Une enquête de l’institut Verian analysée par la Fondapol fait état d’une demande grandissante, dans l’opinion publique, d’une écologie enfin débarrassée de son carcan idéologique. Une mise au point bienvenue qu’il convient cependant d’approfondir.
L’étude publiée à la fin du mois d’août par l’institut Verian (ex-Kantar) et qui porte sur la perception qu’ont les Français de la religion des temps modernes : l’écologie ? Il faut l’espérer car les résultats qu’elle met en avant pourraient dessiller bien des yeux chez nos élites dirigeantes. « La principale leçon de cette étude, observe Dominique Reynié, directeur général de la Fondapol, qui en a assuré le commentaire, est de mettre en lumière un fait dont on sait l’existence mais qui reste pourtant négligé et peu traité : dans l’opinion publique française, une large adhésion à l’écologie cohabite avec un rejet massif de l’écologisme. » La nature, oui ; ceux qui s’en font les porte-parole, non.
Regardons le détail. L’étude devant être présentée à l’occasion des Rencontres des entrepreneurs de France (Ref), un accent particulier est mis sur le lien entre l’écologie et les entreprises. Lien passablement dégradé, les écologistes n’ayant que mépris pour l’entreprise, l’industrie, l’agriculture et pour tout ce qui, de manière générale, fonctionne et soutient une société. Bonne surprise, cette triste réalité est connue ! Ainsi, 66 % des personnes interrogées pensent qu’il y a “trop de normes environnementales pour les entreprises” et que ces normes, “révélatrices d’une bureaucratie trop importante” (75 %), “fragilisent la compétitivité de l’industrie française” (67 %).
Autre point intéressant, et très actuel : la fiscalité verte [penser taxe carbone]. Les “gilets jaunes” sont passés par là, et la fin du monde ne fait plus le poids face aux fins de mois. Cette fiscalité à but écologique est considérée par 62 % des sondés comme “un outil injuste qui pèse d’abord sur les classes moyennes, rurales ou défavorisées”. Revenus des grands discours catastrophistes, les Français sont également 62 % à voir dans l’écologie politique “un prétexte pour créer un nouvel impôt” et pas du tout “une nécessité face à l’urgence environnementale”, qui est pourtant l’un des arguments massues du discours écologiste sur l’air du “c’est pour le climat, c’est pour la planète”. Conclusion de l’étude : ça ne marche plus.
« J’avoue que je n’espérais pas un tel soutien populaire à nos entreprises, ni une telle défiance envers les excès écologistes », s’enthousiasme Benoît Rittaud, président de l’Association des climato-réalistes. Bertrand Alliot, porte-parole d’Action Écologie, abonde dans son sens : « Cette étude montre de manière éclatante qu’une grande majorité de Français estime que l’excès d’écologisme est un puissant facteur de désorganisation. » Plus important encore, selon lui, en estimant à 78 % que “l’écologie devrait davantage s’adapter aux réalités économiques et industrielles”, les Français « réfutent l’idée d’une “crise existentielle” pour l’humanité liée aux enjeux écologiques car, dans le cas contraire, ils diraient que c’est l’économie qui doit s’adapter aux réalités écologiques ».
Plus encourageant encore (quoique de manière moins nette), plus d’un Français sur deux (55 %) considère “la fiscalité verte” comme “une contrainte inefficace qui culpabilise sans offrir d’alternatives concrètes”. Les mots sont importants : “inefficace”, “culpabilise”. On touche ici à la nature même de l’écologisme : une construction essentiellement théorique, dogmatique, dont le but — changer la société — est sans rapport avec l’objet concerné (pesticides, bassines, plastique, etc.).
Résultat notable également: les sondés sont 84 % à estimer que “les mouvements écologistes tentent souvent d’imposer leurs convictions par la pression médiatique et judiciaire, sans passer par le débat démocratique”. Un chiffre qui n’est pas étonnant quand on sait que les écologistes ne se soucient du peuple que lorsqu’il pense comme eux ou pour prétendre le corriger. Le peuple en question n’étant pas dupe, cela explique aussi bien ce résultat écrasant que les scores misérables des candidatures écologistes à l’élection présidentielle (3,26 % des suffrages en moyenne depuis 1974), que l’étude rappelle. « On sait depuis longtemps qu’il y a une distorsion énorme entre la visibilité médiatique de l’écologisme et son poids réel dans l’opinion, mais ce rapport qui quantifie les choses est tout à fait bienvenu », poursuit Benoît Rittaud.
Parlant à ce propos d’une « illustration de la théorie de la tyrannie des minorités », Dominique Reynié pose la question essentielle : « Pourquoi, ou à quel titre, un courant électoralement insignifiant, et depuis si longtemps, parvient-il à bénéficier d’une considération politique et médiatique que l’on pensait réservée à de grands partis ou à de grands électorats? »
La réponse est peut-être dans la question (et aurait mérité de ce fait de figurer dans le sondage) : il s’agit du rôle crucial joué par les médias, où le traitement des questions environnementales relève quasiment exclusivement de l’écologisme et non de l’écologie. Une mainmise décisive qui explique d’ailleurs quelques résultats étonnants, présents dans l’étude; ainsi 57 % des sondés ont “une bonne image des associations ou mouvements écologistes”, 49 % considèrent que les associations environnementales constituent un “contre-pouvoir constructif” et 45 % les jugent plus “responsables” que “radicales”. « Ils sont très majoritairement assez sévères et lucides, en les considérant comme des organisations idéologiques, déconnectées du terrain, mais, paradoxalement, ils en ont majoritairement une bonne image, alors que la mise en œuvre de l’écologie punitive sur le territoire français et européen leur doit beaucoup », commente Bertrand Alliot. Preuve que la propagande a bien travaillé, les Français semblent considérer l’écologisme non comme un système intrinsèquement pervers, une erreur anthropologique, mais comme la regrettable dérive d’une idée demeurée malgré tout positive. Or la vérité oblige à dire que l’écologisme a tout envahi, ne laissant rien d’intact dans ce qu’on appelle aujourd’hui, en France, l’écologie. Tout est à reprendre. Par chance, et c’est le grand mérite de cette étude que de le démontrer, pour la grande révolution intellectuelle dont elle a besoin, l’écologie pourra compter sur le soutien populaire.
Source : Valeurs actuelles
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