dimanche 17 janvier 2021

Baisse de la démographie aux États-Unis

Fin d’une exception ? Le moteur démographique des États-Unis, avec 329 millions d’habitants, ralentit, faute de naissances et d’apport migratoire.

Durant longtemps, l’Amérique a constitué une exception démographique avec la France et Israël. Une forte immigration et un taux de fécondité relativement élevé y faisaient croître plus rapidement la population que dans les autres pays riches.

Mais cette situation à part touche peut être à sa fin, avec plusieurs grands États qui ont perdu leur dynamique de croissance.

Taux de natalité des États-Unis de 1800-2020 (naissances par 1000 habitants)

La population de la Californie stagne et pourrait même décroître : de nombreuses entreprises et citoyens quittent l’État, l’immigration a été limitée par Trump, la natalité atteint un bas niveau inédit. L’Illinois, qui a perdu 250 000 résidents en une décennie, enregistre un déficit démographique depuis sept années consécutives. Mais c’est à New York que la chute est la plus forte : l’État a perdu 126 000 habitants sur les six premiers mois de 2020, soit 0,65 % de sa population. La croissance de quelques États républicains comme le Texas et la Floride, notamment dans le Sud, ne compense pas ce fléchissement.

De janvier à juillet 2020, la population américaine a crû de seulement 0,35 %, soit une hausse de 1,2 million d’habitants pour un total de 329 millions. Le chiffre n’a pas été aussi faible depuis 1900. Ce phénomène est dû en partie à la chute de l’immigration, qui explique la stagnation démographique de villes comme Los Angeles, New York ou Chicago, et qui participe aussi à la baisse de la fécondité. Le taux de natalité par Américaine atteint 1,7 enfant par femme en moyenne, au plus bas depuis des décennies. Il est inférieur au taux français (1,87 en 2019), identique au britannique, mais plus haut que le canadien ou le québécois (1,5-1,6).

 

Indice de fécondité des États-Unis (1800-2020), enfant par femme

Nul doute que la politique migratoire restrictive de Donald Trump a accentué la tendance. Et même si l’administration Biden pourra revenir sur certaines restrictions, elle ne pourra sans doute pas les supprimer toutes, du moins à court terme.

Pour ne rien arranger, deux chercheurs de Berkeley, Joshua Goldstein et Ronald Lee, estiment que les décès dus au Covid, qui pourraient dépasser le demi-million en avril 2021, vont faire chuter de plus d’un an l’espérance de vie. De plus, les experts estiment à 340 000 le nombre de naissances qui n’auront pas lieu en 2021 en raison de la situation sanitaire et économique.

Scénario européen, canadien et québécois

Bien sûr, une partie de ces conséquences pourraient disparaître avec la fin de la pandémie. Les couples qui ont reporté leur projet d’enfant pourraient provoquer un bref baby-boom en 2022 et 2023. Tandis que la possible réouverture des frontières devrait relancer l’immigration. Pourtant, la baisse tendancielle de la démographie devrait se poursuivre ces prochaines années, « parce que l’Amérique ressemble de plus en plus à l’Europe, avec une fertilité moindre et une immigration plus contrôlée », observe le démographe Joseph Chamie.

Par ailleurs, voir sa population décroître constitue un désavantage pour chacun des États américains, dans la mesure où cela diminue son poids politique. Certains États du Midwest et du Nord-Est pourraient perdre plusieurs de leurs grands électeurs.

Selon les scénarios du bureau du recensement américain (US Census), si le pays redevenait l’exception qu’il a longtemps été, avec de hauts niveaux d’immigration, sa population atteindrait les 447 millions en 2060. Mais s’il continuait à maîtriser l’immigration comme sous Donald Trump — avec une natalité équivalente à celle des autres pays riches — ce chiffre pourrait alors tomber à 320 millions.


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