jeudi 13 septembre 2012

La “prescription” par l'État d’un programme aux objectifs éthiques est peu efficace et même parfois contreproductive

Charles L. Glenn nous livre ci-dessous un article établissant que ce n’est pas en imposant aux écoles des contenus civiques ou religieux obligatoires que l’État peut réussir la formation civique ou religieuse des futurs adultes mais par d’autres moyens.

Jan de Groof et moi-même venons d’achever la nouvelle édition, en quatre volumes, de l’ouvrage Balancing Freedom, Autonomy, and Accountability in Education (Concilier liberté, autonomie et imputabilité en éducation). Cet ouvrage est constitué d'articles portant sur 60 pays rédigés par des experts. Le premier volume recueille des essais d’auteur, chacun s’étant intéressé à un thème commun à tous les pays. J’ai désormais terminé ma contribution sur les programmes officiels à contenu éthique ou chargés de valeurs, et la découverte surprenante que j’ai faite, c’est qu’il y a peu de différences entre eux !

Il est très courant pour les gouvernements d’expliquer en détail comment les écoles doivent promouvoir la citoyenneté et les droits de l’homme. C’est aussi fréquent (mais pas universel) qu’un gouvernement prenne des dispositions en faveur de l’enseignement religieux au sein des écoles publiques, en instaurant généralement un mécanisme de dérogation à la demande et parfois aussi en permettant aux familles de choisir librement la tradition religieuse qui sera enseignée par l’école à leur enfant. Si l’on compare ces exigences aux résultats de 38 pays obtenus par l’ICCES (International Civic and Citizenship Education Study), il ressort néanmoins que les prescriptions de l’État ont peu d’impacts sur le comportement des adolescents interrogés.

Soit l’exemple de la République tchèque, qui demande « au niveau secondaire, de prêter beaucoup d’attention aux thèmes de la citoyenneté (et en particulier de la citoyenneté européenne), de la globalisation, du souci de l’environnement et du multiculturalisme. » Malte a des exigences de programmes officiels inhabituellement poussées : ce pays insiste sur « le devoir des écoles de servir de terrain d’essai pour la démocratie en lien avec les déclarations et les traités signés par Malte dans le passé, ainsi qu’avec ses obligations constitutionnelles. En tant qu’institutions-clé de la société civile, les écoles devraient encourager chez les élèves le respect d’autrui, le droit des personnes à jouir de la liberté, de la paix, de la sécurité et des avantages d’une société gouvernée par le droit. Dans une société de plus en plus multiculturelle, le système scolaire doit permettre aux élèves de développer un sens du respect, de la coopération, de la solidarité entre les cultures. » En Lettonie, le rôle assigné aux écoles est de favoriser le développement de citoyens de l’État et de l’Europe qui soient responsables, tolérants et démocrates, tout en leur inculquant aussi l’idée que la vie humaine est la valeur suprême.

Mais les pays qui formulent de tels standards ne sont pas nécessairement ceux dans lesquels les droits de l’homme sont en pratique les mieux respectés. Le rapport de l’ICCS montre que les élèves de 8e année dans la République tchèque, la Lettonie et Malte étaient considérablement moins susceptibles que la moyenne des autres pays d’exprimer leur soutien à l’égalité des droits pour les groupes ethniques et raciaux.

Le même décalage est évident dans des pays comme l’Angleterre qui fait dispenser une instruction religieuse par les écoles publiques et qui a néanmoins des taux de croyance et pratique religieuses beaucoup plus faibles qu’aux États-Unis où cette instruction est interdite.

En bref, la “prescription” par le gouvernement d'un programme aux objectifs chargé de valeurs ne semble pas efficace. En effet, je montre dans mon essai que le contrôle ou la surveillance intrusive du gouvernement peuvent se révéler contreproductifs, en cultivant une passivité chez les professeurs et les élèves, ce qui ne correspond en rien à un modèle de citoyenneté engagée.

Voyons comment s’explique cela. Une des conclusions du rapport ICCS est que cette éducation civique est inversement corrélée à la probabilité de l’engagement politique à venir de ceux qui l’ont reçue. Cela signifie qu’en fait, les élèves qui connaissent mieux le fonctionnement du gouvernement sont moins intéressés, une fois adultes, par l’engagement politique.

Les adolescents en Indonésie, en revanche, ont un score faible en connaissances civiques mais élevé en confiance en eux et en la politique. Les auteurs concluent que l’engagement dans une citoyenneté active dépend davantage de la pédagogie employée et du climat scolaire que du contenu d’enseignement officiellement prescrit. Les écoles dans lesquelles les élèves ont un sentiment d’appartenance les rendent plus intéressés par la citoyenneté.

Ceci est cohérent avec les nombreuses études, réalisées en Europe de l’Ouest comme en Amérique du Nord, portant sur les écoles confessionnelles qui ont des valeurs (« un ethos ») solides et partagées par tous. Comme pour l’éducation à la citoyenneté, il se pourrait que le choix d’enseigner la religion comme une matière scolaire à part entière ait moins d’effet que certains souhaiteraient (ou craindraient !).

En même temps, il est largement prouvé que les écoles à caractère religieux ont un impact profondément positif sur les performances scolaires, sur la formation du caractère ainsi que sur le développement de la foi.

Encore une fois, il est bon de se concentrer sur ce qu’une école fait en pratique plutôt que ce que proclame le programme.

L’auteur du chapitre sur la République tchèque, le pays du monde sans doute le plus sécularisé (seuls 25 % des élèves de 8e année se réclament d’une confession, et 8 % ont participé à un service religieux durant le mois précédent), ajoute de manière intéressante : « C’est pour cela que, dans de nombreux cas, les écoles alternatives et chrétiennes sont devenues des solutions pour des familles qui ne croient plus que l’école publique puisse assurer les hautes valeurs humaines et sociales qui sont nécessaires dans un monde marqué par l’importance des facteurs de risques comme la violence et l’intolérance. »

Mon chapitre se termine sur l’idée que les personnes intéressées par les questions de l’éducation, de la formation du caractère, des valeurs auront plus intérêt à étudier les spécificités des différentes écoles qu’à se pencher sur les prescriptions d’enseignement faites par les gouvernements en matière de valeurs. Ce sont les écoles dotées d’un projet pédagogique nettement articulé, souvent à caractère religieux, et de professeurs qui ne suivent pas de prescriptions gouvernementales pour faire cours, qui semblent le plus à même de produire des diplômés préparés à s’engager en toute confiance dans la vie comme citoyens responsables.

Charles L. Glenn est professeur à l’Université de Boston, où il enseigne en histoire de l’éducation et en politiques éducatives comparées. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont le plus récent est le quatrième volume de Balancing Freedom, Autonomy, and Accountability in Education (Concilier liberté, autonomie et imputabilité en éducation). Il est également vice-président de l’OIDEL, une organisation internationale promouvant la liberté d’éducation et le droit à l’instruction. Ses travaux de recherche en Europe et en Amérique du Nord portent sur la scolarisation en milieu urbain, le choix des parents, la scolarisation des élèves des minorités linguistiques et ethniques, l’interaction entre la religion et l’éducation, l’histoire et la sociologie de l’éducation, la conciliation des normes nationales avec l’autonomie et le caractère distinctif des écoles, la dégradation de la qualité des écoles et de l’équité.

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Université catholique américaine sous enquête : un cours décrit l'homosexualité comme déviance

L'université franciscaine – et donc catholique – de Steubenville, dans l'Ohio, fait l'objet d'une enquête de la part de l'agence nationale de l'Administration américaine chargée d'agréer les cursus universitaires de « travail social » au motif que l'un des cours dispensés dans cette université présente l'homosexualité au nombre des comportements déviants.

C'est sur délation d'un groupe d'étudiants qui s'appellent eux-mêmes les « Franciscan Gay Alumni and Allies » que l'enquête a été lancée ; le groupe réclame une modification du cours afin que l'université « cesse de contribuer à la culture de haine et d'ignorance ». Le cours en question est intitulé : « Comportements déviants ». Il se penche sur le meurtre, le viol, le vol, la prostitution, l'homosexualité, la maladie mentale et l'usage de stupéfiants. En outre, le groupe demande que l'université révise l'ensemble de ses intitulés de cours et « passe en revue tout son programme en vue d'en ôter toute information et enseignement sur ce sujet qui seraient dépassés et qui ne seraient pas étayés par des éléments scientifiques solides ».

Des porte-parole de l'université ont souligné que le mot « déviant » est utilisé au sens sociologique, c'est-à-dire « différent de la norme », et précisent que, conformément à ce qu'enseigne l'Église, elle « traite les personnes homosexuelles avec “ respect, compassion et tact ” (catéchisme de l'Église catholique, n° 2358) tout en considérant les actes homosexuels comme “intrinsèquement désordonnés” ». Les porte-parole ajoutent que l'intitulé du cours résume les têtes de chapitre telles qu'elles apparaissent dans le même cours de nombre d'autres universités, laïques ou confessionnelles. Le directeur de l'agence d'agrément de la Université franciscaine de Steubenville, Stephen Holloway, qui pressé de questions par un organisme catholique (Lifesite) a quelque peu édulcoré l'affaire, indique que l'enquête a été lancée dans la mesure où chaque plainte d'étudiants est a priori prise au sérieux. Il a précisé que le titre du cours ne suffirait pas à faire retirer l'agrément mais que son contenu serait passé au crible pour juger de sa conformité avec les « critères de diversité » inclus dans les conditions d'agrément : il faut et il suffit d'« enseigner le respect pour les personnes homosexuelles et des contenus à propos des styles de vie homosexuelle », a-t-il précisé. Bref, on ne peut qu'approuver l'homosexualité.

De son côté, l'université a fait cette déclaration : « Nous comprenons que certains, ne comprenant pas le terme (déviant) ni son contexte, puissent se sentir offensés par cette description, et celle-ci est en cours d'évaluation. Cependant, changer les définitions sociologiques standardisées est au-delà du champ de notre travail. Comme l'est tout autant le fait de changer les enseignements de l'Église catholique. » Il semble bien qu'on veuille empêcher l'Église catholique de dire ce qu'elle a toujours dit sur le comportement homosexuel.




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