jeudi 3 septembre 2020

Est-il trop tard pour que votre enfant soit instruit à la maison ?

L’école à distance à distinguer de l’instruction à domicile

Si l’état de santé de votre enfant le met à risque de développer des complications s’il contracte la COVID-19, vous pouvez demander qu’il suive ses cours à la maison. Les réseaux public et privé ont développé des services à distance. Vous pouvez aussi formuler une telle requête si une personne de votre famille immédiate est vulnérable. Vous devez alors présenter un billet médical à la direction d’école de votre enfant.

L’instruction à domicile ou l’école à la maison

Dans le cas où votre enfant et les membres de votre famille sont en bonne santé, votre enfant n’aura pas droit à l’enseignement à distance. Vous pouvez alors opter pour une scolarisation à la maison. Et il n’est pas trop tard pour le faire dès septembre.

« L’école à la maison est disponible en tout temps. Le parent peut retirer son enfant à n’importe quel moment de l’année », mentionne la présidente de l’Association québécoise pour l’éducation à domicile (AQED), Marine Dumond.

Au moins 8 304 enfants seront scolarisés à la maison au cours de l’année 2020-2021, selon des données obtenues par Radio-Canada. Au mois de mars 2020, avant que la pandémie de COVID-19 soit déclarée, ils étaient 5 964.

Comment faire ?

Si vous choisissez de faire l’école à la maison, vous devez présenter un avis écrit au ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur et à votre centre de services scolaire pour les informer que votre enfant poursuivra ses apprentissages à domicile. L’avis doit être envoyé dans les dix jours suivant le départ de votre enfant de son école. Si votre enfant fréquente un établissement privé, avisez aussi la direction de l’école.

Par la suite, vous devez présenter un projet d’apprentissage à la Direction de l’enseignement à la maison du ministère et à votre centre de services scolaire dans les 30 jours suivant la fin de la fréquentation scolaire de votre enfant.

Ce document doit présenter l’approche éducative que vous préconisez, le programme d’études et les activités prévues. Vous indiquez également les organisations qui vous épauleront dans l’enseignement à la maison et les modalités d’évaluation.

Frais déjà payés et pénalités

Si vous avez déjà payé des frais à l’école publique de votre quartier, vous recevrez un remboursement pour les services qui n’ont pas été rendus. « Ceci peut cependant varier selon le moment où le parent avise l’école de sa décision », mentionne le ministère de l’Éducation dans un échange de courriels, en précisant que chaque situation sera évaluée au cas par cas.

Dans le cas d’une école privée, vous devez assumer les frais « au prorata du nombre de jours que les services ont été offerts », indique la Fédération des établissements d’enseignement privés (FEEP). « On ne facture pas de frais pour les jours, les semaines ou les mois au cours desquels l’enfant n’est pas scolarisé dans l’un de nos établissements », précise son président, David Bowles.

Toutefois, les droits d’inscription à une école privée — environ 50 $ — ne sont pas remboursables puisqu’il s’agit de frais administratifs imposés pour ouvrir le dossier de l’enfant. Il en est de même pour les frais d’environ 200 $ demandés à l’automne pour réserver une place à l’enfant au sein de l’école pour l’année suivante.

Quant à la possibilité que des pénalités soient exigées, M. Bowles avance que « ce n’est pas une pratique habituelle. Mais tous nos établissements sont indépendants. »

Réfléchissez-y bien !

Avant d’opter pour l’école à la maison, vous devez réfléchir à l’engagement que cela requiert. « On prend la responsabilité [de l’éducation de son enfant], insiste Marine Dumond. On ne délègue plus rien. Il faut chercher des ressources et il faut s’organiser. »

La présidente de l’AQED prévient les parents qui choisissent cette voie de ne pas faire l’erreur d’essayer d’être des enseignants. Ils sont plutôt des parents éducateurs, selon elle. « [Les enfants] ne veulent pas voir leurs parents comme des enseignants, dit-elle. C’est un apprentissage que les parents doivent faire. Ils vont devoir procéder par essais et erreurs. »

L’AQED vous propose plutôt de « sortir des normes » et de recourir à des méthodes alternatives d’enseignement, notamment par le biais de jeux, de lecture, d’activités muséales, etc.

Votre centre de services scolaire peut de son côté vous fournir des manuels scolaires et didactiques, en plus de vous donner accès à une bibliothèque, à des laboratoires, et même à des installations sportives, selon les disponibilités de ces espaces.

Autre association qui aide les parents éducateurs : la HSLDA et l’ACPEQ. Vous faites l’école-maison pour la toute première fois ? et Pour débuter, L’école-maison, c’est quoi au juste ?.

Source

L'égalité, un fantasme français — psychanalyse et aveux d'un brillant sujet libéral

Recension d'Éric Zemmour du livre L'égalité, un fantasme français de Michel Rosen qui vient de paraître aux éditions Tallandier. Un réquisitoire écrit par un ancien inspecteur des finances contre l’égalitarisme à la française qui tourne à la charge contre l’État.

 

Et soudain on comprend tout. On comprend pourquoi l’auteur ne craint pas de venir après les glorieux ancêtres comme Tocqueville, Taine, jusqu’à Alain Peyrefitte. On comprend pourquoi son livre ressemble à un ouvrage des années 1980, en pleine vague libérale, les mêmes thèmes, les mêmes grilles de lecture, les mêmes références, les mêmes exemples, les mêmes idées, les mêmes recettes, suppression du statut de la fonction publique ou smic régional. 
 
Le même plaidoyer pour «la «mondialisation heureuse», le libre-échange, la concurrence. La même admiration pour «l’économie sociale de marché» à l’allemande et l’université à l’américaine. La même préférence donnée à la « mobilité sociale » sur l’égalité, à l’individu sur la société. Le même éloge de «l’équité», à la place de «l’égalité», qui n’avait pourtant pas porté chance à Édouard Balladur en 1995. On comprend pourquoi sa dénonciation du fantasme égalitaire tourne très vite à la dénonciation de l’État. On comprend pourquoi cette impression de déjà lu cent fois, sous les plumes d’Olivennes, Minc, Baverez, etc., bref, tout ce que la nomenklatura française compte de plumes fécondes et de contempteurs du «mal français». On comprend cette avalanche de chiffres qui fait ressembler certaines pages à un rapport de l’Inspection générale des finances : l’auteur en sort !

Le lecteur est arrivé dans les dernières pages du livre, à la postface joliment intitulée «Pavane pour l’énarque défunt», et l’auteur lui avoue tout : Michel de Rosen a 69 ans, il fut élève de l’ENA en 1974, sorti en 1976 (promotion Guernica). Il sera directeur de cabinet d’Alain Madelin dans le gouvernement Chirac de 1986. Fils d’immigré russe, il a rêvé de servir l’État et la France, mais «le maximalisme étatiste du programme commun (…) m’a fait quitter le métier auquel je m’étais préparé avec enthousiasme ».

On le croit volontiers même si on a envie de lui faire remarquer que le maximalisme étatiste a duré deux petites années avant le «virage libéral et européen» de Mitterrand et des socialistes. Deux ans seulement! Mais notre auteur se défend avec conviction et même émotion. Le réquisitoire tourne au plaidoyer. Le plaidoyer à la psychanalyse. Le brillant inspecteur des finances a «pantouflé», a gagné beaucoup d’argent dans le privé, a même travaillé pour les Américains.

Il sait que sous le général de Gaulle on l’aurait qualifié de «traître». Il sait surtout que l’argumentaire libéral et mondialisateur des années 1980 a pris du plomb dans l’aile. Que l’exemple catastrophique d’incompétence de l’État toujours donné (le plan Calcul) peut être contrebalancé par l’incompétence privée qui coûte cher à la France (rachats des grands groupes français par des étrangers, Lafarge, Alstom, Alcatel, etc.). Avec intelligence, Rosen « lâche » volontiers le «ruissellement» des riches vers les pauvres, qui fut pourtant le principal thème de campagne des libéraux pendant trente ans. Mais il s’accroche encore à sa défense du libre-échange comme moteur de la croissance, alors qu’un de nos plus grands économistes, Maurice Allais (un libéral pourtant), a démontré il y a bien longtemps la concomitance entre l’ouverture au monde de l’Europe et de la France et la baisse de la croissance, la montée du chômage, et celle souvent explosive des inégalités au sein des pays, qu’ils soient riches ou pauvres.

Le problème n’est pas l’État français et l’obsession égalitaire française, mais la mondialisation du bas (l’immigration) et la mondialisation du haut (l’internationalisation des élites françaises), qui détruisent le pacte social français » et font s’écrouler le pays sur lui-même
Mais l’équanimité nous oblige à reconnaître que beaucoup d’arguments de notre auteur touchent fort juste. Sa charge contre les égalitaristes fous et leur icône Piketty frappe fort. Les chiffres de prélèvements obligatoires, de dépenses publiques, de prestations sociales, qu’il a l’habileté de donner en pourcentages mais aussi en absolus, font froid dans le dos. Nos « records » mondiaux en ce domaine nous emballent moins que ceux dans les stades. Nous comprenons très bien que le « haut niveau de prélèvements obligatoires vient du haut niveau de dépenses publiques»; et que le haut niveau de dépenses publiques vient du haut niveau de dépenses sociales. Et que le haut niveau de dépenses sociales vient du haut niveau de prestations sociales. En clair, des allocations diverses et variées qu’on verse aux individus (40 milliards d’aides au logement!) au lieu d’investir dans l’hôpital et la recherche. Ce qui fait que face au Covid, l’Allemagne et d’autres pays s’en sont mieux sortis que nous, avec (beaucoup) moins de dépenses sociales ! On comprend même – grâce soit rendue à notre inspecteur des finances défroqué - que notre État-providence réduit bien les inégalités de revenus mais ne favorise pas du tout la mobilité sociale, tandis que les impôts écrasants découragent les riches (qui fuient à l’étranger) et exaspèrent les classes moyennes (qui occupent les ronds-points en gilet jaune).

Dans une page étonnante, parce qu’elle contredit l’ensemble de la thèse antiétatiste, Michel de Rosen reconnaît que la lourdeur insupportable de la machine redistributrice française et les blocages de l’«ascenseur social», comme disait son ancien patron, Alain Madelin, peuvent être expliqués par trois raisons majeures : « Une immigration de niveau socio-économique bas avec de faibles capacités d’assimilation à la culture française (…), un phénomène simultané de mondialisation des classes privilégiées dont le lien avec les territoires s’édulcore (études à l’étranger) (…). Et (l’essor) des technologies de l’information et de télécommunication qui se sont substituées à un très grand nombre de métiers. » Bref, le problème n’est pas l’État français et l’obsession égalitaire française, mais la mondialisation du bas (l’immigration) et la mondialisation du haut (l’internationalisation des élites françaises), qui détruisent le pacte social français et font s’écrouler le pays sur lui-même.

Rosen regarde en face la question avec moult précautions oratoires mais non sans courage : il propose la suppression du droit du sol, l’instauration d’une préférence nationale (sans oser dire le mot) pour les prestations sociales de solidarité, mais aussi une franche sélection à l’entrée des universités françaises. Exactement ce que devait faire et que n’a pas fait le gouvernement Chirac de 1986 qu’il a servi. La psychanalyse est devenue confession. Et faute avouée est à moitié pardonnée.


 
L’ÉGALITÉ UN FANTASME FRANÇAIS 
par Michel de Rosen, 
paru le 27 août 2020, 
aux éditions Tallandier, 
à Paris, 
277 pp., 
ISBN-13 : 979-1021042841 
18,90 euros.
39,85 $ canadiens.