crinqués » [furieux, enragé, furax] par un mot ou de professeurs militants qui veulent écarter un collègue.

C’est un véritable rouleau compresseur, un plan d’action visant une reconfiguration complète, orwellienne, de type soviétique, des institutions, pilotée d’en haut, qui veut s’étendre sur des années et s’appliquer à toutes les dimensions du milieu universitaire canadien.

Flics

Bref, l’idéologie woke est de plus en plus bureaucratisée, logée tout en haut de la hiérarchie du pouvoir universitaire, traduite en politiques quotidiennes visant à imposer cette nouvelle orthodoxie, en plus de servir d’autoroute pour des carrières de policier de la pensée.

L’auteure du document est Arig Al Shaibah, vice-présidente associée à l’Équité et à l’Inclusion à l’Université McMaster, dont les revenus en 2020 étaient de 249 000 $.

Pour en savoir plus, allez sur le site quillette.com et lisez « Anti-Racism as Office-Politics Power Play: A Canadian Academic Case Study ». 

Voir aussi 

Les sciences dures et le wokisme 

Surfinancement des établissements anglophones au Québec

McGill — discrimination positive en médecine pour les candidats qui « s'identifient comme noirs »

Universités — candidats universitaires en sciences (STIM) doivent promettre de promouvoir la diversité (avec liste de postes de professeur ou d’assistant à pourvoir).

Université anglophone Concordia : « Repérer et contrer le colonialisme en physique contemporaine »

Étude sur les pressions, les sanctions, la discrimination politique et l’autocensure à l’université

Aux racines du wokisme dans les universités. Pourquoi cette crise dans les universités ?

Royaume-Uni — le gouvernement s’attaque à la censure et l’intimidation dans les universités 

La lâcheté de l’université anglophone McGill et son « éducation de qualité » 

Longue confrontation lors d’un cours d’anatomie pour avoir rappelé l’importance biologique des différences sexuelles

Universités : après le mot « nègre » devenu tabou, le bannissement de « femme » et « homme » pour transphobie ?  

« Le wokisme, un opium des intellectuels »

Éducation au Québec — « Mais c’est très colonial que de déterminer des échéanciers et de s’y tenir à tout prix ! »

Legault parle de garantir la liberté de débat à l’université, Martine Delvaux de l’UQAM parle de « police » gouvernementale  

Sur l’île de Montréal, chaque étudiant qui étudie en anglais reçoit 56 % de plus de fonds d’immobilisation que celui qui étudie en français  

Étude sur les pressions, les sanctions, la discrimination politique et l’autocensure à l’université  

Étudiants radicaux contre un professeur émérite de l’Université McGill (2020)

Police du correctivisme — étudiant de McGill doit s’excuser pour « microagression » (2014)