Effets du GPS sur la mémoire spatiale et l’hippocampe
- Les participants ayant une expérience plus importante d’usage du GPS présentaient une performance plus faible dans des tâches de navigation autonome — c’est-à-dire sans aide électronique.
- Sur une petite portion des participants réévalués trois ans plus tard, une utilisation plus fréquente du GPS était associée à un déclin plus marqué de la mémoire spatiale dépendante de l’hippocampe.
- Cette association ne s’expliquait pas par un sens de l’orientation subjectif plus faible — les utilisateurs fréquents de GPS n’étaient pas intrinsèquement moins doués pour s’orienter, ce qui suggère que c’est bien l’usage répété du GPS qui diminue l’engagement des circuits hippocampiques.
- Le cerveau n’a pas besoin d’analyser l’environnement, de repérer des points de repère ou d’intégrer des relations spatiales complexes.
- On mobilise davantage des circuits de type réponse stimulus (associés à des habitudes automatiques) plutôt que des stratégies basées sur la formation de cartes mentales complexes, qui demandent une activité soutenue de l’hippocampe.
Implications au‑delà de la navigation
L’impact du GPS sur la mémoire spatiale n’est que la partie émergée d’un phénomène plus large : la dépendance aux technologies numériques peut affecter d’autres fonctions cognitives essentielles, notamment la mémoire, l’attention et l’apprentissage. Plusieurs études montrent que l’accès constant à des informations externes — qu’il s’agisse d’instructions GPS, de moteurs de recherche ou d’écrans en général — diminue la nécessité de mobiliser activement certaines compétences intellectuelles, ce qui peut entraîner un affaiblissement progressif de ces facultés.
Par exemple, une revue publiée dans Learning and Instruction met en évidence que l’usage massif d’outils numériques pour chercher de l’information réduit la mémorisation et la compréhension profonde des contenus. Les lecteurs n’ont plus besoin de retenir les faits ou de structurer mentalement les informations, ce qui affaiblit l’engagement des circuits cérébraux responsables de la mémoire à long terme [2].
L’attention soutenue et la mémoire de travail sont également touchées. Une étude sur des étudiants exposés de manière intensive aux écrans montre que cette exposition est associée à une diminution de la performance en résolution de problèmes, en attention et en mémoire de travail, des fonctions nécessaires pour le calcul mental, la lecture attentive et la planification [3].
Chez les adultes plus âgés, des recherches contrôlées ont démontré que des exercices cognitifs ciblés — lecture à voix haute, calcul mental ou mémorisation active — améliorent l’attention, la mémoire verbale et la vitesse de traitement, ce qui confirme que le cerveau reste plastique et que ses capacités se renforcent par l’usage régulier [4].
Enfin, chez les jeunes, plusieurs synthèses sur l’usage des écrans montrent que la cognition générale et l’apprentissage peuvent être affectés négativement par un usage non pédagogique et excessif. Les distractions numériques et la lecture superficielle favorisent une forme de « paresse cognitive », réduisant la capacité à se concentrer, à mémoriser et à traiter des informations complexes [5].
Dans l’ensemble, ces observations confirment que la dépendance aux technologies, qu’il s’agisse de GPS ou d’écrans numériques, peut réduire l’engagement de nos facultés cognitives si elles ne sont pas sollicitées activement, et qu’il est donc important d’alterner entre usage numérique et pratiques intellectuelles stimulantes pour maintenir ses capacités mentales.
Conclusion
La dépendance accrue aux GPS diminue non seulement notre effort mental — elle change la manière dont notre cerveau s’emploie à naviguer et à traiter l’information. Les données scientifiques disponibles montrent que :
- Un usage fréquent du GPS est associé à une baisse des performances de la mémoire spatiale dépendante de l’hippocampe.
- Des activités intellectuelles non sollicitées par la technologie, comme la lecture approfondie, le calcul mental ou la mémorisation, peuvent également voir leur efficacité diminuer.
- Alterner entre usage numérique et exercices cognitifs traditionnels permet de préserver et stimuler les facultés mentales.
[1] Habitual use of GPS negatively impacts spatial memory during self-guided navigation, Nature, Scientific Reports, 2020
[2] Know what? How digital technologies undermine learning and remembering, ScienceDirect, 2021
[4] Reading Aloud and Solving Simple Arithmetic Calculation Intervention (Learning Therapy) Improves Inhibition, Verbal Episodic Memory, Focus Attention and Processing Speed in Healthy Elderly People: Evidence from a Randomized Controlled Trial, PMC, 2016
[5] Quels sont les effets de l’utilisation des écrans sur la cognition ?, ORES, 2023
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