jeudi 16 février 2012

Au Moyen-Âge tout chevalier était lettré, selon Martin Aurell (1 de 2)

L’auteur, primé par l’Académie des inscriptions et belles-lettres, est l’invité de Christophe Dickès.

La renaissance n’a pas eu lieu au XVIe siècle mais bien aux XIIe et XIIIe siècle si l’on en croit Martin Aurell (Prix Bordin 2008 de l’Académie des inscriptions et des belles-lettres). Avec son étude sur le savoir et la conduite de l’aristocratie à l’époque médiévale, il décrit l’imprégnation littéraire des milieux chevaleresques. Son livre Le Chevalier lettré constitue une monographie admirablement bien documentée sur la culture en un temps que l’on a trop souvent considéré comme un âge obscur.

Écoutez (48 minutes) :




« La Renaissance a eu lieu au XIIe siècle. Elle a atteint sa plénitude au siècle suivant, et s’est prolongée jusqu’à la fin du Moyen-Âge et au-delà. Pourtant nous l’avons placée à tort au XVIe siècle (…) C’était faire fi du vaste mouvement de renouveau culturel qui depuis au moins les années 1100, animait l’Occident. » Pour ceux qui en doutaient, Martin Aurell vient de publier un livre d’une grande érudition sur le développement des savoirs aux XIIe et XIIIe siècles. L’auteur réalise un véritable tour de l’Europe occidental afin d’illustrer et d’asseoir son propos grâce à de nombreux exemples en Italie, en Angleterre, en France ou sur la Péninsule ibérique...

Marie de France
La première « française » à prendre
la plume en français 
Dans cette première émission consacrée à ces chevaliers lettrés, il décrit tout d’abord l’instruction et l’éducation du futur chevalier, son alphabétisation et sa scolarisation. Dans cette transmission, les parents — et notamment surtout la mère — jouent un rôle déterminant. Naturellement ces milieux se distinguent du clergé par l’utilisation non pas du latin mais de la langue vernaculaire comme une langue de savoir. Néanmoins, dans cette société religieuse, les enfants sont aussi confiés aux cloîtres afin de développer leurs connaissances. Non pas tant pour rentrer dans les ordres, mais surtout afin de se préparer à la reprise des affaires d’un père ou simplement répondre aux exigences d’un père qui ne saura voir son fils rester un rustre.

Dans un deuxième temps, Marin Aurell nous invite à découvrir les lieux de la culture ainsi que les vecteurs de cette culture : grande salle du château, chambres des dames où se côtoient jongleurs et compteurs. Certains seigneurs possèdent même une bibliothèque et écrivent. Romans de chevalerie, quête du Graal, histoire d’amour mais aussi vie de saints. La prose et l’expression orale devient une sorte de spectacle qui adoucit les mœurs.

La deuxième partie de cette émission sera d’ailleurs consacrée à l’influence des lettres sur les moeurs chevaleresques (Développement de l’amour courtois, codification de la guerre, etc.)

L’auteur

Martin Aurell, Professeur d’Histoire du Moyen Âge à l’Université de Poitiers

Professeur d’histoire du Moyen Âge à l’Université de Poitiers, membre de l’Institut universitaire de France, Martin Aurell dirige la revue Les Cahiers de civilisation médiévale. Il est un des meilleurs spécialistes de la noblesse aux temps médiévaux. Parmi ses livres figurent La vielle et l’épée : Troubadours et politique en Provence au XIIIe siècle, Aubier ; L’Empire des Plantagenêt (1154-1224), Perrin, 2003; La Légende du roi Arthur (550-1250), Perrin, 2007 qui a été primé par l’Académie des Inscriptions et des Belles Lettres. Il vient de publier chez Fayard : Le Chevalier lettré, Savoir et conduite aux XIIe et XIIIe siècles. Martin Aurell est notamment intervenu au cours d’un colloque consacré à l’académicien Emmanuel Leroy-Ladurie organisé à la Fondation Singer-Polignac en janvier 2010. Il a aussi été l’invité de Canal Académie à propos de son livre sur le roi Arthur.





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1 commentaire:

  1. Les progressistes peuvent bien argumenter que seulement 1 % de la population était lettrée vers l'An Mil (le haut-clergé et l'aristocratie en somme), on passe à un taux d'alphabétisme d'environ 20 % au Bas Moyen Âge, ce qui est phénoménal.

    Renaissance carolingienne, Renaissance ottonienne, Renaissance du XIIe siècle sont toutes des réalités historiques maintenant admises par l'historiographie académique. Des travaux récents ont démontrés que l'époque mérovingienne n'était pas si obscure. Au bout du compte, le tableau que les historiens professionnels restaurent est celui d'une longue continuité, le "Long Moyen Âge" prôné par notamment Jacques Le Goff qui va de la fin de l'Empire romain d'Occident jusqu'à la Révolution et où le concept de "Renaissance" aux XVe-XVIe siècles n'a plus de raison d'être :

    Faut-il abolir la Renaissance ?

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