samedi 31 janvier 2009

Pour une administration scolaire éthique

Voici une lettre ouverte de Guy Durand, théologien et juriste, spécialisé en éthique, publié dans l'Express du 28 janvier 2009.

       Mesdames et messieurs les commissaires de la commission scolaire Val-des-Cerfs, je m'intéresse depuis des années au dossier de la formation morale et religieuse à l'école. Je suis un citoyen payeur de taxe scolaire. Or je ne comprends vraiment pas votre attitude face aux demandes d'exemption pour le cours Éthique et culture religieuse (ECR).

       Il me semble que vous avez toute la latitude voulue pour admettre ces exceptions. Vous avez été élus par la population. Vous existez en partie grâce à nos taxes. Vous avez l'autonomie et la responsabilité nécessaires pour admettre des exceptions aux règles ministérielles. Vous n'êtes pas une officine du Gouvernement, que je sache. Si c'était le cas, ne serait-ce pas plus simple de changer les commissions scolaires par des bureaux régionaux du Ministère ?

       Les parents invoquent la liberté de conscience et de religion, leurs droit et responsabilité vis-à-vis l'éducation de leurs enfants. N'est-ce pas assez fondamental ? En quoi pouvez-vous objecter que le cours est « neutre », qu'il n'est pas menaçant, que les parents ont tort, qu'ils ne connaissent pas le contenu du cours, voire que l'Assemblée des évêques du Québec a donné son accord (très mitigé d'ailleurs) ? Même la Cour suprême, quand elle étudie les questions de liberté de conscience et de religion ne cherche pas à savoir si l'opinion d'un demandeur correspond à une religion spécifique, mais se base sur la seule sincérité du demandeur. Celui-ci juge-t-il que telle action ou règle porte atteinte à ses opinions profondes ?

       Dans certains milieux, on semble prêt à faire des « accommodements » pour les tenants de toutes les religions sauf les catholiques. On ne vous demande pas de vous ingérer dans la direction des écoles, mais de faire savoir que vous ne vous opposez pas aux exemptions.

       Actuellement on punit les enfants pour l'action de leurs parents. Ne trouvez-vous pas cela inconvenant sur les plans éthique et juridique ? Sur ces deux plans, d'ailleurs, la justice exige de changer le fardeau de la preuve. Au lieu de demander aux parents de prouver que le cours cause un « préjudice grave » aux enfants, on devrait accorder l'exemption sauf s'il en découle un tort grave pour les enfants ou un « coût excessif » pour l'école.

       Quant à la socialisation des enfants, en quoi le fait d'être retiré de la classe une heure par semaine pour le cours ECR la menace-t-elle ? En quoi l'exception nuit-elle à l'objectif d'une école commune inclusive. C'est plutôt le contraire qui est vrai. À la limite, certains parents pourraient même retirer leurs enfants pour les inscrire à l'école privée. S'ils en ont les moyens, évidemment ! Et voilà la question de justice sociale qui refait surface.

       Qu'attendre de vous, mesdames et messieurs de la Commission scolaire ? Que, après avoir reconsidéré l'ensemble de la question, vous aurez la lucidité et le courage de changer d'attitude et d'accepter des exemptions au cours d'ECR.



Guy Durand, professeur retraité

Dunham

jeudi 29 janvier 2009

Le pasteur et historien Réal Gaudreault sur le cours d'éthique et culture religieuse

France — Des écoliers moins bons en calcul et en français qu'il y a vingt ans

Des chercheurs de la Direction de l’Evaluation et de la Prospective du ministère de l’Education nationale (Depp) viennent de publier sur le site du Café Pédagogique une étude sur les performances des élèves de CM2, à vingt ans d’intervalle (1987-2007). Il en ressort un bilan inquiétant.

«nbsp;Pour une même dictée, le nombre d’erreurs — essentiellement grammaticales —, est passé de 10,7 en 1987 à 14,7 en 2007. Il y a vingt ans, 26 % d’élèves faisaient plus de 15 fautes; aujourd’hui, le pourcentage est de 46 %. »

Le ministère de l’Éducation a réalisé une étude auprès de 2 500 à 4 500 écoliers de CM2 (10-11 ans).

« En lecture, 21 % des élèves se situent, en 2007, au niveau de compétence des 10 % d’enfants les plus faibles de 1987. Le score moyen des élèves en grande difficulté a particulièrement chuté ces dix dernières années. » En lecture, la baisse des performances ne touche pas les enfants des familles aisées, alors qu’en calcul, la baisse concerne « toutes les catégories sociales ».


Le sociologue Gary Caldwell sur le cours d'ECR

Trois vidéos où le sociologue Gary Caldwell s'exprime sur le programme d'éthique et de culture religieuse.









mardi 27 janvier 2009

La Grande Nouérrceurrr : portrait de famille monochrome, rictus, pénurie francocentrique et ânonnements (5 pages)

Il existe une mythologie simpliste de l'histoire québécoise : avant c'était mal et triste, aujourd'hui c'est bien et enfin joyeux. Toutes les statistiques sur l'augmentation des suicides chez les jeunes, du chômage, sur un lent appauvrissement (et l'obligation d'avoir deux salaires dans une famille), sur l'usage plus grand de drogues, du nombre toujours important d'avortements, du nombre croissant de familles décomposées n'y changeront rien.

C'est un article de foi et il faut propager le mythe (fabula propaganda est).

Nous avions déjà vu le traitement caricatural qu'en faisait un cahier de LIDEC (avec erreurs juridique, historique et papale en quelques cases).

Les éditions de la Pensée (rendues célèbres par un animateur radio pour leur parti-pris en faveur de Mme Françoise David) se devaient de contribuer à la propagation du mythe simpliste.

Le cahier-manuel d'ECR de 1re secondaire se penche donc sur les changements sociétaux qui ont suivi l'avènement de la Révolution tranquille.

Dans la colonne de gauche des scènes de vie des années 50, dans la colonne de droite des scènes correspondantes des années 2000.

Or qu'observe-t-on d'emblée ?

Le portrait de famille est monochrome (oui, bien sûr les photos l'étaient souvent, mais la vie l'était-elle ?), tout le monde est sérieux en 1950. Aujourd'hui, tout n'est que couleurs et sourires.

Dans la cour d'école, la religieuse qui surveille arbore un rictus autoritaire. Les enfants auraient encore été en proie à la pénurie de biens culturels et sujets à une culture franco-française peu ouverte sur le monde, alors qu'aujourd'hui règne l'abondance culturelle qui s'ouvre enfin sur une planète mondialisée (et non la standardisation et l'américanisation bien sûr).

Enfin, la classe des années 50 unisexe (quelle horreur !) est dominée par une religieuse qui semble ânonner à forte voix une leçon alors que les élèves sont passives sur leur banc. Rien à voir avec les classes d'aujourd'hui où les jeunes chimistes (à bas la culture classique !) travaillent et découvrent tout seuls par petits groupes et par l'expérience les sciences modernes sous l'œil approbateur d'une ravissante animatrice de classe souriante et bienveillante. Un esprit malveillant remarquant que dans la classe moderne les rôles valorisés sont tenus par des filles : l'animatrice, les deux filles qui manipulent un tube.

Sur le mythe de la Grande Noirceur, lire 
  1. L'exemple du passé québécois à l'orée du XXIe siècle ;
  2. Le mythe de la Grande Noirceur et du Québec sous-développé ;
  3. Étatisme et déclin du Québec ;
  4. Les collèges classiques ;
  5. Étatisme et déclin du Québec ;
  6. La Révolution tranquille: rupture ou tournant ?
Un extrait :
À la veille de la Révolution tranquille, le Québec n'a rien d'une société sous-développée. La moitié des francophones occupent un emploi... dans le secteur des services! Dès 1931, le recensement montre que peu de gens vivaient encore de l'agriculture et que les 2/3 de la main-d'œuvre travaillaient dans le secteur secondaire (manufacturier) ou tertiaire (services). L'industrie manufacturière avait toujours crû ici au même rythme qu'en Ontario, et ce depuis la Confédération. Durant tout le 20e siècle, la proportion de travailleurs québécois oeuvrant dans le secteur industriel est comparable aux proportions observées aux États-Unis et dans plusieurs pays européens.

On ne constate pas non plus de retard d'urbanisation dans la province. La migration vers les villes se fait à un rythme régulier depuis la fin du XIXe siècle. Le Québec affiche même un taux d'urbanisation supérieur à celui l'Ontario de 1900 jusqu'à la 2e Guerre mondiale, et allait se maintenir au-dessus de la moyenne canadienne par la suite (pour un seuil d'urbanisation de 10 000 habitants).

[...]

Il semblerait donc que les francophones du Québec n'ont jamais eu la mentalité des «nés pour un petit pain», et pour cause. En 1953, le Québec affichait le deuxième revenu par habitant le plus élevé au monde après les États-Unis (en excluant le reste du Canada). Avait-on réellement besoin de la Révolution tranquille et de l'intervention de l'État pour sortir les Québécois de cette prétendue «Grande Noirceur»? Absolument pas! Les Québécois s'étaient développés et modernisés par eux-mêmes, et depuis longtemps, sans l'aide de l'État.

Page 56 — cahier-manuel d'éthique et de culture religieuse Entretiens II pour la 1re  secondaire des éditions La Pensée



Page 57 — cahier-manuel d'éthique et de culture religieuse Entretiens II pour la 1re  secondaire des éditions La Pensée



Page 58 — cahier-manuel d'éthique et de culture religieuse Entretiens II pour la 1re  secondaire des éditions La Pensée



Page 59 — cahier-manuel d'éthique et de culture religieuse Entretiens II pour la 1re  secondaire des éditions La Pensée



Page 60 — cahier-manuel d'éthique et de culture religieuse Entretiens II pour la 1re  secondaire des éditions La Pensée



lundi 26 janvier 2009

Opération radio « Arrachez Françoise David de votre cahier d'ECR »

Le populaire animateur radiophonique de Québec, Sylvain Bouchard, a lancé un concours provincial demandant aux étudiants de secondaire IV de déchirer une page (198) d’un cahier d'éthique et culture religieuse, publié par les éditions La Pensée, et de lui faire parvenir cette page. La station procèdera à un tirage pour déterminer le gagnant du prix de ce concours : un jeu Guitar Hero (pour station Wii). Le concours se termine cette semaine.

« N'acceptez pas le "brainwashage" socialiste de vos profs syndiqués en faveur d'un parti qui s'appelle Québec solidaire » lance Sylvain Bouchard. « Dans un cours où on se vante de mettre toutes les sorcières, les sectes et les chamans sur un même pied d'égalité, quand vient le temps de parler de politique, les masques tombent. Les profs gauchistes syndicalistes du Québec s'affichent », ajoute-t-il.

Écoutez l'émission




Françoise David dit merci aux éditions de la pensée

(page 198, du cahier d'éthique et de culture religieuse, Dialogue II, publié par les éditions La Pensée, 2008)


Sylvain Bouchard dit s'inspirer du professeur Keating du Cercle des poètes disparus qui demande à ses élèves d'arracher les pages d'introduction de leur manuel de poésie.



Rappelons que, dans un chapitre de vingt-huit pages (28) consacré au « féminisme : un autre regard sur la justice », trois pages sont consacrées à Mme François David, chef du parti bicéphale Québec Solidaire. À titre de comparaison, le même cahier ne consacre que douze pages (12) au christianisme dans un chapitre intitulé « Colloque des savoirs en histoire et en religion ». Le même chapitre consacre 8 pages au judaïsme, 7 à l'islam, 8 à l'hindouisme, 7 au bouddhisme et 5 à l'athéisme. À peine moins de pages consacrées au féminisme qu'aux religions dans un manuel d'éthique et de culture religieuse.

Yvon Landry dans les colonnes de la Voix de l'Est dénonçait cette publicité gratuite en ces termes :
Sur le féminisme, il y a une superbe photo en médaillon de Françoise David que les auteures décrivent comme étant sans doute l'une des féministes aujourd'hui les plus connues au Québec. Mme David souhaite maintenant faire progresser sa version de justice sociale par le biais de la politique. Ce paragraphe vaut une publicité d'un million de dollars pour le parti Québec solidaire dont Mme David est la représentante.
Québec Solidaire a envoyé un seul député à l'Assemblée nationale et Mme David est le seul personnage politique québécois à bénéficier de ce type de publicité dans ce cahier-manuel.



Addendum de ce vendredi 30 janvier

Le Devoir nous apprend que Françoise David a envoyé une lettre à la direction de la station de radio pour demander que ce concours prenne fin, faute de quoi elle prendrait d'autres mesures. Elle a aussi qualifié les propos de Sylvain Bouchard de diffamatoires. Ce concours n'était prévu, dès son lancement, que pour une semaine.

On apprend par ailleurs que le concours est maintenant terminé. Mme David regrette qu'un prix — un jeu Guitar Hero — ait été attribué comme prévu.

Mme David discutera lundi de suites à donner à cette affaire avec des avocats et d'autres dirigeants de Québec solidaire. Elle n'exclut pas d'exiger des excuses publiques.

Le directeur des programmes du 93,3, Michel Lorrain, a indiqué que la station allait évaluer ce qui avait été dit et fait dans les derniers jours, et qu'elle prendrait par la suite les mesures appropriées si nécessaire. Toutefois M. Lorrain ne voit pas en quoi des excuses sont nécessaires. Il ne croit pas qu'il y a eu diffamation.

Il n'est pas clair à ce stade si la radio portera plainte contre Le Devoir qui la qualifiait de « radio-poubelle ».


Dans le rayon on serre les rangs, réaction prévisible de deux syndicats qui ne parlent pas du traitement singulier préférentiel réservé à Mme David et au féminisme dans ce cahier, mais évoquent ce « triste rappel des pires réflexes de l'extrême droite à un temps où on incitait les citoyens à s'élever contre d'autres ». Les deux syndicats se muent en partisans de l'ordre qui dénoncent « la dégradation du matériel scolaire ». Rappelons qu'il s'agit d'un cahier d'exercices d'ECR aux feuilles détachables et que de l'espace est y prévu pour les réponses de l'élève. Ce cahier d'activités ne sert donc normalement qu'une fois.

Communiqué similaire d'un véritable répertoire des associations féministes québécoises (subventionnées ?) : Fédération des femmes du Québec; Afeas; Condition féminine de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec; Comité national de condition féminine de la Confédération des syndicats nationaux; Comité de la condition des femmes de la Centrale des syndicats du Québec; Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail; Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec; Fédération de ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté du Québec; Fédération du Québec pour le planning des naissances; L'R des centres de femmes du Québec; Regroupement Naissance-Renaissance; Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale; Relais femmes; Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec; Réseau québécois d'action pour la santé des femmes; Secteur de l'action féministe de l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux.

Addendum du samedi 31 janvier

Le directeur de la station 93,3 FM de Québec a invité Mme David à débattre du sujet sur son antenne. Mme David a refusé cette invitation.

L'animateur Sylvain Bouchard a confié au Soleil qu'il n'avait pas l'intention de s'excuser, tout comme le directeur des programmes de la station, Michel Lorrain. « On dit que j'ai fait de la diffamation, et bien je vous dirais que depuis le début de la journée, c'est moi qui suis victime de diffamation. On dit que je fais de la radio poubelle, et pourtant, je n'ai pas insulté Mme David. Pour moi, Québec solidaire, c'est l'extrême-gauche, alors je ne comprends pas ce qu'il y a de mal à la comparer à une Soviétique. Et sachez que j'aurais eu le même discours sur le cahier d'exercices si on y avait parlé de Mario Dumont. »

Joint à son domicile par le Soleil, le gagnant du concours, Sébastien Ruel, dit avoir participé au concours « premièrement pour le prix ». « Je suis en train de jouer [à mon nouveau jeu de Guitar Hero] présentement. » « Mais je dois dire que les professeurs tentent parfois de véhiculer des messages politiques dans mes cours et je n'aime pas ça », a-t-il ajouté pour expliquer sa participation au concours.

Suite le 2 février : Sylvain Bouchard dit avoir reçu des menaces de mort, Françoise David portera plainte au CRTC

Le dossier Françoise David dans les manuels d'Éthique et culture religueuse

vendredi 23 janvier 2009

Regard romain sur le boycott du cours obligatoire d’éthique et de culture religieuse

L'agence de presse catholique romaine Zenit publie un résumé du boycott qui entoure l'imposition du cours d'éthique et de culture religieuse à tous les petits Québécois.
ROME, Vendredi 23 janvier 2009 (ZENIT.org) — Depuis la mise en place dans les écoles québécoises, à la rentrée 2008, d'un cours d'Etat obligatoire d'« éthique et de culture religieuse », certains parents ont décidé de boycotter le cours. Ils réclament le droit de choisir pour leurs enfants scolarisés « un enseignement moral ou religieux en accord avec leurs croyances et leurs convictions ».

Ce nouveau cours, qui vise à donner aux élèves une ‘connaissance' des croyances et rites de six ou sept religions, avait été dénoncé en octobre 2008 par le cardinal Marc Ouellet, archevêque de Québec et Primat du Canada, comme une orientation « radicale » qu'« aucun pays européen n'a jamais adoptée ».

La réforme

Jusqu'en septembre 2007, les écoles publiques et privées du Québec proposaient encore un enseignement moral et religieux catholique, un enseignement moral et religieux protestant ou un enseignement moral (sans religion), chaque parent faisant le choix d'un de ces trois cours pour leurs enfants au primaire et au secondaire.

La Loi 95 imposant aux écoles publiques et privées un cours d'État obligatoire d'« éthique et de culture religieuse », en vigueur depuis la rentrée de septembre 2008, avait été adoptée en 2005 par le gouvernement de Québec.

Cette loi avait alors modifié l'article 41 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne en abrogeant la partie suivante : « (...) les parents ou les personnes qui en tiennent lieu ont le droit d'exiger que, dans les établissements d'enseignement publics, leurs enfants reçoivent un enseignement religieux ou moral conforme à leurs convictions, dans le cadre de programmes prévus par la loi ».

Pour le gouvernement de Québec, il s'agit, « dans une société marquée par la diversité des croyances », de proposer un enseignement visant à favoriser une société « ouverte et tolérante », à comprendre les « traditions religieuses dont l'influence s'est exercée et s'exerce toujours dans notre société ». Dans la présentation du programme (http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/ecr/), l'État québécois affirme vouloir ainsi signifier « sa volonté de compléter la déconfessionnalisation de tous les éléments du système scolaire public ».

Le boycott des cours

Ainsi, depuis septembre 2008, ce cours d'Ethique et de culture religieuse se propose de faire découvrir aux élèves un ensemble de 6 ou 7 religions et de différentes visions du monde. Il s'agit d'un enseignement obligatoire, dans les écoles publiques comme dans les écoles privées, ces dernières gardant néanmoins la possibilité d'y ajouter des enseignements confessionnels. Cependant, le régime pédagogique ne prévoit pas de temps pour ces cours supplémentaires.

En 2007, un collectif de parents s'est regroupé en Coalition pour la liberté en éducation, qui réclame le droit de choisir pour leurs enfants un enseignement moral ou religieux à l'école en accord avec à leurs croyances et leurs convictions. Ils évoquent le danger que ce cours « banalise la religion en plaçant toutes les religions, spiritualités, mouvements religieux et visions du monde sur un pied d'égalité » et dénoncent le risque de « grande confusion » que cela risque de créer dans la tête de l'enfant. « À la fin de ce cours, on peut prévoir que l'enfant ne connaîtra ni sa propre religion ni celle des autres et qu'il aura une très grande difficulté à démêler l'une de l'autre », ajoutent-ils.

Le risque d'une dictature du relativisme

Les parents dénoncent une dictature du relativisme et notamment un refus de chercher à définir un bien et un mal absolu. Ils justifient leurs craintes par les affirmations contenues dans les manuels eux-mêmes. L'un de ces manuels précise en effet qu'à la suite du cours l'enfant aura peut-être « l'impression que le BIEN et le MAL ABSOLU n'existent pas, mais qu'il y a bien un bien et un mal relatif pour chaque INDIVIDU » (les majuscules sont dans le texte).

En octobre 2008, le cardinal Ouellet avait évoqué dans un article signé dans la revue de l'Université catholique de Milan, Vita e Pensiero, ce cours qui vise à donner aux élèves une « connaissance des croyances et rites de six ou sept religions ». « Je doute que des enseignants vraiment peu préparés à relever ce défi puissent enseigner avec une neutralité totale et de manière critique des notions qui sont encore moins compréhensibles pour eux que leur propre religion ».

« Il faut être très ingénu pour croire que ce miracle d'enseignement culturel des religions produira un nouveau petit Québécois, pluraliste, expert en relations interreligieuses et critique envers toutes les croyances », avait encore dénoncé le cardinal. « Le moins que l'on puisse dire est que la soif de valeurs spirituelles sera bien loin d'être étanchée et qu'une dictature du relativisme risque de rendre encore plus difficile la transmission de notre héritage religieux ».

L'archevêque de Québec avait alors invité à « protéger et entretenir cet héritage religieux fondé sur l'amour qui est une force d'intégration sociale bien plus efficace que la connaissance abstraite de quelques notions superficielles sur six ou sept religions ».

Marine Soreau

Un plaidoyer pro-ÉCR non convaincant

Le théologien Guy Durand publie une lettre ouverte dans la Voix de l'Est au sujet du livre apologétique pro-ECR de Georges Leroux (une version de ce texte a été proposée par le Devoir fortement en faveur du cours ECR et dont Georges Leroux est un des collaborateurs, il n'a pas été publié par le Devoir) :
Le livre contient des idées particulièrement heureuses :

— le regard positif posé sur l'héritage chrétien, qui « imprègne la culture de l'Occident », dont le Québec;

— plus largement, la conception positive des religions, qui ne proposent pas des positions morales sommaires et archaïques, mais « des formes symboliques historiques et actuelles, dont l'interprétation est essentielle à la compréhension de l'identité et de l'expérience contemporaines »;

— la dénonciation d'une conception utilitariste de l'école;

— la critique du relativisme qui conduit au scepticisme.

Le livre contient cependant des éléments problématiques en lien avec ceux du programme d'ÉCR qu'il s'applique à justifier.

1. Affirmant que le programme est le fruit d'un long processus démocratique, le livre ne dit rien sur les ratés de cette histoire.

2. Rien sur la responsabilité et le droit des parents sur l'éducation morale et religieuse de leurs enfants.

3. La laïcité admet d'autres modèles, trop rapidement rejetés par l'auteur sous l'appellation globale de communautarisme (pays scandinaves et Allemagne) et de républicanisme (France). La diversité serait beaucoup plus grande si l'on distinguait, par exemple, la fin (égalité et liberté de conscience) et les moyens (autonomie de l'État et des religions).

4. L'auteur durcit la notion d'école commune, intégrative. En quoi, en effet, la séparation des élèves durant une ou deux heures semaine nuit-elle à cet objectif. Ça se fait déjà pour le choix de plusieurs matières.

5. Comme le programme, l'auteur présente une vision réductrice de la religion, centrée sur la connaissance des rites et symboles mise au service du vivre ensemble, sans insistance sur sa signification ou son apport à la compréhension des grandes questions de l'existence.

6. Le livre assume enfin les aspects anti-pédagogiques du programme, notamment au primaire : lien trop étroit entre morale et religion (quoiqu'il me semble heureux de les mettre à l'intérieur du même groupe de matières); exposition prématurée des jeunes devant autant de conceptions de la vie (six religions); insistance inappropriée sur l'esprit critique à cet âge.

7. À un autre niveau, le livre passe sous silence les difficultés du processus en cours, notamment le manque de préparation des maîtres y compris des formateurs des maîtres.

Conclusion. Malgré la richesse de certaines réflexions, le livre n'arrive pas à convaincre de la justesse du programme d'ÉCR proposé par le Ministère. Peut-être cela tient-il principalement à l'absence de distance entre la réflexion d'ordre philosophique et les applications d'ordre pédagogique. En attendant une révision importante du programme, il est urgent de permettre l'exemption aux élèves (ou parents) qui ne veulent pas suivre le cours. Aux commissions scolaires et aux écoles de prendre leurs responsabilités si le ministère tarde à le faire.

Guy Durand

jeudi 22 janvier 2009

Nouvel informateur catholique : « L’apostasie tranquille, mine de rien ! »

Article tiré du dernier Nouvel informateur catholique.
À l’entrée dans une nouvelle année, l’heure est au bilan. Un examen de conscience — sociétal et ecclésial combiné — est de rigueur. Comment va la foi dans notre société ? La question renvoie à celle que Jésus s’est posée lui-même : « Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » (Lc 18.8). Si le retour du Seigneur était pour aujourd’hui, dans quel état trouverait-il le Québec ? Bien sûr, il rencontrerait des individus encore très croyants. Parlons plutôt de tendance, du courant qui emporte la foule, de l’orientation collective. Et là, force nous est de constater que durant 2008, notre peuple québécois a fait des pas de géant… non sur le chemin du progrès et de l’évolution authentique mais sur celui de la déstructuration sociale et de l’apostasie de la foi. J’exagère ? Ouvrir les yeux grands pour voir où on se dirige peut faire croire à du charriage. La vérité est là, pourtant, aux antipodes des analyses complaisantes du conformisme ambiant. La politique délétère de l’imposition par le gouvernement du cours d’Éthique et culture religieuse dans les écoles est un bon indicateur du marasme à tout point de vue dans lequel s’enfonce notre société, qu’on aime pourtant qualifier de « progressiste » et d’« avant-gardiste ».

Et le fait qu’une poignée de parents seulement — peu publicisés par les médias si ce n’est pour les dévaloriser en associant leur combat à un conservatisme rétrograde — osent résister aux diktats de l’État est symptomatique de l’enlisement social dans lequel nous sommes. Quant au silence de l’opinion publique, il en dit long sur l’apathie de notre peuple face à l’ingénierie sociale de l’État qui prétend arracher, sans vergogne et du même souffle, nos racines profondes et les précieuses valeurs de notre identité collective. Mais l’inégal combat de David contre Goliath ne fait que commencer. Le bras-de-fer imposé par l’intelligentsia gouvernementale peut encore avoir d’imprévisibles conséquences pouvant aller jusqu’à une « persécution tranquille » dans la foulée de la « révolution tranquille ». Déjà, des élèves ont été suspendus en représailles pour leur absence du cours d’ÉCR. L’on va jusqu’à brandir la menace de l’expulsion et de la prise en charge de l’enfant par la DPJ (Protection de la jeunesse) si les parents s’entêtent à retirer leurs enfants du programme. On croirait se retrouver dans une société totalitaire… ou sur le point de l’être. Et presque personne ne s’en scandalise. La plupart des ténors de la place publique font mine de rien. Lors de la dernière élection, on a fait taire, par la stratégie du ridicule qui tue, la seule voix qui a maladroitement critiqué la politique gouvernementale et réclamé un moratoire sur l’implantation forcée du programme. La chose surviendrait à Tombouctou que tout le monde s’indignerait. On se donnerait bonne conscience en dénonçant l’oppression d’outre-frontières au nom de la liberté démocratique. Mais quand c’est chez nous que ça se passe : rien !

C’est, dit-on, un combat « de droite ». Sous-entendu qu’on ne peut l’entériner quand, pour être bien vu et classé parmi les plus intelligents de la planète, on doive forcément se positionner « à gauche ». Au nom de la liberté de conscience, de la démocratie, de la neutralité de l’État, de l’égalité des citoyens devant la loi, des droits et libertés, etc. Incohérences et hypocrisie, s’il en fut ! Où est la démocratie quand le gouvernement s’arroge le droit de modifier, sans consultation publique, la Chartre québécoise des droits et libertés pour l’adapter à son agenda d’hégémonie sur les consciences afin de les plier aux intérêts de l’État ? Où est la tolérance envers toutes les cultures quand on bannit la sienne propre ? Où est la liberté quand on impose un programme scolaire plus que discutable aux parents [et aux enseignants] qui ne sont pas d’accord avec le relativisme philosophique qui le sous-tend ?

Une approche gravement erronée et déterminante qui, sous prétexte d’objectivité, présente le phénomène religieux sous l’angle d’un polythéisme (la croyance en une pluralité de dieux) absolument incompatible avec le monothéisme (la foi en un Dieu unique). Le programme fait ainsi bon accueil à tous les dieux… sauf au vrai Dieu. Certes, on peut reconnaître la bonne intention de l’État de former des citoyens ouverts aux autres cultures dans une société tolérante, respectueuse de toutes les minorités (sauf la minorité contestataire, bien entendu). Mais « l’enfer est pavé de bonnes intentions », comme l’affirmait sainte Thérèse d’Avila (excusez l’emploi du mot « sainte » qui, semble-t-il, pourrait heurter la sensibilité d’une autre culture — voir l’encadré en page 5 du numéro du 18 janvier 2008 : Mouton un jour, mouton toujours ?). On croit créer un climat social positif en invitant le futur citoyen à un super marché des religions pour favoriser sa liberté de choisir.

Il est fort à parier qu’il les rejettera toutes, soit qu’elles se présentent sous la forme de mythes dépassés et souvent risibles d’un point de vue scientifique, soit qu’elles sont trop exigeantes pour l’hédonisme contextuel. Par cette stratégie, on voudrait préparer le lit de l’athéisme et d’un néo-paganisme qu’on ne procéderait pas autrement. Ce n’est pas en faisant un inventaire objectif des rituels et des cultes des diverses religions qu’on parviendra à modeler le citoyen québécois idéal. On devrait plutôt favoriser la croissance de sa propre vie religieuse chrétienne, qui est à la racine de toutes les valeurs de citoyenneté chères à la laïcité. D’autre part, en regard du phénomène religieux, l’objectivité réclame de reconnaître que toutes les religions n’ont pas une égale valeur, même si ce fait entre en conflit avec la prétendue neutralité de l’État. Il y a dans la pensée religieuse de l’humanité une évolution comparable et parallèle au progrès des sciences positives. Sur une échelle comparative, c’est un fait objectivement démontrable que le christianisme se positionne au sommet et à la fine pointe de la démarche spirituelle de l’humanité, comme en témoigne dans tous les domaines les œuvres considérables et universelles qui découlent de la naissance de l’Église, il y a deux mille ans. La clef de cette fécondité provient principalement de ce que la religion du Christ présente un Dieu qui prend l’initiative de se révéler à l’humanité en s’incarnant dans une forme humaine. Ce n’est plus l’homme en quête de la divinité, comme dans le paganisme, mais, à l’inverse, Dieu qui vient à la recherche de l’homme pour le sauver du mal, de la souffrance et de la mort. Cette Révélation ne peut donc pas être présentée sur le même plan que les représentations folkloriques de divinités mythiques créées par l’imaginaire humain sans trahir radicalement son essence-même.

Comme peuple, nous avons eu la chance d’être formés par une religion surnaturelle. Pourquoi faudrait-il y renoncer sous le fallacieux prétexte de s’ouvrir aux mythes et superstitions des autres traditions ? Pour enseigner la tolérance ? Le christianisme n’est-il pas déjà exemplaire en regard du respect, de l’ouverture, de l’accueil du frère humain, quels que soient sa couleur, ses coutumes, sa religion, sa race, son ethnie, ses différences ? Et l’Église n’est-elle pas merveilleusement efficace dans son rôle d’éducatrice du genre humain ? N’est-elle pas la seule institution mondiale à détenir depuis deux millénaires une maîtrise en humanité ? Mais j’entends d’ici le rappel éculé de l’Inquisition.

Ne leur en déplaise, les laïcistes, qui camouflent leur apostasie sous la bonne conscience de l’ouverture aux autres, n’ont aucune leçon à donner à l’Épouse du Christ. Car c’est bien au nom d’une laïcité athée, dans les dernières décennies, que des guerres fratricides ont été enclenchées, des génocides perpétrés et des régimes totalitaires maintenus au prix de millions de vies humaines innocentes dans des goulags de la mort à petit feu, l’oppression des libertés civiles et le viol des consciences. Et ça continue encore de plus bel aujourd’hui !

Du monde à l’Église

L’affligeante cécité de nos élites actuelles, toutefois, n’est pas l’apanage du monde politique. L’aveuglement a aussi gagné nos leaders religieux. Les conséquences en sont d’autant plus dramatiques que c’est la mission de l’Église de jeter un éclairage évangélique sur les véritables enjeux en cours. Quand les pasteurs délaissent ou négligent cette responsabilité, les ténèbres gagnent en puissance dans la société. En entérinant complaisamment et sans trop sourciller le programme d’Éthique et de culture religieuse du gouvernement, notre vénérable assemblée épiscopale se fait hara-kiri. L’Assemblée des évêques catholiques du Québec n’a pas vu que la bureaucratie de l’État vise subrepticement le bâillonnement de l’Église dans le monde éducatif pour amener éventuellement sa disparition dans les nouvelles générations. On tue l’arbre en coupant ses racines. Il ne reste guère d’alternative aux parents qui voient clairs dans la stratégie des fonctionnaires gouvernementaux hostiles à l’Église. Abandonnés à eux-mêmes par leurs pasteurs, ils devront se marginaliser ou se résigner à la descente de notre peuple dans les obscurs dédales et impasses de la déstructuration sociale, de la décadence endémique et, finalement, de l’extinction. Tout de même, on ne devrait pas trop se laisser abattre par la trahison larvée de nos leaders religieux (sauf exception). Le flirt avec l’apostasie explicite de la foi qu’elle constitue résulte d’un mouvement de pensée dissidente qui n’aura pas le dernier mot mais gagne pour l’heure de plus en plus de terrain depuis quelques décennies dans les hautes sphères de notre Église nationale. Précisément depuis que le Concile Vatican II a été interprété par une faction très active et décidée, non comme un renouveau dans le prolongement de la spiritualité millénaire de l’Église mais comme une volte-face, une sorte de « reconversion » à l’esprit du monde. Ainsi, plutôt que d’enraciner l’aggiornamento (l’ouverture) dans la révélation fondamentale du Dieu incarné, certains érudits ont prétendu que le Concile visait non pas l’adaptation mais la conversion de l’Église au monde moderne. Si bien qu’ils en sont venus, en toute logique, à se « garocher » à plat-ventre devant l’idole du monde. Ils ont ainsi inversé les rapports. Ce ne serait plus le rôle de l’Église d’évangéliser le monde mais le monde devrait fournir à l’Église l’éclairage nécessaire à son évolution. La position adoptée par l’AÉCQ en regard de l’imposition comme matière obligatoire du programme d’ÉCR du gouvernement tient de cette vision des choses. L’analyse superficielle qu’en fait son document officiel ne relève pas d’une prise de position évangélique. On ne devrait pas trop s’en surprendre si l’on considère à quelle école appartiennent ses consultants. Ce sont pour la plupart des universitaires déjà vendus aux idées de la laïcité athée. Souvent des catholiques pratiquants, des religieux et des religieuses, des érudits compétents et imbus de savoir. On dit que le poisson commence à pourrir par la tête. Mais voilà un autre abcès qu’il faudra vider à une prochaine.

mercredi 21 janvier 2009

L’État québécois, le carnaval de la décadence et le cours d'éthique et de culture religieuse

Recension intéressante de l'ouvrage de Carl Bergeron, L'État québécois et le carnaval de la décadence, dans l'Action nationale. Quelques extraits centrés sur l'éducation. Les intertitres sont de nous.

« 
Notre État est méconnaissable. La dédramatisation des émeutes de Montréal-Nord, l’instauration insidieuse d’un programme d’Éthique et de culture religieuse ainsi que le zèle pédagogique d’une commission Bouchard-Taylor, voilà quelques exemples récents démontrant la nature subversive des élites trônant au sommet des institutions québécoises.

[...]

Le sourcillement du lecteur à la vue du titre dépourvu de légèreté risque d’être de courte durée, puisque le portrait qu’esquisse l’auteur du Québec contemporain est difficilement réfutable. Dogmatisme socioconstructiviste de l’État en matière d’éducation, étrange uniformité contre-culturelle de l’art, obsession des élites pour la tolérance et la diversité, la longue liste des dérives institutionnelles n’est pas totalement inconnue de ceux qui alourdissent encore leur quotidien d’un rapport intime avec le réel. De cet effondrement en apparence désordonné, l’oeuvre de Bergeron décèle l’étonnant unisson idéologique de l’élite québécoise qui, loin d’être désemparée, s’active à déployer son entreprise«progressiste» à l’aide d’innombrables leviers étatiques.

[...]

Volonté des technocrates d'éduquer le citoyen et ses enfants avec l'argent de ce même contribuable

Ce que l’auteur nomme « techno-progressisme » correspond en partie à cette volonté des élites d’éduquer le citoyen avec les ressources de l’État. Fusion effroyable de l’ambition technicienne et du progressisme utopiste d’ici, l’idéologie est présentée comme la nouvelle doxa étatique québécoise. Langue de bois, chartisme intégral, horreur de la coercition étatique à des fins autres que la sensibilisation, attitude festive, anticatholicisme inné et esprit nomade, voilà les valeurs et réflexes permettant d’accéder aux postes clés.

[...]

Selon l’auteur, ce n’est pas un hasard si les idéologues techno-progressistes se sont attaqués au système scolaire et à la jeunesse. Bergeron décrit ainsi la mutation programmée de ces institutions fondamentales  :
Quand le Ministère de l’Éducation est devenu, en 2005, le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, cela n’était pas un hasard ; c’était l’expression officielle d’une réalité intériorisée depuis longtemps sur le terrain. L’éducation n’est plus que l’éducation, elle est aussi loisir, ce qui se voit par les « méthodes pédagogiques » employées par les nouveaux enseignants, qui ne savent pas tenir une heure sans être ludique ou interactif.
Pas de philosophie, mais le cathéchisme de la « tolérance »

Sur le même sujet, il ajoute brillamment  :
Pour ceux qui ne le savent pas encore, ou qui ne veulent pas le savoir, dans les écoles québécoises on n’apprend moins la langue française que la nécessité de trouver le féminin de « docteur » et de « professeur » ; on n’apprend moins la philosophie que le petit catéchisme de la « tolérance » et du « respect » ; on n’apprend moins à être des adultes qu’à être des citoyens infantocrates.
Mutins de PanurgeLes jeunes formatés, inquisiteurs de nos foyers

Voilà pourquoi, lors des réveillons en famille, il ne vous est plus possible de rire grassement d’un « groupe identitaire » sans subir le regard inquisiteur de votre jeune neveu qui vous accuse, du haut de ses 14 ans, d’être simpliste et borné. Bergeron expose avec une précision inégalée ce formatage idéologique de la jeunesse et des adultes tardant à vieillir. Dans un passage intitulé « Le capital et l’idéologie » , l’auteur démontre que le monde des affaires est loin de former un rempart de pragmatisme contre ce progressisme envahissant.

[...]

La littérature classique, couronne d'épines pour le fonctionnaire nihiliste

La littérature classique, monument gênant aux yeux de l’artiste-fonctionnaire, n’est abordée qu’à des fins pédagogiques, avant d’être ultimement déclassée au profit de substituts plus désirables, telle la littérature jeunesse. Citons une fois de plus Bergeron à ce propos  : « Chaque année, les titres de littérature jeunesse gagnent en légitimité pédagogique et tassent un peu plus ces « textes que personne ne lit et ne veut lire », la littérature, malaise réel que ne savent absolument pas comment combattre nos élites » . Combat, ou plus précisément dit, offensive d’inspiration nihiliste des élites, nous voici au cœur de l’œuvre téméraire de Bergeron.

Le cours d'éthique et de culture religieuse : parachever la conversion au pluralisme normatif

L’esprit québécois, instinctivement prédisposé au salut providentiel, accepte difficilement cette trame tragique, mais malheureusement réelle comme le prouve adroitement l’auteur. Celui-ci nous offre une myriade d’exemples, dont le plus saisissant est sans aucun doute l’avènement du multiculturalisant programme d’Éthique et de culture religieuse piloté par Georges Leroux. En plus d’achever la conversion de l’élève à la religion pluraliste, l’entreprise vise à pulvériser tout réflexe objectiviste que lui auraient transmis accidentellement les derniers vestiges chrétiens de sa civilisation. Car l’œuvre de Leroux n’est pas une modernisation, mais bien une tentative d’endoctrinement, comme le relate ainsi l’auteur  : « Chacune des pages de Leroux semble imprégnée de la crainte de voir un individu s’arracher à la religion pluraliste et de faire son chemin seul, en marge de l’État et de ses surveillants-missionnaires attitrés ». Le peuple peut bien grogner, le Ministère et ses apparatchiks ne le considèrent plus comme légitime. N’y a-t-il pas là une preuve indéniable de la nature subversive de nos élites et de l’État  ? Comment pourrait-on n'y voir qu’un simple dérapage bureaucratique, une machine devenue folle ? Comment une action gouvernementale aussi cohérente pourrait-elle émerger d’un délire généralisé  ? Est-il exagéré de qualifier de totalitaires les pulsions de ces élites, comme le fait Bergeron  ?

[...]

L’œuvre de Bergeron n’est pas simplement originale, elle est d’une originalité vitale. Cet essai, d’une rarissime clairvoyance, démystifie avec élégance les origines de l’affaissement québécois des dernières années et de celles encore à venir. L’État québécois et le carnaval de la décadence est un incontournable pour tout lecteur ne boudant pas impulsivement la notion de déclin sociétal.
 »

mardi 20 janvier 2009

Du fond de mon rang : « Je ne parlerai plus de religion à l'école qu'en présence de mon avocat... »

Témoignage d'une institutrice suppléante après son premier cours d'éthique et de culture religieuse paru ce mercredi 21 dans la Terre de chez nous.
Je poursuis encore cette année mes activités de suppléance dans deux écoles primaires. Le fait de remplacer les professeurs, souvent à la dernière minute, comporte parfois des surprises. La semaine dernière, le professeur absent me demandait de donner le premier cours de l'année d'éthique et de culture religieuse à sa classe de cinquième. Depuis septembre, ce programme remplace les cours d'enseignement religieux et moral dans toutes les écoles du Québec. Pour vous expliquer le contexte, un groupe de parents de la région de Drummondville ont recours aux tribunaux afin d'exiger que leurs enfants soient exemptés. Une école catholique privée de Montréal a entrepris une démarche similaire.
Deux procès ! Bravo. Cette dame est mieux informée que beaucoup de journalistes, même ceux spécialisés en éducation comme M. Pinneault du Journal de Montréal.
Ces causes n'ont pas encore été entendues. Les spécialistes du ministère de l'Éducation ont pris dix ans pour pondre ce cours. Moi, j'ai eu dix minutes pour en prendre connaissance. Dès que j'ai eu annoncé qu'on allait parler d'éthique et culture religieuse, une petite fille a réclamé de sortir. Ça commençait bien ! Elle s'est installée dans le corridor au pupitre près de la porte et a tenu à me rassurer : « Je vais faire mes devoirs. De toute façon, moi non plus je ne veux pas participer à ce cours. » Dans le propos, je sentais le poids de l'opinion des parents. Fais-toi en pas, me suis-je dit en mon for intérieur, vu l'état de mes connaissances, on ne va certainement pas parler de grand-chose ! De retour en classe, j'ai expliqué aux enfants que dans les grandes villes, il y avait beaucoup d'immigrants et plusieurs religions. Le dialogue permettait de mieux comprendre les diverses coutumes et traditions religieuses.

— « On a notre immigrant dans la classe », a tenu à me rappeler un élève.

J'ai jeté un coup d'œil circulaire, mais je ne voyais pas.

— « Ben voyons, notre Chinois ! »

Franchement, j'avais tout bonnement cru que l'élève asiatique avait été adopté par des parents québécois. Alors, je lui ai demandé s'il voulait parler des fêtes religieuses dans sa famille.

— « Moé ?! J'ai pas de religion », a dit le Chinois.

Franchement, la discussion n'allait pas loin. Jusqu'à ce qu'un garçon lève la main et dise que sa famille était membre des Témoins de Jéhovah. Deux autres élèves de la classe l'étaient également. Alors, ils se sont mis à parler de leurs traditions religieuses, de buissons ardents, de Moïse et de Jéhovah. Ils étaient intarissables. Alors que dix minutes plus tôt, j'insistais pour que les jeunes s'expriment, maintenant je ne savais plus comment diriger la discussion. Je sentais la pente glissante, j'imaginais ce que les enfants allaient raconter à leurs parents le soir en rentrant à la maison. Alors, j'ai décrété la fin du cours : « Maintenant, on fait des math ! Vous reparlerez de religion en présence de votre professeur. » Quant à moi, je ne reparlerai de religion à l'école qu'en présence de mon avocat.

samedi 17 janvier 2009

Nier un fait essentiel serait une marque de respect ?

Lettre intéressante parue dans la Voix de l'Est de ce samedi.

Patrice Perreault a écrit une lettre intéressante, publiée mardi, sur le dialogue et le cours d'éthique et culture religieuse (ÉCR). Sa lettre faisait suite à ces questions que je suppose un peu ironiques de la part de M. Andries : « M. Perreault, dans sa réponse, affirme que la crucifixion est un fait historique. Ne manque-t-il pas ainsi de respect envers l'Islam qui affirme en parlant de Jésus : « Mais ils ne l'ont pas tué; ils ne l'ont pas crucifié, cela leur est seulement apparu ainsi » (Coran 4:157)? Remettre en doute cet aspect central du Coran, n'est-ce pas ériger un obstacle au dialogue respectueux ? »

Il s'agissait donc de savoir si, en prétendant que la crucifixion est un fait historique, on n'érigeait pas un obstacle au dialogue respectueux, véritable clé de voûte du cours d'éthique et de culture religieuse. Imaginons le débat en classe ÉCR sur le sujet entre musulmans et chrétiens convaincus !

M. Perreault répond : « En émettant une hypothèse, est-il possible de considérer, compte tenu de la culture du Proche-Orient ancien, qu'un envoyé de Dieu ait connu une mort aussi ignominieuse puisque la crucifixion manifestait, dans la compréhension de l'époque, un rejet divin ? Par le regard musulman sur cet événement, je vois plutôt une marque de grand respect à l'endroit du christianisme, un respect propre à susciter le dialogue. »

Il semble qu'il y ait confusion ici : M. Perreault dit que les musulmans en niant la crucifixion marquent un grand respect, propre au dialogue alors que la question était, si je comprends bien, l'inverse : ne manque-t-on pas de respect envers l'Islam en affirmant la crucifixion.

Quoi qu'il en soit, M. Perreault veut tellement défendre le cours ÉCR et son miraculeux « dialogue » qu'il en vient à affirmer que nier l'acte fondateur d'une religion - la crucifixion de Jésus et donc sa résurrection - est une marque de respect envers cette religion et que cette négation fondamentale est propre à susciter le dialogue! On voit bien à quelles extrémités la vénération du dialogue peut mener : nier l'essence d'une foi serait un respect fondamental envers celle-ci !

M. Perreault en vient même à décrire Jésus comme un envoyé de Dieu — son titre dans le Coran, rassoûl en arabe — et non le Fils de Dieu. Ce qui est pour le moins étrange pour un agent de pastorale catholique!

Pour ce qui est de la compréhension de l'époque d'un être divin qui ne pourrait mourir crucifié au Proche-Orient, M. Perreault semble confondre la nouveauté de ce concept à la mort de Jésus-Christ et le sentiment au Proche-Orient devenu massivement chrétien six siècles plus tard.

On observe là le résultat de cette volonté de « dialogue » et d'ouverture comme nouvelles vertus cardinales: l'affadissement de ses croyances, le reniement, le relativisme et le subjectivisme. Aucune de ces choses ne me semble favorable à un meilleur vivre-ensemble, à un pluralisme réel, car on semble surtout vouloir que tous deviennent fades et indécis.

Marie-France Tremblay

Mme Courchesne croit et est pour le libre choix

Entretien dans le Journal de Montréal avec Mme Courchesne. On y apprend que celle-ci « croit » dans le nouveau cours d'éthique et de culture religieuse (ah ! si c'est une question de foi, c'est différent, ça se respecte...) et qu'elle est pour le libre choix mais dans le domaine de l'enseignement dit privé.

Extraits :
COURS D'ÉTHIQUE ET CULTURE

Situation : Le nouveau cours d'éthique et de culture religieuse fait des remous. Des parents opposés au nouveau cours sont descendus bruyamment dans les rues de Montréal pour réclamer la liberté de choix. Une action en justice a aussi été entreprise.

Réponse « Le cours est là, il est obligatoire et il est là pour rester. Je crois beaucoup en ce cours-là. C'est un beau cours et un bon cours. Les parents qui contestent veulent un cours de religion, mais nos écoles sont laïques et il [n'] (sic) y en a plus de cours de religion. »
On notera :
  1. Que la ministre « justifie » le cours par un jugement esthétique ;
  2. qu'elle ne justifie en rien le caractère obligatoire de ce cours plutôt que son caractère facultatif ;
  3. que de nombreux parents ne veulent pas de ce cours parce qu'il contient trop de « culture religieuse », pendant trop d'années et dès six ans (voir le Mouvement laïque québécois)
  4. que le fait que les écoles publiques soient laïques n'implique pas l'absence de cours de religion (voir la Belgique, l'Allemagne, l'Alsace, etc.)
  5. que le fait que les écoles publiques soient laïques n'explique en rien pourquoi ce cours est obligatoire dans les écoles privées confessionnelles.
Enfin, il n'y a pas une action en justice, mais deux pour l'instant. Une à Drummondville (écoles publiques) et l'autre à Montréal (collège privé Loyola). Les journalistes devraient faire leur travail...

LIBRE CHOIX DU RÉSEAU (PRIVÉ OU PUBLIC)

Situation : Pour une onzième rentrée scolaire consécutive, les écoles publiques du Québec se vident à un rythme effréné, alors que la popularité des établissements privés ne se dément pas. En l'espace de cinq ans, le réseau public a perdu près de 75 000 jeunes. Certains intervenants jugent que le gouvernement devrait cesser de financer à 60 % ces établissements.

Réponse « Sur 9 milliards, c'est 400 M$ qu'on donne au privé. Sincèrement, je ne pense pas que ça ferait une grande différence de le redonner au public. Mais ça pourrait réduire le libre choix. Je pense qu'on doit recréer des milieux de vie dans les écoles publiques où les parents vont avoir confiance que leurs enfants sont encadrés. »


Ici le libre choix est subitement valable, mais pas pour le cours d'éthique et de culture religieuse, même pas dans le privé !

mercredi 14 janvier 2009

Dénatalité et politique familiale (suite), les coûts

On se rappellera que dans les années 1990-1996 à la suite de l'introduction d'une prime à la naissance (d'un maximum de 8000 $), le taux de fécondité du Québec avait rebondi pour dépasser 1,6 enfant/femme chacune de ces années (1,63 en 1990, 1,65 en 1991, 1,66 en 1992, 1,63 en 1993, 1,64 en 1994, 1,62 en 1995 et 1,61 en 1996).

Après son abolition en 1997 par le Parti québécois, pour des raisons idéologiques, le taux de fécondité allait s'effondrer jusqu'à 1,46 enfant par femme en 2002 malgré la mise en place d'un réseau de garderies très coûteux qui cherchait, selon d'aucuns, surtout à éviter que les femmes ne restent trop longtemps à la maison plutôt que d'encourager la natalité. Rappelons qu'en 1982, Claire Bonenfant, présidente du Conseil de la femme lors d'un gouvernement péquiste précédent, avait demandé, au sujet d'une politique aux timides conséquences natalistes : « Cette politique sera-t-elle une politique nataliste déguisée cherchant à nous retourner aux berceaux et aux fourneaux ou bien se présente-t-elle comme une politique de justice sociale ? »

Après de nombreuses années d'expansion économique et des programmes de plus en plus coûteux, le taux de fécondité est remonté à 1,6 enfant par femme au Québec. Le même taux que pendant les années 1990-1996, années peu prospères.

Notons toutefois que le nombre de naissances est aujourd'hui plus bas que pendant ces années 90-96. C'est ainsi que si 98 013 enfants naquirent en 1990 au Québec, il n'en est né que 84 200 en 2007 même si le taux de fécondité est quasi identique. L'explication est simple : le Québec a déjà emprunté la pente de la décroissance démographique et il y a aujourd'hui moins de femmes fécondes (c'est-à-dire entre 15 et 49 ans)...

On ne sait pas trop quelle est l'importance de l'expansion économique dans la hausse de la natalité, on connaît cependant le prix de cette politique voulue par les progressistes et féministes du Québec (le PQ et le PLQ qui ne s'en distingue guère dans le domaine).

Le prix de ce modèle « progressiste »

The Economist de Londres nous rappelle ce prix. Il est nettement plus important que le modèle rétrograde des primes à la naissance (un montant maximum de 8 000 $ par enfant à la fin du programme).

« Les services de garde subventionnés et les congés parentaux, qui permettent aux parents de continuer à gagner jusqu'aux trois quarts de leur salaire, sont à ce point populaires que même les prévisions les plus folles du gouvernement ont été dépassées. Leur prix est bien au-delà des budgets prévus. Il y a maintenant 200 000 places en garderies subventionnées, coûtant chacune 13 000 dollars. Dans les deux prochaines années, 20 000 places supplémentaires doivent être créées. [Ce qui portera le coût total à près de 2,9 milliards de $ par an.] Les congés parentaux devaient coûter un milliard de dollars par année, ils dépassent de 50 % cette prédiction. [1,5 milliard par an donc] »

Soit un coût annuel de 4,4 milliards par an pour cette politique « progressiste » aux résultats très humbles (1,6 enfants par femme) contre en moyenne 0,2 milliard par an pour la politique de prime à la naissance (1,6 enfants par femme) qui « risquait » de garder les femmes à la maison (coût du programme des primes à la naissance de 1989-1996: 1,406 milliards).

L'hebdomadaire conclut que « [c]es deux programmes contribuent à faire du Québec l'endroit le plus endetté en Amérique du Nord et où les impôts sont les plus lourds. » Mais les programmes sont populaires, car on a fait croire qu'ils étaient la seule manière de garantir la survie de la société québécoise, l'épanouissement du fait français en Amérique du Nord.

Avec 1,66 enfant par femme cet épanouissement du fait français n'est toutefois pas du tout assuré malgré le tribut exorbitant payé à cette politique progressiste. Rappelons aussi que les groupes les plus féconds sont les autochtones et les allophones de première génération, pas les francophones.

Baby-boom redouté en Chine malgré l'absence de politique nataliste

La difficulté d'expliquer l'augmentation récente et timide de la fécondité au Québec (s'agit-il d'un effet de l'embellie économique des années 2000, d'un désir croissant d'enfants chez les mères, d'une immigration récente plus nombreuse et plus féconde, des résultats d'une politique dite familiale de plus en plus coûteuse ?) est illustrée en partie par un exemple chinois.

On apprend ainsi que la Chine pourrait connaître un « baby-boom » (enfin à la Québécoise donc une ondelette) malgré sa politique de restriction des naissances. Les responsables chinois du planning familial s'inquiètent ainsi d'un possible "boom" des naissances, un sondage montrant le désir croissant des mères d'avoir plus d'un enfant. Selon ce sondage effectué par la Commission d'État pour le Planning familial, environ 70,7 % des femmes ont l'intention d'avoir au moins deux bébés, a rapporté vendredi le journal China Daily, citant Jiang Fan, vice-ministre chargé de la commission.

« Le chiffre a augmenté de 7,6 points de pourcentage entre 2001 et 2006, ce qui indique la possibilité d'un boom des naissances », a-t-il analysé. Environ 83 % des femmes interrogées souhaitent avoir un fils et une fille, a ajouté Jiang Fan.

La Chine a introduit une politique de restriction des naissances à fin des années 70. Par une application rigoureuse de cette politique, la Chine a réduit le taux de croissance de la population de 1,2 % en 1978 à 0,52 % en 2007. La population continue de croître grâce à l'allongement de la durée de vie. Li Bin, ministre chargée de la commission, a indiqué jeudi que les autorités chinoises devaient adhérer à la politique existante de restriction des naissances et s'efforcer de maintenir une basse fécondité.

Allocution par Marie-Josée Croteau, à la Marche du 18 octobre 2008, à Montréal

Je suis présidente de la Coalition pour la liberté en éducation (CLÉ), mais je suis surtout mère de trois enfants qui sont au primaire. C’est pour eux, que j’ai joint les rangs de la CLÉ. La Coalition regroupe des parents bénévoles de toutes les régions du Québec. Notre mission est d’informer les parents qu’ils ont perdu des droits à leur insu et que maintenant leurs enfants sont obligés de suivre le cours d’éthique et de culture religieuse (ECR) et cela dans toutes les écoles du Québec !

Nous dénonçons l’attitude du gouvernement du Québec qui a modifié l’article 41 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne sans consulter la population. C’est l’État désormais qui décidera ce qui est moralement bien pour nos enfants. Il peut donc obliger les enfants à suivre des cours qui vont à l’encontre des valeurs ou principes familiaux.

C’est ce qui se produit avec le cours ECR. Dès l’âge de six ans, on présentera aux enfants toutes les religions que vous soyez d’accord ou non ! En éthique on poussera les jeunes à se conformer au groupe et à la pensée politique dominante. On veut créer une culture publique commune qui risque d’être déconnectée de la moralité de vos familles et de votre religion. (…)

Cela va trop loin et visiblement nous devons parler plus fort car :
  1. Mme Courchesne est sourde à nos demandes pourtant raisonnables et s’entête à imposer ce cours à tous malgré la controverse qui l’entoure.
  2. Aucune exemption n’est accordée à ce cours alors qu’on accordait facilement ces mêmes exemptions hier à ceux qui ne voulaient pas des cours d’éducation religieuse.
  3. Devant la crispation des autorités scolaires, des parents, poussés à bout, au prix de grands sacrifices, se voient obligés de retirer leurs enfants du cours ECR.
  4. Pire, certains parents font l’objet d’intimidation de la part de certains directeurs d’école qui menacent d’expulsion les enfants et promettent de signaler leur cas à la DPJ.

Le gouvernement prétend présenter un cours prônant le vivre ensemble, le respect des différences. Quel respect porte-il à nous les parents ? Il nous impose le cours, sans aucun choix et sans exemption possible. Il parle de dialogue alors qu’il utilise l’intimidation et les menaces pour faire peur aux parents. Voilà des actes qui en disent long sur la valeur de son sermon sur la tolérance.

Afin de soutenir les parents, la CLÉ a mis en place un système de plaintes auprès duquel vous pouvez rapporter, de façon confidentielle, les mauvaises expériences vécues dans les cours ECR, mais également dans d’autres cours ou activités à l’école qui vous paraissent contraires à la liberté de conscience et de religion. Déjà nous en recevons de nombreuses, et ce n’est qu’un début. Ce que nous demandons au gouvernement c’est que le cours ECR soit optionnel. Nous réclamons que l’école publique offre d’autres options à nos enfants afin de pouvoir choisir pour nos enfants un enseignement moral ou religieux conforme à nos croyances et à nos convictions.

Il faut que les parents québécois et les professeurs recouvrent les droits dont ils ont été dépossédés pour imposer ce cours. Parents, levons-nous, revendiquons nos droits pour l’avenir de nos enfants, pour l’avenir du Québec. M. Charest et Mme Courchesne: respectez enfin les droits de tous les parents québécois !

mardi 13 janvier 2009

Histoire du premier réseau d'écoles publiques aux É.-U.

Samuel Blumenfeld dans son livre Is Public Education Necessary? — ouvrage sur lequel nous reviendrons — nous rappelle comment le premier réseau d'écoles publiques vit le jour aux État-Unis.

Enlèvement par la police d'enfant éduqué à la maisonÀ gauche, couverture de Is Public Education Necessary?, l'enlèvement par la police d'un enfant éduqué à la maison sous les yeux effarés de sa mère.


Vers 1817, un mouvement apparut à Boston dont le but était d’étendre le système d’écoles financées par les contribuables aux écoles primaires. Pour déterminer si un tel réseau se justifiait le Comité scolaire de Boston commanda une enquête.

« [L']enquête eut lieu en novembre 1817, elle révéla que Boston, alors peuplée d’environ 40 000 habitants, avait 8 écoles publiques [qui n’accueillaient que les enfants sachant déjà lire, leur fréquentation était libre, en partie payante et était en partie contrôlée par les parents], y compris l’École latine, une école africaine pour les enfants des Afro-Américains et une école dans l’Hospice pour les enfants des pauvres. L’effectif total de ces 8 écoles était de 2 365 élèves. Il s’agissait là d’approximativement 33 pour cent de la population d’âge scolaire. L’enquête révéla également que 154 écoles privées pour garçons et filles avec un effectif total de 3 757 étaient réparties à travers toute la ville. Il existait également 8 « écoles gratuites de la charité » avec un effectif de 365 élèves. Tout compris, plus de 4 000 étudiants âgés de 4 à 14 ans fréquentaient des écoles privées d’un type quelconque au prix total de près de 50 000 $ payés par les parents. L’enquête signalait que seuls 283 enfants âgés de 7 ans et moins ne fréquentaient aucune école. Ainsi, un pourcentage étonnant des enfants de la ville fréquentait bien l’école et les quatre pour cent qui n’en fréquentaient pas, pouvaient aller aux écoles de la charité si leurs parents le voulaient » (p. 43 de Is Public Education Necessary?)

Le grand architecte Bulfinch déclara en conclusion de ce rapport que l’imposition d’un système d’écoles primaires publiques complet pour y inclure les premières années d'apprentissage était inutile. En effet, non seulement 96 % des enfants fréquentaient déjà une école à l’époque, mais, au besoin, il vaudrait mieux aider financièrement les parents des 4 % restants, la plupart pauvres, à fréquenter une école de leur choix grâce à des bourses plutôt que de mettre en place un nouveau système d’écoles publiques financé par les contribuables, système dispendieux qui dédoublerait le réseau des écoles déjà en place. Bulfinch expliquait que « la plupart des parents qui envoient leurs enfants à l’école privée payante ne considèrent pas cette dépense comme une charge : il paie volontiers les frais, mus par l’amour de leur progéniture et par un sens du devoir. Ceci en fait de meilleurs parents. Ils sont, en effet, plus enclins à se préoccuper des affaires liées à l’éducation quand ils doivent verser une petite contribution que lorsque cette dépense est complètement prise en charge par le trésor public. » Bulfinch laissait, en outre entendre, que l’utilisation d’argent public pour usurper une compétence manifestement du domaine privé ne pouvait mener qu’à la dégénérescence morale. La solidarité familiale serait affaiblie par l’action d’un gouvernement qui prendrait en charge ce qui revenait de droit aux familles. Il ne faut pas oublier – devait-il ajouter – que la charge d’éducateur revient aux parents et que ceux-ci ne délèguent au maître d’école qu’une partie du rôle de parent et des droits afférents.

Malgré ce rapport et cette analyse de Bulfinch, la ville de Boston, principalement à l'instigation des unitariens, se décida à étendre le réseau des écoles publiques subventionnées par les contribuables pour y inclure désormais des écoles élémentaires.

L’instauration du premier système d’école publique aux États-Unis, celui de Boston, ne trouve donc pas sa cause dans un échec des nombreuses écoles publiques et privées qui couvraient Boston pas plus que dans une défaillance du libre marché. Il s’agit plutôt du résultat de l’action conjointe – et en apparence contradictoire – de plusieurs groupes de pression qui cherchaient tous à utiliser l’éducation publique pour accroître leur influence politique ou pour renforcer la puissance de l’État, qu’ils espéraient maîtriser. Les conservateurs religieux, les unitariens (des hérétiques ariens pour les calvinistes et les congrégationalistes) et les socialistes considéraient tous que l’éducation publique était une prise idéale dont il fallait à tout prix se rendre maître. Chacun de ces groupes avait plus à cœur de modifier les sentiments et les idées des enfants de leurs concitoyens selon des normes gouvernementales (qu’ils édicteraient) que de prodiguer un enseignement de base de qualité à ces enfants.

lundi 12 janvier 2009

Un message du directeur de la revue Égards en partie sur le cours d'éthique et de culture religieuse

La décomposition morale et intellectuelle de l’Occident (et en particulier du Québec) a connu, en 2008, une espèce d’accélération. Que l’on pense seulement à l’Ordre du Canada attribué à celui qui a le plus œuvré pour légaliser l’avortement dans notre pays, à la victoire d’Obama chez nos voisins du sud, aux tristes maladresses du gouvernement Harper, à la cuisante défaite de l’ADQ, à l’élection du premier député de Québec solidaire, Amir Khadir, un digne émule de Marion Cotillard face au 11 septembre (voir La Presse du 7 juin 2006), à ces élèves suspendus de leur école, à Granby, pour avoir refusé d’assister au nouveau cours d’éthique et de culture religieuse, à cet homme d’Alma acquitté après avoir « aidé » son oncle malade à se donner la mort par pendaison, plus généralement à la renaissance d’un anticapitalisme puéril et aux agressions sournoises de la part de l’État québécois contre la liberté de conscience et de religion.

En ce qui a trait à la liberté de conscience et de religion, une des grandes tristesses de cette année climatérique fut certainement l’indolence dont firent preuve nos évêques face à l’obligation imposée à nos enfants de suivre un tout nouveau cours d’éthique et de culture religieuse. Par leur refus de s’y opposer, croyant peut-être rendre à César ce qui appartient à César, ils remirent pratiquement à l’État ce qui appartenait aux parents. Nos évêques, aveuglés par un spiritualisme plus mortel pour les libertés que le pire matérialisme, ont-ils vraiment compris l’enjeu politique ? J’en doute. L’imposition à tous du cours ÉCR s’attaque non seulement à la religion chrétienne, mais à notre liberté civile. Le parent a toujours eu le droit moral (reconnu ou non, c’est un autre débat, mais ce droit est déjà parfaitement énoncé dans saint Thomas, au XIIIe siècle!) de décider quel enseignement religieux recevra son enfant. L’Église du Québec, non contente dans le passé de méconnaître au nom de l’Église la souveraineté des parents dans leur ordre, l’ignore aujourd’hui au nom de l’État. On voit à quel point l’étatisme québécois est l’enfant du cléricalisme. Les clercs qui se sont substitués, avant les années 60, aux laïcs ont exercé une action aussi nuisible que les fonctionnaires qui, après la Révolution tranquille, s’emparèrent indûment du gouvernement local (et en particulier des écoles). Les éducateurs n’agissent pas plus au nom de l’Église que de l’État, mais in loco parentis, comme dit la tradition. La liberté scolaire est une liberté cardinale. Ni les évêques ni les ministres, ni les intellectuels ni a fortiori les technocrates n’ont à décider à la place des parents quant à l’éducation religieuse de leurs enfants. Quelle que soit la façon dont ce droit s’incarne et se déploie (plusieurs scénarios sont possibles), il a à tout le moins une portée négative: le père bouddhiste ou juif qui habiterait un village dans lequel on ne trouve qu’une école confessionnelle catholique aurait le droit de retirer son enfant du cours de catéchèse. L’imposition d’un cours comportant un enseignement moral et religieux est condamnable, indépendamment de la qualité intrinsèque de ce cours. Ce droit étant un droit naturel, l’Église ou l’État ne nous en prive que par un acte de tyrannie (appuyé ou non par la population, sa nature tyrannique demeurerait). Nos évêques se sont cru autorisés à donner à l’État ce qui appartient aux citoyens.

Ces mêmes évêques ont béni, il y a une dizaine d’années, l’abrogation du droit à l’éducation confessionnelle garanti par l’article 93 de la Constitution de 1867, enchâssé dans l’article 29 de la charte fédérale de 1982. Ils ont « bradé » ainsi non un privilège de l’Église, mais une franchise – comme on disait au Moyen Âge – des parents catholiques et aussi des parents protestants. Ils trahirent en outre, en ouvrant la voie à ce qui allait devenir l’imposition d’une religion d’État nommé le pluralisme normatif, tous les parents du Québec, y compris les parents incroyants, juifs, bouddhistes, animistes ou musulmans. En acceptant récemment l’imposition du cours ÉCR, l’Assemblée des évêques a de nouveau abandonné honteusement les parents et s’est mise de facto au service de l’État et de ses basses oeuvres, méritant par là le mépris silencieux (et douloureux) de bien des fidèles. Ces derniers se souviendront que l’Église du Québec a pris jusqu’au bout le parti de l’État contre les droits des pères et des mères de famille. Seuls les marxistes et les nazis ont été aussi loin que la Belle Province. Seuls les évêques du Québec se sont montrés si faibles, si apathiques, si médiocres d’esprit et de coeur, si indignes de leur haute fonction. On ne peut exclure, dans ce Québec moderne qui ressemble chaque jour davantage à un laboratoire d’éradication des libertés, une déliquescence et une destruction des libertés constitutives de la nationalité canadienne-française qui se passeraient dans l’indifférence, dans la nonchalance, dans l’inertie, avec un effet d’autant plus dévastateur pour les communautés qu’il se produit en l’absence de persécution violente. Rappelons une des vérités fondatrices de notre civilisation: l’école ne relève en définitive ni de l’État ni de l’Église, mais des parents, des ménages, c’est-à-dire de la société civile. Toutes nos libertés se trouvent en miniature dans celles des familles. Lorsque les familles n’exercent plus sur la vie publique (le gouvernement local, les écoles, etc.) une influence prépondérante, les libertés meurent d’inanition : elles ne survivent qu’enracinées dans le foyer domestique.

La façon dont l’irréligion et le libéralisme s’en prennent sans vergogne aux droits et aux franchises traditionnels des familles illustre une nouvelle fois qu’une société libre et antichrétienne constitue une absurdité, une contradiction dans les termes : hors du christianisme et de la filiation judaïque, l’esclavage est de fait (les admirables convenances entre la théologie chrétienne et les libertés politiques n’ont pas d’analogue dans l’islam). Une liberté abstraite, hypostasiée, vidée de toute substance, seule avec elle-même dans un tête-à-tête narcissique, s’épuise, s’éteint et s’abolit. Un mélange de foi et de cruauté inhérent à un retour du sacré sans le Christ succédera inévitablement aux désertifications sociales, humaines, politiques provoquées par le nihilisme et la culture de l’infidélité et de la déloyauté. Les défaillances de quelques clercs ne modifient nullement le fond des choses. Au bout du compte,puisque les confessions protestantes ne résistent plus à la dissolution libérale qu’en se réfugiant dans un fidéisme sclérosé, c’est le catholicisme ou la mort pour l’Amérique française et britannique. Dès aujourd’hui, humblement, fermement, loin de ce découragement léthargique ou aigri caractéristique des milieux marginalisés, tirons les leçons de nos défaites. Le conservatisme québécois et canadien s’affaisse sous le poids de sa vacuité morale et intellectuelle. L’ADQ, en particulier, pareille en cela aux autres mouvements populistes (du boulangisme jusqu’au poujadisme pour n’évoquer que le cas français), s’est tarie à cause de sa débilité doctrinale. Notre tâche, à Égards, est de continuer à offrir à la résistance conservatrice (qui s’incarne d’abord dans les familles) des idées, des principes et, comme dirait Platon, « de beaux discours ». Le reste appartient au mystère du grain de sénevé.

Un joyeux Noël à tous nos lecteurs et à tous nos amis !



Abonnement à la revue Égards

dimanche 11 janvier 2009

Le Nouvel Informateur catholique : les évêques et le cours ECR


Dans le premier numéro du Nouvel informateur catholique de 2009, le directeur de la revue, Paul Bouchard, déplore la timidité des évêques du Québec devant le nouveau cours gouvernemental obligatoire d'Éthique et culture religieuse.

« En entérinant complaisamment et sans trop sourciller ce programme gouvernemental, notre vénérable assemblée épiscopale se fait hara-kiri. L’Assemblée des évêques catholiques du Québec n’a pas vu que la bureaucratie de l’État vise subrepticement le bâillonnement de l’Église dans le monde éducatif pour amener éventuellement sa disparition dans les nouvelles générations. On tue l’arbre en coupant ses racines », indique le fondateur de cette publication.

Cette opinion est d'ailleurs confirmée involontairement par la conseillère pédagogique de la Commission scolaire du Lac-Témiscamingue, Marie-Hélène Brault, qui déclarait dans le Reflet du Témiscamingue du 18 décembre  : « En créant le nouveau programme, le gouvernement voulait créer plus d’échanges entre les élèves et démontrer aux enfants qu’il existe autre chose que la religion morale et catholique », a résumé madame Brault.  »

samedi 10 janvier 2009

ECR : analyse d'un programme multiculturaliste et pluraliste normatif

Quelques extraits d'une analyse du programme d'éthique et culture religieuse par Charles-Philippe Courtois, docteur en histoire (UQAM) et en sciences politiques (Paris), parue dans l'ouvrage collectif Contre la réforme pédagogique, VLB éditeur. M. Courtois adopte une critique nationaliste et laïque (républicaine ou fermée qui cherche à rejeter la transmission de la religion hors de l'école). Nous ne souscrivons pas à toutes ses analyses, mais nous pensons qu'elles valent la peine d'être diffusées. Les intertitres sont de nous.

« 

[...]

Programme évalué par la capacité à « s'ouvrir à l'autre »

Car c'est bien là que le bât blesse. la « culture religieuse » proposée ne s'enseignera pas dans un cursus où l'élève sera évalué sur la base de ses connaissances. Non, on ne mesurera pas, dans l'évaluation de ce cours, s'il peut expliquer sommairement les principales caractéristiques de chacune des grandes religions et leur histoire. Il sera évalué en fonction de ses « compétences ». En l'occurrence, le cours combinant « éthique » et « culture religieuse », le volet de culture religieuse sera évalué en fonction d'une seule compétence :« pratiquer le dialogue ». Et ce, tout au long du cursus, durant onze années ! Au fond, on se fiche bien de savoir si l'élève a appris l'histoire de Mahomet ou de Bouddha. Ce qu'on cherche, c'est d'évaluer sa capacité d'« ouverture à l'autre », d'acceptation de la diversité religieuse, car c'est bien cela que mesure la compétence « pratiquer le dialogue ».

[...]

Au surplus, le fait de combiner la culture religieuse à l'enseignement moral entraîne un effet d'amalgame : la morale et la religion sont liées [c'est un laïque qui écrit], et la morale et ce que d'aucuns nomment l'« hyper-tolérance » se voient confondues.

L'évaluation par compétence peut donc être particulièrement insidieuse, non seulement parce qu'elle rend secondaire l'accès aux connaissances de base, mais aussi parce qu'elle permet facilement d'accorder la première place au conditionnement idéologique dans le processus d'évaluation. Constatation qui ne manque pas de piquant, lorsqu'on songe que les défenseurs de la nouvelle pédagogie n'en finissent plus de se distancier des modèles classiques de l'école, soit catholique, soit républicain, en critiquant non seulement les idéologies véhiculées par ceux-ci, mais, prétendument, le fait même de favoriser soit le catholicisme, soit le patriotisme.

Le bourrage de crâne sera particulièrement intensif

Comme ce cours sera obligatoire de la première année du primaire à la dernière année du secondaire, le bourrage de crâne sera particulièrement intensif.

[...]

George Leroux détournerait la laïcité au profit du pluralisme

Ainsi, Leroux avance que la laïcité au Québec peut (lire: doit) s'ouvrir à ;la diversité selon des « modalités inédites de respect du pluralisme », telles qu'elles n'existent nulle part ailleurs (p. 11. [du livre de George Leroux, véritable apologie du cours d'ECR : Éthique, culture religieuse, dialogue, Fides, 2007])

Déjà, on saisit bien que la laïcité [républicaine à la française] telle qu'on la connaît n'est donc pas au programme. Une nouvelle définition de l'égalité, poursuit-il, s'est affirmée depuis les années 1960. De fait, cet énoncé semble suffire, dans le petit essai de Leroux, à justifier l'implantation du cours d'ECR.

Le respect multiculturel élevé en Bien fondamental démocratique

Leroux va même plus loin dans le passage suivant : « [c]omment cultiver ce respect, qui est la vertu fondamentale de la démocratie, sans soutenir la connaissance de l'autre et sans valoriser la différence ?» (c'est moi qui souligne, p. 12)

Pourquoi la vertu fondamentale de la démocratie, qui est, après tout, en premier lieu un régime où le peuple est souverain, est-elle définie par une interprétation multiculturaliste de l'égalité et des droits de l'homme ? En cela, l'argumentaire n'est pas loin de reposer sur un argument d'autorité : le Bien étant défini, il ne reste plus qu'à le faire appliquer. Les adversaires défendant du coup le Mal, il n'y a pas lieu de prendre en compte leur point de vue ou leurs arguments. En somme, le pluralisme apparaît comme un nouveau commandement, inscrit au premier rang de la nouvelle table des lois que voudraient nous imposer les clercs de la religion politiquement correcte.

Un nouveau premier commandement : la pluralité est une richesse

Les citations suivantes illustrent bien qu'il s'agit en effet d'un commandement : l'élève, explique Leroux, « doit être amené à déduire que la pluralité n'est pas un obstacle à surmonter [d'où la nécessité alors paradoxale d'imposer ce cours], mais une richesse à connaître et à intégrer dans sa vision du monde ». Non seulement il s'agit d'un commandement, mais il prime sur tous les autres, y compris sur les objectifs de la formation scolaire. Car « [c]e cadre [l'école] doit intégrer la connaissance de l'autre dans toutes les composantes de sa culture, et au premier rang de ses valeurs et de ses croyances, qu'elles soient ou non religieuses » (p. 17)

Volonté de contrôle idéologique tendancieux

Georges Leroux ajoute même que « faire passer chaque jeune de la constatation du pluralisme à la valorisation du pluralisme normatif » (pp. 13-14) devient carrément la « mission » de l'école. Affirmation qui exprime assez crûment une volonté de contrôle idéologique tendancieux. La pluralisme devient le principe d'éducation de la jeunesse québécoise (p. 40).

[...]

Étrange définition de l'intégration : intégrer le Québec au multiculturalisme

Voyons en effet comme [George Leroux] définit l'intégration : « Chacun entrera dans l'école comme dans une société où les identités sont à la fois communes et multiples : communes d'abord, dans la mesure où l'école [d'État] assume le mandat collectif de l'éducation publique et a pour mission de transmettre les valeurs fondamentales de la démocratie, mais aussi différentes, puisque chacun appartient à un monde qui varie selon ses origines, ses croyances, sa culture » (p. 15).

En d'autres mots [pour Leroux], l'école québécoise ne doit plus intégrer les enfants à la culture québécoise [...] Elle doit au contraire intégrer le Québec à la diversité culturelle du multiculturalisme ou du pluralisme, selon l'expression préférée...

Conséquences du métissage actuel du Québec imprévisibles, il faut juste s'ouvrir

Car personne ne peut prévoir où mènera le métissage au Québec « sur le plan des croyances, des pratiques, du métissage des identités et des cultures. » (p. 17), mais l'école doit travailler à ce que ce mélange se fasse le plus harmonieusement possible en s'ouvrant aux valeurs et aux croyances de l'autre, ce qui permettra une pleine sécularisation et laïcisation. Aucun autre objectif d'intégration n'est au programme que la fameuse « ouverture à l'autre », véritable lieu commun qu'ânonnent en chœur les nouveaux clercs de l'orthodoxie bien pensante.

[...]

Le pluralisme, le nouvel opium des intellectuels

En ce sens, on peut en effet dire que le pluralisme s'impose désormais sans partage comme le nouvel opium des intellectuels.

Mais pourquoi ? Ici, Leroux présente son « plaidoyer ». Il soutient que deux arguments démontrent la nécessité de ce cours : un argument historique et un argument de philosophie politique. L'argument est alambiqué. Il y a d'abord le processus de laïcisation enclenché depuis la Révolution tranquille. Or celui-ci ne mène pas forcément [si l'Histoire a un sens!] à ce type de pluralisme, mais plutôt à la laïcité. Mais on verra combien Leroux veut se séparer du modèle républicain, caricaturé, démonisé là encore à la manière du rapport Bouchard-Taylor[.]

[...]

Georges Leroux contre la laïcité à la française

En résumé, il y a trois arguments contre le républicain selon Leroux : il intègre à une culture nationale française alors qu'il devrait s'ouvrir à l'Europe et au pluralisme (argument de dissolution de l'identité nationale et des nations); il ne s'est pas bien ouvert à l'islam (argument curieux puisque la laïcité implique un principe de neutralité et d'égalité dont on pourrait, plutôt, exiger une meilleure application); et enfin, la culture classique est élitiste et n'attire pas tellement les jeunes (argument de démagogie culturelle et éducative).

la colère des musulmans français s'expliquerait par le manque de place faite à leurs racines — argument qui est peut-être un peu simpliste.

L'argument de philosophie politique en faveur du cours d'ECR : faible et puéril

Quant à l'argument de philosophie politique, il nous paraît être le plus faible ; car l'ouvrage de Leroux s'abstient, en définitive, d'argumenter véritablement. Il ne prend pas au sérieux les critiques et, par conséquent, ne se donne pas la peine d'exposer dans le détail la raison des choix qu'il défend.

Il s'agirait de « mettre en harmonie l'école avec la modernité politique » (p. 36). En soi, cela ne veut pas dire grand-chose. Qui définit la modernité ? A-t-il été une fois pour toutes déterminé que le multiculturalisme incarnait la modernité, la seule voie qu'un peuple et un État puissent choisir pour être « modernes »? Cet argument est puéril.

[...]

[Insensibilité de George Leroux comme Bouchard-Taylor aux volontés populaires]

Leroux relativise le principe de majorité qu'il dit « nostalgique »

Leroux va très loin. Il relativise le principe de majorité : ce principe est peut-être imaginaire, en tout cas « nostalgique ».

[... Le principe d'égalité], « le seul principe capable de régler notre rapport à la diversité » (p. 37). Encore une fois, relevons-le, la diversité se fonde elle-même dans l'argumentaire. C'est au nom de l'impératif du multiculturalisme que le tout se justifie, mais cet impératif n'est nullement argumenté par l'auteur. C'est pourquoi, au total, cet argumentaire est bien pauvre.

Tendances inquiétantes chez les experts habituels du Monopole de l'Éducation

En revanche, il nous instruit sur des tendances inquiétantes dans une partie de l'intelligentsia, et plus encore sur le fait de leur poids sur le ministère de l'Éducation. Nous parlons de cette ambition de rééducation idéologique, à la rectitude politique, qui vise à normaliser les esprits des citoyens québécois de demain selon les critères du multiculturalisme canadien.

[...]

Faire le lit de la chimère multiculturaliste et de la culture cosmopolite très anglicisée

Le cours d'ECR est vicié parce qu'il n'est pas centré sur l'instruction en matière de grandes religions, ni sur le civisme, buts qui seraient louables, mais sur une volonté crue de rééducation idéologique en faveur du multiculturalisme canadien, rebaptisé « pluralisme ».

Or, aborder le monde avec une perspective québécoise n'empêche en rien de s'ouvrir sur le monde, tandis qu'abolir la perspective québécoise sur le monde n'est qu'un moyen d'affaiblir radicalement l'identité québécoise et de menacer, à terme, la perpétuation de notre identité nationale et le terroir bien réel d'une de ces différences culturelles qu'on prétend chérir.

En somme, on se propose de promouvoir une chimérique diversité multiculturaliste, qui n'est qu'une autre forme d'intégration à une culture cosmopolite et très anglicisée, plutôt que de perpétuer le cadre d'une différence culturelle concrète, celle que définissent un peuple dûment constitué et une « société distincte ».

[...] »