Des enseignants s’inquiètent de l’évolution plus lente que d’habitude des jeunes en raison de la gestion de la pandémie. Le Journal de Québec relate :
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Prise de présence en 2020 |
« Je n’avais jamais vu ça avant. »
Cette phrase, Le Journal de Québec l’a entendue à répétition en parlant ce printemps à une vingtaine d’enseignants et d’intervenants de plusieurs régions. Des travailleurs d’expérience qui en avaient pourtant vu de toutes les couleurs avant.
Jean-Philippe Viau est orthopédagogue depuis plus de 10 ans dans la même école primaire de Montréal auprès de jeunes de 5e et 6e année. Avant, il pouvait compter environ cinq élèves sur une classe de 20 qui peinaient à comprendre un texte en français.
« Maintenant, c’est la moitié. Facilement. »
Toujours pas revenu
Bien que la dernière année se soit déroulée presque entièrement en présentiel [en classe, en personne], la normalité ne semble pas être revenue dans les apprentissages, selon les gens interrogés.
Plusieurs précisent que c’est en fait l’écart entre les plus forts et les plus faibles qui s’est creusé.
« D’habitude, j’ai des étudiants forts, des moyens et des faibles. Là, je n’ai pas vraiment de moyens », remarque François Régimbal, professeur de sociologie au cégep du Vieux Montréal.
Quand on braque le projecteur sur les plus faibles, le portrait semble alarmant à plusieurs endroits, particulièrement en milieu défavorisé et allophone.
« Nos jeunes ne vont pas bien », soupire Crystel*, qui travaille comme psychologue scolaire à Montréal.
Trois élèves de son école ont fait du mutisme sévère cette année, c’est-à-dire qu’ils ont cessé de parler. Ce trouble est rare. Dans une année normale, on en compterait au plus un seul dans tout l’établissement.
« On a un enfant de 5e année qui lit huit mots par minute. Ça, c’est un niveau première année. »
Cas plus sévères
Les élèves qu’elle voit sont ceux qui ont le plus de difficulté, ce qui n’est pas représentatif de l’ensemble. Mais la sévérité des cas qui se retrouvent dans son bureau s’est aggravée.
Certains enfants d’immigrants avaient déjà pris du retard en raison de leur parcours migratoire. Puis, une fois qu’ils sont arrivés au Québec, la pandémie et l’école à distance sont venues paralyser leur progrès à nouveau.
« Avant, quand un élève avait deux ans de retard, on se disait “oh, mon dieu”. Là, c’est trois ou quatre ans de retard […] J’ai peur que ça ne se rattrape pas, tout ça. »
Au secondaire, c’est la motivation et le manque d’organisation--- des adolescents qui inquiètent le plus les enseignants interrogés. Plusieurs admettent avoir dû baisser leurs attentes.
« La pandémie a tout arrêté. C’est comme si [les jeunes] étaient encore en attente », dit Pénélope*, qui enseigne le français à Montréal.