jeudi 7 janvier 2010

Afrique du Sud – Pour la sixième année de suite, le taux de réussite aux examens de fin d'études secondaires diminue

Le taux de réussite des écoles publiques sud-africaines aux examens couronnant les études secondaires a chuté pour une sixième année consécutive malgré une forte augmentation des dépenses gouvernementales dans le secteur éducatif. Cette faible diplomation condamne des millions de jeunes au chômage, cause principale selon certains experts de la criminalité endémique qui sévit en Afrique du Sud. Les examens se tiennent en décembre mois qui marque la fin de l’année scolaire sud-africaine.

La ministre de l’Éducation de base, Angie Motshekga (à gauche), a déclaré lors d'une conférence de presse à Prétoria ce jeudi que le taux de réussite des étudiants en dernière année dans les écoles publiques est passé de 62,5 pour cent en 2008 à 60,6 pour cent en 2009.

Contrairement au baccalauréat français, le diplôme de fin d’études secondaires (« National Senior Certificate ») ne permet pas automatiquement de s’inscrire à une université. Pour ce faire, l’étudiant doit satisfaire certaines conditions supplémentaires : une moyenne de note plus élevée aux mêmes examens ainsi qu’un choix de sujets considérés plus difficiles.

L’Afrique du Sud a plus que quadruplé les dépenses en éducation depuis les premières élections multiraciales tenues en 1994. Cette forte augmentation ne s’est cependant pas traduite par de meilleurs résultats. On attribue habituellement ces échecs à la mauvaise formation des enseignants, à une réforme scolaire qui a augmenté la charge administrative imposée aux enseignants et à une culture rurale qui ne privilégie pas l’étude scolaire.

Les politiques de discrimination positive en faveur des Noirs menées par le gouvernement ANC depuis 16 ans privent également l’Afrique du Sud d’enseignants qualifiés. C’est ainsi que le quotidien Beeld avait signalé en août de l'année passée que plusieurs dizaines de milliers de postes d’enseignants et de directeurs d'école sont à pourvoir dans les écoles publiques sud-africaines. Ils ne sont pas comblés, car l’Administration n’en fait pas la publicité ou quand des professeurs blancs qualifiés y postulent on rejette systématiquement leur candidature. Le grand nombre de postes à pourvoir s’explique en partie par l’épidémie de SIDA qui fauchait déjà 55 enseignantes par mois en 2000. L'épidémie de SIDA touche principalement les éducatrices noires.


Élèves de l'école secondaire Ian Mackenzie à Lilydale, dans un ancien bantoustan, en 2005

Devant une assemblée de 1500 enseignants en août dernier, le nouveau président Jacob Zuma s’est également insurgé contre le fait que les enseignants noirs enseignent moins de temps que les blancs : « les enseignants dans les écoles précédemment blanches donnent cours pendant 6,5 heures par jour, alors que les professeurs noirs dans les écoles précédemment désavantagées [à savoir dans les bantoustans ou les ghettos noirs] ne donnent en moyenne que 3,5 heures de cours par jour. »

La baisse du taux de réussite aggrave la pénurie de travailleurs qualifiés noirs dans un pays où un manque d'ingénieurs, de techniciens et autre personnel qualifié a obligé des entreprises comme Sasol, le plus grand producteur mondial de carburant à partir de charbon, à embaucher des travailleurs à l'étranger. La forte diplomation des blancs ne permettra pas de résoudre la crise actuelle puisque les politiques de discriminations politiques leur ferment souvent les portes des entreprises et les forcent à l’exil. Ces politiques ne sont pas sans conséquence sur l’économie sud-africaine. Les nombreuses coupures générales d’électricité de 2008 ont révélé la pénurie aiguë de techniciens que connaît le producteur d’électricité national, Escom. Cette pénurie est en grande partie le résultat de politiques discriminatoires comme le rappelle R. W. Johnson dans son livre South Africa’s Brave New World (pp. 479-480) : « [Escom] devra recruter deux nouveaux employés qualifiés par jour pour les cinq prochaines années. Au minimum la moitié de ceux-ci devront être des femmes noires afin d’atteindre ses objectifs de 65 % de cadres noirs et de 40 % de personnel noir en 2010, malgré la quasi-inexistence de femmes noires ingénieures. »

Ce faible taux de diplomation ne pourra que faire grossir les rangs des chômeurs sud-africains. Le chômage officiel sud-africain atteint le taux de 24,5 pour cent. Le manque de personnel qualifié entrave également les efforts du gouvernement pour stimuler une économie dont le PNB s'est contracté d'environ 1,9 pour cent en 2009.


Élèves d'une école « blanche » de Prétoria en 1986 (il y a bien un élève noir même si techniquement l'apartheid est toujours en vigueur)


Échouer en physique

Le nombre d’élèves dont la note en physique a été égale ou supérieure à 30 % est passé de 54,9 pour cent en 2008 à 30 % cette année a déclaré le Ministère de l’Éducation de base dans un rapport. Le taux de passage en mathématiques est resté stable à 46 %. Toutefois, de nombreux journaux rapportent des résultats bruts désastreux en mathématiques qui ont dû être pondérés à la hausse. Le professeur John Volmink, président du conseil qui standardise les résultats finaux, a toutefois précisé que les notes n’ont pas été ajustées à la hausse par plus de 10 %. Aussi étrange que cela puisse paraître aux yeux des étrangers, il suffit d'obtenir 30 % pour passer de nombreux sujets, c'est le cas en mathématiques (pour plus de détails sur les critères de réussite, voir ici).

Seuls 20 % des finissants peuvent s’inscrire à l’université

551 940 élèves de 12e année ont présenté les examens finaux du secondaire. Seuls 19,8 percent de ceux-ci ont obtenu des notes suffisamment élevées pour s’inscrire à l’université ou à un collège postsecondaire. Il s’agit d’une légère amélioration par rapport au 19,4 % de 2008.

1 sur 40

Selon un rapport publié l’année passée par la Banque de développement d’Afrique australe, seul un élève sur 40 qui a commencé l’école en 1995 (après la fin de l’apartheid) a réussi l’examen final de mathématiques supérieures qui permet l’entrée dans les écoles d’ingénieurs et les professions techniques. Les examens de mathématiques « normales » ou de « culture mathématique » considérés plus faciles ne permettent pas l’inscription dans ces facultés. Réussir l’examen de mathématiques supérieures (avoir plus de 30 %) ne garantit pas de pouvoir s’inscrire dans certaines facultés, c’est ainsi que les facultés de commerce exigent souvent une note minimale de C+ (65 %). En 2007, seuls 700 étudiants noirs avaient obtenu un C+ ou davatange en mathématiques supérieures.

Augmentation soutenue des budgets dans les années à venir

Le ministre des Finances, Pravin Gordhan a prévu d'affecter 144 milliards de rands (20 milliards de $) à l’éducation, soit 17 % du budget. Il prévoit augmenter cette somme de 8,6 % en moyenne par an pendant les trois prochaines années fiscales conformément aux vœux de Jacob Zuma, président de l’Afrique du Sud depuis mai 2009 et lui-même démuni de tout diplôme scolaire, qui a fait de l’éducation une de ses priorités.

« Près de 3 millions de jeunes âgés de 18 à 24 ne suivent aucune formation ni ne travaillent, il ne s’agit pas seulement d’un gâchis de talent, mais également d’une cause potentielle de troubles sociaux graves » a déclaré dans un rapport sur le sujet le Center for Higher Education basé au Cap.

L’augmentation des dépenses en éducation n'a pas réduit substantiellement le taux d’analphabétisme. L’Afrique du Sud s'est classée au dernier rang dans un classement regroupant 40 pays, derrière le Maroc et le Koweït. Ce classement a été publié en 2007 dans le cadre du Programme international de recherche en lecture scolaire (PIRLS:2006). Cette étude vise à établir les compétences de lecture des élèves de 10 et 11 ans quand ils sont confrontés à des textes littéraires et informatifs authentiques.

On retrouvera ci-dessous le classement complet du PIRLS.

Pays Note moyenne
Russie (Fédération de) 565
Hong-Kong 564
Canada, Alberta 560
Singapour 558
Canada, Colombie-Britannique 558
Luxembourg 557
Canada, Ontario 555
Italie 551
Hongrie 551
Suède 549
Allemagne 548
Pays-Bas 547
Belgique (Flandre) 547
Bulgarie 547
Danemark 546
Canada, Nouvelle-Écosse 542
Lettonie 541
États-Unis d’Amérique 540
Angleterre 539
Autriche 538
Lituanie 537
Taïwan 535
Canada, Québec 533
Nouvelle-Zélande 532
Slovaquie 531
Écosse 527
France 522
Slovénie 522
Pologne 519
Espagne 513
Israël 512
Islande 511
Moyenne de l’échelle du PIRLS 500
Moldavie 500
Belgique (francophone) 500
Norvège 498
Roumanie 489
Géorgie 471
Macédoine (république de) 442
Trinité et Tobago 436
Iran 421
Indonésie 405
Qatar 353
Koweït 330
Maroc 323
Afrique du Sud 302


Exemple de texte du PIRLS 2001 : La nature et le questionnaire correspondant.

Plus d'info sur PIRLS 2006 ici.



Sources supplémentaires Bloomberg et News 24.

10 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est la faute de l'apartheid (même si des enfants noirs étaient parfois dans des écoles blanches en 1986).

C'est la faute de l'apartheid pendant encore plusieurs siècles, pour tout.

Loulouanthropo a dit…

Ce pays s'enfonce malgré sa richesse, ses superbes infrastructures. La discrimination positive le tue. Un cinquième des blancs, surtout les jeunes, est parti.

Diberville a dit…

Truc aussi bizarre en Afrique du Sud comme l'apprend le lien : on réussit ses examens avec 30 %...

D'où des caricatures du type

http://www.wonkie.com/comics/2009-01-14_07-Clueless-Pandor.png

temps a dit…

Heureusement que les titres sont souvent illusoire et que c'est la pratique qui forme. Ainsi peut importe les mesures d'échelles à la soumission, si au moment utile le docteur fait le bon geste et que le mécanicien utilise le bon outil.
Cordialement

Anonyme a dit…

Pour avoir connue l'AFS, en 1997, je peux vous dire que seul les aveugles croyaient à la nation arc en ciel.La prise de pouvoir de noirs c'est traduit, immédiatement par la corruption et l'abus de pouvoir, démultipliés. Il suffisait de voire "les nouveaux maîtres" à l'oeuvre dans la vie courrante pour savoir que ce pays était foutu.Et, à cause de qui??? Que ceux qui ont voulu,les changements en AFS, aillent y vivre maintenant pour étayer leurs croyances.

Anonyme a dit…

Il faudrait peut-être se rappeler que les débuts d'un nouveau régime se passent souvent dans une certaine désorganisation. René Lévesque, dans ses mémoires, raconte qu'après sa démission il s'était mis à lire des ouvrages historiques sur les États-Unis et il se disait frappé de la pagaille intérieure qui suivit leur accession à l'indépendance après la fin de la guerre avec les Britanniques, transition cahoteuse que rapportent les chroniques de l'époque et que des historiens américains ne dissimulent pas.

Chris K a dit…

À anonyme qui excuse :

Il n'y a pas eu de guerre en Afrique du Sud, enfin rien que ressemblât la guerre d'indépendance des États-Unis.

C'est quoi le début, en fait l'apartheid a disparu il y a 20 ans (il y a eu 4 ans de gouvernement de transition justement pour éviter une passation cahoteuse).

Anonyme a dit…

Ouain, bon, la lutte contre l'apartheid c'était pas une guerre d'indépendance, euh... "La vache était pas brune, elle était grise!" Hum...

Bokkie Duplessis a dit…

Anonyme-la-mauvaise-foi,

Vous faites semblant de ne pas comprendre ?

Il y a eu moins de morts pendant la lutte contre l'apartheid que pendant les années post-apartheid, pauvre idiot. Aucun rapport avec une guerre civile ou la Guerre d'indépendance des États-Unis en terme de DESTRUCTION des infrastructures ? Vous ne comprenez donc pas ?

On ne peut dire que les noirs, 20 ans après la fin de l'apartheid voient leur niveau scolaire DIMINUER à cause de la destruction de l'infrastructure sous l'apartheid : le gouvernement blanc construisait à tire-larigot des écoles ! Vous connaissez les chiffres, la croissance de l'alphabétisme pendant les années 60-90 en Afrique du Sud ?

Alors avant de ressortir vos clichés éculés de petit gauchiste je-sais-tout-j-ai-écouté Radio-canada, renseignez-vous et sortez les statistiques !

Êtes-vous jamais en Afrique, courageux Anonyme ?

C'est vous le prof bêtement pro-ECR? ça ne m'étonnerait pas : vous êtes donneur de leçons politiquement correctes infondées, épandeurs de stéréotypes bien pensants, une disciple du prêt à penser et de la bouillie pour chats. Je ne supporte plus ce genre de personnages, d'autant plus quand ils peuvent dévoyer mes enfants.

Willem a dit…

à voir Matric results :



http://beta.mnet.co.za/carteblanche/Article.aspx?Id=4510&ShowId=1

(et la partie suivante)


à lire :

(racial Quotas at SA universities)

http://beta.mnet.co.za/carteblanche/Article.aspx?Id=4514&ShowId=1