mercredi 10 mars 2021

La Russie sanctionne Twitter pour manque de filtrage des contenus pédopornographiques ou faisant l'apologie de drogues ou du suicide

C’est une nouvelle illustration des tensions croissantes entre Moscou et les géants des réseaux sociaux. La Russie a annoncé ce mercredi « ralentir » le fonctionnement de Twitter, accusé de ne pas supprimer des contenus « illégaux » : ceux jugés pédopornographiques ou faisant l’apologie de l’usage de drogues ou du suicide.

« Des mesures de réponse centralisées ont été prises à l’encontre de Twitter, à savoir le ralentissement de la vitesse du service », a indiqué le gendarme de l’Internet et des médias, Roskomnadzor, qui a le pouvoir de bloquer des sites ou ressources Internet en Russie. « La décélération sera mise en œuvre sur 100 % des appareils mobiles et 50 % des appareils fixes », précise-t-il. Le réseau social n’a pas réagi dans l’immédiat.

L’opération a, semble-t-il, débuté aux alentours de 2 heures, ce mercredi, heure des premières remontées sur le site « Downdetector », qui recense minute par minute les problèmes rencontrés par les internautes sur des sites et services spécifiques en ligne.

Depuis environ 2 h ce mercredi 10 mars les internautes russes signalent des ralentissements sur Twitter.

Depuis environ 2 h ce mercredi 10 mars les internautes russes signalent des ralentissements sur Twitter.
Capture d’écran de Downdetector pour Twitter en Russie.

Un nouveau message aux géants de l’Internet 

« Au 10 mars 2021, 3168 documents contenant des informations interdites n’étaient toujours pas retirés (dont 2569 avec des appels au suicide par des mineurs, 450 avec de la pornographie juvénile, 149 avec des informations sur la consommation de drogues) », détaille dans son communiqué de presse le Roskomnadzor, qui a de son côté, assure-t-il, envoyé « plus de 28 000 demandes initiales et répétées de suppression de liens et de publications illégaux ». « Si Twitter continue d’ignorer les exigences de la loi, les répliques se poursuivront conformément au règlement et peuvent aller jusqu’au blocage », prévient l’agence.

La démarche des autorités russes s’inscrit dans un contexte de critiques à l’égard des géants (majoritairement américains) que sont Twitter, Facebook, YouTube et dans une moindre mesure TikTok. Le sénateur russe Alexandre Bachkine a réagi, assurant que cette mesure « constituera une bonne douche froide qui donnera à réfléchir à YouTube et à tous les autres ». 

Le communiqué de Roskomnadzor

 Lundi encore, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a accusé les géants de l’Internet de « fonctionner en dehors du cadre juridique » et de « n’obéir à aucune loi russe ». La veille, Facebook avait bloqué des articles des médias russes RBK et TASS sur l’arrestation d’« extrémistes » ukrainiens présumés. Plusieurs hauts responsables russes ont aussi vu par le passé leurs comptes bloqués, dont le chef du programme spatial Dmitri Rogozine, le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov ou encore le sulfureux homme d’affaires Evguéni Prigojine. Fin janvier, le président Vladimir Poutine avait jugé à Davos, en Suisse, que les géants de l’Internet étaient « déjà en concurrence de facto avec les États », évoquant leurs « tentatives de contrôler brutalement la société ».

Sur le même sujet En réaction, les autorités n’ont cessé ces dernières années de serrer la vis sur le « runet », l’Internet russe. La Russie bloque déjà avec un succès variable nombre de sites ayant refusé de coopérer avec les autorités, comme le réseau social professionnel LinkedIn, détenu par l’américain Microsoft. Les autorités russes s’en étaient également pris en 2018 à la populaire messagerie cryptée Telegram pour son refus de fournir aux services de sécurité les moyens de lire les messages de ses utilisateurs. Après deux ans d’un blocage guère efficace, elles avaient abandonné en levant cette interdiction.

Google paie une amende
On apprend par ailleurs Google LLC a payé une amende de 3 millions de roubles aux autorités russes pour non-respect des exigences de la législation sur la protection des citoyens contre les contenus malveillants. La loi fédérale n ° 149-FZ "sur l'information, les technologies de l'information et la protection de l'information" établit des exigences visant à protéger les citoyens contre les contenus socialement dangereux sur Internet. En particulier, il oblige les moteurs de recherche à exclure les liens vers des ressources Internet contenant des informations interdites dans le pays de l'émission sur le territoire de la Russie. En 2019, une procédure administrative a été ouverte contre Google pour non-suppression des contenus interdits des résultats de recherche (le montant de l'amende était de 700 mille roubles, l'amende a été payée). La surveillance effectuée par Roskomnadzor a révélé que la société ne se conformerait que partiellement aux exigences de la législation russe. Cela a servi de base à l’ouverture d’une procédure pour la commission répétée d’une infraction administrative (partie 2.1 de l’article 13.40 du Code administratif de la Fédération de Russie). Le 25 mai 2020, le tribunal a condamné Google à une amende de 1,5 million de roubles (l'amende a été payée). Un suivi plus poussé a révélé qu'environ 30% des liens vers des contenus interdits en Russie restent dans les résultats de recherche. La commission répétée d'une infraction administrative par Google est devenue la base de la mise en responsabilité de l'entreprise, conformément à la partie 2.1 de l'article 13.40 du Code administratif de la Fédération de Russie. Le procès a eu lieu le 17 décembre 2020. Le magistrat du district judiciaire n ° 422 du district judiciaire Tagansky de Moscou, la société a été condamné à une amende d'un montant de 3 millions de roubles.

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