vendredi 13 novembre 2020

Novlangue — « paix linguistique » et « nationalisme pur et dur »

Mathieu Bock-Côté nous permet d’ajouter deux nouvelles entrées à notre lexique novlangue

Paix linguistique
Situation dans laquelle les Québécois se font une fierté de leur capitulation linguistique et consentent à leur marginalisation, leur humiliation collective, et leur dépossession identitaire et politique avec le sourire en plus d’en redemander.
 
Nationalisme linguistique

Formule utilisée sous plusieurs formes (nationalisme pur et dur, revanchard, belliqueux, intolérant, etc.) dans les milieux mondains pour décrire celui qui commence à remettre en question les vertus de la « paix linguistique ».


 
La situation du français à Montréal est catastrophique : tel est le portrait, appuyé par des chiffres précis et de multiples aux études, que brosse le chercheur indépendant Frédéric Lacroix dans son récent ouvrage Pourquoi la loi 101 est un échec (Boréal).

En réalité, l’État du Québec n’a été officiellement francophone que pendant deux ans, de 1977 à 1979, c’est-à-dire de l’adoption de la Charte de la langue française (loi 101) à l’arrêt Blaikie de la Cour suprême du Canada, lequel a invalidé les dispositions de la Charte faisant du français la seule langue officielle de la législation et de la justice. En 1982, le coup de force constitutionnel perpétré par le Premier ministre Pierre Trudeau a atténué la portée des clauses scolaires de la Charte. Sans compter que l’arrêt Ford, en 1988, a rétabli le bilinguisme dans l’affichage.

Bien sûr, l’adoption de la loi 101 a amené de nombreux progrès, notamment celui d’avoir accru les transferts linguistiques des nouveaux arrivants vers le français de 10 % à 50 %. Mais il faudrait, selon Lacroix, qu’ils augmentent à 90 % pour assurer ici un avenir à notre langue. Les locuteurs de langue maternelle française sont minoritaires à Montréal depuis 2006 ; le français comme langue d’usage y sera déclassé par l’anglais en 2036.

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La troisième censure est celle de la paix linguistique. Le Québec ne vit pas une situation de paix linguistique en ce moment. Loin de là. 

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La Hongrie propose un amendement constitutionnel pour s'opposer à la théorie du genre

Viktor Orban, Premier ministre de Hongrie
Le gouvernement hongrois a proposé mardi un amendement constitutionnel qui défend l’intégrité sexuelle des enfants tout en limitant l’adoption aux couples mariés.

Dans le projet d’amendement soumis au parlement par la ministre de la Justice Judit Varga, la constitution nationale déclarerait que « la mère est une femme, le père est un homme », rapportent les médias hongrois, tout en interdisant le changement de sexe pour les mineurs.

En opposition directe à la théorie du genre, le texte amendé déclare que « la Hongrie protège le droit des enfants à une identité conforme à leur sexe de naissance et garantit une éducation conforme aux valeurs fondées sur l’identité constitutionnelle et la culture chrétienne de la Hongrie. »

La « dignité humaine », déclare un exposé des motifs, « comprend également le droit de chaque enfant à avoir une identité appropriée à son sexe, y compris la protection contre les interférences mentales ou biologiques avec son intégrité physique et mentale. »

La loi hongroise reconnaît déjà le mariage comme une union stable entre un homme et une femme, et l’amendement de mardi stipulerait que seules les personnes vivant dans une telle union seraient autorisées à adopter des enfants. Les célibataires ne peuvent adopter des enfants qu’avec une autorisation spéciale du ministre chargé des affaires familiales.

« La base des relations familiales est le mariage », dit-il. « La mère est une femme, le père est un homme. »

Les responsables gouvernementaux affirment que le nouveau projet de loi renforcera « l’accent mis sur les droits des enfants lors de l’adoption ».

En août, le gouvernement hongrois avait déjà mis fin aux programmes d’études de genre dans les universités publiques après avoir déterminé que les programmes ne servaient aucun but identifiable et étaient basés sur « l’idéologie plutôt que la science ».

Bence Rétvári, secrétaire d’État au ministère des Ressources humaines, a déclaré que les diplômes universitaires doivent être ancrés sur une base scientifique, alors que les études de genre, « comme le marxiste-léninisme », sont plus justement appelées idéologie que science, et sont foncièrement inappropriées pour l’enseignement universitaire.

Le nombre d’étudiants touchés par l’interdiction est minime : seuls 11 candidats ont été admis en étude de genres cette année à l’université Eötvös Loránd de Budapest et deux à l’Université d’Europe centrale, les deux seules universités qui offrent des études de genre en Hongrie.

États-Unis — Le vote républicain caché : les diplômés opposés au politiquement correct

De tous les ratés de la part des sondeurs lors de l’élection de 2020, le plus grand décalage entre le scrutin et la réalité est venu des élections des représentants à la Chambre. Les 435 représentants sont élus pour deux ans, au suffrage universel direct. Le consensus parmi les principaux pronostiqueurs était que les républicains perdraient 10 à 15 sièges à la Chambre. Un haut responsable républicain de la Chambre déclarait même que perdre cinq sièges républicains serait un bon résultat.

Au lieu de cela, les républicains devraient gagner au moins sept sièges à la Chambre et pourraient finir par remporter jusqu’à 13 sièges détenus par les démocrates lorsque le dépouillement aura été complété. Il est probable qu’aucun républicain de la Chambre ne perdra sa réélection. C’est une énorme erreur qui ne peut être écartée à la légère.

Selon un article convaincant du professeur de science politique Eric Kaufmann, « le correctivisme politique ambiant fait qu’un certain nombre de diplômés blancs craignent de révéler leurs intentions de vote ». Dans son article, il avance la preuve qu’il existerait un vote caché en faveur de Trump qui ne provient pas de ses partisans blancs de la classe ouvrière, mais plutôt des électeurs de tendance conservatrice des banlieues aisées qui ont peur de partager en public leurs points de vue sur la politique et les questions culturelles sensibles.

« Le correctivisme politique (rectitude politique) se réfère au contrôle du discours public afin qu’il  obéisse à des tabous culturels, en particulier ceux concernant la race, le sexe et la sexualité. Ceux qui brandissent des tabous acquièrent un pouvoir rhétorique qui les encourage à élargir le sens de concepts tels que le racisme pour englober des actions non racistes comme voter pour Donald Trump », écrit Kaufmann.

Kaufmann se base sur de nombreuses données sociologiques pour faire valoir que les conservateurs les plus instruits sont les plus réticents à partager leurs points de vue sur ces questions brûlantes avec les sondeurs. (Voir le graphique ci-dessous publié plus tôt sur ce carnet.Kaufmann souligne que les sondages à la sortie des urnes montrent une surperformance notable de Trump auprès des électeurs blancs diplômés de l’université : Trump et Biden sont à égalité dans cet électorat, avec 49 % chacun. L’écart entre les prévisions des résultats à la Chambre et les résultats serait la preuve la plus importante de cet électorat caché pro-Trump concentré dans de nombreuses banlieues de la classe moyenne et les banlieues éloignées.

 


Une autre preuve d’un ressac de la classe professionnelle contre les démocrates provient d’une étude sur six mois récemment publiée portant sur les électeurs de banlieue et menée par les principaux stratèges républicains Robert Blizzard (de Public Opinion Strategies) et Liesl Hickey (d’Ascent Media). Curieux de comprendre les électeurs de banlieue, le duo a interrogé sur leurs opinions politiques quarante hommes et femmes de banlieue, diplômés de l’université, dans les États clés au cours des six derniers mois. Les deux chercheurs se sont entretenus avec eux à plusieurs reprises depuis le début du projet en mai 2020.

L’une de leurs conclusions les plus importantes est que de nombreux participants ont exprimé spontanément leur frustration face aux excès de la « culture d’annulation », soulignant un environnement étouffant où les employés craignent d’être licenciés ou punis pour des opinions politiques hétérodoxes qu’ils exprimeraient sur le lieu de travail.

Le cas de l’analyste de données progressiste David Shor est instructif. Il a été licencié ce printemps pour avoir partagé une simple analyse politique sur les réseaux sociaux. Ses mises en garde sur les risques électoraux liés à des politiques progressistes allant trop loin, risques et exagérations que de nombreux démocrates étaient réticents à exprimer publiquement, sont soudainement devenues sagesse conventionnelle à la suite des résultats décevants des démocrates au Congrès.

En effet, au lendemain de l’élection, de nombreux démocrates de la Chambre ont reproché à leurs collègues les plus à gauche les résultats décevants à la Chambre, les accusant de mettre en avant des idées de gauche impopulaires comme mettre fin au financement de la police et soutenir un régime d’assurance médicale publique universelle. Dans l’État de New York, où les républicains ont connu un succès inattendu lors des élections au Congrès et à la législature de l’État, les républicains ont attaqué leurs opposants démocrates sur les questions d’ordre public, y compris une récente loi qui réformait les conditions de mise en liberté sous caution pour faciliter la libération des criminels avant leur procès.

Au lendemain de l’élection de Trump en 2016, l’une des analyses les plus pénétrantes fut celle publiée en 2017 et commandée par le Center for Politics de l’Université de Virginie. Elle tentait de comprendre ce qui avait motivé le soutien des partisans de Trump à cet homme d’affaires grossier. La grande majorité des électeurs de Trump a déclaré que c’était son opposition à la rectitude politique — bien plus que ses politiques, ses antécédents d’homme d’affaires ou ses appels au changement. Les répondants étaient profondément méfiants à l’égard des médias. Près de neuf répondants sur 10 (88 %) déclaraient que les critiques des médias à l’égard de Trump renforçaient leur opinion que le président est sur la bonne voie. Le même pourcentage était d’accord avec l’affirmation de Trump selon laquelle la presse est « l’ennemie du peuple américain ».

Voir aussi

États-Unis — les conservateurs sont ceux qui craignent le plus d’exprimer leurs opinions

Les plus religieux hériteront-ils de la Terre ? (Eric Kaufmann)

Le déclin des blancs : rejeter, réprimer, fuir ou métisser ? (Eric Kaufmann)