![]() |
Le manuel de 1963 |
J’invite ceux qui ont ce livre dans leur bibliothèque à le feuilleter, et encore mieux, à le lire. Datant d’il y a cinquante ans un certain nombre de points sont à actualiser : on ne parle plus de l’URSS de nos jours, et les découvertes scientifiques ont permis d’améliorer la connaissance des civilisations anciennes. Toutefois, il reste un grand classique, offrant une vision large et panoramique de l’histoire du monde. En tant que tel, et comme son rédacteur est un de nos plus grands historiens, il conserve un intérêt réel.
Mais ce livre est d’abord un manuel, destiné à des lycéens de 17-18 ans. C’est là qu’un certain problème se pose aujourd’hui : bien rares sont les lycéens capable de lire ce livre en 2012. Dans l’édition Flammarion il pèse plus de 600 pages, écrit dans une police de taille 8. Bien évidemment il n’y a aucune photographie ni aucun document. La comparaison avec un manuel actuel d’histoire est effrayante. En cinquante ans la chute du niveau est réel, la baisse des exigences indéniables. Des lycéens d’aujourd’hui sont incapables de lire un manuel destiné à leurs grands-parents. Plus grave encore, je doute que des étudiants en histoire de niveau maîtrise puissent se frotter à ce texte dense quant à la typographie et à la réflexion. Quant aux étudiants qui obtiennent le capès [Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré], et même l’agrégation, en histoire peu d’entre eux lisent des livres de ce genre. Si les futurs ou nouveaux professeurs sont incapables de comprendre ces livres, il n’y a rien d’étonnant à ce que les élèves ne puissent y entrer. La comparaison des manuels suffit à prendre la mesure de la déchéance intellectuelle de notre pays. Inutile de présenter des études ou des statistiques qui essayent bien souvent de gommer l’effroyable réalité.

Revoir la formation
Se former en entreprise est une réelle possibilité. C’est apprendre sur le tas, apprendre en faisant. Rien n’exclut qu’il y ait aussi des cours de mathématiques ou de français, et même de littérature ou d’histoire. Rien n’exclut que l’on cherche aussi à les élever vers des domaines plus intellectuels, mais de façon différente. La démocratisation et la massification du système éducatif ont non seulement empêché la formation d’une élite de France, ce qui est extrêmement grave, mais cela a aussi détruit des générations d’enfants à qui l’on a obligé de suivre une formation en décalage complet avec leur appétence. Dans ce jeu stupide, tout le monde fut perdant.
Un professeur latiniste me montrait le texte fameux de Paul-Émile à la bataille du lac Trasimène. Ce texte figurait dans le manuel de 4e de 1998. Aujourd’hui, c’est-à-dire quatorze ans plus tard, non seulement il n’est plus étudié en 4 e, mais il n’est même pas présent dans le manuel des lycéens. Ici aussi la baisse des exigences est quantifiable et visible. Mais peu de parents s’en doute.
Accorder la liberté
Pour y remédier il serait nécessaire de faire un secondaire à trois niveaux. Restaurer l’apprentissage dès l’âge de 12-13 ans, si utile pour des enfants inaptes à l’école mais qui ont tant de talents à développer ailleurs. Solidifier les filières professionnelles et technologiques du lycée, afin que les élèves qui s’y destinent soient réellement formés, et que cela ne soit pas vu comme des filières poubelles. Réserver les filières générales à l’élite intellectuelle, et faire de ce lycée l’antichambre des études supérieures, ou le baccalauréat soit le premier grade universitaire. Bien évidemment, il serait aussi nécessaire de supprimer l’examen du bac et de permettre à chaque établissement d’avoir une grande souplesse dans le programme à suivre. On pourrait définir un programme commun à suivre, afin de faciliter une nécessaire harmonisation, qui durerait environ la moitié de l’année, et l’autre moitié pourrait être des figures libres, afin que les établissements et les professeurs puissent s’adapter au niveau et aux espérances de leurs élèves. Cela s’appelle la liberté éducative. Hélas, l’école en France a choisi le chemin de l’égalité, ce qui la conduit à toujours rejeter la liberté.
Supprimer les concours
L’entrée dans le supérieur pourrait alors se faire sur dossier, avec éventuellement une lettre de recommandation du lycée. La première année servirait à faire un deuxième écrémage, afin d’éliminer et de réorienter les étudiants qui ne sont pas à leur place, qui ne veulent pas suffisamment travailler, ou qui ne sont pas au niveau. On pourrait ainsi supprimer les concours, qui non seulement ne permettent pas de sélectionner les meilleurs candidats, mais qui en plus transforment l’année scolaire en parenthèse de bachotage, ce qui ne permet ni d’approfondir des matières ni de se former réellement. Supprimer les concours redonnerait tout leur sens aux examens, et serait beaucoup plus utile aux étudiants.
Pour ceux qui ont peur de la formation professionnelle je les invite à regarder ce reportage sur la cuisine de l’Élysée, réalisé pour le magazine Michelin. Le chef actuel des cuisines de l’Élysée explique comment il est entré dans cette maison sous la présidence de Pompidou comme simple commis, comment il a gravi un à un les différents échelons, pour être, désormais, le chef des cuisines. Qui niera que c’est là un bel exemple de réussite professionnelle ? Cela ne fut possible que parce qu’il n’y avait pas le collège unique. Dans notre système actuel cette personne aurait été obligée de suivre l’enseignement jusqu’en terminale, de faire un bac S [cégep scientifique], et finalement de perdre son temps et ses envies. Que de talents gâchés nous perdons depuis si longtemps !
Source
Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)
Je pense au contraire que les concours sont une forme de sélection équitable et qui pousse la population vers le haut.
RépondreSupprimerLes concours sont les derniers remparts pour les établissements d'enseignement pour sélectionner les meilleurs étudiants. Sélectionner les étudiants par concours c'est avant tout permettre à ceux qui en ont les capacités d’accéder à un enseignement très pointu.
Le système d'acceptation sur dossier ouvre la porte à des sélections biaisées par les réseaux d'influence des parents plus que par les capacités des élèves.
Pour que l'école soit libre, il faut qu'elle soit impartiale et juste.
Arrêtons de dépenser pour donner à tous un enseignement médiocre. Le but de l'école devrait être de donner aux élèves toutes les chances de réussir dans leur vie professionnelle et non pas d'amener 100% des élèves à l'Université.