samedi 21 avril 2018

L'État-providence : une pompe aspirante pour tous les immigrants « illégaux »

Chronique de Mathieu Bock-Côté sur la crise des immigrants illégaux au Québec. Le texte en italique est de ce carnet.

On veut nous faire croire que le Québec s’apprête à connaître une vague sans précédent de réfugiés à la frontière américaine, par le désormais célèbre chemin Roxham. Mais c’est faux. À jouer avec les mots, on fausse notre perception de la réalité.

Gendarme au chemin Roxham transformé en porteur et voiturier

Réfugiés ?

Comme l’été passé, mais en de plus vastes proportions, le Québec subira une vague d’immigrants illégaux, traversant la frontière avec la complicité du gouvernement fédéral et la bénédiction du système médiatique. Ce dernier nous les présente comme les damnés de la terre auxquels nous serions obligés d’ouvrir nos portes, sans quoi nous manquerions de cœur.


Ils seront 400 à arriver quotidiennement, et c’est le Québec qui devra payer les infrastructures nécessaires à leur accueil. À Montréal, les écoles débordent. Évidemment, nous avons des responsabilités humanitaires, et personne ne les renie. Mais ce n’est plus de cela qu’il s’agit. Notre système social fonctionne à la manière d’une pompe aspirante pour les illégaux, et le droit des réfugiés, complètement détourné et instrumentalisé, ouvre une nouvelle vanne pour favoriser une migration massive et continue.

Nous le savons, la grande majorité de ceux qui traversent la frontière sont de faux réfugiés qui se fichent du système légal canadien et des règles mises en place pour accueillir ceux qui veulent vivre ici ou demander notre aide. Ils trichent et prennent la place de ceux qui suivent les règles. Nous le savons aussi, le système de renvoi de ceux qui voient leur demande refusée est terriblement inefficace.


Frontière


Le commun des mortels se demande : pourquoi le gouvernement fédéral ne fait-il pas respecter la frontière, qualifiée par François Legault de « passoire » ? Pourquoi est-ce le Québec qui doit prendre la facture pour les « invités de Justin Trudeau » — je cite Jean-François Lisée. L’immigration illégale heurte les fondements de notre société. L’essentiel n’est pas d’en atténuer les effets négatifs, mais de l’arrêter.



Les écoles pleines à craquer, qui paie ?

Dans l’ensemble du Québec, 2500 enfants sont venus s’ajouter au réseau scolaire l’été dernier, a estimé le Premier ministre Philippe Couillard hier.

« Ça, c’est comme cinq écoles de plus d’un coup. Ce n’est pas vrai que tu peux ajouter cinq écoles chaque été. »

Au-delà des locaux, il faut aussi trouver plus de profs spécialisés en francisation alors qu’une pénurie de personnel sévit. « On se les arrache tous », dit Mme Guillemette.

Les écoles de la région de Montréal ne voient pas comment elles pourront trouver l’espace et les profs pour accueillir le double d’élèves migrants l’an prochain. La vague d’entrée à la frontière de cet été s’annonce encore plus grosse que celle de l’an passé.

« Ça suffit », soupire Maryse Maheux-Dion, directrice de l’école primaire Saint-Noël-Chabanel, dans l’arrondissement de Saint-Michel à Montréal.

L’an passé, elle avait cinq groupes de jeunes qui ne parlent pas encore français. En quelques mois à l’automne, ce nombre a presque triplé.

Son école de plus de 1000 élèves compte maintenant 14 classes d’accueil.

Rappelons que chaque élève coûtait déjà en moyenne 12 000 $ au Trésor public en 2010 chaque année... L'instruction de ces 2500 enfants coûtera donc 30 millions par an aux contribuables. Or les parents de ces jeunes « réfugiés » sont le plus souvent sous-diplômés, c’est pourquoi ils n’émigrent pas par le système d’immigration régulière. Ils ne paieront donc jamais ce simple poste de dépenses annuelles avec leurs impôts.

Justin Trudeau avait déclaré, le 7 septembre 2017 : « À ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre, sachez que le Canada vous accueillera indépendamment de votre foi. La diversité fait notre force. »

Étonnamment le Premier ministre au Québec, Philippe Couillard, l’avait applaudi sans rien demander en retour. Pourtant, il savait que l’arrivée au Québec, d’un flux aussi massif de demandeurs d’asile allait nécessiter des ressources financières et matérielles supplémentaires.

Pour Mario Dumont, Justin Trudeau après avoir fait ce vibrant appel est en train de créer des masses de futurs clandestins au Québec. Rappelons que le Canada rejette ainsi 90 % des demandes d’asile faites par des Haïtiens.

Des années en attente

À la base du problème, la hausse fulgurante des temps d’attente avant que soit traitée une demande. La loi prévoit qu’un demandeur d’asile au Canada devrait voir son dossier traité en 60 jours. Présentement, les gens sur le terrain nous parlent plutôt de délais de l’ordre de 23 mois. La machine est engorgée par le nombre de cas.


Le gouvernement Trudeau nous promet de nouvelles ressources pour réduire ces délais. Avec la hausse prévue du nombre de demandeurs d’asile cette année, ce sera déjà beau s’ils parviennent à empêcher la détérioration des délais. Aux 23 mois pour voir sa cause entendue, il faut ajouter le temps d’obtenir le jugement, puis les délais d’appel pour ceux dont la demande est rejetée.

En somme, une personne qui ne respecterait aucun des critères pour obtenir le statut de réfugié au Canada pourrait néanmoins passer des années au pays. Trois, quatre, cinq. La famille pourra aussi s’être agrandie durant cette période. Des enfants qui seraient nés au cours de ces années seraient par définition des citoyens canadiens ayant vu le jour sur notre sol. Vous voyez la situation se compliquer...

Les personnes qui ne répondent pas aux critères pour devenir réfugiés finiront par se faire dire non par les autorités canadiennes. Quels seront alors les choix disponibles ? Retourner dans leur pays d’origine, après quelques années vécues au Canada, risque d’être peu tentant.

Bien des gens ne se présenteront tout simplement plus aux autorités et choisiront de vivre clandestinement au Canada. Une vie sous le radar. Un travail au noir, une vulnérabilité terrible. Mais une vie en sol canadien sera malgré tout perçue comme une meilleure chance de réussite pour leurs enfants.

Jouer le système

Ne soyons pas naïfs : c’est exactement ce que les passeurs vendent. Je te rentre au Canada. Tu n’obtiendras pas le statut de réfugié, mais les délais sont longs et tu vas pouvoir vivre là pendant quelques années. Ensuite, on verra.

Le Canada se retrouvera devant le terrible dilemme : expulser des familles ou passer l’éponge sur des années de lois bafouées, comme si les lois du pays étaient une farce.

Justin Trudeau veut-il vraiment laisser un nouveau problème d’immigration clandestine en héritage ? J’y réfléchirais à deux fois.

Bonus


Reportage publicitaire de la société radiotélédiffusion d’État (CBC) filmé dans deux écoles de Winnipeg (Manitoba). Les derniers qui encouragent les Jets (de Winnipeg) sont les francophones (majoritaires au Manitoba quand celui-ci s’est joint à la Confédération), ils ne donnent ni leur origine ni la langue qu’ils utilisent, contrairement aux autres élèves. Ils disent « Vas-y Jets », il faudrait sans doute dire « Allez les jets ! »

Religion — baisse de la fréquentation de la messe sous le pape François, stabilité chez les protestants

De 2014 à 2017, en moyenne 39 % des catholiques états-uniens ont déclaré avoir fréquenté l’église au cours des sept derniers jours.

Il s’agit d’une baisse par rapport à une fréquentation moyenne de 45 % de 2005 à 2008 et de 75 % en 1955.

En revanche, les 45 % de protestants américains qui ont déclaré une présence à l’église chaque semaine de 2014 à 2017 sont essentiellement les mêmes que ceux d’il y a dix ans. Ils épousent en grande partie la tendance à long terme pour ces dénominations religieuses.

Au milieu des années 2000, le nombre de fidèles catholiques hebdomadaires s’était stabilisé à 45 % après avoir chuté de manière considérable à partir du Concile Vatican II (1962-1965) et de ses conséquences tumultueuses. Voir à ce sujet l’excellent livre de Guillaume Cuchet.


La première grande chute de la fréquentation de la messe (dans l’histoire récente) de la part des catholiques a eu lieu de 1950 à 1970 quand le pourcentage des catholiques qui déclaraient avoir assisté à la messe cours des sept derniers jours a chuté de plus de 20 points de pourcentage. Cette fréquentation a ensuite diminué en moyenne de quatre points par décennie jusqu’au milieu des années 1990 avant de se stabiliser jusqu’au milieu des années 2000. Depuis lors, la tendance à la baisse a repris, le pourcentage de « messalisants » ayant chuté de six points au cours de la dernière décennie.

Gallup ne fournit pas un décompte exact d’une année à l’autre, par conséquent, la période 2005-2008 sélectionnée pour l’enquête (46 % de messalisants) correspond aux quatre premières années de la papauté de Benoît et la période 2014-2017 (39 % de messalisants) coïncide au début du pontificat de François (le pape François est devenu pape en 2013). L’Office central des statistiques du Vatican a publié un rapport l’année dernière dans lequel il a constaté que les vocations au sacerdoce ont poursuivi leur tendance à la baisse depuis 2012. Le déclin s’est accéléré sous le pontificat du pape François. Le nombre total de séminaristes dans le monde a chuté de 118 251 en 2013 à 116 843 en 2015.

Cette analyse est basée sur plusieurs enquêtes Gallup menées vers le milieu de chaque décennie des années 1950 à nos jours. Les données pour chaque période fournissent une taille d’échantillon suffisante pour examiner la fréquentation des églises chez les protestants et les catholiques, les deux plus grands groupes religieux du pays, ainsi que les tendances selon l’âge au sein de ces groupes. La taille des échantillons n’est pas suffisante pour permettre l’analyse de dénominations protestantes spécifiques ou de religions non chrétiennes.

plus de la moitié des catholiques les plus âgés ne vont désormais plus à la messe hebdomadaire

En 1955, les catholiques pratiquants de tous les groupes d’âge ont largement respecté l’obligation de masse hebdomadaire de leur foi. À cette époque, environ trois catholiques sur quatre, quel que soit leur âge, ont déclaré avoir été à l’église la semaine d’avant. Cette fréquentation a brusquement chuté dans les années 1960, alors que les jeunes catholiques sont devenus de moins en moins susceptibles d’y assister. La baisse s’est accélérée au cours des années 1970 et s’est poursuivie à un rythme plus lent depuis lors.


Pendant ce temps, depuis 1955, il y a eu aussi un déclin lent, mais régulier de la fréquentation régulière des églises chez les catholiques plus âgés. Cela inclut des déclins de 10 points ou plus au cours de la dernière décennie parmi les catholiques âgés de 50 ans et plus, menant à la situation actuelle où plus de 49 % des catholiques dans toutes les catégories d’âge déclarent aller à l’église la semaine dernière.

La seule augmentation de la fréquentation hebdomadaire à la messe est venue des catholiques américains âgés de 30 à 39 ans, qui ont augmenté de trois points de pourcentage, passant de 40 à 43 %. Le groupe des jeunes adultes âgés de 21 à 29 ans a connu une légère hausse de la fréquentation hebdomadaire de Benoît XVI de 2005 à 2008, à 29 %. Mais cela a ensuite chuté sous le pape François entre 2014-17 à 25 %. Le taux actuel de fréquentation hebdomadaire des églises chez les protestants et les catholiques est similaire à la plupart des groupes d’âge, selon l’enquête, à l’exception de ce groupe démographique de 21 à 29 ans. Les protestants du segment des jeunes adultes sont plus susceptibles que les jeunes adultes catholiques (25 %) de dire qu’ils ont fréquenté l’église au cours des sept derniers jours (36 %). Cette baisse de la fréquentation de masse chez les jeunes adultes catholiques et la disparité entre leur taux de fréquentation et celui de leurs homologues protestants vient alors que François est en train de convoquer un synode de la jeunesse.

Pour maintenir la cohérence avec les sondages Gallup antérieurs lorsque la population de l’échantillon était âgée de 21 ans et plus, cette analyse définit le groupe d’âge le plus jeune comme les personnes de 21 à 29 ans plutôt que la tranche d’âge de 18 à 29 ans.

La fréquentation hebdomadaire du temple se maintient chez les protestants de tous âges

La fréquentation des temples protestants américains n’était pas aussi élevée que celle des églises catholiques dans les années 1950 — mais elle n’a pas diminué avec le temps. La fréquentation des églises protestantes a diminué dans les années 1960 et 1970 chez les 21 à 29 ans, mais elle a depuis rebondi. Parmi les personnes de 60 ans et plus, la fréquentation hebdomadaire a augmenté de huit points depuis les années 1950.

Actuellement, le taux de fréquentation hebdomadaire des églises chez les protestants et les catholiques est similaire pour la plupart des tranches d’âge.

Les protestants (36 %) sont plus susceptibles que les catholiques (25 %) de dire qu’ils y ont participé à un culte religieux au cours des sept derniers jours.


L’immigration diminue la part des protestants

Bien que le taux auquel les protestants vont à l’église ait tenu bon au cours des six dernières décennies, le pourcentage d’Américains se disant protestants a fortement diminué, passant de 71 % en 1955 à 47 % au milieu de 2010. Si en 1955, 89 % des Américains étaient blancs, ils n’étaient plus que 64 % en 2019 à se dire blancs non hispaniques (ce chiffre est de 61 % en 2016).

Depuis 1999, la définition des protestants par Gallup inclut ceux qui utilisent le terme générique « Chrétien » ainsi que ceux qui se disent protestants ou qui nomment une foi protestante spécifique.

En revanche, alors que l’Église catholique a connu une baisse de fréquentation aux États — Unis, le pourcentage global de catholiques s’est maintenu assez régulièrement — en très grande partie à cause de la croissance de la population hispanique américaine.

Vingt-deux pour cent des adultes américains s’identifient aujourd’hui comme catholiques alors qu’ils étaient 24 % en 1955.

Signe troublant pour ces deux confessions religieuses : les jeunes adultes, en particulier ceux âgés de 21 à 29 ans, sont moins susceptibles que les adultes plus âgés de s’identifier comme protestants ou catholiques. C’est en partie parce que plus de jeunes s’identifient comme « autres » ou avec d’autres religions non chrétiennes, mais surtout en raison de la grande proportion — 33 % — qui se dit « sans religion ».

Bilan

Il est révélateur de noter que la fréquentation hebdomadaire de la messe baisse alors que la fréquentation au culte protestant est restée globalement stable. Cet affaissement suggère que cette chute s’explique par des problèmes confessionnels propres aux catholiques plutôt que des changements sociétaux plus larges qui toucheraient toutes les confessions. Il serait probablement injuste d’attribuer tout le déclin de la fréquentation de la messe catholique au seul effet François, bien que l’on sache que plus une église est progressiste moins elle semble attirer de fidèles (il est plus facile de regarder la télévision et sa religiosité progressiste faite d’écologisme, de droit-de-l’hommiste, de féminisme exacerbé et d’immigration illimitée).


Source : Gallup

Pas de prière chrétienne dans ce manuel ECR,
mais bien une à un esprit amérindien
créateur et protecteur de la Terre

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Québec — Encore moins d'enseignants masculins

Les profs masculins sont toujours de plus en plus rares dans les écoles du Québec, a constaté Le Journal.

Selon les plus récents chiffres obtenus par le Journal de Québec auprès du ministère de l’Éducation, les hommes représentent 24,7 % du personnel enseignant des commissions scolaires, comparativement à 25 % pour l’année précédente. Cette proportion est en baisse constante dans le réseau scolaire québécois depuis au moins dix ans.

Les hommes sont encore plus rares dans les écoles primaires, où ils ne représentent que 14,2 % des enseignants. En maternelle, ils ne comptent que pour 2 %. Au secondaire, les hommes occupent 35 % des classes, un nombre qui est aussi en diminution. La situation a toutefois déjà été différente, puisque les enseignants masculins ont été majoritaires au secondaire jusqu’en 1997.

Un « cercle vicieux »

Éric Tremblay, qui enseigne à des élèves de sixième année, voit dans ces chiffres un « cercle vicieux » à briser.

« Il y a de moins en moins de gars en enseignement, donc de moins en moins de modèles. C’est extrêmement dommage », affirme cet enseignant qui a discuté de cette réalité avec ses élèves, en classe.
 
Selon M. Tremblay, le modèle traditionnel de la classe est moins attirant pour les hommes.
« Les gars me disent qu’ils ne se reconnaissent pas là-dedans », lance-t-il.

Cet enseignant n’a toutefois pas hésité à bousculer le statu quo dans sa classe, qui ne ressemble à aucune autre.

Heureusement, le réseau scolaire est de moins en moins rigide, ajoute-t-il. « Il y a de plus en plus de place pour être toi-même et ça fait du bien. »

En baisse dans les directions

Dans les rangs des directeurs d’école, les hommes sont aussi de moins en moins nombreux.

Seulement 34,7 % d’entre eux dirigent une équipe-école, une proportion qui est aussi en baisse constante.

De nombreux experts ont souvent souligné l’importance d’avoir une présence masculine plus forte en enseignement.

Source : Journal de Québec

France — Pour les médias, un bon étudiant est un étudiant « en grève »

Du carnet d’Ingrid Riocreux, un décryptage de la rhétorique des médias français (qui s’appliquerait sans doute aux québécois) :

Pour les médias, un bon étudiant est un étudiant « en grève »
La violence ne viendrait pas des bloqueurs, mais des anti-bloqueurs



On trouve sans peine des articles et des reportages intitulés :


Mais on cherchera en vain : « qui sont les bloqueurs qui s’en prennent aux étudiants non grévistes ? »

Pourtant, le Premier Ministre, comme celui de l’enseignement supérieur, ou encore le Président de la République ont insisté sur le caractère minoritaire des étudiants au sein des comités de blocage des universités. Mais il est vrai qu’ils ont tout intérêt à nier la légitimité de ceux qui s’opposent à la réforme portée par le gouvernement :

Je constate quand même que dans beaucoup d’universités occupées, ce ne sont pas des étudiants, mais ce sont des agitateurs professionnels, les professionnels du désordre dont parlait Michel Audiard. […] [Et les vrais étudiants] doivent comprendre que s’ils veulent avoir leurs examens en fin d’année, c’est mieux de les réviser, parce qu’il n’y aura pas d’examens en chocolat dans la République. (Emmanuel Macron sur TF1)

Sur les examens en chocolat, on pourra aussi écouter Raphaël Enthoven et son billet matinal particulièrement bien senti :



Le problème est, en réalité, beaucoup plus large et devrait amener les médias à s’interroger sur la manière dont ils traitent les mouvements de contestation en milieu étudiant. On ne devrait pas les aborder comme n’importe quel soulèvement social. À proprement parler, un étudiant ne peut pas être « en grève » puisqu’il n’est pas salarié. La Charte de Grenoble (1946) qui consacre l’avènement du syndicalisme étudiant peut bien présenter les étudiants comme des « travailleurs », reste que les moyens d’action de ces mouvements eux-mêmes et leur capacité de nuisance invalident cette assimilation abusive.

L’étudiant « gréviste » peut, pour participer à des manifestations, se priver de cours. Mais c’est un risque qu’il prend, un dommage qu’il s’inflige et dont il doit être prêt à assumer les conséquences. Il ne pénalise que lui-même puisque, étant étudiant, il n’apporte rien à l’institution, mais a tout à recevoir d’elle.

À l’inverse, un ouvrier gréviste, au surplus s’il bloque son usine, paralyse les moyens de production et refuse de contribuer par sa force de travail à la prospérité de l’entreprise. Son action a donc un sens, en lien direct avec l’objet de sa colère.

Mais un étudiant qui bloque une université nuit seulement aux autres étudiants. Son action n’a donc aucun sens, manque sa cible et ne peut aboutir qu’à jeter le discrédit sur les revendications du mouvement.

Sans compter que n’importe quel petit lettreux un peu politisé ne saurait, avec ses petits bras, lancer et tenir un blocage. Les infos que j’ai pu recueillir ici et là confirment que « les étudiants » (dixit les médias) qui bloquent telle ou telle fac ne sont que très minoritairement des étudiants de la fac en question, certains n’étant même pas étudiants du tout.

Et là, on attendrait une enquête journalistique un peu rigoureuse pour nous donner des informations plus précises sur : qui vient d’où ? dans quel but et dans quelles proportions ? À bon entendeur…

La focalisation diabolisante sur les anti-bloqueurs, facilement réduits à quelques groupuscules néo-fascistes venus en découdre avec leurs homologues d’extrême gauche (dont tout le monde, en revanche, s’obstine à nier l’existence) prouve une nouvelle fois que, même pour les journalistes, un bon étudiant anti-blocage est un étudiant qui se tait.

Les bloqueurs ont le droit de transformer les AG en séances d’intimidation collective n’ayant absolument rien de démocratique, ils ont le droit de dégrader les locaux et de brutaliser leurs camarades de promo qui persistent à demander la tenue des cours et des examens.

Ils ont une marge de manœuvre très large avant qu’on les accuse de violence. Ceux d’en face ont des possibilités d’action bien plus réduite. S’ils essaient de forcer un barrage de grévistes : ce sont eux qui font preuve de « violence ».

À la grande époque du CPE [contrat première embauche], j’étais en classe préparatoire [aux Grandes écoles], ce qui signifie que la plupart des bloqueurs autour de moi étaient des lycéens (+ quelques étudiants de prépa). Avant de leur abandonner l’établissement, le proviseur avait négocié avec eux pour que les étudiants de prépa puissent continuer à bénéficier des cours, si bien que nous devions, chaque jour, présenter notre carte de khâgneux à des gamins qui nous autorisaient alors à entrer dans notre propre établissement ! Un matin, j’ai estimé que je n’avais pas à me plier à cette mascarade et j’ai fait mine de passer sans les voir. Une petiote m’a rattrapée et m’a réclamé mon attestation d’inscription en prépa. « Ah oui, c’est vrai, ai-je répondu, il faut que je te montre mon Ausweis pour entrer dans mon propre lycée ». Je l’ai vue se décomposer. Pas une seconde elle n’avait imaginé qu’on puisse la considérer comme une fasciste. Elle dut s’en ouvrir à ses camarades de lutte, car le lendemain, une affiche en format A3 était placardée à l’entrée de l’établissement ; paradoxalement, elle ne s’adressait pas aux personnes qui voulaient y entrer, mais aux élèves qui tenaient les piquets de grève : « ils nous traitent de fascistes ! » en était le titre chargé d’un étonnement rageur. L’épisode de l’Ausweis y était relaté : « alors qu’elle réclamait sa carte d’étudiante à une élève de classe préparatoire, l’une de nos camarades s’est vu répondre, etc. » et le document expliquait que les grévistes étaient déjà bien gentils d’accepter de nous laisser entrer et qu’il fallait remettre les choses à leur place : si fascistes il y avait, c’était moi, c’étaient tous ces gens qui ne soutenaient pas le mouvement de protestation contre le CPE et qui étaient donc « les complices du gouvernement, du grand capital et de la police ». Les mêmes rebelles à la petite semaine furent pourtant bien obligés de l’appeler, la police, quand quelques jours plus tard, les élèves de la ZEP [euphémisme pour zone d’éducation prioritaire, comprendre banlieue immigrée] décidèrent de venir casser du bourgeois gréviste à coups de barres de fer. Maman ! Le même genre d’incidents eut lieu dans d’autres établissements, mais les élèves de ZEP n’étant pas des néonazis, le silence médiatique autour de ces faits fut à peu près total : rien à voir avec le récent scandale de Montpellier…

En conclusion, je dirai juste : laissez bosser ma petite-sœur, elle a ses partiels dans un mois et là, elle en a vraiment marre de votre cirque.