vendredi 24 janvier 2020

Pakistan — les élèves chrétiens perdent des points bonus accordés à ceux capables de réciter le Coran (en arabe)


Libérée de prison en 2018, Asia Bibi  vit alors près d’Islamabad, sous haute protection. Elle rejoindra le Canada sept mois plus tard.


Dans un récit-choc qui paraît la semaine prochaine, « Enfin libre ! » (Éditions du Rocher), l’ancienne ouvrière agricole catholique exilée dans un lieu secret au Canada raconte ses neuf années de souffrance en détention au Pakistan, où un tribunal l’avait condamnée à mort pour un prétendu blasphème.

Extraits du livre d’Asia Bibi

Depuis quelques mois, Asia Bibi vit libre, mais cachée, dans un pays libre. Grâce à la mobilisation des médias du monde entier et des autorités politiques de nombreux États, elle a fini par échapper à sa condamnation à mort au Pakistan. Exfiltrée de la prison où elle croupissait depuis neuf ans en attendant son exécution pour avoir simplement bu dans le même puits que des musulmanes de son village, elle a réussi à quitter, avec sa famille proche, le pays où des foules fanatisées excitées par des leaders islamistes comptaient lui régler son compte en dépit de la décision de justice intervenue (tardivement…) en sa faveur.

Dans le texte qu’elle coécrit avec la journaliste française Anne-Isabelle Tollet qui, pendant des années, a remué ciel et terre (jusqu’au Vatican !) pour la secourir, cette catholique de 49 ans et mère de trois enfants revient sur son martyr, dès avant son emprisonnement : les menaces, les insultes, les coups, les humiliations, les tortures… Un calvaire emblématique de la persécution endurée par les deux millions de chrétiens vivant dans ce pays musulman voisin de l’Afghanistan et de l’Iran. C’est à eux, en particulier à ceux « accusés de blasphème, toujours emprisonnés » que cette mère Courage dédie son livre.

Avant d’être jetée en prison, je ne connaissais rien en dehors de mon village. Dans mon monde, les chrétiens vont rarement à l’école, et comme j’ai grandi à la campagne, je ne voyais rien d’autre que les champs et mes voisins musulmans qui travaillaient la terre. Je ne suis pas instruite, mais j’ai vite compris qu’eux non plus n’étaient pas plus renseignés que moi. Eux connaissent le Coran et moi la Bible. Pour moi, les extrémistes islamistes sont méchants, mais pas particulièrement avec les chrétiens. Ils effraient aussi les musulmans qui doivent tenir une ligne de conduite stricte par rapport au Coran. Les islamistes ne sont pas représentatifs, d’ailleurs on n’en croise pas à tous les coins de rue, mais ils dictent leur volonté au Parlement, leur influence est terrible parce que tout le monde les craint, même les ministres et le président. Tout le monde est désemparé face à eux, parce qu’ils n’hésitent pas à mettre des bombes ou à s’allier avec les talibans pour tuer et se tuer au nom d’Allah. D’ailleurs, les juges du tribunal de Nankana et de la Haute Cour de Lahore ont dû avoir peur d’eux pour me condamner à la peine capitale.

Je suis fière d’être catholique. Avec les protestants, il paraît que nous représentons moins de 2 % de la population. Nous ne sommes pas perçus comme une menace, mais nous ne sommes pas considérés comme des êtres respectables. Ou plutôt, on se méfie de nous, car nous ne croyons pas en leur Dieu, Allah. Quand nous faisons nos papiers d’identité, nous sommes obligés de déclarer notre religion. Notre passeport a aussi une couleur particulière, il est noir. Avant même de l’ouvrir, on sait tout de suite que nous sommes chrétiens. C’est comme si on nous mettait une marque au milieu du visage et, au Pakistan, ce n’est pas un avantage. Notre communauté souffre de toutes sortes de mépris et cette attitude a toujours été ancrée dans les esprits : nous sommes d’ailleurs surnommés chouri, un surnom extrêmement dévalorisant, insultant même, qui désigne « celui qui nettoie les toilettes ». La grande majorité des chrétiens est donc cantonnée au nettoyage de la rue et, à la campagne, il est difficile de posséder des terres, car les musulmans refusent de nous vendre leurs graines de semence à un prix normal. Pour nous, c’est beaucoup plus cher.

Je n’ai pas pu aller à l’école parce que ma famille était trop pauvre. Or, il y a beaucoup de bonnes écoles chrétiennes, mais elles sont trop chères pour nous et ce sont souvent les musulmans qui y étudient ! Situation absurde. Mais je tenais à ce que mes enfants sachent lire et écrire et qu’ils trouvent un bon métier. […] L’école où ils allaient était un misérable bâtiment avec peu de mobilier et de matériel, mais ils apprenaient tellement de choses. Ils seront professeur, médecin ou peut-être même avocat ! C’est le souhait de ma fille de 20 ans, Eicham, et ici elle va y arriver. Le fils de ma cousine est bien devenu comptable. Bien sûr, au Pakistan, là où il travaille, il progresse moins vite que les musulmans, mais il est content et il peut offrir une belle vie à sa famille. J’avais peur pour mes enfants, même à l’école. Parce que tous les jours, leurs camarades de classe les incitaient à se convertir et parfois les insultaient ou les bousculaient quand ils disaient qu’ils croyaient en Jésus et qu’ils étaient fiers de leur religion.

Un jour, ma Sidra, qui est tellement sensible, est revenue bouleversée. Dans l’école de garçons à côté de la sienne, Charoun, un jeune chrétien de 15 ans, que tout un groupe maltraitait depuis des mois et des mois, a été roué de coups de pied et de coups de poing. Ils l’ont frappé tellement fort qu’il en est mort. Et la police a refusé de reconnaître qu’il était harcelé parce qu’il était chrétien. Ils étaient tous jaloux de Charoun, car il était très bon élève et c’est pour ça qu’ils l’ont traité avec violence. Tous les adultes ont fermé les yeux et Sidra ne pouvait pas s’arrêter de pleurer. Je l’ai consolée en la serrant très fort dans mes bras. Les frères de Charoun ont eu ensuite tellement peur qu’on leur fasse la même chose qu’ils n’ont plus voulu retourner en classe. C’est tellement injuste. La vie, pour nous les chrétiens, n’est déjà pas facile. Pourquoi même les enfants sont-ils méchants entre eux à l’école ? Ils sont tous là pour apprendre la même chose. Mais les livres qu’ils étudient disent aussi des choses insultantes sur les chrétiens et les autres minorités. Un jour, Sidra m’a lu un texte qui expliquait que nous étions inférieurs, mauvais, qu’on devait se méfier de nous et nous traiter en ennemis. Même dans les livres savants, ils racontent des mensonges. Les élèves chrétiens, qu’ils soient brillants ou pas, perdent de toute façon des points bonus accordés aux musulmans capables de réciter le Coran [en arabe, une langue étrangère au Pakistan où la langue du pays est l'ourdou].

[…] Dans les grandes villes au Pakistan, les chrétiens ne vivent pas comme à la campagne. Ils se réunissent dans des quartiers qu’on appelle aussi des ghettos. Avec Achiq et les enfants, nous allions chaque année à Lahore pour assister à la messe de Pâques au sein de la Joseph Colony. Construite sur un terrain marécageux, la Joseph Colony n’a jamais été très accueillante pour des non-chrétiens. Les déchets jonchent le sol boueux et l’air est saturé d’une poussière noire recrachée par les usines voisines. Nous avions des amis parmi les 450 chrétiens qui s’entassent dans les petits immeubles. Tchazia et Akbar nous invitaient chaque année à partager le repas pascal. Je les aimais beaucoup, ils avaient le cœur grand avec leurs trois petits. Je sais qu’ils ont beaucoup prié pour moi et, grâce au Ciel, leurs prières ont été entendues. Je regrette seulement de ne plus pouvoir les revoir pour les remercier.

En 2013, j’avais eu peur pour eux. Lors d’une visite, Achiq m’avait raconté que l’ensemble de la Joseph Colony avait été prise pour cible par des voisins musulmans.


Là-bas, on appelle ça des mobs [foule/plèbe/populace] : des mouvements de foule excitée par des religieux fanatiques qui détruisent tout au nom de la défense de l’islam. C’est ce que nous redoutons le plus, nous, chrétiens. Plus de 150 maisons avaient été détruites suite à une dispute entre un musulman et un chrétien. Sawan Machi avait été accusé de blasphème et, immédiatement, un appel à manifester avait été lancé à la mosquée pendant la prière du vendredi. La foule était revenue pour tout brûler et jeter sur les maisons et les petites églises des produits chimiques utilisés pour faire fondre l’acier. À l’époque, Achiq m’avait rassurée, car la petite famille de Tchazia et Akbar se portait bien et le gouvernement avait accepté de payer toutes les réparations. Quant à celui qui a été accusé de blasphème sans raison, je crois qu’il croupit toujours en prison.

[…] Chrétiens comme musulmans, on vit tous avec la peur au ventre qu’une personne mal intentionnée nous accuse à tort. Et c’est bien ce qui m’est arrivé. On m’a précipitée dans un horrible cauchemar qui a duré dix ans. J’ai cru que je ne me réveillerais jamais ! C’est aussi arrivé à d’autres comme Chakil, une femme du village juste à côté du mien, et son fils Masih qui n’avait que 9 ans. Ses voisins musulmans ne supportaient pas que le petit Masih se mêle aux jeux de leurs enfants parce qu’il était chrétien. Alors ils l’ont accusé d’avoir brûlé le Coran. La police est venue les arrêter tous les deux, sans même prendre la peine de vérifier si c’était vrai. Ils ont été brutalisés et risquaient la peine de mort. Un enfant de 9 ans ! C’était l’âge de mon Eitcham, ça me glace le cœur rien que d’y penser. Ils sont tous devenus fous. Heureusement, au Pakistan, il y a tout de même des gens qui nous défendent. Ils créent des associations pour protéger les innocents des injustices. Ils ont fait tellement de bruit et de scandale auprès de la police, dans les rues et partout où ils ont pu, que Masih et sa maman ont été relâchés. Mais ils étaient prêts à assassiner un enfant de 9 ans, juste parce qu’il partageait les jeux des musulmans !

Souvent d’ailleurs, la foule est tellement électrisée par la haine qu’elle n’attend pas que les juges rendent leur verdict. Ça a été le cas pour Chazad et Chama, un couple de chrétiens, parents d’un enfant de 3 ans, qui travaillaient dans un village près de chez nous. Ils ont été accusés d’avoir sali le Coran et leurs voisins ont appelé la police. Mais la police n’a pas eu le temps d’arriver, une foule très hostile composée de centaines et de centaines de personnes s’est abattue sur eux comme une énorme vague. Ces personnes les ont frappés avec une rage qui n’était pas humaine, et puis elles les ont brûlés vifs et la police n’a rien pu faire.

[…] Dans mon pays, les jeunes filles chrétiennes sont souvent enlevées, retenues de force et même violées, parfois par plusieurs hommes. On les convertit de force à l’islam, on les marie sans leur demander leur avis. Elles sont brisées pour le reste de leur vie, du moins quand elles s’en sortent, car il arrive aussi qu’on les brûle à l’acide ou qu’on les tue si elles osent résister. C’est un drame qui est arrivé à Yaqoub, un chrétien de notre communauté. […] Asma, sa fille de 25 ans qui était douce et belle comme le jour, travaillait comme maîtresse de maison chez une famille musulmane. Tout allait bien pour elle, la famille la traitait plutôt bien. Mais Gujjar, un musulman, avait décidé qu’il voulait l’épouser sans lui demander son avis. Asma n’en avait aucune envie et elle ne voulait pas se convertir à l’islam. Elle a résisté pendant de longues semaines, elle a refusé sa proposition, ce qui a rendu le jeune homme fou de rage. Zaman, l’employeur d’Asma, un homme bon, l’a heureusement soutenue et protégée, mais cela n’a pas suffi. Un jour, alors qu’Asma est allée ouvrir la porte puisqu’on avait frappé, Yaqoub l’a entendue hurler de douleur. Il s’est précipité et a vu Gujjar, le visage déformé par la haine et la colère, en train de contempler Asma dévorée par les flammes. Il l’avait brûlée vive juste parce qu’elle ne voulait pas l’épouser. Dans quel monde vivons-nous ?

Enfin libre !
de Asia Bibi et Anne-Isabelle Tollet
paru aux Éditions du Rocher
à Monaco
le 29 janvier 2020
216 pages
ISBN-13 : 978-2268102405

Immigration — Augmentation historique en 3 mois de la population (208 234) du Canada

La population du Canada a augmenté de 208 234 personnes du 1er juillet au 1er octobre 2019, principalement en raison d'un afflux d'immigrants et de résidents non permanents. 

Une augmentation équivalant à celle de Sherbrooke tous les 3 mois.


La croissance naturelle (naissances - décès) n'ajoute plus qu'environ 16 % de nouveaux habitants ces jours-ci avec une fécondité autour de 1,5 enfant/femme (il s'agit en fait à terme d'une contraction de 25 % par génération de la population).

 C'est la première fois que la population du Canada augmente de plus de 200 000 personnes en un seul trimestre. Cette augmentation représente une croissance démographique trimestrielle de 0,6 %, soit la croissance la plus marquée observée depuis le début de la période couverte par le système actuel de comptabilité démographique (juillet 1971). Au 1er octobre 2019, la population du Canada était estimée à 37 797 496 personnes.



La migration internationale, tant permanente que temporaire, a expliqué 83,4 % de l'ensemble de la croissance démographique canadienne au troisième trimestre, une part qui ne cesse d'augmenter. Le reste de la croissance (16,6 %) a été attribuable à l'accroissement naturel, soit la différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès. Il est attendu que la contribution de l'accroissement naturel poursuive une tendance à la baisse sous l'effet du vieillissement démographique et du maintien de la fécondité à des niveaux plus faibles.

Le fort accroissement migratoire international observé au cours du troisième trimestre était à la fois principalement attribuable à l'accueil d'un nombre élevé de nouveaux immigrants (103 751 personnes) et à la hausse du nombre de résidents non permanents (+82 438 personnes). Des croissances d'une telle ampleur n'avaient jamais été observées auparavant au cours d'un seul trimestre.

La croissance de la population a été la plus élevée en Colombie-Britannique (+0,7 %) et la plus faible à Terre-Neuve-et-Labrador (+0,1 %).
Alors que la migration internationale était le principal facteur à l'origine de la croissance dans la majorité des provinces et territoires du pays, l'effet de la migration interprovinciale est plus inégal. L'Alberta a enregistré son plus fort accroissement migratoire interprovincial (+2 285) en quatre ans, après plusieurs trimestres de baisse et une reprise au troisième trimestre de 2018.

Au Québec, où sont généralement observées des pertes migratoires interprovinciales, un portrait différent de la situation se dessine récemment. En effet, au cours de chacun des trois derniers trimestres, la province a enregistré un solde migratoire interprovincial près de zéro (-200 du 1er juillet au 1er octobre 2019).

Source


Belgique — Mauvais niveau de français des élèves et étudiants flamands

L’Université de Hasselt (au Limbourg en Belgique) a instauré un cours de français général en première année de licence pour combler les lacunes, grandissantes selon une enseignante interrogée, des jeunes étudiants flamands. Ce cours précède celui de français des affaires qui est offert en deuxième de licence commerciale.

Ces lacunes s’expliquent par un enseignement insuffisant du français au secondaire (pénurie de professeurs de français, réduction du nombre d’heures de français, qualité variable des manuels, manque de pratique des élèves). Conscient de l’impact de cette faiblesse dans la maîtrise du français souvent requise sur le marché du travail en Belgique, le gouvernement flamand songe à améliorer le niveau de français des jeunes Flamands.




Voir aussi

L’étonnant « yes » des nationalistes flamandes à l’anglicisation des universités flamandes

Belgique — présence obligatoire d'écoliers dans les manifestations « pour le climat »

Les feux en Australie sont-ils dus au « dérèglement » climatique, sont-ils les pires de l'histoire ?


Nous résumons ci-dessous les données actuelles sur les feux de brousse australiens établies par Roy Spencer.

Tendances de l’activité des feux de brousse

Le graphique suivant représente l’ampleur des principaux feux de brousse en Australie depuis 100 ans alors que la population australienne a été multipliée par cinq. Les données proviennent de l’article sur les feux de brousse en Australie de Wikipédia.


Fig. 1. Superficie en hectares brûlés lors de la saison sèche (juin à mai) par les principaux feux de brousse en Australie depuis la saison 1919-20 (le total de la saison 2019-20 est au 7 janvier 2020).

Comme on peut le voir, la plus grande superficie brûlée a eu lieu de 1974 à 1975, avec plus de 100 millions d’hectares (près de 15 % de la superficie totale de l’Australie). Curieusement, cependant, selon les données du Bureau australien de météorologie (BOM), les feux de brousse de 1974-75 se sont produits pendant une année avec des précipitations et une température inférieures à la moyenne. Cela est contraire au récit (médiatique) selon lequel les principaux feux de brousse seraient typiques des seules années chaudes et sèches. En réalité, un supplément de pluie pendant la saison humide peut produire plus de combustible pour les saisons sèches suivantes.

Chaque saison sèche en Australie connaît une chaleur excessive et une faible humidité. Lire aussi L’Australie a-t-elle vraiment battu des records de chaleur ?

Tendances des températures maximales en Australie

Le graphique suivant (en rouge) montre les variations moyennes annuelles des températures maximums quotidiennes pour l’Australie, par rapport à la moyenne sur 40 ans au cours de la période allant de 1920 à 1959.

Fig. 2. Températures moyennes annuelles maximums en Australie, selon les observations (rouge) et celles prédites par la moyenne de 41 modèles climatiques (bleu). (Source).

La figure 2 (en bleu) montre également la moyenne de 41 températures maximales quotidiennes prévues par les modèles climatiques CMIP5 pour l’Australie (tiré du site Web de KNMI Climate Explorer). Ce graphique appelle des remarques importantes.

Premièrement, si nous corrélons les températures annuelles de la figure 2 avec la superficie des feux de brousse brûlée de la figure 1, il n’y a essentiellement aucune corrélation (-0,11), principalement en raison de l’énorme cataclysme de 1974-75. Si cette année est supprimée des données, il y a une faible corrélation positive (+0,19, à peine significative au niveau 2-sigma). Mais faire dépendre à ce point cette corrélation d’un seul événement unique (dans ce cas, sa suppression de l’ensemble de données) est précisément l’une des raisons pour lesquelles nous ne devrions pas utiliser les événements de feux de brousse actuels (2019-2020) comme indicateur du changement climatique à long terme.

Deuxièmement, alors qu’il est bien connu que les modèles CMIP5 produisent trop de réchauffement sous les tropiques par rapport aux observations, en Australie c’est précisément l’inverse qui se produit selon le Bureau de météorologique australien (BOM) : les températures mesurées par le BOM se réchauffent plus rapidement que la moyenne des modèles climatiques. Cela pourrait dû à des mesures trompeuses à la suite de changements dans la technique de mesure des thermomètres australiens (différents abris, passage des thermomètres au mercure à des sondes électroniques) et au traitement des données historiques (à la baisse pour cause d’« homogénéisation »), comme l’a affirmé Jennifer Marohasy.

Ou, peut-être que l’écart s'explique simplement par la variabilité naturelle du climat. Qui sait ?

Enfin, notez l’énorme variabilité de la température d’une année à l’autre sur la figure 2. De toute évidence, l'année 2019 a été exceptionnellement chaude, mais une bonne partie de cette chaleur était probablement due aux variations naturelles dans les régions tropicales et subtropicales, en raison de la persistance des conditions El Niño et de l’effet que cela a sur les zones tropicales et subtropicales qui reçoivent des précipitations et celles qui en sont privées.

Tendances des précipitations en Australie

Les précipitations australiennes sont un excellent exemple pour faire comprendre qu’une année particulière ne peut servir comme preuve d’une tendance à long terme. Le graphique suivant est semblable au graphique de la température ci-dessus (Fig.2), mais celui-ci illustre en rouge les précipitations observées par le Bureau de météorologie australien (BOM).

 Fig. 3. Comme sur la Fig. 2, mais le graphique représentent ici les précipitations annuelles

Il est évident que 2019 a été une année très sèche en Australie, non ? Peut-être un record historique. Mais la tendance à long terme a été à la hausse des précipitations (et non à la baisse), illustrant à nouveau le fait qu’une année particulière ne peut en rien servir à établir une tendance à long terme. Elle ne peut pas plus prouver que la valeur particulière de cette année est liée aux changements climatiques d’origine humaine.

Et en ce qui concerne les changements climatiques liés à l’activité humaine, la ligne bleue de la figure 3 montre que les prédictions de la théorie du réchauffement climatique telle qu’incarnée par la moyenne de 41 modèles climatiques ne permettent pas de détecter un impact à long terme dans les précipitations en Australie qui serait dû à l’activité humaine, malgré les affirmations contraires des médias, des pseudo-experts et des célébrités hollywoodiennes.

Il faut, en effet, garder à l’esprit que le risque d’incendie de brousse peut augmenter avec l’augmentation des précipitations pendant la saison de croissance précédant la saison des incendies. Plus de précipitations produisent plus de combustible. En fait, il existe une corrélation positive entre les données de précipitations de la figure 3 et les hectares de feux de brousse brûlés (+0,30, significatif au niveau de 3-sigma). Cela ne veut pas dire que les conditions chaudes et sèches ne favorisent pas de plus nombreux feux de brousse. C’est le cas (pendant la saison des incendies), toutes choses étant égales par ailleurs. Mais à la lumière des données illustrées par les trois graphiques ci-dessous, il est difficile de relier les feux de brousse très importants de 2019-2020 à la théorie du réchauffement climatique.

Activité mondiale des feux de brousse et de forêt

Si le changement climatique d’origine humaine (ou même le changement climatique naturel) entraînait une augmentation de l’activité des feux de forêt, on devrait noter cette augmentation dans les statistiques mondiales plutôt que dans une région particulière, comme l’Australie. Bien sûr, une région déterminée peut connaître une tendance à la hausse (ou à la baisse) de l’activité des feux de brousse, simplement en raison des variations naturelles et chaotiques du temps et du climat.

Mais, contrairement à la perception populaire, une étude sur l’activité des feux de brousse à travers la planète a révélé que ces dernières décennies ont en fait connu une baisse de cette activité (Doerr et Santin, 2016) et non une augmentation. Cela signifie qu’il y a plus de régions qui connaissent une diminution de l’activité des feux de brousse que de régions où il y a davantage de feux de brousse.

Pourquoi cette diminution n’est-elle pas attribuée au changement climatique d’origine humaine ?

Conclusion

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles les gens ont l’impression que les incendies de brousse s’aggravent et que cela est dû au changement climatique liée à l’activité humaine. Tout d’abord, les médias ont tendance à se concentrer sur les catastrophes... Ils ne signalent pas un manque de catastrophes. Le désir d’attirer davantage de clics signifie que les titres sont de plus en plus sensationnalistes. Les médias peuvent toujours trouver au moins un expert prêt à soutenir le récit souhaité.

Deuxièmement, la diffusion de l’information est maintenant rapide et elle se répand profondément, se propageant à travers les médias sociaux.

Troisièmement, un nombre croissant de groupes de défense de l’environnement s’emparent de toute catastrophe naturelle et déclarent qu’elle est causée par l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère. Les affirmations hyperboliques et contre-factuelles de militants comme Rebellion Extinction en sont l’un des meilleurs exemples récents.

Tout cela dans un contexte d’une recherche scientifique financée par les gouvernements en fonction de la menace à la vie et aux biens que le chercheur affirmera exister si sa recherche n’est pas menée à bien et que les politiques gouvernementales ne sont pas modifiées en conséquence. (En réalité le nombre de décès causés par des catastrophes naturelles est en baisse constante dans le monde, voir Greta La Science Thunberg devant le Congrès : « Même avec 1 °C, un nombre inacceptable de vies perdues »)

D’après les preuves disponibles, s’il existe une augmentation à long terme du nombre de feux de brousse dans un endroit précis comme l’Australie (ou la Californie), elle est principalement due à une augmentation du nombre de départs de feu d’origine humaine, qu’ils soient accidentels ou volontaires. Une raison connexe est la pression croissante du public pour qu’on réduise la fréquence des brûlis, qu’on diminue le défrichement de la végétation morte et la mise en place de coupe-feu, parce que le public croit que cette moindre intervention humaine augmente la beauté naturelle et permet de la préserver la faune et la flore, mais les conséquences à long terme empirent plutôt les choses..

Des articles de presse récents affirment que des dizaines de personnes ont été arrêtées en Australie pour pyromanie, un phénomène qui a probablement été multiplié par cinq comme la population australienne au cours des 100 dernières années. Les sources d’incendies accidentelles augmentent également quand la population augmente avec toute l’infrastructure qui accompagne un plus grand nombre de personnes (véhicules, lignes électriques, feux de camp, allumettes et mégots de cigarettes, etc.)

Ainsi, attribuer automatiquement les feux de brousse australiens au changement climatique d’origine humaine est le plus souvent du catastrophisme dénué virtuellement de toute base factuelle.




Pour Benoît Rittaud mathématicien (université Sorbonne Paris Nord) et président de l’Association des climato-réalistes les feux en Australie n’ont pas été causés par un « dérèglement climatique » Alors que l’Australie est ravagée par des incendies considérables, le changement climatique est pointé du doigt. Une réaction automatique et fausse.

Difficile de ne pas céder à l’abattement devant les millions d’hectares de forêt australienne ravagés par les flammes, et leurs 28 victimes. Moteurs de notre solidarité, nos émotions ne doivent cependant pas abolir notre faculté de réflexion.

Si nous revivons un jour les mêmes scènes, il est mieux d’analyser objectivement ce qu’il s’est passé. Les marchands de peur, eux, n’ont pas besoin de le faire, ils tiennent leur explication depuis le début : il fait plus chaud à cause de nous, donc la forêt brûle. Peu importe que ce soit faux, l’important est de satisfaire le complexe climato-industriel et ses relais médiatiques et militants.

En réalité, la surface globale brûlée par les feux de forêt diminue. Le siècle passé semble même avoir établi un minimum sur les deux derniers millénaires. Pour la période récente, des observations satellitaires entre 1996 et 2012 signalent une baisse significative de 1 % par an, et même de 2 % entre 2003 et 2012. Pour l’Australie, le chiffre est encore plus frappant : 5 % de forêt brûlée en moins entre 1991 et 2015, toujours par an. Pour mémoire, la tendance est également baissière sur le pourtour méditerranéen. On hésitera à l’attribuer au réchauffement climatique...

Mais, dira-t-on, 18 millions d’hectares de forêt australienne partis en fumée en quelques jours, n’est-ce pas du jamais-vu ? Non. Dans ce même pays, un incendie six fois plus ravageur, soit une fois et demie la taille de la France, s’est produit en 1974-1975. Une année qui, contrairement à 2019-2020, n’était même pas celle d’une sécheresse particulière. Cela ne diminue en rien le drame vécu ces jours-ci ; cela diminue en revanche l’intérêt du simplisme climatique pour comprendre le phénomène.


Partie de la propriété du célèbre acteur Russell Crowe il y a 10 semaines après un feu de brousse (en haut) et il y a quelques jours (en bas) après les pluies récentes. Voir Australie — Fortes pluies (100 mm) pour les zones de feux de brousse (m-à-j)

Jamais en retard d’une sortie alarmiste, le Monde s’est ridiculisé en titrant que les incendies de 1974-1975 « n’ont pas été bien pires » que ceux de cette année, principalement au motif qu’ils concernaient d’autres zones moins peuplées. Certes, la différence est réelle pour les personnes concernées. Sauf que le journal du soir est bien entendu incapable de dire en quoi cette distinction permettrait de préserver le prétendu lien entre feux de forêt et « climat déréglé par l’homme ».

À ce propos, faisons l’expérience de pensée qui consiste à intervertir les incendies actuels et passés, pour nous poser la question suivante : le Monde eût-il alors écrit que 117 millions d’hectares de forêt brûlée, ce n’est « pas bien pire » que 18 millions ? Avouons qu’on imagine plus facilement un éditorial sur le mode : « Six fois plus étendus que le record précédent, les feux en Australie témoignent de la crise climatique en cours »...

Il est temps que le climat cesse d’avoir bon dos. Pour cela, nous devons apprendre, ou plutôt réapprendre que les questions environnementales ont, dans leur grande majorité, vocation à être traitées à des échelles locales. En l’espèce, l’origine du drame australien est tout à fait banale : la gestion du parc forestier national s’est considérablement dégradée depuis plus de vingt ans. Les spécialistes et hommes de terrain s’en alarmaient depuis longtemps.

Une catastrophe peut révéler la grandeur d’un homme. Alors que la meute exigeait du Premier ministre australien qu’il relève les ambitions climatiques de son pays suite à la « leçon » donnée par les incendies, celui-ci a refusé tout net. En tenant tête à la dictature de l’émotion, Scott Morrison a ainsi agi en homme d’État. Puissent nos gouvernants en prendre de la graine.

Voir aussi

Australie — Fortes pluies (100 mm) pour les zones de feux de brousse (m-à-j)

Bobards — Incendies en Australie : cinq images qui ont trompé des milliers de personnes

L’Australie a-t-elle vraiment battu des records de chaleur ?

Greta La Science Thunberg devant le Congrès : « Même avec 1 °C, un nombre inacceptable de vies perdues »