lundi 21 juin 2010

Le jugement Loyola : un atout pour tout le Québec

Cette lettre a été transmise par son auteur au Devoir. Les gras et italiques sont de nous.

Éthique et culture religieuse

Par Gérard Lévesque
Témoin expert dans la cause citée 

Le jugement que vient de rendre la Cour supérieure du Québec dans la cause opposant l’école montréalaise Loyola à la Ministre de l’Éducation a pour effet de permettre aux parents qui en assument les coûts d’envoyer leur enfant dans une école privée où l’enseignement religieux sera dispensé en conformité avec leurs convictions, dans le respect de la liberté de conscience et de religion protégée par les chartes québécoise et canadienne. Pour éviter le détestable et honteux système à deux vitesses, le gouvernement québécois doit tout faire pour que l’école publique offre le même bénéfice à tous les parents et les enfants du Québec. 

La décision du tribunal vient rendre encore plus pertinent le souhait exprimé antérieurement par le PQ et l’ADQ à l’effet de « suspendre le programme et le repenser de fond en comble » (Éthique et culture religieuse, Le PQ et l’ADQ veulent mettre le programme aux oubliettes, Le Devoir, 11 déc. 2009 ). Cet impératif s’impose encore plus à la suite de la brillante analyse que la chercheuse Joëlle Quérin a faite des nombreuses et graves carences de ce programme.

Dans son jugement éclairé et fouillé, l’honorable Gérard Dugré a mentionné qu’il existe des avenues prometteuses autres que celle retenue par l’ÉCR. Il mentionne entre autres celle exposée dans le rapport d’expert que nous avons déposé dans le cadre de cette cause. En voici un aperçu, à titre de simple illustration de la place qu’il y a pour la réflexion sur un projet de refonte du programme ÉCR. Il faut donc faire les choses autrement en tirant le profit possible de ce que ce programme ÉCR contient de récupérable et de ce que comportaient de valable nos acquis du passé et que ce programme a dépréciés indûment.

Dans le contexte de la diversité culturelle, ethnique et religieuse du Québec contemporain, il est illusoire de croire que l’on peut respecter les diverses croyances et incroyances par une formule unique et uniforme comme l’est l’ÉCR. Il ne convient pas par exemple d’imposer aux enfants de personnes athées ou agnostiques un cours de vraie culture religieuse, pas plus qu’aux membres de groupes religieux qui ne désirent pas que l’école prenne en main la substance de la formation religieuse de leurs enfants. Par ailleurs, on admet généralement que l’école québécoise, comme toutes celles à travers le monde, a un rôle subsidiaire à jouer dans la formation religieuse du jeune citoyen.

En conséquence, le programme québécois d’enseignement religieux ne peut être approprié que s’il fait preuve de souplesse. Entre autres possibilités, cela pourrait s’apparenter au programme des mathématiques où l’on songe à soumettre trois volets au choix des élèves selon que leur orientation est en sciences humaines ou en art, en recherche ou en médecine, ou encore dans les secteurs techniques.

Ainsi, un programme d’enseignement religieux souple et respectueux des droits pourrait offrir, là où le nombre le justifie et sauf contraintes administratives excessives, le choix entre les trois possibilités suivantes :
  1. un cours de culture religieuse confessionnelle incluant un volet sur les grandes religions, ainsi qu’un volet éthique. Ce choix serait accessible aux confessions chrétiennes, musulmanes, juives et autres reconnues au Québec. Ce choix pourrait tirer profit de formules connues d’enseignement confessionnel assorties d’ajouts sur les grandes religions inspirés par exemple du programme ECR ;
  2. un cours au contenu substantiellement éthique, comportant un léger volet sur les confessions religieuses reconnues au Québec avec une véritable prédominance sur les traditionnelles, comme on l’a espéré du cours ÉCR. Ce choix serait susceptible de respecter davantage les personnes athées ou agnostiques. Ce programme correspondrait en partie à l’enseignement moral que l’on a déjà mis en place par le passé pour satisfaire le droit des personnes athées et/ou serait en partie inspiré du volet éthique du programme ECR.
  3. un cours de culture religieuse multiculturelle incluant une nette prédominance sur les traditions religieuses du Québec ainsi qu’un volet éthique. Une version améliorée du programme ECR pourrait convenir. Ce choix pourrait être à retenir dans le cas où les deux choix précédents ne pourraient être possibles faute de pouvoir remplir les conditions liées au nombre d’élèves et aux ressources humaines et administratives.

Ce programme d’enseignement religieux à choix multiple comporte de plus d’autres nombreux avantages. Il évite la détestable politique du mur à mur pour favoriser plutôt une politique équitable s’ajustant aux diverses régions du Québec ainsi qu’à la diversité montréalaise. Le gouvernement éviterait de plus de mécontenter tout le monde en refusant d’opter pour un accommodement déraisonnable qui consiste à enlever aux Québécois de souche un droit qu’ils avaient acquis pour soumettre les Néo-Québécois à ce qui ne leur convient pas non plus.

Par un programme de ce genre, le gouvernement éviterait, tant au niveau des droits que des contenus des programmes, la politique de la terre brûlée qui, en éducation, amène à toujours tout recommencer à zéro. Ce programme est de plus susceptible de favoriser le dialogue entre les diverses confessions religieuses par son respect des identités particulières et son ouverture à celles des autres. Enfin, autre avantage et non des moindres, le gouvernement favoriserait la paix sociale en rendant inutile la guéguerre devant les tribunaux. Peut-on faire davantage !






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6 commentaires:

Pier3d a dit…

Bonjour,

Un collège subventionné par le gouvernement a-t-il le droit de refuser d'appliquer les directives du gouvernement (la Loi !) et en plus, d'engager des procédures judiciaires contre le même gouvernement-'subventionneur' ?

Qui nous dit que ce n'est pas avec l'argent même de ces subventions que Loyola a payé ses avocats et la recherche pour défier la loi ?

Et même si Loyola nous disait qu'il s'agit de fonds séparés, ce serait totalement faux et simplement un exercice comptable.

Au lieu d'aller en appel, le gouvernement devrait sur le champ suspendre le paiement de la subvention à Loyola. (Fermer le robinet tout de suite)

Puis, laisser le collège qui s'est librement mis dans ce pétrin, se débrouiller pour en sortir : soit, poursuivre le gouvernement pour l'obliger à reprendre ses paiements ou simplement faire amende honorable et revenir à sa position d'avant le procès en s'excusant et en promettant de ne plus recommencer ce genre de mutinerie.

De plus, le gouvernement devrait tout de suite aujourd'hui envoyer un vérificateur, Monsieur Renaud Lachance lui-même, pourquoi pas, accompagné d'agents de police, investir les bureaux du collège et vérifier comment « notre » argent a été géré dans cette affaire.

Après tout, c'est notre argent et il est temps que les fonctionnaires, comme le directeur de ce collège, prennent conscience qu'ils sont payés avec l'argent du public. Notre argent !

Et, oui, fonctionnaire, il l'est à 60 %. Qu'on me corrige si je me trompe.

Pierre Cloutier
Longueuil

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Pour une école libre a dit…

Pier3d

demandait

"Qui nous dit que ce n'est pas avec l'argent même de ces subventions que Loyola a payé ses avocats et la recherche pour défier la loi ?"

Parce que les avocats de Borden, Ladner et Gervais ont tout fait pro bono.... Donc pas un sou des parents imposés deux fois (frais de scolarité + impôts des parents qui passent par Québec) qui a servi pour défier non pas la Loi, mais une décision administrative et faire appliquer la Loi...

Un autre aveugle a dit…

Pier3d a dit:

"Un collège subventionné par le gouvernement a-t-il le droit de refuser d'appliquer les directives du gouvernement (la Loi !) et en plus, d'engager des procédures judiciaires contre le même gouvernement-'subventionneur'"

Oui quand le gouvernement se sert de sa massue pour imposer une dictature aux autres (et plus de 75% de la population est contre la massue). En passant, les subventions ne paient pas la totalite des frais du college. Il y en a qui sont fournis par les parents qui desirent que les enfants frequentent un college prive et que les enfants soient eduques selon le christianisme. Et en plus dans la partie des subventions qui vient du gouvernement, cet argent sort aussi de ma poche pour le redonner au college. Donc je paye 2 fois dans un college prive: une fois pour subventionner le college (par l'entremise du gouvernement) et une autre fois pour y inscrire mes enfants. Donc j'ai doublement le droit d'etre respecte dans un droit aussi fondamental que la liberte de conscience et de religion.

Un autre aveugle a dit…

Suite a ce commentaire:

Le gouvernement ne s'est pas gene, (meme si des sondages ont demontres qu'env 75% de la population Qc est contre le caractere obligatoire du cours ecr) lui pour prendre les impots de ce 75% de la population et payer en cour les avocats de toute sa puissance et ses fonds illimites, et d'aller contre les parents de drummondville courageux tel David contre Goliath.

L'imposition du cours ecr est anti-democratique, anti-charte des droits canadiennes, dictateur, etc.

Et puis est-ce que le gouvernement se gene lui pour se servir de mon argent pour m'ecraser les orteils (comme le disait si bien la ministre courchesne).

Les chartes sont justement la pour proteger les plus faibles contre l'envahisseur tout puissant qu'est le gouvernement du Qc.

Conclusion: oui je n'ai aucune gene meme si le college loyola se serait servi de deniers publics pour me defendre, puisque que le gouvernement fait de meme et sans le consentement/en ecrasant la population.

Si vous revez d'une dictature, vous pouvez toujours aller vivre a Cuba (ou ancienne Irak)... Pas moi! Le gouvernement doit representer le peuple et est elu pour/par le peuple. En democratie, le gouvernement n'est pas un dictateur...

Michel THYS a dit…

Un autre point de vue ...

Je ne partage pas le point de vue de Gérard LEVESQUE.
« La valeur des acquis du passé », le patrimoine culturel, …, doivent être préservés, mais pas de manière exclusive, dans un immobilisme inadapté à notre époque.
Ils doivent être repensés, relativisés et transmis en regard des exigences de la modernité.
Certes, « le libre choix des parents est protégé par les chartes québécoise et canadienne. Mais ce système éducatif pérennise le communautarisme, devenu obsolète. Un exemple : l’influence des parents croyants, même créationnistes, est certes légitime mais elle est affective et unilatérale. Elle doit donc être compensée par celle de l’école, où l’on n’enseigne pas le créationnisme, qui est une croyance, mais l’évolutionnisme, qui est une théorie scientifique, et même un fait d’observation.
Les parents n’ont pas à interférer dans le choix des programmes. Les enfants et ados n’appartiennent pas à l’Etat, mais, à cet égard, il a la charge et la responsabilité d’ouvrir à

Gérard LEVESQUE écrit : « Il est illusoire de croire que l’on peut respecter les diverses croyances et incroyances par une formule unique comme l’est l’ECR ».
Et pour cause : dans sa conception actuelle, ce cours privilégie anormalement la religion catholique, par rapport aux autres religions, et il occulte malhonnêtement les options laïques (même la mention de l’athéisme a été supprimée !).
Un minimum de culture religieuse (intellectuelle, sans quoi c’est de la catéchèse prosélyte) fait partie de la culture générale (« la Trinité n’est pas qu’une station de métro ! »), mais aussi un minimum de culture laïque, afin de permettre aux jeunes de choisir aussi librement que possible de croire OU de ne pas croire, n’en déplaise à ceux qui prétendent détenir LA Vérité, plutôt qu’une « vérité » personnelle, partielle et donc provisoire, que l’on se forge au contact de celles des autres, par le dialogue, et sans chercher à convaincre.

A mes yeux, les trois possibilités de programmes proposées par Gérard LEVESQUE ont pour but de freiner la déconfessionnalisation, pourtant inévitable, de la majorité des sociétés intellectualisées, même si le Québec est encore majoritairement catholique.
Puisse le cours d’ECR être amélioré dans le sens de l’ouverture à la différence de l’autre (non fondamentaliste, s’entend) que prône l’!humanisme laïque, qui n’est pas antireligieux mais une alternative permettant une citoyenneté responsable et un « vivre ensemble » harmonieux !

Michel THYS à Waterloo, en Belgique
http://michel.thys.over-blog.org/article-34247100.

Michel THYS a dit…

Un atre point de vue ...
Je ne partage pas le point de vue de Gérard LEVESQUE.
« La valeur des acquis du passé », le patrimoine culturel, …, doivent être préservés, mais pas de manière exclusive, dans un immobilisme inadapté à notre époque.
Ils doivent être repensés, relativisés et transmis en regard des exigences de la modernité.
Certes, « le libre choix des parents est protégé par les chartes québécoise et canadienne. Mais ce système éducatif pérennise le communautarisme, devenu obsolète. Un exemple : l’influence des parents croyants, même créationnistes, est certes légitime mais elle est affective et unilatérale. Elle doit donc être compensée par celle de l’école, où l’on n’enseigne pas le créationnisme, qui est une croyance, mais l’évolutionnisme, qui est une théorie scientifique, et même un fait d’observation.

Les parents n’ont pas à interférer dans le choix des programmes. Les enfants et ados n’appartiennent pas à l’Etat, mais, à cet égard, il a la charge et la responsabilité d’ouvrir à TOUS, et sans prosélytisme, un horizon philosophique aussi large que possible.
Gérard LEVESQUE écrit : « Il est illusoire de croire que l’on peut respecter les diverses croyances et incroyances par une formule unique comme l’est l’ECR ».
Et pour cause : dans sa conception actuelle, ce cours privilégie anormalement la religion catholique, par rapport aux autres religions, et il occulte malhonnêtement les options laïques (même la mention de l’athéisme a été supprimée !).

Un minimum de culture religieuse (intellectuelle, sans quoi c’est de la catéchèse prosélyte) fait partie de la culture générale (« la Trinité n’est pas qu’une station de métro ! »), mais aussi un minimum de culture laïque, afin de permettre aux jeunes de choisir aussi librement que possible de croire OU de ne pas croire, n’en déplaise à ceux qui prétendent détenir LA Vérité, plutôt qu’une « vérité » personnelle, partielle et donc provisoire, que l’on se forge au contact de celles des autres, par le dialogue, et sans chercher à convaincre.

A mes yeux, les trois possibilités de programmes proposées par Gérard LEVESQUE ont pour but de freiner la déconfessionnalisation, pourtant inévitable, de la majorité des sociétés intellectualisées, même si le Québec est encore majoritairement catholique.
Puisse le cours d’ECR être amélioré dans le sens de l’ouverture à la différence de l’autre (non fondamentaliste, s’entend) que prône l’!humanisme laïque, qui n’est pas antireligieux mais une alternative permettant une citoyenneté responsable et un « vivre ensemble » harmonieux !

Michel THYS à Waterloo, en Belgique
http://michel.thys.over-blog.org/article-34247100.