jeudi 28 mars 2019

Les écoles talmudiques ne sont pas des « écoles illégales juives »

Hier, le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge a annoncé un nouveau règlement qui viserait à « encadrer » les écoles religieuses considérées comme « illégales ». Les médias ont repris cette formule à l’envi. « Roberge s’attaque aux écoles religieuses illégales » titrait le Journal de Québec, sur LCN Mario Dumont parlait de « mettre fin aux écoles religieuses illégales ». Radio Canada avait d’abord titré sur les « écoles illégales » (voir capture d’écran ci-dessous et cette url https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1160826/quebec-ecoles-illegales) et d’écoles clandestines avant de se raviser et de parler plus correctement de « Québec renforce sa réglementation sur l’école à la maison ».

Rappelons que nous sommes d’accord que les enfants du Québec apprennent le français, des mathématiques, des rudiments de sciences et d’histoire-géographie. Le problème avec le règlement de M. Roberge est son manque de souplesse, de nuances, de notion d’équivalences dont vont faire les frais des parents qui ne sont en rien juifs, ni même religieux. Faut-il ainsi, comme semble l’indiquer le règlement, qu’un enfant qui suit le programme officiel français par correspondance du CNED passe aussi les examens du ministère québécois ? Lire Instruction à domicile — Québec serre la vis et renforce le monopole du Ministère et Réglement Roberge sur l’instruction à domicile : recul « navrant » et manque de souplesse pour l’AQED (Association québécoise pour l’éducation à domicile).


Pour le directeur de l’Association éducative juive pour l’enseignement à la maison, Jacob Maman, interrogé par le Journal de Montréal, « il n’y a plus d’écoles illégales au Québec ». Ces yéchivas enseignent de l’enseignement religieux (une trentaine d'heures par semaine) et offre du soutien scolaire dans les autres matières (quelques heures par semaine).

Nous sommes enclins à donner raison à M. Maman.

Voici ce qu’en disait l’ancien ministre de l’Éducation (ex-ADQ, maintenant PLQ) Sébastien Proulx dans le cadre de ces écoles talmudiques : « Il n’y a pas eu de demande de permis, il n’y a pas de demande de permis en cours, il n’y en a pas eu dans le passé. Ce n’est pas un endroit où il se donnait un programme éducatif, donc ce n’est pas une école au sens du ministère de l’Éducation », a confirmé Sébastien Proulx.

Et ce qu’en disait le juge Dugré quand Québec a voulu faire fermer en urgence une de ces yéchidas (écoles talmudiques) :

[100] De plus, selon la plaidoirie des procureurs des parties, les établissements offrant des cours de soutien, par exemple en français, anglais ou mathématiques, ne sont pas considérés par le MELS comme étant soumis à l’obligation de détenir un permis en vertu de la L.E.P. [Loi sur l’enseignement privé]

[103] De son côté, l’Académie admet qu’elle n’est pas titulaire d’un permis délivré par la Ministre pour son établissement, mais soutient qu’un tel permis n’est pas requis puisqu’elle ne tient pas un établissement d’enseignement auquel s’applique la L.E.P. [Note du carnet puisqu’il s’agit d’un type de séminaire qui n’enseigne pas le programme du ministère !]

Bref, ces « écoles » talmudiques ne sont pas plus assujetties à la loi sur l’enseignement que des écoles d’équitation, des centres de soutien scolaire ou des séminaires. Elles ne peuvent donc pas être illégales dans le cadre de cette loi. Pour plus de détails voir Marronnier — Les écoles juives « illégales ».

Consternation de la part de l’Association éducative juive pour l’enseignement à la maison

« De revenir avec un nouveau règlement en plein milieu d’année, sans consultation, c’est un peu de la provocation », se désole le directeur de l’Association éducative juive pour l’enseignement à la maison, Jacob Maman.

Bien qu’elle n’ait pas été nommée par le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge, cette association s’estime directement visée. M. Maman dit représenter environ 2000 élèves dans plusieurs centres d’enseignement à travers le Québec.

Les enfants qui fréquentent des centres comme l’académie Yechiva Toras, où Le Journal a rencontré Jacob Maman, suivent des cours religieux en avant-midi. Une fois rentrés à la maison, ils y reçoivent l’enseignent des matières obligatoires.

Une façon de faire rendue possible par la loi 144 adoptée sous l’ancien gouvernement libéral, mais qui a été critiquée durement hier par le ministre Jean-François Roberge. Il estime qu’elle ne permet pas de contrôler le cursus enseigné.

« Les enfants passent 20 heures, 30 heures par semaine dans ces lieux-là, apprennent un paquet de choses, sauf le Programme de formation de l’école québécoise, et c’est très problématique pour nous », a indiqué le ministre sans toutefois nommer d’établissement.

Le nouveau projet de règlement rendra obligatoire l’enseignement d’un « contenu minimal d’apprentissage enrichi », basé sur les programmes d’études de l’école québécoise en langues, mathématique, sciences et univers social, tout comme les examens ministériels.

Après avoir fait d’importants efforts pour respecter la loi 144, l’association se dit surprise de se voir imposer un nouveau règlement.

« Dimanche, on a eu des entretiens entre les parents et les évaluateurs et il y avait des représentants [du ministère] et, de ce qu’on a entendu, ils étaient très heureux de ce qu’ils voyaient », explique M. Maman.

« C’est comme jouer avec les parents comme des marionnettes. Avec la loi 144, on a fait des changements et là on refait encore des changements », ajoute Jacob Maman

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire