« Anfent », « on aurais », « cher Madame » : une analyse commandée par Québec en vue de réformer l’enseignement du français brosse un portrait inédit des erreurs les plus courantes chez les jeunes Québécois. Le document présente des exemples authentiques tirés d’un millier de copies de l’épreuve ministérielle d’écriture de la 6e année du primaire tenue en juin dernier.

Erreurs liées à la graphie des mots

87 %, au moins une erreur
37 %, cinq erreurs ou plus

anfent [enfant]
actualitée [actualité]
aujourdhui [aujourd’hui]

Erreurs liées au nombre selon le sens dans la phrase

76 %, au moins une erreur

chaque élèves [chaque élève]
les journal [les journaux]
les dernières découverte [les dernières découvertes]

L’échantillon retenu par le ministère de l’Éducation pour son analyse se veut représentatif du milieu scolaire avec 94 % d’élèves issus du secteur public et 6 % du privé. Ce genre d’erreurs plaide pour un recentrage de l’enseignement du français vers les « régularités », estime Suzanne G. Chartrand qui s'exprime dans les colonnes de La Presse, qui démolit le mythe voulant que la langue de Molière soit faite « d’exceptions ». « C’est faux, faux, faux », dit-elle en insistant sur le fait qu’il s’agit plutôt « d’un paquet de régularités » et sur l’importance de les répéter aux élèves.


Erreurs liées à l’accord avec le sujet constitué d’un pronom

57 %, au moins une erreur

tu pourraient [tu pourrais]
on aurais [on aurait]
ils termines [ils terminent]

Dans le cadre de l’épreuve ministérielle d’écriture de l’an dernier, les élèves devaient rédiger une lettre destinée à leur enseignante pour lui faire des suggestions afin d’intéresser la classe à l’actualité. Ils avaient alors le droit de consulter un dictionnaire, une grammaire et des tableaux de conjugaison. « Mais encore faut-il qu’ils aient bel et bien ces ouvrages », souligne Martin Lépine interrogé par La Presse en rappelant qu’ils sont aujourd’hui absents de nombreuses classes, tout comme le fameux Bescherelle.

Erreurs liées à l’accord en nombre du déterminant

48 %, au moins une erreur

cet arguments sont [ces arguments sont]
tout les jours sont [tous les jours sont]
les jeune lit [le jeune lit]

Ce genre d’erreurs milite en faveur d’une pratique beaucoup plus fréquente de l’écriture en classe, estime Martin Lépine, puisqu’« en s’exerçant à réécrire, les élèves sont capables eux-mêmes de les identifier ». Certaines sont si flagrantes qu’il pourrait s’agir d’erreurs d’inattention, ajoute-t-il.

Erreurs liées à l’accord en nombre de l’adjectif

44 %, au moins une erreur

le premiers sport [le premier sport]
mes expériences scientifique [mes expériences scientifiques]
les petit monstres [les petits monstres]

Les experts consultés relèvent qu’il aurait fallu évaluer les erreurs de syntaxe des élèves, ce qui n’a pas été fait. Ils rejettent par ailleurs l’idée que la qualité du français s’est dégradée chez les jeunes Québécois. « Il y a toujours des esprits chagrins qui parlent d’une époque où tout le monde était un génie, mais il faut rappeler qu’il y a de nombreuses années, la plupart des Québécois signaient leur nom d’une croix », souligne Martin Lépine.

Erreurs liées à l’accord en genre

40 %, au moins une erreur

cher Madame Francine [chère Madame Francine]
l’actualité international [l’actualité internationale]
le domaine préférée [le domaine préféré]

Martin Lépine souligne que le fait de rédiger 300 mots, comme l’ont fait 70 % des élèves dont les copies ont été analysées, représente beaucoup de pression pour un jeune âgé de 11 à 12 ans, surtout dans les quatre heures imparties pour l’épreuve. Certains, dont les parents consultent « l’actualité internationale », par exemple, sont alors avantagés s’ils voient au quotidien comment ce mot est écrit. Un exemple qui démontre encore une fois l’importance de la lecture selon lui.

Erreurs liées à l’accord avec le sujet

40 %, au moins une erreur

l’actualité internationale pourraient les intéresser [l’actualité internationale pourrait les intéresser]
les jeunes reste [les jeunes restent]
la radio ne peux pas [la radio ne peut pas]

S’ils sont d’abord destinés aux enseignants, les résultats de cette analyse serviront également au ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, dans l’élaboration de sa réforme de l’enseignement du français qu’il présentera plus tard ce printemps, lui qui a fait de la valorisation de la langue à l’école l’une des priorités de son mandat. Répertorier les erreurs les plus fréquentes était d’ailleurs un de ses engagements.