lundi 30 juillet 2018

Appropriation culturelle : avant Lepage, Rameau (rediff)

Dans le cadre des « controverses » et « tourmentes » récentes autour des spectacles SLĀV et Kanata nous reproposons cette appropriation culturelle due à Philippe Rameau dans les Indes galantes en 1736.

Remarquons que ces tourmentes ont été savamment relayées par les grands médias québécois. Il a ainsi suffi d’une simple lettre ouverte d’un groupe personnalités de peu de poids pour que les médias décrètent le jour même qu’il existait une controverse et une tourmente autour de Kanata. La SRC s’est ainsi fait une nouvelle fois le porte-voix, la caisse de résonance, de ces militants.

Dès 9 h du matin le 14 juillet, Radio-Canada parle de « tourmente » et de « controverse » :





La lettre ouverte dont la société d’État s’est fait le relais et qui a été mise en ligne par Radio-Canada sur le site Espaces autochtones de la SRC a été publiée le même 14 juillet, tôt le matin, et était passée inaperçue : elle n’a suscité que 1 (un) seul commentaire en 16 jours... L’article de la société d’État annonçant dans son titre la « controverse » dès 9 h du matin le même jour  a, par contre, recueilli plus de 200 commentaires approuvés par le modérateur public...



Revenons donc à Rameau qui près de trois siècles avant Lepage met en scène des Indiens et des Européens. Le tout à Paris avec des acteurs français ou plutôt « blancs » pour parler le langage contemporain dans une époque qui prétend abolir les distinctions de races...

Lors d’une représentation le 10 mars 1736, Rameau présente un nouvel acte (« une entrée ») à son opéra-ballet Les Indes galantes. Ce nouvel acte présente une histoire qui se déroule dans une forêt de la Nouvelle-France ou de Louisiane sous le régime français. Les « Sauvages » y tiennent le beau rôle, les prétendants européens de la belle Indienne Zima sont tournés en ridicule (l’un trop jaloux, l’autre trop volage). Non, décidément, le jeune prétendant indien de Zima, Adario, aime le plus simplement. La forêt nord-américaine est également un havre de paix où « jamais un vain désir ne trouble ici nos cœurs ». Les deux prétendants européens de Zima sont à l’arrière de la scène dans la vidéo ci-dessous. Ils sont tout essoufflés après quelques pas de danse, alors qu’Adario reste frais et fringant.




Rameau a assisté aux danses de deux chefs indiens de la Louisiane sur la scène du théâtre des Italiens à Paris en septembre 1725. Toutefois, la chorégraphie de la vidéo ci-dessus est bien moderne. La diction aussi d’ailleurs (pour une prononciation plus classique de ce rondeau, voir ici).

On trouvera ci-dessous la description de la danse de Deux Sauvages exécutée pour la première fois le lundi 10 septembre 1725 sur le Théâtre des Italiens. Ce texte fut publié pour la première fois dans le Mercure du mois de septembre 1725, puis dans le Parfaict Dictionnaire (1767).

Les Comédiens Italiens, avant leur départ pour Fontainebleau, donnèrent sur leur Théâtre une nouveauté des plus singulières. Deux Sauvages venus depuis peu de la Louisiane, grands & bien faits, âgés d’environ vingt-cinq ans, dansèrent trois sortes de danses, ensemble & séparément, & d’une manière à ne pas laisser douter qu’ils n’aient appris les pas & les sauts qu’ils font, très loin de Paris. Ce qu’ils prétendent figurer est sans doute fort aisé à entendre dans leur pays, mais ici rien n’est plus difficile à pénétrer : voici ce que nous en avons pu apprendre.

Le premier Danseur représentait un Chef de sa Nation, vêtu un peu plus modestement qu’on ne l’est à la Louisiane, mais en sorte que le nu du corps paraissait assez. Il avait sur la tête une espèce de couronne, pas riche, mais fort ample, ornée de plumes de différentes couleurs. L’autre n’avait rien qui le distinguât d’un simple guerrier. Le premier fit entendre à celui-ci, par sa façon de danser, & par ses attitudes cadencées, qu’il venait proposer la paix, & présenta le calumet ou étendart à son ennemi. Ensuite, ils dansèrent ensemble la danse de la paix. La seconde danse appelée la guerre, exprime une assemblée de Sauvages, où l’on prend le parti de faire la guerre à tel ou à tel peuple, & on en voit toutes les horreurs. Ceux qui sont de ce sentiment opinent en venant se mêler à la danse. Dans la troisième le guerrier va d’abord à la découverte de l’ennemi, armé d’un arc & d’un carquois garni de flèches, pendant que l’autre assis par terre bat du tambour, ou espèce de timbale pas plus gros que la forme d’un chapeau. Après avoir découvert l’ennemi, le Sauvage revient en donner avis à son Chef. Il imite ensuite le combat, dans lequel il suppose avoir défait l’ennemi. Après quoi ils dansent ensemble la danse de la Victoire.

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Si l'histoire de France et de l'Europe est singulièrement absente des écoles québécoises, les prières autochtones et le rapprochement délibéré entre l’écologisme et la spiritualité autochtone (en partie fantasmée) sont bien présents dans le matériel scolaire québécois. Ici une prière amérindienne à la Terre-Mère, illustration du manuel d’ECR Près de moi, publié par les éditions CEC, destiné à la 2de année du premier cycle du primaire, manuel B, p. 60

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(Suite d’une autre prière amérindienne à la Terre-Mère, illustration du manuel d’ECR Près de moi, publié par les éditions CEC, destiné à la 2de année du premier cycle du primaire, manuel B, p. 61)

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Illustration du manuel d’ECR Mélodie, publié par Modulo, destiné au 1er cycle du primaire, manuel B, p. 8

samedi 28 juillet 2018

Novlangue du jour : « fragilité blanche »

« Fragilité blanche » — ne pas aimer se faire traiter injustement de raciste. Terme créé par des racialistes qui sert à psychiatriser et pathologiser toute personne perçue comme blanche qui n’aime pas être culpabilisée injustement.

Voir cette chronique de la radio d’État fortement subventionnée (plus d’un milliard de $/an) qui normalise hypocritement le concept de « fragilité blanche », l'air de rien, terme relevant pourtant du racialisme décomplexé et militant.

C’est ainsi que, vendredi, la journaliste gouvernementale Rose Aimée Morin (ci-contre) derrière un effacement professionnel de façade affirmait « Je ne vous donnerai pas mon opinion ». Affirmation qui ne l'empêcha pas de donner illico son opinion,  de sermonner et de soupirer devant ceux qui ne comprennent pas le concept « super important » d’appropriation culturelle (qu’elle confond avec celui de stéréotypes surannés ou infondés comme le Québécois d’office « trappeur » ou « vivant six mois par an dans le sous-sol du centre Eaton »).

En toute impartialité, elle se fait ensuite l’interprète religieuse d’une seule « sociologue », Robin di Angelo, dont le mérite est d’avoir pondu le concept fumeux de « fragilité blanche ». Le sermon lu au micro dure sept minutes accablantes.





Robin di Angelo est une militante controversée connue comme l’égérie du multiculturalisme et du féminisme. Pour Jordan Peterson de l’Université de Toronto : « Robin di Angelo est la reine rhétorique de la pensée des “guerrières de la justice sociale” (SJW). La trame métissée du postmodernisme, du marxisme, de la théorie critique et du féminisme qu’elle tresse est probablement ce qui se rapproche le plus  d’une politique concrète ».


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Les nouvelles formes de dépendances des jeunes doivent interroger les parents…. comme les professeurs !

Une société qui détruit la jeunesse

Par Virginie Subias-Konofal, auteur de « L’Histoire (in)correcte de l’école », directrice du département Culture générale à l’ILFM, et directrice du département Français à l’Académie du Professorat.

Les résultats d’une enquête assez alarmante ont été publiés au début du mois de juin et devraient alerter tant les pouvoirs publics que les parents sur la situation délétère dans laquelle la société plonge notre jeunesse. Cette enquête centrée sur Les addictions chez les jeunes (14-24 ans) a été conçue par la Fondation pour l’innovation politique, la Fondation Gabriel Péri et le Fonds Actions Addictions, et largement relayée par les médias.

On y apprend que 38 % des 14-24 ans passent plus de deux heures par jour sur les réseaux sociaux, dont on connaît la dimension addictive, mais aussi la face sombre : immoralité, vulgarité, harcèlement, insultes, complotisme…


10 % de ces jeunes y consacrent entre 5 h et 8 h par jour, ce qui semble de l’extérieur absolument colossal. On imagine à quel point ces réseaux, qui font échanger des contenus généralement indigents, entrent en concurrence avec tous les systèmes d’apprentissage, au premier rang desquels l’école.

L’enquête révèle aussi que 21 % de ces jeunes regardent des images pornographiques au moins une fois par semaine. Là encore les chiffres sont inquiétants, quand on sait l’impact nocif de ces images sur le développement de l’esprit et de la sensibilité des adolescents. Ils sont d’autant plus inquiétants que 63 % des sondés ont déclaré ne jamais regarder d’images pornographiques sur écran… Sérieusement ?

Qui a déjà eu affaire à des lycéens, voire à des collégiens, sait ce qui circule sur les téléphones des adolescents dans les cours de récréation, les vestiaires de sport ou les bus scolaires… haut lieu de, disons, communication.

Tous les éducateurs sont horrifiés par la prolifération de ces contenus pornographiques, qui polluent tous les sites de jeux pour enfants, et leurs messageries. Et 63 % d’entre eux, purs agneaux, auraient réussi à s’en préserver totalement jusqu’à 24 ans et à ne jamais, même par inadvertance, tomber sur des sites douteux, sur lesquels leur curiosité les aurait amenés à circuler un peu ? C’est tout de même assez peu probable, et le chiffre peut paraître nettement surestimé.

Une enquête IFOP de mars 2017 indiquait qu’un adolescent sur deux (52 % des 15-17 ans) avait déjà vu des vidéos pornographiques, généralement sur son téléphone, et que 18 % en avaient vu une au cours des trois mois précédant l’enquête. Voilà qui paraît plus réaliste. Et internet est pour cela l’outil rêvé : 12 % des sites internet mondiaux ont un contenu pornographique, tandis que 25 % des recherches sur les moteurs de recherche concernent des sites pornographiques. Finalement, l’offre ne couvre pas la demande…

30 % des jeunes boiraient de l’alcool au moins une fois par semaine. Là encore, il faut regarder la réalité en face. Le chiffre est, en soi, assez élevé. Mais surtout il ne s’agit certainement pas du petit verre de rosé bien frais qui agrémente l’apéritif dominical de leurs parents.

Les alcools prisés par nos jeunes sont des alcools forts, consommés dans un but d’ivresse avéré et associés généralement à des ingrédients sucrés (sodas, Redbull…) de manière à produire de petites bombes cérébrales. Que les parents pour lesquels cela reste obscur demandent à leurs ados ce qu’est la « beuverie » express, ou une « lampée »…

L’alcool qu’ils consomment prend plus souvent la forme de vodka ou de Tequila, que du porto de mamie et quand ils apportent des bouteilles de coca à une soirée, ils ont rarement l’intention de le boire seul.

Quant à la consommation de drogues, là encore on reste songeur. L’étude, qui est en réalité un simple sondage, annonce 6 % de consommateurs hebdomadaires de cannabis, et 85 % de jeunes n’y ayant jamais touché. Leurs parents étaient-ils près du téléphone lors de l’enquête ?

Pourtant, ces derniers ne semblent pas dupes, et 75 % d’entre eux pensent que la consommation de cannabis est « répandue » chez les jeunes (18 % « très répandue », 57 % « assez répandue »). En revanche, lorsqu’on les interroge sur la consommation de leur propre enfant, ils sont 75 % à penser qu’il n’y a jamais touché. C’est bien connu : les bêtises, ce sont toujours les enfants des autres qui les font…

Le site drogue -info-service ne donne pas les mêmes chiffres. Il parle de 41 % des jeunes de 17 ans ayant déjà fumé (2011), et déclare que les jeunes Français sont parmi les plus gros consommateurs d’Europe. Il souligne par ailleurs que 33 % des adultes français ont aussi touché au cannabis, et que plus de 3 % sont des consommateurs réguliers.

Le site de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies indique une augmentation constante et donne pour 2014 le chiffre de 47,8 %, soit près d’un jeune de 17 ans sur deux qui aurait déjà « goûté ». 9 % de ces jeunes de 17 ans disent fumer au moins 10 joints par mois.

Voilà les données qu’il faut prendre en compte lorsque l’on enseigne, si l’on ne veut pas, par angélisme, passer à côté du réel. Il faut garder à l’esprit que les élèves auxquels on parle en cours, et auxquels on donne des devoirs, vont passer l’essentiel de leur temps, hors des cours voire pendant les cours, à consulter leur messagerie et leurs réseaux sociaux (Snapschat et Instagram essentiellement, Facebook étant « pour les vieux » aux dires de mes élèves…), qu’ils se feront un petit joint le soir avant de se mettre au travail pour se détendre après une journée d’attente passive à l’école, et que leur dimanche sera consacré à se remettre de leur « biture express » (beuverie) du samedi soir…

Il faut donc que les adultes sains renouent le contact avec ces jeunes que l’État laxiste abandonne aux griffes de tous ceux qui veulent les corrompre et les dégrader, quelles que soient leurs motivations. Pour cela il faut s’informer, puis se former et ne pas avoir peur d’affronter la réalité pour redonner à cette jeunesse l’amour du Beau, du Vrai et du Bien et la confiance en l’avenir.

Source : Liberté scolaire

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samedi 21 juillet 2018

Histoire — Centenaire de l'assassinat de Nicolas II de Russie, célébrations

La vidéo ci-dessous rend compte de la procession, avec le patriarche Cyrille, qui a eu lieu dans la nuit du 16 au 17 juillet 1918, à Ékaterinebourg en Russie, pour le centenaire de l'assassinat du tsar Nicolas II et de la famille impériale. Une foule de plus de 100.000 personnes y a participé.



Documentaire sur la mort de la famille impériale, si la mort de Nicolas II dans la maison de l'ingénieur Ipatieff à Ékaterinebourg ne fait pas de doute, certains doutes subsisteraient sur le sort et le lieu de décès des autres membres de la famille impériale. L'Église de Tous-les-Saints a été bâtie sur les ruines de la maison Ipatieff (Ipatiev selon la graphie moderne). En 2008, à la suite d'analyses ADN, le laboratoire de la faculté de médecine de l'université du Massachusetts a publié ses résultats, confirmant que tous les membres de la famille Romanov ont bien été exécutés. Le peloton d'exécution était sous les ordres du chef de la Tchéka locale, Iakov Iourovski. En l'honneur de Iakov Sverdlov qui aurait ordonné l'exécution collective ou solitaire, la ville fut rebaptisée Sverdlovsk en 1924. Ékaterinebourg retrouve son ancien nom en 1991 après la chute du régime communiste.





vendredi 20 juillet 2018

Québec — Éducation à la sexualité et « aux relations égalitaires » imposées dès la garderie

Communiqué de la Presse Canadienne (avec le manque de distance habituelle envers les mesures gouvernementales imposées, pardon, offertes aux enfants captifs) :

Ce ne sont pas que les écoles primaires et secondaires du Québec qui offriront [novlangue pour « imposeront », car normalement on peut refuser une offre] cet automne des cours d’éducation sexuelle, certaines garderies et maternelles accueilleront [imposeront] un programme similaire spécialement adapté aux tout-petits.

Quelque 1200 enfants âgés de 0 à 5 ans seront ainsi exposés à certaines notions touchant à la sexualité et aux relations égalitaires dans le cadre d’un projet-pilote déployé par la Fondation Marie-Vincent.

Si cette première phase d’implantation est couronnée de succès [elle le sera, car il n’y a aucun objectif vérifiable défini à l’avance et vérifié par la suite par des gens qui ne sont pas juges et parties du projet, ces innovations du gouvernement sont généralisées peu d’années après leur introduction. À moins que la mesure du succès soit le silence des parents.], le projet Lanterne/Awacic pourrait par la suite être étendu à davantage de garderies, maternelles et centres communautaires.

Plusieurs ministères sont partenaires du projet, qui a été spécialement conçu pour s’arrimer aux nouveaux cours d’éducation sexuelle qui seront offerts [à nouveau !] dans les écoles québécoises dès la prochaine rentrée scolaire.

Dans le cadre de ce projet-pilote, environ 300 intervenants gravitant autour des enfants seront formés par des professionnels de la Fondation Marie-Vincent, un centre spécialisé dans la prévention de la violence sexuelle touchant les enfants et les adolescents.

Des éducatrices en garderie, des intervenants en milieu communautaire, des gestionnaires de services de garde et des enseignants de maternelle 4 et 5 ans seront ainsi outillés pour répondre aux questions des tout-petits et aborder certains thèmes touchant à l’éducation sexuelle.

Le pari que l’on fait, c’est de se dire qu’en offrant une éducation sexuelle saine [qui est contre la vertu ? Mais que recouvre précisément ce terme, on chercherait en vain des exemples dans la dépêche de la Presse canadienne, c’est très flou. À dessein ?] et en éduquant les enfants aux relations égalitaires [c’est-à-dire ?] dès le plus jeune âge, on prévient la violence sexuelle.

[Ceci est sujet à débat : en quoi traiter mieux les filles : ne pas se battre physiquement avec elles, les traiter en petites demoiselles, alors qu’on se bat entre garçons, augmenterait la violence sexuelle ? On a la désagréable impression, comme d’habitude, qu’on utilise la peur justifiée des parents que leurs jeunes enfants soient victimes de sévices sexuelles pour faire passer un tout autre ordre du jour plus politisé, plus polémique, anti-différence des sexes : « les relations égalitaires ». Le même truc a été utilisé avec le nouveau cours d’éducation à la sexualité : on utilise de nouvelles craintes des parents liées aux sextos, à la pornographie sur internet pour faire passer un ordre du jour féministe, hédoniste, de normalisation de plus en plus évidente des thèses de la théorie du genre, du transgenderisme et de la coterie LGBTQQ2SAI+.]

« Si on commence à aborder tranquillement ces thèmes-là dès la garderie et par la suite, quand les enfants arrivent à l’école, on continue d’en parler, ça va devenir des discussions plus faciles et plus ouvertes », croit Annie Fournier.

Le projet a d’ailleurs été coiffé du titre « Lanterne » pour imager la lumière qui sera faite sur l’éducation à la sexualité et aux relations égalitaires. Quant à « Awacic », il s’agit d’un terme attikamek qui signifie « petit être de lumière », un mot couramment utilisé pour désigner un enfant.  

[Comme c’est mignon ! Jouer sur les sentiments, y a rien de tel.]

Des outils qui seraient adaptables

Les outils développés ont été pensés pour s’arrimer aux différentes réalités de la province. Ils seront d’ailleurs publiés en quatre langues : français, anglais, attikamek et innu [montagnais].

« Ce qui est intéressant avec ce programme, c’est qu’il se fait dans des milieux qui sont très différents pour essayer d’avoir des outils de prévention les plus adaptés et les plus adaptables possible aux différents contextes », souligne Annie Fournier.

Une chargée de projet, elle-même Attikamek, veille à adapter le projet aux besoins identifiés sur les réserves de Manawan, dans Lanaudière, et de Wemotaci, en Mauricie, ce qui facilitera par la suite l’élargissement du programme à d’autres communautés autochtones.

Une autre chargée de projet s’occupe d’adapter les outils aux quartiers multiculturels de Côte-des-Neiges et Parc-Extension à Montréal. Et une troisième intervenante harmonise le projet aux réalités du quartier Sacré-Cœur à Longueuil, un milieu défavorisé, ainsi qu’à la municipalité de Saint-Rémi en Montérégie, un secteur rural plus homogène.

Le déploiement du projet-pilote sur ces trois sites initiaux est financé par l’organisme à but non lucratif Avenir d’enfants, né d’un partenariat entre le gouvernement du Québec et la Fondation Lucie et André Chagnon.

Déjà, deux autres sites d’implantation se sont ajoutés. Le Secrétariat à la condition féminine finance un volet de l’initiative pour la rendre accessible aux enfants de la nation [montagnaise] de Natashquan sur la Côte-Nord. Et la Ville de Montréal soutient l’accès au programme pour les jeunes du quartier Saint-Pierre à Lachine.

Ce n’est jamais un jeu

Annie Fournier s’attend évidemment à ce que certains parents soient réticents face au programme. « Ça fait peur à certaines personnes parce qu’elles ont l’impression qu’on va parler de sexe, mentionne-t-elle. Mais le programme n’a pas du tout cette prétention-là, on va plutôt parler des notions de frontière, des émotions, des relations égalitaires. »

[Ne pas parler de sexe ? Mais de quoi parle-t-on alors quand plus haut on parle d’« offrir » « une éducation sexuelle saine »... ?]

Ce projet répond d’ailleurs à une demande formulée par des éducatrices lors de consultations menées il y a deux ans par la Fondation Marie-Vincent. « Dans le développement psychosexuel, il y a un pic de comportements sexuels entre 3 à 5 ans et un deuxième à l’adolescence. Les éducatrices nous rapportaient se sentir un peu démunies et ne pas savoir quoi dire et jusqu’où aller », rapporte Mme Fournier. [On aimerait avoir l’avis d’un docteur qui mettrait en perspective ces affirmations : peut-on vraiment comparer le pic sexuel à l’adolescence avec l’intérêt pour des parties intimes entre 3 et 5 ans (« jouer au docteur ») ?]

Pour les accompagner, plusieurs outils ont donc été développés. Ceux-ci seront malléables, en ce sens qu’ils permettront aux éducatrices d’approfondir le sujet selon leur degré de confort.

Faire peur aux parents en parlant des agresseurs sexuels pour, en même temps, lutter contre les « stéréotypes »

Mme Fournier rappelle que de nombreux agresseurs font croire aux enfants qu’ils ne font rien de mal puisqu’il ne s’agit « que d’un jeu ».

Deux livres ont été rédigés pour les enfants de 3 à 5 ans, l’un portant sur les frontières interpersonnelles (la « bulle ») et les limites que l’on peut poser et l’autre traitant des relations égalitaires entre les garçons et les filles.

[Quel est le rapport entre cette lutte aux stéréotypes chère à certaines féministes et les agresseurs sexuels ?]

Un livre a également été conçu pour les enfants âgés de 0 à 24 mois. « C’est un imagier qui démontre que peu importe si on est un garçon ou une fille, on peut rire, pleurer, avoir peur et jouer aux jeux que l’on veut », détaille Mme Fournier.

Les notions seront donc introduites de manière informelle, par le biais de causeries ou encore lors de périodes de jeux.

Un jeu de prévention sur la violence sexuelle a notamment été créé pour apprendre aux enfants à déceler les situations inacceptables.

[On aimerait avoir plus de détails, de quelles situations inacceptables s’agit-il ? Évidemment, chacun peut penser à certaines situations inacceptables qu’il faut déceler, mais sont-elles vraiment uniquement celles que vise ce programme ?]

DPJ retire deux filles à leurs parents sur fond d'instruction à la maison

Un couple lance un cri du cœur contre la DPJ, qui lui a retiré ses deux filles il y a plus de trois ans. Au centre du désaccord, la scolarisation et un diagnostic d’autisme.

Lorsque Sylvie et François (prénoms modifiés) vont voir leurs deux filles, âgées de 10 et 11 ans, ils ne peuvent même pas les toucher. Ni les consoler. Ils ont le droit de les voir une heure et demie par semaine, sous supervision, dans un endroit déterminé par la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ). Sylvie et François se sont vu retirer leurs droits parentaux et tous les autres droits. Aussi bien dire qu’ils se sont fait retirer leurs enfants, point. Depuis plus de trois ans. L’histoire commence en région, leur première fille a huit mois, Sylvie et François font le choix de s’acheter une maison sur le bord d’un lac privé, dans les pays d’en haut, avec plein d’animaux, des poules, des canards, des lapins, des chèvres miniatures.


Dessin d’une des enfants fourni par les parents anéantis. Elles n’auraient plus le droit de dessiner.

Ils ont un élevage de chiens de race.

Presque un an plus tard, ils ont eu une autre fille. « On est resté là pendant sept ans, les filles étaient libres, raconte Sylvie. C’est ce qu’on voulait, qu’elles grandissent dans la nature. Elles allaient se baigner dans le lac, avec une veste de sauvetage bien sûr, elles ont appris à faire du vélo, du quatre roues. »

François travaillait à temps plein, il faisait du soutien technique pour une entreprise de télécommunication. « On avait tout équipé pour les enfants, on avait un module de jeux, se souvient François. Il y avait un camping à deux minutes, on y allait, il y avait beaucoup d’enfants, des activités. Chez nous, on recevait la famille et les amis, on se faisait des barbecues, des feux de camp au clair de la lune. Les filles ont grandi là-dedans. »

Jusqu’à ce que François doive se trouver un nouveau travail, qu’ils décident de se rapprocher de la ville. Et aussi d’une école. « La première année, pour la plus grande, je l’ai fait en scolarisation à la maison. Quand la deuxième a été en âge, on a décidé de se rapprocher pour les inscrire. »

François s’est vite trouvé un boulot, toujours en soutien technique dans le domaine des télécommunications. Ils ont déménagé dans un quatre et demi au nord de Montréal, près d’un boulevard.

Sylvie et François ont décidé de continuer la scolarisation à la maison le temps que les filles s’adaptent à leur nouvelle vie. « Je me suis présentée à la commission scolaire pour les inscrire, je n’avais pas leurs certificats de naissance. J’ai dit à la dame que je les inscrirais quand je les aurais. »
Elle a fait la demande au Directeur de l’État civil.

La dame, qui avait pris soin de préciser à Sylvie qu’elle n’était pas en faveur de l’école à domicile, a vérifié peu de temps après si les enfants avaient été inscrites. Elles ne l’étaient pas.

Au lieu d’appeler les parents, elle a appelé la DPJ.

La DPJ a dépêché tout de suite une intervenante à leur domicile, Sylvie lui a montré le certificat qu’elle avait reçu, lui a dit qu’elle attendait l’autre avant de procéder à l’inscription. Selon ce que m’a raconté Sylvie, l’intervenante, voyant qu’elle était de bonne foi, a fermé le dossier. Aussitôt que le facteur a livré le certificat manquant, Sylvie est allée inscrire ses filles à la commission scolaire de la Rivière-du-Nord, leur a fait l’école à la maison. « On s’est inscrits comme membre de l’AQED », l’Association québécoise pour l’éducation à domicile, pour avoir des ressources.

Une première rencontre a eu lieu en septembre. « Une dame m’a remis une feuille avec ce qui devait être vu, ce que les filles devaient apprendre. Elles le savaient déjà, elles faisaient déjà plus que ça. » Sylvie a conservé cette feuille. « Je lui ai demandé si je pouvais avoir les manuels, avoir accès à la bibliothèque de l’école, inscrire les filles aux sorties, j’étais même prête à payer. C’était non, non, non, c’était impossible. Il n’y avait aucune possibilité d’avoir accès à quoi que ce soit, il n’y avait aucune ouverture. » Et elle est repartie. « J’ai été convoqué le 17 mars [2015] pour leur montrer le porte-folio, pour évaluer ce que les filles avaient fait pour l’année. Je trouvais ça trop tôt, j’ai laissé un message pour déplacer le rendez-vous. » Habituellement, les rencontres d’évaluation se tiennent entre la mi-mai et la mi-juin. Elle n’a pas eu de retour d’appel. Elle ne s’est pas présentée au rendez-vous du 17 mars. « Quand ils ont vu ça, au lieu de m’appeler, ils ont tout de suite appelé la DPJ, pour refus de scolarisation. » Trois semaines plus tard, une intervenante s’est pointée à la maison. « Elle posait des questions sur tout, sur la hauteur du comptoir, sur le sofa qui n’avait pas de bras sur le côté, n’importe quoi. Je n’étais pas habituée à me justifier comme ça. »

L’intervenante est revenue trois semaines plus tard avec une autre intervenante, ils ont posé des questions aux filles.

« Elle nous a appelés deux semaines plus tard, elle nous a dit de nous présenter en cour le lendemain matin. Elle nous a dit de ne pas emmener nos enfants. On ne connaissait rien à la DPJ, on ne comprenait pas. » Ils allaient bientôt comprendre. Le 21 mai 2015, la DPJ retient le signalement, estimant que la sécurité et le développement des enfants sont compromis. On reproche aux parents de ne pas prendre les moyens suffisants pour les scolariser ni pour les socialiser. On les accuse de faire de l’isolement parental, élément qui ne sera pas retenu comme prépondérant.

Les enfants ont alors sept et huit ans.

S’ensuit une série d’audiences en Chambre de la jeunesse, qui culmine le 19 juin, alors que François se présente devant le tribunal le matin, seul. En fin d’avant-midi, le juge demande à voir les enfants. « Je pars les chercher, mais, en même temps, la procureure de la DPJ réclame à la cour une intervention d’urgence. Elle dit qu’il y a un risque qu’on se sauve en Ontario ou aux États-Unis... »

Le juge donne le feu vert aux policiers pour aller chercher les enfants. François arrive sur le fait, les policiers sont chez lui. Sa femme et ses filles n’y sont pas. Dans le logement, il n’y a aucune boîte, aucune valise, aucun signe qui laisserait croire à une fuite imminente. « J’étais partie me promener avec les filles. J’étais stressée, je m’étais dit que ça me relaxerait. On traversait la 117 quand les policiers sont arrivés. » Ils ont pris les filles. Le tribunal a ordonné qu’elles soient placées immédiatement dans une famille d’accueil, ce qui fut fait. Les deux ont été placées quelques semaines plus tard dans un foyer, officiellement un « centre de réadaptation », avec sept autres jeunes. « Plusieurs des enfants qui sont là ont vécu de la violence. » Évidemment, c’est le choc. Les filles n’ont jamais été séparées de leurs parents.

La DPJ les fait évaluer par une neuropsychologue, qui conclut que la plus jeune est atteinte d’autisme sévère, que l’aînée a une forme modérée. « En cour, elle a dit qu’elles ont un développement équivalent à 9 à 12 mois, à peu près aucune autonomie, qu’elles peuvent à peine marcher et s’habiller qu’elles n’ont jamais vu un ballon de leur vie. »

François et Sylvie m’ont montré plein de photos où on les voit jouer au ballon. D’autres où elles font du vélo. Ils m’ont aussi montré des photos de blessures observées sur leurs filles lors de visites, des photos d’elles avant et après le placement. Elles sont amaigries, quasiment méconnaissables. « On ne sait jamais ce qui se passe là-bas, on ne nous informe de rien. Et quand on pose des questions, on nous répond n’importe quoi. »

J’ai passé trois heures et demie avec Sylvie et François, ils sont arrivés à notre rendez-vous avec cinq sacs remplis de documents. Ils m’ont montré les rapports d’évaluation psychologique des enfants, les documents de cour, la transcription de l’audience du 19 juin 2015, la facture du garage du même jour, une facture de plus de 2000 $ pour de l’orthodontie pour l’aînée, jusqu’aux notes médicales prises quand la petite avait deux mois, « suit des yeux, sourit, entend bien ». Oui, les parents sont en colère.

On le serait à moins.

Parmi les liasses de documents que les parents m’ont remis, il y a des dessins que leurs filles ont faits depuis leur arrestation. « Il y en a un où elle est tombée dans l’eau, où on voit le mot kidnapping. [...] Elles n’ont plus le droit de dessiner. »

Sylvie me parle d’une conversation qu’elle a enregistrée, dans le temps qu’ils pouvaient parler à leurs filles au téléphone. « Il y a quelqu’un à côté. Ma fille demande : “Est-ce que j’ai le droit de dire ça ?” La personne dit : “Oui, c’est OK, tu as le droit de dire ça.” »


Même chose pour les rencontres supervisées, qui se limitent à un dîner une fois par semaine, en présence de deux intervenantes. « On est dans une petite salle avec des meubles d’enfants, raconte Sylvie. Il y a plein de questions qu’on ne peut pas poser. On ne peut pas leur demander comment ça va ni ce qu’elles font. On apporte un jeu, un livre, on discute du livre. » Ils ne peuvent pas les toucher. La DPJ a fait faire une seconde évaluation, les diagnostics sont plus nuancés, on ne parle plus d’autisme sévère, mais d’une forme plus légère. Les parents ont pu faire évaluer leurs filles par un autre spécialiste, il a conclu à une forme légère pour la plus petite, rien de concluant pour la plus grande. « On sait que la petite a un problème d’élocution, on est prêts à travailler ça. Et si elles ont besoin de services et d’accompagnement, on est prêts à faire tout ce qu’il faut. » La DPJ ne les croit pas.

Depuis presque trois ans, donc, les parents et la DPJ sont à couteaux tirés à cause du diagnostic. « Ils nous demandaient de signer le premier diagnostic, mais on a toujours refusé de le faire. Ça n’a aucun sens. » Pour les parents, il est clair que l’arrestation de leurs filles les a traumatisées au point de fragiliser leur santé mentale.

La DPJ accuse les parents de refuser de collaborer, de critiquer sans arrêt la ressource où leurs filles sont hébergées.

Le 19 avril dernier, le tribunal de la jeunesse a prolongé de deux années le placement des filles, qui ont maintenant 10 et 11 ans, jugeant même « improbable à plus long terme » un retour à la maison. « Cette situation est d’autant plus triste que nous sommes en présence de parents qui ne constituent aucunement un danger pour la sécurité de leurs enfants qu’ils aiment immensément. »

Tout ça pour un désaccord sur la scolarisation. Et sur un diagnostic d’autisme. L’intransigeance de la DPJ est d’autant plus préoccupante qu’on tente habituellement par tous les moyens de maintenir les enfants dans leur milieu familial, même dans des situations à haut risque, où certains parents ont des problèmes de dépendances ou de violence.

Retirer un enfant de son milieu doit être un dernier recours.

Dans ce cas-ci, la DPJ n’a même pas envisagé un milieu plus proche des enfants, cela même si une grand-mère pourrait prendre le relais. « On était même prêts à donner notre logement à ma mère. On a deux salles de bains, les filles ont chacun leur chambre. » Elles sont joliment décorées. La DPJ s’entête. S’acharne. J’ai beau retourner la situation dans tous les sens, donner le bénéfice du doute à la DPJ, je n’arrive pas à concevoir que de faire arrêter des enfants de sept et huit ans par des policiers, de les arracher à leur famille peut, d’une façon ou d’une autre, être fait pour leur bien.

Si tout ça sert des intérêts, ce ne sont certainement pas ceux des enfants.

Source : Le Soleil, le 18 juillet 2018

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dimanche 15 juillet 2018

Université Trinity Western: Cour suprême du Canada réinterprète les lois selon son penchant progressiste

Il y a près d’un mois, la Cour suprême du Canada a statué contre une université chrétienne qui désirait former des avocats. La nouvelle de cet arrêt que nous considérons comme liberticide a fait peu de bruit au Québec. C’est pourquoi nous pensons qu’il est utile de revenir sur celui-ci.

Trinity Western contre les barreaux britanno-colombien et ontarien

La Cour suprême du Canada a statué sur le fait que les barreaux de la Colombie-Britannique et de l’Ontario ont le droit de refuser d’agréer la faculté de droit proposée par l’Université chrétienne Trinity Western (UTW), à cause de son code de conduite jugé discriminatoire envers les homosexuels. Ce code de conduite interdit aux étudiants et au personnel de l’UTW d’utiliser un langage vulgaire ou obscène, d’être ivres, de consommer de la pornographie, de médire des gens ou de s’adonner à des activités sexuelles extra-conjugales ou homosexuelles. Il n’est donc pas « discriminatoire » envers les seuls homosexuels, mais contre toute une série de comportements considérés comme non bibliques.

L’Université Trinity Western est une université chrétienne évangélique privée à Langley, en Colombie-Britannique. La Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada a approuvé le programme de droit de l’UTW et a reconnu qu’il respectait les normes universitaires et professionnelles. Les barreaux n’alléguaient donc pas que quelque chose clochait dans le programme juridique de l’UTW, que ses professeurs étaient inaptes, que les étudiants à l’issue de leur cursus ne connaîtraient pas le droit, mais ils prétendaient que le code de vie de UTW est discriminatoire envers la communauté LGBTQ+. Seule cette « communauté » intéressaient les barreaux en question, les hétérosexuels obscènes ou aux mœurs légères ne suscitaient aucun intérêt de leur part.

Cour suprême : les barreaux peuvent refuser d’accréditer le programme de droit de l'UTW

Une majorité à la Cour suprême du Canada a conclu que les barreaux de la Colombie-Britannique et de l’Ontario avaient le droit de violer la liberté religieuse de Trinity au nom des « valeurs de la Charte » et donc de ne pas reconnaître sa faculté de droit. Tuant ainsi dans l’œuf l’établissement d’une faculté de droit à Trinity Western. Nous reviendrons sur le raisonnement juridique étonnant de la Cour suprême ci-dessous.

Notons tout d’abord que ce n’était pas la première fois que Trinity Western se retrouvait devant la Cour suprême pour défendre ses diplômés.

Victoire en 2001 de Trinity Western contre l’Ordre des enseignants de Colombie-Britannique

En 1995, Trinity Western avait fondé une faculté d’éducation, mais l’Ordre des enseignants de la Colombie-Britannique avait refusé l’accréditation de ce programme arguant que le code de conduite de Trinity Western était discriminatoire envers les étudiants homosexuels. L’Ordre avait rejeté la demande d’accréditation de Trinity Western au motif que les normes communautaires de l’université, qui s’appliquaient à tous les étudiants, professeurs et employés, interdisaient le « comportement homosexuel ». L’Ordre a soutenu que cette politique était discriminatoire et qu’il ne serait pas dans l’intérêt public d’approuver la demande.

Les tribunaux inférieurs de la Colombie-Britannique et, plus tard, la Cour suprême du Canada avaient alors statué en faveur de l’Université Trinity Western.

En 2001, dans une décision de huit contre un, la Cour suprême du Canada avait alors statué que l’Ordre des enseignants avait « agi injustement » en rejetant la demande de Trinity Western. La Cour avait souscrit aux jugements des tribunaux provinciaux inférieurs, déclarant qu’en se fondant sur « les préceptes religieux de l’UTW au lieu de l’impact réel de ces croyances sur le milieu scolaire public, l’Ordre des enseignants de la Colombie-Britannique a agi sur la base de considérations non pertinentes ».

La Cour suprême ajoutait : « Rien dans les normes communautaires [le code de conduite] de l’UTW, qui ne font que dicter la conduite des gens qui fréquentent l’UTW ou qui y travaillent, n’indique que les diplômés de l’UTW ne traiteront pas les personnes homosexuelles d’une manière équitable et respectueuse. La preuve révèle que les diplômés du programme de formation des enseignants, offert conjointement par l’UTW et l’USF [Université Simon Fraser], sont devenus jusqu’à maintenant des enseignants compétents dans des écoles publiques, et notre Cour ne dispose d’aucune preuve de comportement discriminatoire. »

Défaite en 2018, que s’est-il passé ? Juridiquement rien, socialement dans l’élite beaucoup

Comment expliquer alors que, 17 ans plus tard, Trinity Western perde une cause similaire devant la Cour suprême du Canada ?

Pour le célèbre chroniqueur Mark Steyn, « Il s’agit d’une décision absurde, mais c’est une décision qui confirme ce que j’avais écrit quand Anthony Kennedy [le juge démissionnaire de la Cour suprême des États-Unis] avait rendu sa décision sur le mariage homosexuel. […] Anthony Kennedy tortura le texte pourtant clair de la Constitution pour lui faire dire que Madison et Jefferson avaient astucieusement prévu le besoin du mariage homosexuel il y a quelques siècles. » Adoptant un point de vue gramsciste, il ajoute : « On dit souvent que la politique découle de la culture, mais le droit découle aussi de la culture. Anthony Kennedy suit le rythme. Il y a environ 30 ans, la Cour suprême a déclaré qu’il n’y avait pas de droit constitutionnel à la sodomie. Puis, rien n’a changé dans la Constitution, ce qui a changé ce sont les tendances dans la société. Les juges suivent le rythme, cela s’est produit à Washington et Ottawa. Dans ce sens, les droits et le droit ne sont que des modes. Et le hic pour Trinity Western c’est que la chasteté chrétienne n’est plus à la mode. Rien de plus. Personne ne prétend, les arguments juridiques sont tellement tortueux, que ce n’est rien de plus. Sauf que ce groupe de personnes, les LGBTQwerty, est une communauté protégée alors que les chrétiens en faveur de la chasteté ne le sont pas. Voilà. Rien de plus. » (vidéo à 19 min 30 s)

Ajoutons que la tendance qui fait primer les « droits » des LGBT sur la liberté religieuse n’est pas nécessairement majoritaire dans la population en général, mais elle semble bien l’être dans le chef de l’élite urbaine canadienne médiatique, universitaire et juridique.

Victoire d’hypothétiques étudiants LGBTQ+ mariés, perte réelle d’une université évangélique privée

Dans les faits, sept des neufs juristes d’Ottawa ont courageusement suivi la mode actuelle dans les élites urbaines du Canada en se portant à la défense de potentiels étudiants LGBTQ2SAI+ qui seraient obligés de fréquenter une faculté de droit proposée à l’Université Trinity Western - une petite université chrétienne évangélique privée à Langley, en Colombie-Britannique, dont le code de conduite interdit les relations sexuelles sauf entre des couples mariés hétérosexuels.

Évidemment, nul étudiant LGBTQ marié n’est obligé de s’y inscrire… Rappelons que le code de conduite proscrit les relations sexuelles hors mariage aux hétérosexuels. Les personnes qui préféreraient vivre en union de fait plutôt que de s’engager dans l’institution du mariage et les personnes qui ont d’autres croyances religieuses sont tout autant exclues que celles qui veulent avoir des relations homosexuelles alors qu’ils fréquentent UTW.

Même la juge en chef, lors de ce jugement, Beverley McLachlin, l’admet quand elle écrit : « [133]…. Les étudiants qui sont en désaccord avec les pratiques religieuses d’une école ne sont pas tenus de la fréquenter. Mais si, pour quelque raison que ce soit, ils souhaitent le faire, et ils consentent aux pratiques qui sont exigées des élèves, il est alors difficile parler de contrainte. » McLachlin fait néanmoins partie de la majorité des 7-2 confirmant la décision des barreaux de la Colombie-Britannique et de l’Ontario de ne pas accréditer les diplômés de Trinity… Comprenne qui pourra.

La Cour suprême a donc brimé les droits de Trinity Western et de ses étudiants sans qu’on sache qui profitera dans les faits de cette restriction de liberté.

Rappelons au passage que 6 de ces 7 juges ont été nommés par des gouvernements prétendument conservateurs…

Coup d’État constitutionnel au ralenti

Pour Bruce Pardy qui écrit dans le National Post, la décision de la Cour suprême dans l’affaire Trinity Western n’est rien moins qu’une autre étape d’un coup d’État constitutionnel progressif. Les juges d’Ottawa transforment de leur propre chef la Charte des droits et libertés en l’interprétant comme bon leur semble pour arriver à la décision qu’ils préfèrent.

Bruce Pardy rappelle le film comique australien « Une Maison de rêve » (1997), devenu un classique du genre. Dans celui-ci, un homme va en justice pour empêcher que l’on exproprie de sa maison afin d’agrandir un aéroport. Son avocat, qui n’a aucune idée comment défendre son client devant le Tribunal, allègue une violation de la Constitution australienne. « Quel article de la Constitution a été violé ? » demande alors la juge. L’avocat n’en a aucune idée. « Il n’y a pas un seul article », répond-il avec hésitation, « c’est juste l’esprit de la chose qui l’est ». Pour une génération d’avocats, cette réplique devint une blague récurrente utilisée pour se moquer de certains avocats à bout d’arguments.


C’est « L’esprit de la chose », extrait de « Une maison de rêve » (en anglais australien)

Pour la Cour suprême du Canada, ce n’est plus une blague, mais une technique pour faire évoluer la Loi dans le sens qui lui agrée.

Une majorité de la cour a conclu que les barreaux avaient le droit de violer la liberté religieuse de Trinity au nom des « valeurs de la Charte » affirmant doctement qu’il s’agissait là d’une position équilibrée. Position équilibrée dont elle a le secret. La liberté de religion est garantie comme une liberté fondamentale à l’alinéa 2a) de la Charte des droits et libertés, Les « valeurs de la Charte » ne se trouvent explicitées nulle part dans le texte. Ils sont, oui, « juste l’esprit de la chose », utilisée par la Cour pour renverser les droits réels de la Charte et réécrire la Constitution.

La Charte des droits garantit les droits de citoyens face à l’État, pas face à une université privée

Selon la majorité des juges, le code de conduite de Trinity imposait des barrières inéquitables à l’entrée, en particulier pour les étudiants LGBTQ. Cette majorité a donc estimé que les refus d’accréditation par les barreaux constituaient un « équilibre proportionné » des protections de la Charte en jeu. Cela peut sembler juste et raisonnable au profane, mais cette façon de présenter les choses est foncièrement retorse.

En effet, la cause ne mettait pas en lice des protections concurrentes de la Charte. Les libertés religieuses de Trinity n’étaient pas opposées aux droits à l’égalité des personnes LGBTQ parce que ces droits n’existent pas. La Charte ne s’applique à personne, sauf à l’État. En tant qu’institution religieuse privée, Trinity n’était assujettie ni à la Charte ni d’ailleurs au Code des droits de la personne de la Colombie-Britannique. Trinity Western était le seul parti ayant des droits garantis par la Charte, applicables aux barreaux en tant qu’organismes investis d’un pouvoir délégué par l’État. Nommer le code de conduite une « barrière inéquitable » est malhonnête.

Les communautés religieuses sont constituées de personnes privées qui se rassemblent et se mettent d’accord sur un code auquel elles choisissent d’adhérer. Elles n’imposent ces normes à personne d’autre qu’à elles-mêmes. Personne n’est obligé de se joindre à elles et personne n’a un droit inaliénable d’aller à une école de droit qui fait partie d’une institution religieuse privée. Il n’y a rien à « équilibrer ». Jusqu’à ce que, bien sûr, le tribunal suprême du Canada invoque les valeurs de la Charte. Vous savez, « l’esprit de la chose ».

Et quelles sont, dites-vous, ces valeurs de la Charte ? Si la liberté religieuse est une liberté fondamentale, la valeur de la liberté religieuse n’est-elle pas une valeur de la Charte ? À la lecture de l’arrêt Trinity Western, la réponse des juges d’outre-Outaouais, apparemment, elle n’en est pas une...

Les valeurs de la Charte ne sont pas une réalité objective inscrite, mais un ensemble de préjugés moraux concurrents qui existent dans le chef des juges de la Cour suprême. La Charte a été conçue et rédigée comme une liste de droits négatifs protégeant les particuliers contre l’ingérence d’un État dominateur.

Les valeurs de la Charte, telles qu’énoncées par la Cour en 2018, sont, par contre, des valeurs collectivistes des « progressistes » : l’égalité (de résultat plutôt que de chances), la justice (sociale) et la dignité (collective). Les valeurs de la Charte ne sont décidément pas les valeurs individuelles de liberté des libéraux classiques ou les vertus traditionalistes des conservateurs.

Les juges dissidents

Il est très instructif de consulter le jugement dissident des juges Brown et Côté qui n’y vont pas de main morte : « les valeurs consacrées par la Charte, comme l’“égalité”, la “justice” et la “dignité” deviennent de simples procédés rhétoriques qui permettent aux tribunaux de donner préséance à des points de vue moraux, sous le couvert de “valeurs” non définies l’emportant sur d’autres valeurs, et sur les droits garantis par la Charte eux-mêmes. » L’invocation de valeurs de la Charte par la majorité des juges donne toute latitude aux barreaux d’enfreindre les droits garantis par la Charte au nom de l’« intérêt public », un mot codé qui représente simplement les idéaux et préjugés progressistes auxquels tous doivent maintenant se conformer.

Pendant des années, la Cour suprême a insisté sur le fait que la Constitution canadienne était un « organisme vivant » qui devait s’adapter aux circonstances sociales changeantes, bien évidemment dans le sens des valeurs à la mode parmi les juges de la Cour suprême.

En utilisant les valeurs de la Charte, le tribunal a porté ce projet à un nouveau niveau. L’affaire Trinity Western est la décision la plus récente de la Cour suprême qui consiste à transformer lentement mais sûrement la Charte qui était une liste de droits à la liberté en un ensemble de valeurs collectivistes non définies. La cour le fait de sa propre initiative, sans directive provenant du pouvoir législatif représentant (imparfaitement) le peuple ou sans vote direct du peuple par référendum. Car d’où les neuf avocats du Tribunal siégeant le long de l’Outaouais tirent-ils donc la légitimité de s’arroger ce pouvoir ? Certainement pas du peuple. Pour Bruce Pardy, « il ne s’agit de rien de moins qu’un coup d’État constitutionnel au ralenti. Et ce n’est pas une blague. »

Protéger « la diversité » en tuant dans l’œuf la véritable diversité

La décision de la Cour suprême dans la cause Trinity Western est mal étayée et fourmille de contradictions. Notamment, elle explique la décision des barreaux par leur volonté d’établir une profession juridique « diversifiée » sans jamais songer qu’une faculté de droit chrétienne évangélique contribuerait manifestement à cet objectif.

Notons que ce n’est pas la première fois que la Cour suprême opère de la sorte.

Dans l’affaire S.L. contre la Commission scolaire des Chênes sise à Drummondville, le dossier de l’imposition à tous les élèves par l’État québécois d’un programme unique d’éthique et de culture religieuse (ECR) afin d’enseigner une même vision de la multiplicité des religions, la Cour suprême avait repris les arguments éculés du gouvernement sur la nécessité de ce programme dans une société marquée de plus en plus par la diversité. Les avocats des parents avaient alors opposé à la Cour suprême que cette diversité serait sans doute mieux assurée par le respect de la diversité des choix religieux des parents plutôt que par l’imposition par l’État d’une unique vision de la multiplicité des religions selon laquelle toutes les religions seraient dignes de respect, qu’on pouvait croire à la sienne, mais pas trop, car il fallait être d’abord tolérant envers cette diversité. La juge en chef McLachlin avait physiquement marqué sa désapprobation quand un des avocats des parents contre l’imposition d’ECR avait mentionné cette contradiction évidente de la part des gens qui n’avaient que les mots « tolérance » et « diversité » à la bouche : en imposant ECR on ne tolérait pas la réelle diversité ni la dissidence dans une matière pourtant philosophique et morale.

Pour revenir à la cause Trinity Western, la loi ne peut imposer à une institution privée d’être « diverse » en la forçant à accepter des gens qui enfreignent son code de conduite que ce soit au niveau des relations homosexuelles ou des autres restrictions inscrites dans ce code. C’est plutôt aux barreaux provinciaux — munis de pouvoirs délégués par l’État — d’assurer la diversité de la profession juridique en acceptant les diplômés d’une faculté de droit peu à la mode.

Changement historique : le « droit » des LGBTQ à ne pas être vexés prime sur la liberté religieuse d’un établissement privé

Les tribunaux canadiens ont longtemps protégé les pratiques religieuses qu’ils croient sincères, pas nécessairement essentielles ou commandées par les Écritures. Dans l’arrêt Trinity Western, la majorité des juges a pris le contrepied de cette tradition tolérante.

Car, pour les juges majoritaires, « la restriction en l’espèce est d’importance mineure parce que, selon le dossier dont nous disposons, il n’est pas absolument nécessaire d’adhérer à un covenant [pacte/code de conduite] obligatoire pour se livrer à la pratique religieuse en cause, à savoir étudier le droit dans un milieu d’apprentissage chrétien où les gens suivent certaines règles de conduite à caractère religieux. La décision de refuser d’agréer la faculté de droit proposée par TWU régie par un covenant obligatoire ne fait qu’empêcher les étudiants éventuels d’étudier le droit dans leur milieu d’apprentissage religieux optimal où tout le monde doit respecter cet engagement. »

Comme preuve de cette importance mineure, selon eux, les juges n’offrent guère d’autre argument que le fait que ce code ne serait pas obligatoire pour des chrétiens évangéliques, mais une préférence. Il semble surtout que de qualifier ainsi le code de l’UTW leur permet de rendre plus acceptable leur prétention que les barreaux ont agi avec mesure et équilibre.

Répercussions importantes

Cette décision du tribunal suprême a de profondes répercussions sur les institutions confessionnelles au Canada et leur participation à la société. Désormais, les organes administratifs statutaires (comme les barreaux, les tribunaux des droits de la personne, les commissions qui accordent des permis) ont le droit de porter atteinte aux entités religieuses et à leurs droits et libertés en restreignant leur comportement. En raison de cette décision, il reste peu de place dans notre culture politique pour les institutions religieuses. Cette décision entraînera de graves conséquences à l’avenir pour les groupes religieux dans le domaine de l’éducation, mais aussi dans d’autres secteurs, notamment les hôpitaux catholiques et autres entreprises confessionnelles.

Pour les juges dissidents, les barreaux ont outrepassé leur mandat

Les motifs des juges dissidents Côté et Brown sont intéressants, nous en reproduisons une sélection ci-dessous :
Selon la loi habilitante de la LSBC [barreau de Colombie-Britannique], la décision relative à la reconnaissance d’une faculté de droit a pour seule fin légitime de veiller à ce que les diplômés soient individuellement aptes à devenir membres de la profession juridique parce qu’ils respectent des normes minimales en matière de compétence et de déontologie. Vu l’absence de préoccupations à l’égard de l’aptitude des éventuels diplômés en droit de UTW, le seul exercice justifiable du pouvoir discrétionnaire statutaire de la LSBC aurait été pour elle d’agréer la faculté de droit proposée par UTW. […]
le paragraphe 2 27 (4,1) ne confère pas à la LSBC le pouvoir de réglementer les facultés de droit ni de garantir l’égalité d’accès aux facultés de droit. Dans la mesure où les politiques d’admission d’une faculté de droit ne soulèvent pas de préoccupations quant à l’aptitude des diplômés de celle ci à pratiquer le droit, la loi ne confère tout simplement pas le pouvoir à la LSBC de les scruter.

[…]

Tout préjudice causé aux communautés marginalisées dans le contexte de la formation juridique est examiné par les tribunaux provinciaux des droits de la personne, par les assemblées législatives et par les membres de l’exécutif, qui confèrent à ces institutions le pouvoir de délivrer des diplômes. [Note du carnet : cela ne relève pas des barreaux qui ont outrepassé leur pouvoir administratif délégué par l’État, car les barreaux ne régissent pas le fonctionnement des facultés de droit, mais juge de la qualité de leur formation juridique.] La LSBC, en tant que représentante de l’État, n’est pas un électron libre qui peut tout se permettre. Elle ne peut pas décider de veiller au respect de telles questions de son propre chef alors qu’elles outrepassent son mandat.

[…]

La LSBC a manqué à son devoir statutaire en s’en remettant aux résultats d’un référendum ayant une incidence sur des droits garantis par la Charte sans réaliser, comme le requiert le cadre d’analyse prescrit dans les arrêts Doré et Loyola, un juste équilibre entre ces droits et les objectifs législatifs en cause. Les résultats du référendum ont été entérinés sans autre discussion et, par conséquent, sans la tenue d’un débat de fond. La décision de la LSBC ne repose donc sur aucun raisonnement. Et pourtant, les juges majoritaires de la Cour [suprême] ont remplacé les motifs (inexistants) de la LSBC par les leurs et ils font du résultat leur seule considération. Bien qu’une erreur aussi grave commande normalement que la décision de la LSBC soit annulée et que le dossier lui soit renvoyé pour qu’elle tranche la question adéquatement, il revient maintenant à la Cour de déterminer ce qui constitue une mise en balance proportionnée en l’espèce.

[…]

Les Canadiens ne sont pas tenus d’adhérer au même ensemble de valeurs. Les valeurs d’une personne peuvent pour une autre être frappées d’anathème. Cela ne pose pas problème dans la mesure où chacun accepte le droit de l’autre de souscrire à ses valeurs et de les afficher d’une manière qui soit compatible avec les limites de l’engagement citoyen minimal qui est essentiel pour assurer l’ordre civique — ce qui n’est aucunement en cause en l’espèce. Toutefois, ce qui est préoccupant, c’est d’imposer des « valeurs » préférées par les tribunaux pour limiter d’autres droits garantis par la Constitution, dont le droit de souscrire à d’autres valeurs.

[…]

En s’appuyant sur une abstraction d’une large portée [note du carnet : « l’égalité » sans plus de détail], les juges majoritaires évitent plutôt de rendre explicites leur jugement moral, ses fondements et le pouvoir légal sur lesquels il repose.

[…]

Le manque de logique quant au fait pour les juges majoritaires d’insister pour qu’un cadre d’analyse distinct soit appliqué aux décisions administratives attentatoires est troublant [.]

Respecter la diversité religieuse est dans l’intérêt public au sens large, et le fait d’agréer la faculté de droit proposée ne revient pas à approuver des actes discriminatoires à l’égard des personnes LGBTQ. La politique d’admission de l’UTW n’a pas pour objet d’exclure les personnes LGBTQ — ni personne d’autre, d’ailleurs —, mais bien d’établir un code de conduite qui assure la vitalité de la communauté religieuse de l’université. Elle ne concerne pas un seul groupe de personnes, et bien d’autres groupes (notamment les personnes hétérosexuelles non mariées) y seraient assujettis. L’inégalité d’accès que cause le Covenantdécoule directement du respect de la liberté de religion, qui en soi permet de promouvoir l’intérêt public en favorisant la diversité au sein d’une société libérale et pluraliste. Seuls l’État et les acteurs étatiques — et non les institutions privées comme l’UTW — sont constitutionnellement tenus de respecter la différence de sorte à promouvoir le pluralisme dans la sphère publique. Assimiler ainsi reconnaissance et approbation fait du rempart qu’est la Charte une arme qui impose à des acteurs privés des obligations découlant de la Charte.

La neutralité de l’État exige qu’il ne favorise ni ne défavorise aucune croyance, pas plus du reste que l’incroyance. Dans tous les cas, la neutralité de l’État doit primer. La tolérance et le respect de la différence servent l’intérêt public et favorisent le pluralisme. La reconnaissance de la faculté de droit proposée par UTW constituait la seule décision représentant une mise en balance proportionnée des droits garantis par la Charte et des objectifs statutaires de la LSBC.

[U]n code de conduite communautaire conforme aux croyances évangéliques orthodoxes ne vise pas directement les personnes LGBTQ ; elle ne concerne pas un seul groupe de personnes, et bien d’autres groupes (notamment les personnes hétérosexuelles non mariées) y seraient assujettis. La politique d’admission de UTW n’a pas pour objet d’exclure les personnes LGBTQ — ni personne d’autre, d’ailleurs —, mais bien d’établir un code de conduite qui assure la vitalité de la communauté religieuse de l’université.

Qui plus est, le fait d’avoir et d’exprimer à l’égard du mariage les opinions morales sur lesquelles reposent les portions du Covenant de UTW qui sont en cause en l’espèce a été expressément reconnu par le Parlement comme n’étant pas incompatible avec l’intérêt public et comme étant digne de respect (Loi sur le mariage civil, L.C. 2005, c. 33, préambule et art. 3.1) :

Le refus par la LSBC d’agréer la faculté de droit proposée par UTW a une incidence considérable sur les droits garantis à la communauté de UTW par l’al. 2a) de la Charte. Même si le mandat légal de la LSBC de protéger [TRADUCTION] « l’intérêt public » était interprété de façon à ce qu’elle soit habilitée à tenir compte de considérations n’ayant rien à voir avec l’aptitude, le fait d’agréer la faculté de droit proposée n’est pas contraire aux objectifs d’intérêt public visant le maintien de l’égalité d’accès dans la profession juridique et de la diversité au sein de celle ci.

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vendredi 13 juillet 2018

Principe de « fraternité » et le gouvernement des juges qui interprètent selon leur bon vouloir

Le fameux « délit de solidarité » [aider des immigrants illégaux] est inconstitutionnel, à la grande joie des associations de défense des droits de l’homme, et de leurs « amis » passeurs.

Apparemment, ça n’a rien à voir. En fin de semaine dernière, on apprenait que le Conseil constitutionnel avait estimé que le troisième terme de la devise de la République, la fraternité, était un principe constitutionnel ; qu’il était donc interdit à l’État de poursuivre ceux qui aident des étrangers clandestins. Le fameux « délit de solidarité » est donc inconstitutionnel [...]

En donnant une force juridique à un principe philosophique, le Conseil poursuit sa tâche commencée il y a soixante ans : donner une force juridique, à partir de ses interprétations, à chacun des principes énoncés dans la Déclaration des droits de l’homme. […]

C’est ce qu’on appelle aujourd’hui l’État de droit, qui soumet chaque acte de l’État à une norme de droit. Contrairement à ce qu’on croit, cet État de droit n’est pas synonyme de démocratie. […] Dans la tradition juridique française, on appelle cela : « le gouvernement des juges ».

Dans une démocratie, les partis politiques sont l’expression de la volonté du peuple. Dans une oligarchie [plus précisément une dicastocratie], les juges considèrent qu’ils ont tous les droits vis-à-vis des partis politiques. Leur confisquer leur subvention, comme au FN, ou, comme lors de la dernière présidentielle, fausser le résultat en mettant le favori (François Fillon) en examen. Pas besoin de donner des leçons à Poutine ou à Erdogan…



La professeur de droit public Anne-Marie Le Pourhiet analyse dans le même sens la décision des Sages de mettre fin au délit de solidarité, qu’elle juge irresponsable. Elle a publié une lettre ouverte dans ce sens dans le Figaro que nous reproduisons des extraits ci-dessous.

[...]

Le juge constitutionnel a trahi sur au moins trois points la lettre et l’esprit de la Constitution qu’il est chargé d’appliquer : d’une part, la fraternité n’a jamais eu la moindre définition ni donc de contenu normatif ; d’autre part, elle n’a jamais évidemment concerné que les citoyens de la nation française réunis en « fratrie » symbolique ; enfin, l’article 2 de la Constitution distingue soigneusement la « devise » de la République de son « principe » qui n’est pas du tout celui que le Conseil constitutionnel prétend consacrer.

En premier lieu, l’article 2 de la Constitution dispose simplement que la devise de la République est « Liberté, Égalité, Fraternité ». À l’inverse de la liberté et de l’égalité qui font l’objet de nombreuses autres dispositions constitutionnelles essentielles, la fraternité ne figure que dans cette devise seulement répétée à l’article 72-3 dans une formule néocoloniale désuète indiquant que « la République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité ».

C’est à Robespierre que l’on doit la première formulation de la trilogie qu’il proposait, dans son discours du 5 décembre 1790, d’inscrire sur la poitrine des gardes nationales. On retrouve la formule badigeonnée et « enrichie » en 1793 sur les murs de Paris : « Unité et indivisibilité de la République. Liberté, Égalité, Fraternité ou la mort ». Elle réapparaît durant la révolution de 1830, mais c’est en 1848 qu’elle devient officielle.

La définition et la nature exacte de la fraternité ont toujours posé problème et en font incontestablement le « maillon faible » de la trilogie. L’usage révolutionnaire du terme était de nature familiale, axé sur l’appartenance nationale et la commune ascendance. La Constitution de 1791 indiquait ainsi dans son titre 1er : « Il sera établi des fêtes nationales pour conserver le souvenir de la Révolution française, entretenir la fraternité entre les citoyens et les attacher à la Constitution, à la patrie et aux lois. » L’article 301 de la Constitution de l’an III reprend la même disposition. La vocation civique initiale du mot est donc évidente, il s’agit d’exalter une vertu citoyenne par une mémoire partagée. La fraternité est précisément ce qui distingue les citoyens des étrangers dans le cadre du nationalisme révolutionnaire.

C’est dans la Constitution de 1848 que le terme entre officiellement dans la trilogie avec, cette fois, une inspiration issue du rapprochement des forces républicaines et du christianisme social [les « curés rouges »] plus axée vers la charité et le solidarisme. La fraternité devait suppléer le « droit au travail » que l’on avait retiré du projet de Constitution et qui fit l’objet de discussions longues et passionnées. L’entraide et l’assistance « fraternelles » sont mentionnées à deux reprises dans le préambule de la Constitution de 1848 et se confondent en réalité avec la solidarité nationale. Sous la IIIe République, il avait d’ailleurs été question de remplacer effectivement la fraternité, jugée trop sentimentale et chrétienne, par la solidarité.

L’on ne saurait nier que la fraternité a toujours « juré » un peu à côté de la liberté et de l’égalité. Celles-ci sont considérées par les révolutionnaires comme consubstantielles à l’humanité puisque les hommes « naissent » libres et égaux en droits. Ce sont des principes, des postulats premiers, des droits plus naturels que positifs. La fraternité, conçue comme l’amour indistinct de ses concitoyens, relève au contraire de l’affectif, donc du vœu pieux purement moral. On comprend donc que l’inspiration chrétienne de la fraternité de 1848 ait agacé certains républicains authentiques et il faut bien admettre que les discours sur ce thème ont toujours peiné à s’extraire du prêchi-prêcha compassionnel et moralisateur et à fournir des arguments consistants et convaincants.

En second lieu, que ce soit dans la période révolutionnaire, dans la Constitution de 1848 ou à l’article 72-3 de la Constitution actuelle relatif à l’outre-mer, la fraternité n’a jamais expressément uni que les citoyens français appartenant à la « famille » nationale et ne s’étend certainement pas aux étrangers, a fortiori en situation irrégulière, c’est-à-dire entrés ou demeurés sur le territoire français au mépris des lois républicaines. C’est une falsification des principes républicains que de prétendre appliquer la fraternité à l’ensemble du « genre humain » à la façon de l’Internationale socialiste ou de la chrétienté et de décider, comme le fait le Conseil constitutionnel qu’il « découle » de la fraternité la « liberté » d’aider des étrangers illégaux dans un but humanitaire.

Le Conseil feint d’ignorer que c’est la souveraineté populaire qui est le principe normatif fondateur de la République et que ce principe lui interdit précisément de faire prévaloir ses interprétations idéologiques subjectives [...]

En troisième lieu, si le préambule de la Constitution de 1848 consacrait la fameuse trilogie « Liberté, Égalité, Fraternité » en la qualifiant de « principe », les constituants de 1946 et de 1958 ont, en revanche, délibérément changé la donne en spécifiant formellement, dans leurs articles 2 respectifs, que la trilogie n’est plus que la « devise » de la République tandis que son « principe » est désormais « Gouvernement du peuple, pour le peuple et par le peuple ». Le Conseil constitutionnel a donc délibérément triché avec le texte constitutionnel en affirmant qu’il « découle » de la devise que la fraternité est un « principe » à valeur constitutionnelle. C’est de l’inversion terminologique pure et simple. Le Conseil feint d’ignorer que c’est la souveraineté populaire qui est le principe normatif fondateur de la République et que ce principe lui interdit précisément de faire prévaloir ses interprétations idéologiques subjectives sur la volonté générale exprimée par le peuple français ou ses représentants.

À ce degré de déformation du texte qu’il est censé faire respecter, le Conseil s’assoit sur l’État de droit démocratique au lieu de le défendre. Hubert Védrine pointait récemment à juste titre la responsabilité des juges nationaux et européens dans l’impuissance nationale à maîtriser l’immigration, visant essentiellement le Conseil d’État et les Cours de justice de Luxembourg et de Strasbourg. Voilà maintenant que le Conseil constitutionnel se met aussi à dérailler, dans une incompréhensible surenchère, vers l’activisme judiciaire « abbé-pierriste », au moment même où l’exaspération monte de toutes parts à l’égard du « gouvernement des juges ». Il ne faut dès lors pas s’étonner de voir fleurir les propositions de réforme de l’institution.

Source : Le Figaro

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À qui sont ces enfants au juste ?

France — Blanquer ne va-t-il pas assez loin ?

Alors qu’il entrera en application à l’école primaire et au collège dès septembre, le « réajustement » des textes hérités du mandat socialiste précédent mécontente « pédagogistes » comme « conservateurs ».

Défenseur du bon sens et du pragmatisme, le ministre français de l’Éducation nationale Blanquer affirmait ne pas vouloir tomber dans les querelles idéologiques traditionnelles. Un peu plus d’un an après son arrivée Rue de Grenelle, il ne fait pourtant pas exception à la règle.

Suppression du prédicat — ce concept grammatical non identifié, hérité du quinquennat Hollande —, retour à la « leçon » de grammaire, apprentissage des quatre opérations mathématiques dès le CP, mais aussi du premier couplet de La Marseillaise… Sans procéder à une réécriture complète des programmes rédigés en 2015, le ministre de l’Éducation, à travers la feuille de route fixée au Conseil supérieur des programmes, voulait marquer la rupture. Mais ces signaux idéologiques, s’ils font mouche auprès de l’opinion et des familles, ne parviennent pas à convaincre les représentants enseignants, qu’ils soient du camp « pédago » ou du camp « conservateur ». Dans les rangs de ces derniers, on regrette que le ministre ne soit pas allé plus loin dans son entreprise de détricotage des réformes du mandat précédent.

« On fait croire que l’on rétablit le bon sens, mais en réalité on ne fait pas grand-chose », déplore René Chiche, vice-président du syndicat Action et démocratie (CFE-CGC). Ces programmes réécrits en disent finalement peu sur les connaissances et les contenus. En revanche, comme les précédents, ils n’en finissent pas de définir des objectifs de compétences, poursuit le professeur de philosophie. Il y a cinquante ans, un programme tenait sur à peine deux pages ! » L’actuel texte sur le cycle CP-CE2 en compte vingt-cinq… « C’est le “prêt à enseigner”. Le professeur, nourri des fiches de l’administration centrale, est réduit à un rôle d’exécutant », conclut René Chiche. Tout comme le Snalc, syndicat classé à droite, il regrette, l’absence de « repères annuels de progressivité ». Derrière ce jargon, ce sont deux visions de l’école qui s’affrontent : d’un côté les partisans des « cycles » d’apprentissage de deux ou trois ans, de l’autre les défenseurs de repères annuels clairs pour les professeurs. Souhaités par Jean-Michel Blanquer, ces repères seront définis dans une « note de service » à venir, a précisé son ministère. Mais quelle sera leur portée réglementaire ?