jeudi 18 mars 2010

France — Pouvoirs publics, médias et experts relativisent l'immigration et présentent ses effets sous un jour favorable

Extraits d'un entretien avec la démographe Michèle Tribalat, directrice de recherche à l’INED, publié dans L'Express à l'occasion de la sortie de son livre Les Yeux grands fermés.

On chercherait donc à rassurer les Français en leur cachant les vrais chiffres de l'immigration ?

Pouvoirs publics, médias, experts n'inventent pas des chiffres, mais ils privilégient les instruments qui relativisent l'immigration et présentent ses effets sous un jour favorable ou, lorsque ce n'est pas possible, qui mettent les immigrés ou leurs descendants en position de victimes. Dans notre pays, on semble plus préoccupé par l'effet de l'information que l'on diffuse que par la réalité qu'elle recouvre. Un climat antiraciste joue, qui incite à la prudence: on cherche à éviter d'alimenter les craintes des Français et à améliorer leur opinion sur l'immigration. Dans notre époque mondialisée, l'immigration apparaît comme une fatalité. Autant la présenter sous un jour favorable.

Pourtant l'immigration est, selon de nombreux observateurs, utile à notre économie ?

C'est ce que l'on nous martèle de tous côtés, mais je n'ai pas lu beaucoup d'études traitant de la question en France. Cette insistance contraste avec le silence assourdissant qui a accueilli le rapport du CAE, silence qui montre le peu d'intérêt pour la réalité, ou tout au moins pour un diagnostic éclairé. Et les études qui sont disponibles, souvent réalisées aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni, ne mettent pas en avant une augmentation décisive du produit intérieur brut [PIB] par habitant due à l'immigration. Que le PIB s'accroisse avec le nombre de travailleurs (au moins en période de croissance) n'est pas une grande nouvelle. Mais très peu semble revenir aux natifs et aux immigrés déjà présents.

Qu'en est-il des salaires ?

Les nombreuses études étrangères s'accordent généralement pour constater un effet négatif sur les plus bas salaires lorsque l'immigration est faiblement qualifiée. Les nouveaux immigrés entrent en concurrence avec les salariés peu qualifiés déjà présents, dont les immigrés, et font baisser les salaires. Une enquête britannique a testé l'effet de l'immigration récente de travailleurs des pays de l'Est, en particulier de travailleurs polonais. Ces immigrés étaient plutôt bien qualifiés mais se sont déclassés sur le marché du travail britannique et ont concurrencé les salariés les moins bien payés. En France, l'immigration n'est pas très qualifiée, un peu plus de 40 % de sans-diplôme dans le flux de 2006. Elle est, par ailleurs, très dépendante des liens familiaux tissés avec des étrangers. L'immigration familiale a changé : elle n'accompagne plus à distance, comme autrefois, le flux d'entrées de travailleurs. Elle comprend désormais des unions dites mixtes entre Français et étrangers, dans lesquelles le conjoint français est bien souvent d'origine étrangère. Ces unions ouvrent ainsi un droit à immigrer à un étranger qui vient du même pays que celui des parents de son conjoint français.

[Notons que, même au Canada où une partie de l'immigration est qualifiée, les bienfaits économiques d'une forte immigration sont remis en question par des instituts de recherche comme l'Institut Fraser pour qui l’immigration massive nuit au bien-être des Canadiens en général et les politiques d’immigration doivent être revues.]

Si l'immigration n'a que peu ou pas d'effets économiques, est-elle nécessaire pour l'équilibre démographique de la France, comme l'affirment certains de vos collègues ?

On entend effectivement souvent cet argument. Il provient d'un raisonnement purement quantitatif qui, poussé à l'extrême, nécessiterait des flux insoutenables. Tout dépend de la facilité de ces immigrés à occuper un emploi, emploi qui dépend lui-même de leur qualification. Cependant, toutes les études -souvent étrangères- concernant l'impact de l'immigration sur les finances publiques mettent l'accent sur un point : l'immigration, même qualifiée, ne pourra jamais rétablir à elle seule l'équilibre des finances publiques.

[Notons que, au Canada et selon le C.D. Howe Institute, l'immigration ne serait pas une solution miracle pour éviter une crise dans la vieillissement de la population active au pays. Voir Immigration et population vieillissante.]

[...]

Si, comme vous le dites, on reste dans le faux-semblant et le demi-mensonge, ne doit-on pas craindre une réaction violente de la population ?

Tout dépend de son degré d'irritation. Aux Pays-Bas, par exemple, nous avons assisté à l'émergence du phénomène Pim Fortuyn. On y a souvent vu une montée en puissance de l'extrême droite, alors que Paul M. Sniderman et Louk Hagendoorn [dans When Ways of Life Collide, Princeton University Press, 2007] ont montré que cela traduisait, en fait, un mécontentement surgi du cœur de la société. La réaction a touché des gens plutôt tolérants sur la question de l'immigration, qui n'avaient pas une vision négative de l'islam mais qui rejetaient certaines pratiques sociales des musulmans.





Michèle Tribalat était invitée le jeudi 18 mars 2010 sur France Culture pour débattre du coût de l’immigration.


Addendum vendredi 19 mars

Jean-Paul Gourévitch, expert international en ressources humaines, spécialiste de l’Afrique et des migrations, publie une mise à jour de sa monographie Le coût de la politique migratoire de la France. Selon lui, cette politique coûte 38,3 milliards d’euros par an soit près de 2 points de PIB.

Lire la monographie en ligne, dans un format adapté à la lecture à l’écran (format flash).

Télécharger la monographie au format Pdf.









Soutenons les familles dans leurs combats juridiques (reçu fiscal pour tout don supérieur à 50 $)

8 commentaires:

Roro a dit…

Merci beaucoup de ce billet.

Sur l'extrait audio.

L’animateur (à la gauchiste invitée) : ” … un certain nombre de personnes s’occupant des questions migratoires estiment que ce n’est plus de la compétence des Etats parce que ces Etats sont sous le contrôle de leur opinions publique et que ces opinions publiques se TROMPENT PAR DEFINITION. Est-ce que ce n’est pas ça votre idée ?

La gauchiste: “Non, ce n’est pas vraiment l’idée, c’est l’idée que la pression de l’opinion publique dans ce domaine-là est beaucoup trop forte et qu’il y a toute une série…

L’animateur (excédé) : “Mais enfin c’est PAS CA LA DEMOCRATIE ? QUE LES OPINIONS PUBLIQUES PUISSENT DECIDER AVEC QUI ELLES ONT ENVIE DE VIVRE ?

La gauchiste: ” Dans ce cas-là on aurait toujours la PEINE DE MORT en France si on suivait ce genre d’argumentation!”

Voila le credo de la gauchiasse invitée :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Catherine_Wihtol_de_Wenden

'Tit Tonio a dit…

Michèle Tribalat complètement atone face à une idéologue délirante. Incompréhensible !

Garli a dit…

Pas tout à fait de votre avis, 'Tit Toine. Mme Tribalat m'a semblé très claire et m'a paru faire entendre ses idées. Le dernier mot a été, en effet, pour l'idéologue, mais c'est pour dire qu'on ne pouvait pas faire confiance aux opinions publiques... Le masque est tombé.

Un pov' pékin de Paname a dit…

Écoutez l’émission, c’est très instructif.

C’est encore pire que ce que l’on pense…

Les chiffres sont truqués, depuis toujours. Soit ils n’existent pas, soit ils sont volontairement sous estimés.

Tribalat explique aussi que l’on se sert du solde migratoire pour montrer qu’il ne se passe rien, alors que les estomacs entrent et les cerveaux partent.

Elle explique bien aussi que l’immigration de travail représente 5% oui CINQ POUR CENT, de l’immigration totale, qui n’est plus qu’une immigration de regroupement familial…

A la fin une super collabo raconte que les politiques migratoires doivent être décidées par des instances supra nationales, car les citoyens des états sont trop obtus dans ce domaine…

Depuis plusieurs années je prépare mon départ de ce pays. Les autres pays sont aussi envahis, mais au moins la vie communautaire y est admise.

Pour moi les droits de l’homme les plus fondamentaux sont la liberté d’expression, la sécurité physique, la propriété, le droit de vivre entouré des gens que j’ai choisi et qui me ressemblent culturelement.

La France est le pays occidental dans lequel ces droits sont le plus ouvertement bafoués.

Dans l’avenir je pense que de nombreux français de souches demanderont l’asile politique à d’autres pays, notamment anglo-saxons.

Notre avenir est TRES TRES sombre.

Julien L'Apostat a dit…

Débat très intéressant où face à Mme Tribalat, la “juriste” se démasque : proposer un salaire décent (!!!) pour certains emplois (BTP,…) serait je cite “un coût pour l’économie”.

La même qui soutient juste avant que l’immigration ne fait pas baisser les salaires !

Petit fait qui ne trompe pas : Tribalat s’exprime de manière apolitique, posée, parfois un peu trop justement quand en face la “juriste” est aggressive et ne cesse de lui couper la parole.

Sébas a dit…

@ Roro :

L'argument qui dit que si le peuple avait le plein pouvoir, la peine de mort redeviendrait légale, est un faux argument.

De 1, pour savoir avec exactitude si les peuples occidentaux seraient pour le peine de mort, il faut des référendums, pas des sondages.

Lorsque le peuple est vraiment souverain, comme dans "démocratie directe", il s'informe pour-de-vrai.

Dans notre système faussement démocratique, où l'on vote une fois aux 4 ans, le peuple se désintéresse -avec raison- de tout ce qui touche à la politique ou aux enjeux sociétaux.

Seulement 57.3% des gens ont voté aux dernières élections québécoises. De ce nombre, seulement 42% ont voté pour les Libéraux. Donc moins de 25% des électeurs ont voté pour Charest ! Soit seulement 1 366 000 électeurs. Plus de 3 258 000 électeurs n'ont PAS voté en novembre 2008.

Message du DGE:

"Le taux de participation des électeurs au scrutin provincial de lundi a été le plus bas depuis 1927, selon les données fournies par le Directeur général des élections. C'est la première fois de l'histoire que le taux de participation est inférieur à 70 % au Québec"

Il (le peuple) s'assit découragé de la 'chose' publique- devant sa 'tivi', et se croit informer...

Qui va les blâmer? Pas moi en tout cas, car je ne vote plus depuis longtemps. C'est une vraie bouffonnerie, cette soi-disant démocratie pour le peuple, par le peuple. Je me répète: Nous votons aux 4 ans, ensuite ils font TOUT ce qu'ils veulent et nous n'avons AUCUN pouvoir à part chialer, payer, ou déménager. Alors, je chiale comme des millions d'autres Québécois...


Alors qui blâmer? Si ce n'est pas la faute du peuple. Le manque de vraie démocratie? Le manque de vraies informations (concernant la peine de mort dans ce cas-ci)?


En tout cas, si les individus;

- savaient que la peine de mort n'est pas dissuasive;

-savaient que dans les juridictions ou elle existe, il y a PLUS de crimes violents;

-savaient que plusieurs sont condamnés à mort, même s'ils sont innocents;

-entendaient souvent que; le meurtre (même par l'état), reste un meurtre...

-savaient que "œil pour œil, dent pour dent", n'est pas digne de notre civilisation, que c'est "un retour en arrière", et que cela représente les valeurs de l'ancien testament et du coran...

-réalisaient que c'est au Québec que les médias canadiens parlent le plus de meurtres et de chiens écrasés (i.e. des faits divers,) et surtout de façon sensationnelle... n'est-il pas un peu normal que le 'peuple' veut pendre par les couilles tous ces 'nombreux' (sic) salauds?

-savaient que les juridictions où la peine de mort est encore utilisée, les criminels violents sont PLUS violents, car ils savent qu'ils vont "y passer de toute façon", alors "aussi ben y aller à fon'train" et faire de 'mégas crimes'...

Sébas a dit…

Suite et fin:

Cela n'est JAMAIS dissuasif comme mesure. Il y a PLUS de crimes violents, là où l'état utilise la violence. Iran, Chine, Pakistan, Yémen, États-Unis, etc.

D'ailleurs plusieurs états américains ont cessé d'avoir recours à la peine capital.

Google: Wikipédia Peine_de_mort_aux_États-Unis

En plus, la peine de mort coûte plus cher que les autres options.

Je cite un autre blogueur du Devoir:

"Ceux qui pensent que la peine de mort est une manière de sauver de l'argent aux contribuables canadiens sont totalement dans l'erreur. Au contraire, en calculant tous les frais qu'une condamnation à mort occasionne, ne serait-ce qu'avec les appels au jugement, et tous les frais d'avocats qui vont avec, on s'est aperçu que garder une personne en prison à vie coute moins cher ! Ne pas avoir la peine de mort non seulement nous empêche de tuer des innocents faussement accusés et d'encourager le meurtre comme acte de justice, mais aussi réduit les dépenses judiciaires. Bref, abolir la peine de mort coute moins cher à la société sur tous les points."

***

Voici une partie du problème:

Lorsque le "peuple" voit tous les criminels récidivistes commettre de nouveaux crimes ou être relâchés trop tôt et lorsqu'il entend parler "aux nouvelles", de tous ces CAS(et que les médias ne se gênent pas pour brasser les émotions du bon peuple et ce, malgré le fait que ces crimes soient en forte baisse -ici en tout cas), il se tanne et demande des mesures extrêmes...

Me semble qu'il y a beaucoup de solutions, avant d'en arriver à la peine de mort barbare et sans appel. (ce qui est vraiment grave lorsqu'il y a erreur judiciaire).

Si la majorité des individus avait conscience de tout ça, peut-être que le 'peuple' serait toujours contre la peine de mort ?

Seulement, tout ça est IMPOSSIBLE à vérifier avec des sondages (questions qui sont toujours biaisées d'une façon ou d'une autre), car le peuple se croit libre, se croit informer, se croit en démocratie, croit aux sondages, etc.

Et les "illusionnistes médiatiques" et autres "démogos' qui nous font croire certaines choses sur la peine de mort, sont-ils pour ou contre la peine de mort?

Poser la question c'est y répondre.
;-)

Qu'en pensez-vous?

Sébas a dit…

J'ai fait une erreur dans mon message de 7:57... voici les bons chiffres:

2 448 612 personnes (42.67% des 5,7 millions d’électrices et électeurs inscrits), n’ont PAS voté en novembre 2008.