jeudi 21 octobre 2021

Cégep — « La ministre McCann doit être à l’écoute du corps enseignant »

Depuis plusieurs semaines, le président de la Fédération des cégeps, Bernard Tremblay, s’exprime sur toutes les tribunes pour donner son avis sur les rapports entre la réussite scolaire et l’enseignement du français au collégial. Et la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann, semble n’avoir d’oreille que pour lui : le Plan d’action pour la réussite en enseignement supérieur 2021-2026, qu’elle a présenté au début du mois de septembre, est calqué sur la position de la Fédération des cégeps.

Cette situation est d’autant plus préoccupante que Bernard Tremblay prétend parler au nom des cégeps, alors que les comités des enseignantes et enseignants de la formation générale ont été exclus jusqu’à présent de la consultation du gouvernement. Rappelons que ceux-ci ne sont pas représentés par la Fédération des cégeps, qui n’a aucune légitimité démocratique et qui ne parle pas au nom de tous les acteurs de l’enseignement au collégial.

L’analyse de la Fédération repose en partie sur une comparaison des taux de diplomation entre les cégeps français et anglais. C’est une litanie que nous connaissons. Depuis plusieurs années déjà, les cours de philosophie sont comparés aux cours dits équivalents dans les cégeps anglais, qui font partie du programme « Humanities ». Mais cette comparaison ne tient pas la route. Ces cours ne sont pas équivalents, pas plus que les résultats moyens des étudiantes et étudiants dans les deux réseaux. […]

Plutôt que d’accuser hâtivement certains cours de la formation générale pour leurs plus faibles taux de réussite en les qualifiant prestement de « cours écueils », il faudrait s’interroger collectivement sur les véritables causes d’un tel écart. Qu’en est-il des inégalités sociales et scolaires entre les élèves qui proviennent des trois filières d’études du secondaire (public régulier, public enrichi et privé) ? Pourquoi un nombre important d’étudiantes et d’étudiants qui font leur entrée au cégep n’ont pas le niveau suffisant en français pour réussir leurs études ? Qu’est-ce qui pousse les meilleurs élèves à migrer vers le cégep anglais ?

La Fédération des cégeps se trompe lorsqu’elle affirme que le collégial n’est pas en cause dans l’anglicisation du Québec. Certes, les cégeps ne sont pas l’unique cause du phénomène, mais il y a une tendance lourde actuellement dans le réseau collégial : les collèges anglophones sont devenus des cégeps d’élite dans le secteur préuniversitaire et attirent un nombre important d’allophones ainsi qu’une proportion croissante de francophones, particulièrement dans les milieux favorisés. Il se produit alors un effritement du français dans les études supérieures au Québec et un « écrémage » du cégep français.

Nous apprenions récemment qu’un groupe de travail avait été mis en place par le ministère de l’Enseignement supérieur pour produire un rapport sur la maîtrise du français au collégial. Or, le groupe de travail est formé de trois expertes qui n’enseignent pas dans les cégeps et qui n’auraient pas le mandat de consulter le comité-conseil de la formation générale, lequel regroupe notamment les représentants des enseignantes et enseignants de philosophie et de littérature, ce que nous déplorons.

Les enseignantes et enseignants de philosophie au collégial ont à cœur la réussite étudiante ; ils sont ouverts à participer à une réflexion commune sur les exigences langagières et la réussite des cours de philosophie au collégial. Encore faudrait-il qu’ils soient invités à une consultation dont les conclusions ne sont pas tirées d’avance par la Fédération des cégeps et que leurs représentantes et représentants aient les ressources suffisantes pour y participer activement.

* Cette lettre publiée dans Le Devoir est cosignée par:
Simon Blouin, Cégep de Granby
Pierre-Olivier Bois, Collège Montmorency
Isabelle Bouchard, Cégep de Trois-Rivières
Félix Brunetta, Cégep régional de Lanaudière
Alexandre Comeau, Cégep de Saint-Jean-sur-Richelieu
Tony Patoine, Cégep du Vieux Montréal
Vicki Plourde, Cégep Garneau
Patrice Létourneau, Cégep de Trois-Rivières
Richard Vaillancourt, Collège de Bois-de-Boulogne
Marc-André Vaudreuil, Cégep Gérald-Godin
Pour le comité des enseignantes et enseignants de philosophie au collégial


Plus de soldats américains sont morts du suicide au 2e trimestre 2021 que de la Covid depuis mars 2020

Plus de membres de l’armée américaine sont morts par suicide au cours du seul deuxième trimestre 2021 que du coronavirus pendant toute la durée de la pandémie, selon un inquiétant rapport du Pentagone.

Entre le début du mois d’avril et la fin du mois de juin 2021, il y a eu 139 suicides militaires au total — 99 dans le service actif, 14 parmi les réservistes et 26 dans la garde nationale — indique le dernier rapport du Defense Suicide Prevention Office (DSPO).

Les statistiques publiées font état d’une hausse de 46 % des suicides au sein des forces actives de l’armée américaine, par rapport à 2020.

Les nouveaux chiffres signifient également que les suicides survenus au cours de ce seul trimestre civil représentent plus du double du nombre officiel de décès dus au Covid-19 dans les forces armées, que le Pentagone a estimé à 58 jusqu’à présent.

Le rapport annuel 2020 du ministère de la Défense sur les suicides militaires, publié fin septembre, faisait état de 580 décès de ce type au cours de l’année 2020 — corrigé à 581 dans le dernier trimestre — contre 505 au total l’année précédente.

Alors que le taux de suicide chez les réservistes et la Garde nationale est resté « statistiquement stable » depuis 2016, la force de service actif a connu une augmentation « significative », a déclaré le Dr Karin Orvis, qui a pris la tête de la DSPO en 2019. Le taux de suicides en service actif était de 28,7 pour 100 000 en 2020, le plus élevé depuis que des registres détaillés ont commencé à être tenus en 2008, où il était de 16,9 pour 100 000.

Les hommes enrôlés de moins de 30 ans sont les plus à risque. Ils représentent 42 % de la population militaire totale en 2020, mais 63 % des suicides cette année-là, a déclaré Orvis. Le taux de suicide de l’armée de terre, 36,4 pour 100 000, est presque le double de celui de la marine, 19,3.

L’archevêque du Pentagone déclare que les troupes ne peuvent pas être forcées à recevoir le vaccin Covid contre leur conscience, alors que les différents corps d’armée examinent les exemptions.

Les chiffres du deuxième trimestre de 2021 sont antérieurs au retrait américain d’Afghanistan, qui a débuté en août. Tout suicide lié au pont aérien de Kaboul et à la fin de ce conflit de 20 ans sera comptabilisé dans le prochain rapport trimestriel.


Cannabis — la consommation depuis la légalisation est passée de 14 % à 20 % de 2018 à 2021

Trois ans après la légalisation du cannabis au Canada, la consommation du cannabis a augmenté chez les adultes, plus particulièrement chez les personnes âgées de 25 à 54 ans. Quant aux jeunes de 15 à 17 ans, leur consommation de cette drogue a diminué. C’est ce qui ressort d’une étude publiée vendredi passé par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).

Cannabis, une drogue d’adultes, de vieux ?

En 2018, 22 % des personnes de 15 à 17 ans disaient consommer du cannabis, contre 21 % en 2019 et 19 % en 2021, détaille l’ISQ.

Un constat qui laisse « perplexe » la Dre Marie-Ève Morin, médecin de famille travaillant en dépendance et en santé mentale à la clinique La Licorne, à Montréal.

« Je crois que ç’a été compensé par d’autres substances chez les jeunes. Ce n’est pas vrai que les jeunes consomment moins. Au contraire, je pense que les jeunes du secondaire consomment de plus en plus de benzodiazépine, le Xanax. Ils ont de plus en plus accès au speed [amphétamine], à l’ecstasy », explique-t-elle à La Presse, à la lumière de sa pratique.

Elle se demande également si la consommation de wax, de la cire de cannabis contenant une très forte dose de THC, a été comptabilisée dans l’étude.

« La nouvelle mode, ce sont les wax pens. Ce sont des crayons [de cire] qui se vendent 40 $ l’unité, et là-dedans, il y a un nombre prédéterminé de doses de wax », poursuit la Dre Morin. Ce produit circule sur le marché noir.

Au contraire, la diminution de la consommation de cannabis des jeunes n’étonne pas Jean-Sébastien Fallu, professeur à l’École de psychoéducation à l’Université de Montréal, chercheur à l’Institut universitaire sur les dépendances (IUD) et au Centre de recherche en santé publique (CReSP). Depuis une dizaine d’années, une diminution de la consommation d’alcool et d’autres substances a pu être observée dans cette tranche d’âge, estime-t-il, même si à l’avenir un rebond n’est pas à exclure.

Augmentation de la consommation chez les adultes

La proportion totale de consommateurs de cannabis de 15 ans et plus a cependant augmenté au Québec, passant de 14 % à près de 20 % de 2018 à 2021, selon l’ISQ.

Chez les personnes de 25 à 34 ans, la proportion de consommateurs de marijuana est passée de 26 % en 2018 à 29 % en 2019, puis à 36 % en 2021. Ce taux a augmenté de 12 % en 2018 à 15 % en 2019, et à 20 % en 2021, au sein de la population âgée de 35 à 54 ans, dévoile la même étude de l’ISQ.

 Proportion de consommateurs de cannabis au Québec, selon différentes tranches d’âge (Source : ISQ)

« Il était prévu qu’une légalisation puisse être associée à une augmentation de consommateurs, mais on ne s’attendait pas à de grandes augmentations, ce qui est effectivement le cas, notamment durant la première année », déclare Jean-Sébastien Fallu. Il pense que la gestion de pandémie de COVID-19 (confinement, couvre-feu) est à l’origine de la hausse marquée de la consommation de cannabis observée lors de la dernière année.

Parmi les 20 % de Québécois se disant consommateurs de marijuana, 24 % ont déclaré avoir augmenté leur consommation en raison de la gestion de la pandémie, rapporte l’ISQ.

Toutefois, les proportions des types de consommateurs de cannabis, soit quotidiens ou occasionnels, par exemple, n’ont pas changé de façon marquée au cours de la pandémie, précise M. Fallu.

Depuis le début de la gestion gouvernementale de la pandémie, « beaucoup de personnes adultes ont commencé à développer des troubles psychologiques ou psychiatriques. Au lieu d’aller consulter un médecin, ils ont pris ce qu’ils avaient sous la main pour se soulager. On a vu pendant la pandémie une augmentation de la consommation d’à peu près toutes les substances », évoque la Dre Morin.

Elle estime que la consommation de cannabis est banalisée, car elle est considérée comme moins risquée que celle d’autres drogues.

« Mais ça augmente le taux des cancers respiratoires, ça augmente les risques de psychose, ça a un effet dépresseur à long terme, c’est addictif [et] il y a un sevrage quand on arrête. Ce n’est pas banal, le pot », rappelle-t-elle.

La stigmatisation liée au cannabis s’estompe au Canada et les gens en consomment davantage

La stigmatisation liée au fait de fumer de l’herbe s’estompe et les gens en consomment davantage, selon une étude.

Trois ans après que le cannabis est devenu légal, davantage de Canadiens fument qu’on ne le pensait, selon une étude publiée par l’Université Dalhousie.

Menée en mai, l’étude a révélé que 42 % des personnes interrogées se considèrent comme des consommateurs de cannabis, avec environ 12 % déclarant avoir commencé à consommer de la marijuana après sa légalisation en octobre 2018.

Les résultats sont 20 % plus élevés que le pourcentage de Canadiens que l’on croyait fumeurs de cannabis, selon un récent rapport de Statistique Canada.

Les chiffres sont également en hausse de 36 % par rapport à une étude similaire menée à Dalhousie en 2019. « L’acceptation et la consommation de cannabis augmentent et la stigmatisation sociale diminue », a déclaré Brian Sterling, co-auteur du rapport.

« Cela se normalise de plus en plus », a ajouté Sterling, associé de recherche au Laboratoire d’analyse agroalimentaire de l’Université Dalhousie. « De plus en plus de gens l’achètent légalement. La plupart ne sont plus vraiment inquiets à l’idée d’en parler ouvertement. »

Le rapport indique également que les attitudes canadiennes ont changé en faveur du cannabis légal, y compris la consommation publique de la drogue dans des endroits comme les restaurants.

Il indique également que maintenant 78 % des Canadiens sont en faveur de la légalisation — contre la moitié de la population canadienne qui a soutenu le pot légal en 2019.

Environ 60 % des Canadiens achètent de l’herbe dans un magasin de cannabis et 32 % ont déclaré avoir augmenté leur consommation d’herbe en raison de la gestion de la pandémie.

La légalisation n’a pas fait disparaître le marché noir

Un des buts proclamés de la légalisation était d’endiguer les ventes du marché noir. Mais aujourd’hui, à peine plus de la moitié des ventes de marijuana sont réalisées sur le marché légal. « La demande ne s’est pas transférée du marché illégal vers le marché légal, surtout dans l’ouest du pays », explique Jean-François Ouellet, professeur à HEC Montréal.

Seul le Québec semble faire office d’exception. Il a choisi un système public de vente via ses points SQDC (Société québécoise du cannabis), tandis que beaucoup de provinces tournent au 100 % privé, ou avec les deux régimes. « Le Québec a aussi choisi de vendre du cannabis au même prix que le marché noir. Et si les gens ne veulent pas se déplacer, il leur est possible de commander en ligne et de se faire livrer le jour même, », poursuit le professeur.

« Les enquêtes surestiment généralement la partie légale et sous-estiment la partie illégale », relativise Michael Armstrong, professeur de l’université Brock de St Catharines (Ontario), tout en soulignant qu’il « existe une tendance claire vers des dépenses plus légales et moins illégales ».

« Les petits revendeurs illégaux ont été les plus touchés, confie le psychologue Serge Brochu, professeur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal. Les grandes organisations criminelles ayant une offre diversifiée d’activités illicites ont pu investir dans d’autres créneaux. » Cet expert estime illusoire de croire que la légalisation du pot le fera disparaître. « Le marché noir canalise de plus en plus ses efforts sur les sites internet pour proposer des produits à moindre coût », note Amnon Jacob Suissa, professeur de sociologie de l’Université du Québec à Montréal.

Forte concurrence, surproduction et baisse des prix ont mis un coup de frein à l’emballement dans l’industrie naissante du cannabis récréatif légal.

Le géant Canopy Growth gérait sept usines de culture au Canada. Elles ont toutes fermé ou ont été vendues en 2020. Cotée en Bourse, l’entreprise a vu la valeur de son action chuter de plus de 26 % depuis janvier. Une baisse qui s’explique par « des points de vente fermés pendant les confinements » et des « problèmes d’approvisionnement avec les sites américains », selon le PDG David Klein. Ses concurrents dénoncent aussi le manque de points de vente dans certaines provinces.

Certains producteurs ont dû se mettre à l’abri de leurs créanciers, comme AgMedica et Wayland.

Emerald Health Therapeutics, qui emploie 120 personnes, résiste, mais ne songe pas, pour l’instant, s’agrandir à l’international.

Contexte

Depuis le 17 octobre 2018, la vente, la possession, la production et la distribution de cannabis sont encadrées légalement au Canada. Mais pour protéger les mineurs, la loi prévoit de lourdes sanctions pour les personnes qui leur vendent du cannabis ou qui se servent d’eux pour commettre une infraction liée à cette drogue (en les utilisant comme revendeurs ou guetteurs, par exemple). L’âge légal pour consommer du cannabis au Québec est de 21 ans. Il est de 19 ans dans les autres provinces canadiennes, sauf en Alberta, où il est de 18 ans.

Voir aussi 

La SQDC diffuserait des images interdites dans des médias sociaux accessibles aux mineurs (2021)

Québec — La légalisation du cannabis n’a pas entamé les bénéfices du crime organisé 

Alberta — Épidémie de syphilis parmi sans-abri, drogués, homos et bisexuels et Amérindiens 

La Russie sanctionne Twitter pour manque de filtrage des contenus pédopornographiques ou faisant l’apologie de drogues ou du suicide 

Analyse des demandes d’assurance maladie : la gestion de la COVID-19 a un impact profond sur la santé mentale des jeunes  

Espérance de vie baisse chez les hommes en Ontario, en Colombie-Britannique et chez les blancs aux États-Unis (pré-Covid, opioïdes en cause) 

Québec — consommation d’antidépresseurs a augmenté de 68 % chez jeunes filles au cours des 5 dernières années (pré-Covid) 

Canada — la légalisation du cannabis a accru le nombre de consommateurs (2019)

Arrêter le cannabis et la mémoire revient

Le cannabis aurait des « effets négatifs et persistants » sur les capacités cognitives des ados

Cannabis thérapeutique : effets positifs modestes, effets indésirables sont importants et très fréquents

Mauvais signal quand l’État légalise le cannabis et se lance dans sa production

Des écoliers (5 à 9 ans) hospitalisés après avoir consommé du cannabis

Le Canada va être « cool » : des psychiatres craignent l’impact de la légalisation du cannabis

La fumée de cannabis contient sept fois plus de goudrons et de monoxyde de carbone (CO) que celle du tabac, selon un test d’un magazine français de consommateurs, qui calcule que « 3 joints = 1 paquet de cigarettes ».

Le mensuel 60 millions de consommateurs de l’Institut national de la consommation (INC), publié en avril 2006, s’est servi d’une machine à fumer pour faire ce test dont le but était de comparer les teneurs en nicotine, goudrons, monoxyde de carbone, benzène et toluène dans les fumées principales de joints de cannabis et de tabac.