mercredi 22 juillet 2009

Russie — Retour de l’enseignement religieux dans les écoles


Le président Dmitri Medvedev a mis un point final au débat fleuve concernant l'enseignement de la culture religieuse dans les écoles et le retour des aumôniers dans l'armée, note mercredi le quotidien Kommersant.

Quelques régions russes avaient introduit il y a trois ans des classes obligatoires en culture orthodoxe. Cette mesure avait causé un grand émoi chez les adeptes d'autres confessions et les athées qui déclaraient que la religion n'avait pas sa place dans des écoles laïques. Ce programme avait soulevé de vives critiques, d'aucuns y voyant un parallèle avec l'étude obligatoire du communisme ou de l'athéisme scientifique de l'ère soviétique, une idéologie obligatoire remplaçant l'autre.

Au cours d'une réunion tenue dans sa résidence de Barvikha (région de Moscou), le chef de l'État a soutenu ces deux idées. Il n'est cependant pas prévu d'imposer l'enseignement religieux, les écoliers athées pourront étudier « l'éthique laïque ».

En ouvrant la réunion, Dmitri Medvedev a fait savoir qu'il avait « décidé de soutenir l'idée d'enseigner dans les écoles russes des éléments de la culture religieuse et de l'éthique laïque . Il a également jugé utile de déployer dans les forces armées des aumôniers représentant les confessions traditionnelles russes. Le président a qualifié d'« expérience » l'introduction de disciplines religieuses dans les écoles (à partir du 1er septembre 2009). L'expérience sera organisée pendant trois ans dans 18 régions. Ces dix-huit régions regroupent près de 12 000 écoles.

Le Patriarche de Moscou et de Toutes les Russies Cyrille a souligné le principe de volontariat qui est à la base de l'étude de la culture religieuse. Le grand rabbin de Russie Berl Lazar s'est dit surtout préoccupé par « les problèmes de la xénophobie et de l'extrémisme », qui devraient selon lui être réglés en inoculant aux enfants une bonne compréhension de la culture religieuse. Selon lui, la variante optimale consisterait à apprendre aux écoliers les cultures de différentes confessions.

C'est qu'en effet, contrairement au Québec, il ne s'agit pas d'imposer un seul enseignement multireligieux à tous, mais d'offrir la possibilité de choisir un enseignement distinct pour ce que la Russie appelle ses religions traditionnelles. Il y aura donc des cours séparés d'enseignement religieux orthodoxe russe, islamique, bouddhiste et judaïque.Un enseignement sur le catholicisme ou le protestantisme n’est pas prévu. Rappelons que l'Église orthodoxe accuse les catholiques et les protestants de « prosélytisme ».

Une alternative aux quatre religions serait une branche sur l’histoire et la culture des religions mondiales, ainsi qu’un enseignement éthique, a précisé M. Medvedev. Il y aurait donc six options différentes. Ces branches seront enseignées par les maîtresses et maîtres d’école de l’État. Si les essais sont concluants, le projet sera étendu à l’ensemble des écoles du pays, a annoncé le président russe.

Le chef de la fraction du parti LDPR (libéral-démocrates) à la Diète d'État (chambre basse du parlement russe) Igor Lebedev a qualifié « d'absolument justes » les initiatives du président Medvedev. Le parti proprésidentiel Russie unie n'a pas encore réagi à cette décision, mais il est réputé pour ses liens étroits avec l'Église orthodoxe russe.

Le premier vice-président du Parti communiste Ivan Melnikov craint que les popes n'évincent les vrais enseignants des écoles. « Or, nous nous opposons à l'ingérence des institutions ecclésiastiques dans l'activité des institutions laïques », souligne M. Melnikov. Les tentatives d'ingérence sont entreprises depuis les années 1990, et toujours à l'initiative du pouvoir, a pour sa part déclaré Sergueï Ivanenko, membre du parti Iabloko, qui estime que le pouvoir cherche à obtenir ainsi un contrôle supplémentaire sur les citoyens par le biais de l'Église.

Le patriarche Cyrille, chef de l'Église orthodoxe russe, a félicité le président Medvedev pour son projet: « Le libre choix [les options en réalité] permet de répondre à toutes les préoccupations souvelevées » a-t-il ajouté.

À l'heure actuelle, il n'existe pas de programme national d'enseignement religieux dans les écoles publiques russes qui sont « laïques », l'enseignement religieux ayant été aboli depuis la Révolution de 1917.

« Je crois qu'il faut souligner l'importance fondamentale du principe » de la séparation de la religion et de l'État, a déclaré M. Medvedev lors de sa rencontre à sa résidence de Barvikha près de Moscou avec des chefs religieux orthodoxes, musulmans, juifs et d'autres religions.

Devinette