vendredi 5 mars 2010

Les écoles hors contrat françaises peuvent choisir leur programme et leur pédagogie

Les écoles indépendantes ou hors contrat en France sont entièrement libres d'élaborer leurs propres programmes et pédagogie. Elles peuvent donc choisir leurs manuels et leurs horaires. En pratique, afin de préparer les élèves qui les fréquentent à l'examen du baccalauréat national, les écoles indépendantes se conforment le plus souvent au programme de l'Éducation nationale les deux dernières années du secondaire français (le cégep québécois).

Pour ce qui est du contenu des connaissances et savoirs à faire acquérir aux élèves, ces écoles n'ont qu'une seule obligation légale : que leurs élèves aient, au terme de la période soumise à l'obligation scolaire, le niveau scolaire défini par le décret N° 99-224 du 23 mars 1999 relatif au contenu des connaissances requis des enfants instruits dans la famille ou dans les établissements d'enseignement privés hors contrat. Il s'agit là d'un court texte de bon sens que ces écoles libres respectent sans difficulté.



École primaire indépendante Charles de Foucauld à Saint-Maur


Groupe scolaire Saint-Dominique


Les écoles indépendantes françaises alimentent-elles un communautarisme qui pourrait nuire à l’unité et à la concorde nationales ?


À cette question, Jean-Noël Dumont, professeur de philosophie, directeur du Collège Supérieur de Lyon et administrateur de la Fondation pour l’école, répond que l'on distingue classiquement la société, qui repose sur la loi et un fondement contractuel, et la communauté, qui repose sur la coutume et un fondement « sacré » ou, au moins, antérieur aux volontés particulières. Ainsi l'État a-t-il les caractères d'une société, la nation ceux d'une communauté.

Les écoles indépendantes reposent donc pour M. Dumont sur l’idée qu'on ne peut éduquer que dans une communauté, c'est-à-dire dans la transmission cohérente de valeurs, dans une identité symbolique forte. On sait assez que des consignes contradictoires, que la mésentente des adultes, contribuent à la détresse des enfants. À l'idée de communauté, on oppose celle de république.

« L'école républicaine » est censée être le creuset qui permet l'identité nationale. Or il faut remarquer qu'à ses grandes heures, que l'on ne cesse de rappeler avec nostalgie, l'école que l'on dit républicaine s'appuyait sur un sentiment national fort, autrement dit des valeurs cohérentes et des appartenances symboliques fortes. Le professeur Dumont rappelle que Péguy évoquait en une page fameuse les « hussards noirs de la République » qu'étaient ses instituteurs. Or, précise-t-il, ces instituteurs qui bouffaient du curé lui donnaient pourtant l'impression de dire la même chose que les curés. Ils étaient d'ailleurs souvent des protestants français. Même si les discours différaient, une seule voix se faisait entendre dans une seule langue. Cette école était nationale, et même nationaliste, plus que républicaine.

Qu'en est-il à présent ?

Selon le directeur Dumont, l'école républicaine semble bien impuissante à être un creuset. Loin d'offrir une vision du monde cohérente, elle est le miroir des doutes et des désaccords.Comment éduquer dans un tel brouhaha ?

Les communautés éducatives constituées par les écoles indépendantes feraient-elles alors de mauvais citoyens ?

Pour le philosophe Dumont, on peut au contraire penser que c'est à travers une communauté que se forge un sens du bien commun. N'est-ce pas déjà le cas dans les familles ? Il est vrai que certains régimes totalitaires ou révolutionnaires ont vu dans les familles des communautés dangereusement indépendantes qu'il fallait dissoudre pour une plus grande unité de l'État... Un enfant qui apprend au sein d'une communauté le sens du service, de la responsabilité et du partage, peut bien hausser ces dispositions vers la cité. Ainsi la communauté est-elle le chemin de l'intégration, car fera-t-on une société avec des individus sans appartenances ? La famille et l'école ne peuvent remplir leur mission que si elles sont paisiblement des communautés. Cette mission est bien celle d'y apprendre la participation au bien commun. Au lieu de dénoncer les communautés, chrétiennes dans le cas des écoles de la Fondation pour l’école, et de les enfermer dans la désapprobation, un État avisé ferait mieux, selon le professeur Dumont, en reconnaissant leurs services, ce qui, en retour, leur permet de ne pas se vivre comme fermées sur elles-mêmes. Car il est clair que les communautés éducatives ne doivent pas se penser comme un refuge identitaire. Pour le philosophe, elles ont pour mission de conduire les enfants hors de la communauté vers la société, ce qui permettra aussi à cette société de ne pas être une société anonyme.






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5 commentaires:

Alejandro a dit…

Donc totale liberté. Très intéressant...

Anonyme a dit…

Sait-on si ces écoles sans contrat sont subventionnées par le gouvernement français. Je serais porté à penser que non.

Quelqu'un connaît-il la réponse?

Pour une école libre a dit…

Ces écoles ne sont pas subventionnées.

Mais au Québec, même les écoles non subventionnées doivent appliquer le régime pédagogique (penser cours d'histoire et éthique et culture religieuse tous les deux très idéologiques).

Se rappeler de l'appréciation de compétence "L'élève situe-t-il sa conscience citoyenne dans un contexte planétaire ?" en *histoire* (et éducation à la citoyeneté) unique au Québec et en théorie appliquée dans toutes les écoles.

Jonathan a dit…

Est-ce que ces écoles hors contrat existent depuis longtemps en France?

C'est renversant de constater qu'au pays du jacobinisme, la France laïque, républicaine et indivisible, des écoles comme celle là peuvent opérer en toute liberté alors qu'au Québec elles seraient illégales et condamnées par les médias, les politiciens et une bonne partie de la population. Cela en dit long sur le Québec.

Pour une école libre a dit…

Jonathan,

En boutade, on pourrait vous répondre que ces écoles existent depuis la nuit des temps, c'est le mode normal de fonctionnement avant la mainmise de l'État sur les écoles et les revenus des parents pour ce faire.

Résumé de Wikipédia :

Jusqu'au début du XIXe siècle, la liberté d'enseignement était totale.

La question de la liberté d'enseignement en France naît en 1806, lorsque Napoléon Ier instaure un monopole de l'Université d'État sur l'enseignement. Les écoles sont conçues comme des casernes, les enseignants devant tous enseigner la même chose au même moment partout en France.

Jusqu'à la fin du XXe siècle, elle est l'objet de vifs débats entre les tenants du monopole de l'enseignement public et les défenseurs de la liberté de choix des parents et de leurs enfants, qui considèrent la liberté d'enseignement comme une conséquence naturelle des libertés de conscience, d'expression et d'association.

# 10 mai 1806 : loi de création de l'Université napoléonienne ;
# 17 mars 1808 : décret définissant le monopole de l'Université sur l'enseignement primaire, secondaire et supérieur ;
# 28 mars 1833 : loi Guizot, instaurant la liberté de l'enseignement primaireé

En 1905, la « République» expulsera la plupart des religieux éducateurs, des milliers d'instituteurs et de maîtres. Charles de Gaulle, par exemple, suivra ses maîtres jésuites en Belgique où ils s'étaient réfugiés pour finir ses classes préparatoires (après le bas, le cégep, avant l'université).

Après la guerre 1914-1918, ayant reconnu la valeur des religieux au front et l'utilité de la religion, on assistera a un regain de liberté pour les écoles confessionnelles en France.